Cass. crim., 13 mars 1989, n° 88-80.590
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Le Gunehec
Rapporteur :
M. Bayet
Avocat général :
Mme Pradain
Avocats :
Me Choucroy, SCP Waquet et Farge
CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Roger,
contre l'arrêt de la 9e chambre correctionnelle de la cour d'appel de Paris, en date du 23 novembre 1987, qui l'a condamné, du chef d'entrave à la participation d'actionnaires aux assemblées générales d'une société anonyme, à une amende de 40 000 francs et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 440 de la loi du 24 juillet 1966, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré l'exposant coupable d'avoir sciemment empêché les parties civiles de participer à l'assemblée générale ordinaire et à l'assemblée générale extraordinaire de la SA Le Florence, assemblées générales tenues le 8 septembre 1977 ;
" aux motifs adoptés des premiers juges que l'exposant admet qu'il n'a pas informé Claude Y... de ce que Jane Z..., Denise A... et Hélène A... étaient actionnaires ; qu'il s'est lui-même gardé de prévenir les parties civiles de son initiative destinée à reconstituer un conseil d'administration dont elles seraient exclues ; qu'il a admis que les actionnaires qui étaient convoqués jusque-là par lettres recommandées individuelles le soient par convocations, parues dans un journal d'annonces légales en plein milieu du mois d'août, c'est-à-dire dans les conditions plus appropriées pour en assurer le secret, qu'ainsi X... a bien empêché sciemment les parties civiles de participer aux assemblées générales litigieuses ;
" alors, d'une part, que l'exposant faisait valoir, dans un chef péremptoire de ses conclusions d'appel auquel la cour d'appel a omis de répondre, qu'il avait communiqué à Y... l'intégralité des documents sociaux en sa possession et, en particulier, les procès-verbaux de 1969 à 1974, mentionnant Mme A... et Mme Z... en qualité d'actionnaires et d'administrateurs ; que l'assemblée a été convoquée par Me Y... qui a respecté toutes les formalités légales ; qu'ainsi X... n'avait mis aucun obstacle à la participation à l'assemblée des parties civiles, et qu'elles n'avaient aucun titre à y être convoquées, dès lors que celle-ci a été convoquée par un mandataire de justice, dans des conditions de parfaite régularité ;
" alors, d'autre part, que la cour d'appel, qui se borne à affirmer l'élément intentionnel du délit reproché, sans aucunement le caractériser, n'a pas donné de base légale à sa décision " ;
Vu les articles susvisés ;
Attendu, d'une part, que tout jugement ou arrêt doit être motivé ; que l'insuffisance des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu, d'autre part, que, aux termes de l'article 440. 1° de la loi du 24 juillet 1966, sont punis des peines prévues par ce texte ceux qui sciemment auront empêché un actionnaire de participer à une assemblée d'actionnaires ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que pour déclarer Roger X..., président de la SA Restaurant Le Florence, coupable du délit prévu et réprimé par l'article 440. 1° de la loi du 24 juillet 1966, la cour d'appel qui a retenu à bon droit que Denise A..., veuve Z..., et Jane Z..., divorcée X..., parties civiles, étaient au 8 septembre 1977 actionnaires de la société précitée constate les conditions anormales dans lesquelles les assemblées générales ordinaire et extraordinaire du 8 septembre 1977 de ladite société ont été convoquées par le mandataire de justice commis à cet effet et note les circonstances obscures dans lesquelles, après ces assemblées, Roger X... a procédé à une nouvelle répartition des actions qui excluait lesdites parties civiles, point sur lequel, selon les juges, le prévenu n'a apporté que des explications confuses et dénuées de pertinence ; que la cour d'appel se borne à énoncer qu'il résulte de ces éléments que Roger X... a bien empêché sciemment lesdites actionnaires de participer aux assemblées générales litigieuses ;
Mais attendu qu'en l'état de ces seules énonciations qui ne caractérisent pas à la charge du demandeur un acte d'entrave à la participation des actionnaires à l'assemblée générale, élément matériel constitutif du délit poursuivi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, sans qu'il y ait lieu d'examiner le premier moyen proposé :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 23 novembre 1987, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles.