Cass. com., 20 septembre 2005, n° 03-10.163
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 12 septembre 2002), que le 30 janvier 1996, la société Menuiserie Charpente A. Richard a été mise en liquidation judiciaire, M. X... étant nommé liquidateur; que le 9 juillet 1996, le juge-commissaire a autorisé la vente du fonds de commerce au profit de la société Nouvelle A. Richard ; que les actes ont été passés les 4 et 10 octobre 1996 par le liquidateur ; que M. Y... et Mme Y..., épouse Z... (les consorts Y...), propriétaires du terrain donné à bail sur lequel était exploité l'entreprise ont demandé judiciairement la nullité, à défaut, l'inopposabilité à leur égard de cette cession du droit au bail et du fonds de commerce, laquelle cession portant, selon eux, sur une unité de production, a été ordonnée au profit de l'ancien dirigeant sans qu'ils aient été entendus, et subsidiairement la résiliation judiciaire du bail en raison des manquements répétés des preneurs ;
Attendu que les consorts Y... font grief à l'arrêt d'avoir dit n'y avoir lieu à prononcer la nullité de la cession du fonds de commerce au profit de la société Nouvelle A. Richard, alors, selon le moyen :
1 ) qu'en confirmant le jugement ayant rejeté au fond l'action en nullité de la cession intentée par les consorts Y..., tout en constatant que cette action était irrecevable faute pour ces derniers d'avoir exercé contre l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la cession le recours prévu par l'article 25 du décret du 27 décembre 1958, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé le texte susvisé, ensemble l'article L. 622-17 du Code de commerce ;
2 ) qu'une cour d'appel ne peut, sans excès de pouvoir, statuer au fond sur une action qu'elle déclare irrecevable ; qu'en l'espèce, en statuant sur le bien fondé de la demande des consorts Y... en nullité de la cession du fonds de commerce, tout en constatant que ces derniers étaient irrecevables à contester cette cession faute d'avoir exercé contre l'ordonnance du juge-commissaire le recours prévu par l'article 25 du décret du 27 décembre 1985, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble l'article 562 du nouveau Code de procédure civile ;
3 ) qu il y a cession d'une unité de production dès lors que les biens repris permettent la poursuite ou la reprise d'une activité, peu important que l'activité de l'entreprise débitrice ait cessé ; qu'en se fondant pour exclure la qualification de cession d'une unité de production, sur la circonstance inopérante que l'activité de la société Y... avait cessé, sans rechercher si, comme ils le faisaient valoir, cette cession, qui incluait la totalité des éléments corporels et incorporels du fonds de commerce et emportait reprise de quatre salariés de la société débitrice, ne portait pas sur un ensemble de moyens matériels et humains permettant la reprise d'une activité économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 622-17 du Code de commerce ;
4 ) que la cession globale d'une unité de production ne peut avoir lieu que dans les formes prescrites par l'article L. 622-17 du Code de commerce ; qu'en refusant de prononcer la nullité de la vente du fonds de commerce, constitutif d'une unité de production, bien que celle-ci ait été réalisée selon les formes prévues par l'article L. 622-18 concernant la vente des éléments d'actif isolés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
5 ) que la cession globale d'une unité de production ne peut notamment intervenir sans que le propriétaire des locaux dans lequel l'unité est exploitée ait été entendu ou dûment convoqué par le juge-commissaire ; que le non-respect de cette formalité cause nécessairement un grief au propriétaire ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 622-17 du Code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que l'ordonnance critiquée prévoyait sa notification au bailleur et qu'à supposer que cette formalité n'ait pu être menée à bien, les consorts Y... ne sauraient prétendre la remettre en cause, dès lors qu'ils n'ont pas exercé le recours prévu par l'article 25 du décret du 27 décembre 1985 et que ce recours leur restait ouvert en l'absence de notification ; que la cour d'appel n'a donc pas statué sur l'irrecevabilité de l'action des consorts Y... ;
Attendu, en second lieu, que l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, qu'à supposer même que l'opération ordonnée doive s'analyser comme portant sur une unité de production relevant de l'article L. 622-17 du Code de commerce, les consorts Y... ne justifient pas d'un quelconque grief consécutif à leur défaut de convocation, s'agissant d'une simple audition, devant le juge-commissaire, lequel choisit librement l'offre qui lui paraît la plus sérieuse et qui permet dans les meilleures conditions d'assurer durablement l'emploi et le paiement des créanciers, et que ni l'interposition de personne, ni la fraude alléguée ne sont établies ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, abstraction faite des motifs surabondants évoqués aux trois dernières branches, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.