CA Paris, 14e ch. B, 24 mai 2002, n° 2002/01557
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
LC Systems (SARL), Line
Défendeur :
Chenguelly, Rofer
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cuinat
Conseillers :
M. André, M. Valette
Avoués :
Me Teytaud, SCP Gibou-Pignot-Grappotte-Benetreau
Avocat :
Me Dangibeaud
Vu l’appel formé par la SARL L.C. SYSTEMS et M. Pierre André LINE d’une ordonnance de référé rendue le 9 janvier 2002 par le président du tribunal de commerce d’Evry, lequel après s’être déclaré compétent matériellement, a :
- déclaré recevable la demande de MM. CHENGUELLY et ROFER, et, y faisant droit, a désigné M. Jean-Yves ROSTOKER en qualité d’expert, avec pour mission notamment d’examiner les comptes annuels de la société L.C. SYSTEMS de l’exercice 2000 et dire si ces comptes sont en cohérence avec la situation comptable de la société L.C. SYSTEMS au regard :
. des frais de recherche et de développement évalués à 218.256 francs, correspondant à une activité attribuée à M. CHENGUELLY qui en conteste la simple realité ;
. des immobilisations incorporelles figurant au bilan 2000 ;
. de la déclaration de crédit impôt recherche déposée pour l’exercice 2000 ;
. de l’absence de constitution de toute provision au titre de l’action judiciaire engagée par M. CHENGUELLY à l’encontre de la société L.C. SYSTEMS ;
- réserve les dépens ;
Vu les dernieres conclusions déposées le 26 mars 2002 par la SARL L.C. SYSTEMS et M. Pierre André LINE aux termes desquelles les appelants demandent à la Cour de :
- réformer le jugement entrepris ;
- dire que le juge des référés était incompétent ;
- renvoyer les intimés à se pourvoir au fond en la forme des référés ;
- subsidiairement, dire n’y avoir lieu à expertise ;
- en toute hypothèse, constater le caractère abusif de l’action de Messieurs CHENGUELLY et ROFER ;
- condamner solidairement Messieurs CHENGUELLY et ROFER à payer à la société L.C. SYSTEMS la somme de 40.000 euros à titre de dommages-intérêts et celle de 4.000 euros au titre de l’article 700 du NCPC, ainsi qu’en tous les dépens de première instance et d’appel ;
Vu les dernieres conclusions prises le 28 mars 2002 par Messieurs CHENGUELY et ROFER, intimés, tendant à voir confirmer l’ordonnance déférée, débouter la SARL L.C. SYSTEMS et M. Pierre André LINE de l’ensemble de leurs demandes, condamner M. LINE à verser à chacun des intimés la somme de 1.220 euros au titre de l’article 700 du NCPC et condamner M. LINE et la société L.C. SYSTEMS aux entiers dépens ;
SUR CE, LA COUR,
Considérant qu’il ressort de l’examen des pièces de la procédure de première instance que Messieurs CHENGUELLY et ROFER ont, par assignation du 8 octobre 2000, saisi en référé le président du tribunal de commerce d'EVRY d'une demande, au visa des articles L. 221-9 et L. 223-35 du Code de commerce, de nomination d’un commissaire aux comptes avec mission notamment d’examiner les comptes annuels de la société LC SYSTEMS pour l'exercice clos le 31 décembre 2000 et de dire si ces comptes reflètent la véritable situation comptable de la société LC SYSTEMS ;
Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des articles 12 et 43 du décret n° 67-236 du 23 mars 1967 que dans le cas prévu au troisième alinéa de l’article L. 221-9 du Code de commerce, le commissaire aux comptes est désigné par ordonnance du président du tribunal de commerce statuant en la forme des référés ;
Considérant qu’il apparait que c’est avec raison que le délégataire du président du tribunal de commerce d’EVRY, après avoir constaté qu’il statuait en la forme des référés sur la demande de Messieurs CHENGUELLY et ROFER, a retenu sa compétence ;
que c’est donc par erreur que l’ordonnance rendue a été qualifiée d’ordonnance de référé et qu’il convient de rectifier cette erreur en restituant à la décision critiquée son exacte qualification dans les termes du dispositif ;
Considérant qu’il s’avère par ailleurs que, contrairement à ce que soutiennent les appelants, les motifs retenus par le premier juge pour fonder sa décision sont suffisants par rapport aux exigences de l’article 455 du NCPC ;
Considérant qu’il est établi et au demeurant non discuté que Messieurs CHENGUELLY et ROFER représentent en tant qu’associés de la SARL L.C. SYSTEMS au moins le dixième du capital social de cette société ;
qu’ils sont donc recevables à demander en justice la nomination d’un commissaire aux comptes en application des dispositions de l’article L. 223-35 alinéa 3 du Code de commerce ;
Considérant qu’au regard des critiques portées par les associés minoritaires sur la régularité de la comptabilité de la société, cette demande apparait justifiée ; que de surcroit, les appelants ne soulèvent aucune objection sérieuse au principe même de cette demande ;
Considérant que c’est donc à tort que le premier juge a nommé non pas un commissaire aux comptes, mais un expert en lui confiant une mission dans les termes sollicités par les associés minoritaires, en excédant ainsi les pouvoirs attribués au président du tribunal de commerce par l’article L. 223-35 du Code de commerce sur lequel était fondée leur demande ;
que c'est en vain que les intimés invoquent les dispositions de l’article L. 223-37 du Code de commerce lesquelles ne sont pas applicables à la nomination d’un commissaire aux comptes ;
Considérant qu'il convient en conséquence d’infirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise, et, statuant à nouveau, de nommer un commissaire aux comptes pour la SARL L.C. SYSTEMS lequel remplira les missions prévues par les articles L. 210-1 et suivants du code de commerce et notamment en ses articles L. 223-35, L. 223-36 et L. 223-39 ;
Considérant que les parties succombant respectivement dans leurs prétentions, il convient de faire masse des dépens et de les partager par moitié entre elles ;
Considérant que l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du NCPC aux parties en la cause ;
PAR CES MOTIFS, LA COUR,
Rectifie d'office la décision déférée ;
Dit que l’ordonnance du président du tribunal de commerce d’EVRY du 9 janvier 2002 a été rendue en la forme des référés ;
Déclare la SARL LC SYSTEMS et M. Pierre André LINE partiellement fondés en leur appel ;
En conséquence,
Réforme l’ordonnance entreprise ;
Statuant à nouveau,
Nomme M. François GROS demeurant 140 boulevard Haussmann 75008 PARIS en qualité de commissaire aux comptes de la SARL L.C. SYSTEMS afin de remplir les missions prévues par les articles L. 210-1 et suivants du Code de commerce et notamment en ses articles L. 223-35, L. 223-36 et L. 223-39 ;
Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du NCPC ;
Rejette toute autre demande ;
Fait masse des dépens et dit qu’ils seront supportés par moitié entre les parties ; admet les avoués en la cause au bénéfice des dispositions de l’article 699 du NCPC.