Cass. com., 14 décembre 1993, n° 92-11.702
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
Mme Pasturel
Avocat général :
M. Curti
Avocats :
Me Choucroy, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, Me Ryziger
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 décembre 1991), que par deux actes en date respectivement des 6 et 7 août 1986 et du 27 novembre 1986, la société civile immobilière Les Fruits d'or (la SCI) a vendu en l'état futur d'achèvement à la société Le Minotaure des lots dépendant d'un ensemble immobilier en cours de construction, la date d'achèvement des travaux étant fixée, sauf cause légitime de suspension, à la fin du mois de décembre 1986 pour la première vente et à la fin du premier trimestre 1987 pour la seconde ; que la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Var (la banque) est intervenue aux deux actes pour consentir un prêt à l'acquéreur ; que le 28 septembre 1987, la société Le Minotaure a assigné la SCI en paiement de dommages-intérêts pour retard dans la livraison et impossibilité technique de lui livrer quatre lots ; qu'après avoir délivré à son tour, le 29 décembre 1987, à la société Le Minotaure, en visant la clause résolutoire contenue dans les actes de vente, un commandement de payer les sommes restant dues sur le prix, la SCI l'a assignée, le 24 mars 1988 pour faire constater l'acquisition de la clause et la résolution des ventes ; que la société Le Minotaure a été mise en redressement judiciaire le 19 mai 1988, puis en liquidation judiciaire ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt, confirmatif du chef litigieux, rendu après jonction des deux instances, d'avoir déclaré irrecevable en application de l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985 son action résolutoire, aux motifs, selon le pourvoi, que le commandement de payer avait pour cause des fractions du prix de vente exigibles antérieurement au jugement d'ouverture du redressement judiciaire tandis qu'à la date de cette décision la résolution n'avait pas encore été judiciairement constatée par une décision passée en force de chose jugée, alors qu'en matière de vente immobilière d'un immeuble à construire, la clause résolutoire pour non paiement du prix a nécessairement pour effet d'entraîner la résolution du contrat de plein droit à l'expiration du délai fixé lors de la mise en demeure restée sans résultat, sans qu'il soit besoin d'une décision de justice se bornant à constater la résolution ; qu'ainsi, dans la mesure où, comme en l'espèce, le commandement de payer du 29 décembre 1987 était resté sans résultat à la date de prise d'effet de la clause résolutoire qui y était visée et où cette date de prise d'effet était antérieure à la date d'ouverture du redressement judiciaire de l'acquéreur, l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985 était inapplicable ; que l'arrêt a donc violé ce texte pour fausse application ;
Mais attendu que la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a retenu souverainement que le retard d'achèvement des travaux, réalisé le 24 décembre 1987, avait occasionné à la société Le Minotaure un très important préjudice financier résultant à la fois de la perte d'exploitation et du versement à l'organisme prêteur d'intérêts intermédiaires et qu'en l'état de ces conséquences dommageables, imputables à l'inexécution fautive de son obligation de livraison par la SCI, la société Le Minotaure était fondée à se refuser au paiement de la dernière fraction du prix restant due, de sorte que la clause résolutoire n'était nullement acquise compte tenu du manquement de la SCI à son obligation contractuelle ; qu'abstraction faite des motifs, erronés dès lors que n'était pas en cause la résiliation du bail d'un immeuble affecté à l'activité de l'entreprise en liquidation judiciaire pour défaut de paiement de loyers antérieurs à l'ouverture de la procédure collective, mais surabondants, critiqués par le pourvoi, elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le second moyen, pris en ses trois branches : (sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.