Cass. 3e civ., 10 mars 2009, n° 06-22.078
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lacabarats
Avocats :
SCP Boulloche, SCP Boutet, SCP Gaschignard
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 27 septembre 2006), que par acte sous seing privé du 31 juillet 1997, M. X... a acquis de la Société immobilière Y... (SIM), propriétaire d'un ensemble immobilier à Poitiers destiné à lotir, deux parcelles cadastrées 325 et 326 ; qu'après la mise en redressement puis liquidation judiciaires de la SIM, Mme Z... ayant été désigné liquidateur (le liquidateur) a été autorisée, par ordonnance du juge-commissaire du 20 novembre 1998, à vendre de gré à gré la parcelle 326 à M. X... et diverses parcelles dont celle numérotée 334, devenue 340, à la société Sofiparc (Sofiparc) ; que par jugement du 11 septembre 2001, devenu irrévocable, le tribunal a déclaré parfaite la vente conclue le 31 juillet 1997 ; que soutenant qu'une partie de la parcelle 340 était comprise dans le lot qu'il avait acquis, M. X... a assigné le liquidateur, la Sofiparc et la SCI Hôtel de la Tête Noire (SCI), devenue propriétaire de cette parcelle, aux fins de voir juger que la vente qui lui avait été consentie portait sur une partie de la parcelle 340 et annuler les ventes consenties par le liquidateur le 9 novembre 2001 en ce qu'elles portaient sur cette parcelle ; que le tribunal a rejeté la demande ; qu'en cause d'appel, la SIM a formé un appel en garantie contre la société Sofiparc et cette dernière contre le liquidateur ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi provoqué, réunis :
Attendu que la Sofiparc, la SCI et le liquidateur font grief à l'arrêt d'avoir décidé que la vente consentie par la SIM à M. X... portait sur un immeuble cadastré section BX n° 326 et partie du n° 340 et d'avoir, en conséquence, annulé les ventes consenties, le 9 novembre 2001, par le liquidateur à la Sofiparc et par cette dernière à la SCI en ce qu'elles portent sur partie de la parcelle n° 340, alors, selon le moyen :
1° / que nulle preuve n'est admise contre une présomption légale ; qu'en l'espèce, il est constant que par ordonnance du juge-commissaire en date du 20 novembre 1998, devenue définitive, le liquidateur de la SIM a été autorisé à céder à M. X... une parcelle cadastrée BX n° 326 et à la société Sofiparc une parcelle cadastrée BX n° 334, de laquelle est issue la parcelle 340 ; qu'il a donc été définitivement jugé que la parcelle cadastrée 340 avait été cédée à la société Sofiparc, si bien que M. X... était irrecevable à engager une action tendant à la revendication de cette parcelle ; qu'en déclarant une telle action recevable et bien fondée, la cour d'appel a violé les articles 1341, 1347, 1351, 1352 du code civil et 480 du code de procédure civile ;
2° / qu'un commencement de preuve par écrit doit émaner de la partie à laquelle il est opposé ; que si cet écrit émane d'un tiers, la personne à qui on l'oppose doit se l'être rendu propre par une acceptation expresse ou tacite ; qu'en l'espèce, pour décider que la parcelle 340 acquise par la société Sofiparc avait déjà été cédée à M. X..., la cour d'appel s'est fondée sur des écrits émanant de la SIM et de son liquidateur ; qu'en se fondant ainsi sur des écrits qui n'émanaient pas de la société Sofiparc, sans avoir justifié que cette dernière les avait acceptés, la cour d'appel a violé l'article 1347 du code civil ;
3° / que dans leurs conclusions d'appel, la société Sofiparc, la SCI et le liquidateur ont fait valoir que les prix des différents actes de vente permettaient d'établir que la parcelle 340 avait été cédée à la société Sofiparc et non à M. X... ; qu'en effet, ce dernier a acquis un bien d'un peu plus de 150 m ² pour le prix de 300 000 francs, soit 2 000 francs environ le m ², que la société Sofiparc a acheté une superficie d'environ 1450 m ² à 1860 francs le m ² et que si les prétentions de M. X... étaient fondées, il aurait acquis 290 m ² pour 300 000 francs, soit 1034 francs par m ² ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, que l'autorité de la chose jugée par l'ordonnance du juge-commissaire qui a autorisé la vente d'un bien dépendant de l'actif d'un débiteur n'est pas opposable au tiers qui invoque un droit de propriété sur ce bien ; que dès lors, la cour d'appel en a exactement déduit, sans violer l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la vente de gré à gré de la parcelle cadastrée BX 340, que cette décision était sans effet envers M. X..., étranger à la procédure collective ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel, qui a retenu à bon droit qu'un écrit émanant de la SIM ou de son liquidateur pouvait constituer un commencement de preuve par écrit du contrat de vente que M. X... invoquait à l'encontre de cette société, a souverainement relevé, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que M. X... pouvait se prévaloir d'un titre de propriété sur la partie de la parcelle cadastrée n° 340 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le second moyen du pourvoi principal :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter la SCI de son action en garantie contre la société Sofiparc et cette dernière de son action contre le liquidateur, l'arrêt retient que la demande de la SCI ne peut être accueillie, le représentant de cette partie ne pouvant valablement saisir la cour d'appel d'une demande de condamnation contre lui-même, fût-ce en qualité de représentant d'une autre partie, et que la garantie de la société Sofiparc n'étant pas valablement recherchée par son acquéreur, celle-ci n'est pas fondée à obtenir la garantie de son vendeur ;
Qu'en relevant ce moyen d'office, sans inviter, au préalable, les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette le recours en garantie formé par la société Sofiparc à l'encontre de Mme Z..., ainsi que le recours formé par la société Hôtel de la Tête Noire contre la société Sofiparc, l'arrêt rendu le 27 septembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers, autrement composée.