Cass. com., 19 novembre 2002, n° 00-20.516
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
M. Boinot
Avocat général :
M. Lafortune
Avocats :
SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Le Bret-Desaché
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 2073 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Société marseillaise de crédit (la banque) a consenti en 1992 à la société Pharmacom une avance sur marchandises garantie par un gage portant sur un lot de produits de la société débitrice ; que la convention de constitution de gage prévoyait que des prélèvements sur les marchandises gagées ne pouvaient être effectués que moyennant paiement anticipé d'un montant égal à la valeur des marchandises déclarées ou substitution simultanée de marchandises de valeur équivalente ; que la société Pharmacom, faisant valoir qu'elle n'avait pu obtenir l'autorisation de reprendre une partie des marchandises gagées alors que la valeur de ces marchandises était supérieure au montant du crédit garanti, a assigné la banque en paiement du montant de la différence ;
Attendu que, pour condamner la banque à payer une somme à M. X... en qualité de liquidateur de la société Pharmacom, la cour d'appel relève que la convention de constitution de gage prévoyait que des prélèvements sur les marchandises gagées ne pouvaient être effectués que moyennant soit paiement anticipé d'un montant égal à la valeur des marchandises déclarées, soit substitution simultanée de marchandises d'un montant équivalent ; que l'expert a constaté que la créancière n'avait pas donné suite à des demandes de déstockage formulées en novembre 1995 bien que les marchandises fussent périssables et avait laissé leur péremption survenir en connaissance de cause sans mettre en oeuvre antérieurement les droits de réalisation ou d'attribution que lui reconnaît la loi et qui ne sont pas contestés ;
qu'abstraction faite de la lettre de la convention, la créancière ne pouvait agir de la sorte sans nuire consciemment à la débitrice qui demeurait tenue du remboursement du crédit d'avance et dont le gage se trouvait ainsi réduit à néant ; qu'à juste raison, l'expert a, dans ces conditions, considéré que son inaction fautive justifie qu'à concurrence de la valeur non critiquée de la marchandise périmée, sa responsabilité se trouve engagée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le créancier gagiste peut refuser de se dessaisir de son gage s'il n'obtient pas préalablement paiement de sa créance à concurrence de la valeur de celui-ci, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 juin 2000, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.