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Décisions

CA Reims, ch. civ., 8 décembre 2015, n° 15/00097

REIMS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Banque CIC Est (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lafay

Conseillers :

Mme Lefevre, Mme Magnard

JEX Reims, du 19 déc. 2014

19 décembre 2014

Par jugement du 11 avril 2014 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal d'instance de Reims a condamné, d'une part, M. Frédéric M. et Mme Laurence M., son épouse, d'autre part, M. Frédéric M. seul, à payer diverses sommes à la société Banque CIC Est, SA. En exécution de cette décision, la société CIC Est Direction du contentieux, SAS, a fait procéder à une saisie-vente le 24 juillet 2014, dénoncée le 12 août 2014 à M. M..

Le 9 octobre 2014, M. M. a fait assigner la société CIC Est Direction du contentieux devant le juge de l'exécution de Reims en contestation de la régularité de la saisie-vente. La société Banque CIC Est, SA, est intervenue volontairement à l'audience. M. M. a sollicité la nullité de la saisie-vente et la condamnation de la société CIC Est Direction du contentieux à lui payer une somme de 1 200 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle. La société CIC Est Direction du contentieux et la société Banque CIC Est ont demandé le rejet des prétentions adverses.

Le jugement du 19 décembre 2014 a rejeté l'exception de nullité pour vice de forme soulevée par M. M. à l'encontre du procès-verbal de saisie-vente, a rejeté sa demande en application de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle et l'a condamné aux dépens.

M. M. a fait appel de cette décision. Aux termes de conclusions du 2 juin 2015, il demande à la cour, au visa des articles L. 142-1, L. 221-1 et suivants et R. 221-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, de :

- constater l'absence de commandement de payer préalablement à la saisie-vente,

- infirmer en conséquence le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de nullité de la saisie-vente,

à titre subsidiaire :

- constater que l'huissier de justice n'a pas pénétré dans les lieux et que les termes désignant les objets saisis sont imprécis,

- infirmer en conséquence le jugement en ce qu'il rejeté la demande de nullité de la saisie-vente,

en tout état de cause :

- condamner la société Banque CIC Est aux dépens et au paiement d'une somme de 1 200 euros HT sur le fondement de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle.

Selon écritures du 6 juillet 2015, la société Banque CIC Est conclut à la confirmation de la décision déférée, au débouté des demandes de M. M., à sa condamnation aux dépens et au paiement d'une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 octobre 2015.

Sur ce, la cour :

Sur le commandement préalable :

L'article L. 221-1 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, après signification d'un commandement, faire procéder à la saisie et à la vente des biens meubles corporels appartenant à son débiteur, qu'ils soient ou non détenus par ce dernier.

L'article R. 221-1 du code des procédures civiles d'exécution précise que le commandement de payer prévu à l'article L. 221-1 contient, à peine de nullité :

1° mention du titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées avec le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l'indication du taux des intérêts,

2° commandement d'avoir à payer la dette dans un délai de huit jours faute de quoi il peut y être contraint par la vente forcée de ses meubles.

Sont produits aux débats :

- le jugement du 11 avril 2014 assorti de l'exécution provisoire,

- l'acte de signification du 6 mai 2014 à M. M., par dépôt à l'étude, du jugement du 11 avril 2014,

- le commandement de payer du 27 mai 2014 délivré à M. M. par dépôt à l'étude, par lequel il lui est fait commandement de payer la somme de 28 934,30 euros en principal, outre indemnité pour frais irrépétibles, intérêts et frais (pièce n°3 de l'intimée), étant toutefois observé que le décompte du principal comporte une erreur pour mentionner deux fois le solde dû au titre d'un même crédit, la première fois pour 2 812,55 euros, la seconde pour 2 562,80 euros, base de calcul des intérêts contractuels, ce qui réduit à la somme totale de 26 371,50 euros le montant dû en principal,

- le procès-verbal de saisie-vente du 24 juillet 2014, qui fait itératif commandement de payer la somme de 28 934,30 euros, outre indemnité pour frais irrépétibles, intérêts et frais, et saisit certains meubles, dénoncé le 12 août 2014 à M. M..

Il est observé que le commandement de payer du 27 mai 2014 mentionne :

- le jugement du tribunal d'instance de Reims du 11 avril 2014 signifié le 6 mai 2014 comme titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées, avec décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus et l'indication du taux des intérêts,

- que faute de s'acquitter des sommes mentionnées, le débiteur pourra y être contraint par la saisie-vente de ses biens meubles à l'expiration d'un délai de huit jours.

Ce commandement répond aux exigences de l'article R. 221-1 du code des procédures civiles d'exécution. Par suite, l'acte de saisie-vente est valide au regard des articles ci-dessus cités.

Sur la validité des opérations de saisie :

L'article L. 142-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que :

'En l'absence de l'occupant du local ou si ce dernier en refuse l'accès, l'huissier de justice chargé de l'exécution ne peut y pénétrer qu'en présence du maire de la commune, d'un conseiller municipal ou d'un fonctionnaire municipal délégué par le maire à cette fin, d'une autorité de police ou de gendarmerie, requis pour assister au déroulement des opérations ou, à défaut, de deux témoins majeurs qui ne sont au service ni du créancier ni de l'huissier de justice chargé de l'exécution (...)'

L'article R. 221-16 du même code dispose que 'l'acte de saisie contient à peine de nullité : (...) 2° l'inventaire des biens saisis comportant une désignation détaillée de ceux-ci ; (...) 7° l'indication, le cas échéant, des nom, prénom et qualité des personnes qui ont assisté aux opérations de saisie, lesquelles apposent leur signature sur l'original et les copies ; en cas de refus, il en est fait mention dans l'acte ; (...)'

Le procès-verbal de saisie-vente du 24 juillet 2014 mentionne que l'huissier de justice a 'saisi les biens suivants visibles depuis la voie publique', à savoir un téléviseur écran plat et un canapé en cuir.

L'huissier de justice n'ayant pas pénétré dans l'habitation du débiteur, aucune méconnaissance des dispositions de l'article L. 142-1 ne peut lui être reprochée, ainsi que pertinemment observé par le premier juge. De même il ne peut lui être fait grief de n'avoir pas respecté les dispositions de l'article R. 221-16 7°.

La pratique consistant à opérer la saisie des biens aperçus à travers la vitre du local est critiquable et incompatible avec l'établissement d'un inventaire fiable. Cependant la nullité prévue par l'article R. 221-16 n'est encourue qu'à charge pour celui qui invoque la nullité de l'acte de procédure de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même s'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public, selon l'article 114 du code de procédure civile. Or, si M. M. reproche à l'huissier de justice de n'avoir pas désigné précisément les biens saisis et donc de ne pas permettre de les différencier d'autres objets de même nature 'qui pourraient être présents dans la maison', il ne justifie pas d'un grief concret résultant d'une désignation insuffisante, tel qu'une confusion possible avec un autre téléviseur écran plat ou un autre canapé effectivement présent au domicile. En conséquence, le premier juge a exactement apprécié que la preuve d'un grief n'était pas rapportée et que l'exception de nullité soulevée devait être rejetée.

Sur les autres demandes :

M. M. succombe et supporte les dépens d'appel. Il convient de rejeter les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile et sur l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle.

Par ces motifs :

Confirme le jugement du 19 décembre 2014,

Rejette toutes les autres demandes,

Condamne M. M. aux dépens d'appel.