CA Bourges, ch. civ., 20 février 2020, n° 18/01530
BOURGES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
BNP Paribas Personal Finance (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Sarrazin
Conseillers :
M. Perinetti, Mme Ciabrini
EXPOSE
Par un arrêt du 23 mars 2017 rendu par la cour d'appel de Bourges, confirmant un jugement du Tribunal d'instance de Nevers du 31 mars 2016, M. Roger G. et Mme Marie G. ont été condamnés à payer à la SA BNP PARIBAS PF la somme de 47 470,99 € avec intérêts au taux contractuel de 0,733 %, ainsi que 150 € au titre de la clause pénale et 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par requêtes reçues au greffe le 26 février 2018, la BNP PARIBAS PF a demandé la convocation de M. Roger G. et de Mme Marie G. à l'audience de saisie des rémunérations du Tribunal d'instance de Nevers afin d'obtenir paiement de sa créance. Les débiteurs ont contesté cette mesure, invoquant notamment l'absence de solidarité prévue par le titre exécutoire.
Par jugement en date du 25 octobre 2018, le Tribunal d'instance de Nevers a :
- ordonné la jonction des affaires 2018/73 et 2018/74 sous le n° de RG n°11-18/587 ;
- dit que la contestation de M. Roger G. et Mme Marie G. était recevable en la forme ;
- l'a déclaré partiellement fondée ;
- ordonné la saisie des rémunérations de M. Roger G. pour la somme de 24 998,87 € se décomposant comme suit :
- principal : 23 511,39 €,
- intérêts : 851,67 €,
- frais : 635,81 €,
- ordonné la saisie des rémunérations de Mme Marie G. pour la somme de 24 998,87 € se décomposant comme suit
- principal : 23 511,39 €,
- intérêts : 851,67 €,
- frais : 635,81 €,
- débouté M. Roger G. et Mme Marie G. de leurs autres demandes ;
- condamné M. Roger G. et Mme Marie G. aux dépens de l'instance.
Le Tribunal a notamment retenu que, si la banque était bien détentrice d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible et permettant la mise en place d'une saisie des rémunérations, l'arrêt de la Cour d'appel de Bourges ne prévoyait pas de condamnation solidaire des débiteurs, de sorte que leur condamnation était conjointe. Il a également réduit le montant des frais d'huissier pouvant être réclamés aux actes d'exécution strictement nécessaires, le reste des frais n'étant pas jugé justifié.
M. Roger G. et Mme Marie G. ont interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 18 mars 2019, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des moyens et prétentions qu'ils développent, M. et Mme G. demandent à la Cour de :
- réformer le jugement entrepris ;
- constater que l'arrêt du 23 mars 2017 rendu par la Cour d'appel de BOURGES ne prévoit pas une condamnation solidaire des époux G. ;
- limiter en conséquence la somme principale à laquelle Mme Marie G. est tenue à 24 060,49 € ;
- limiter en conséquence la somme principale à laquelle M. Roger G. est tenu à 24 060,49 € ;
- débouter la BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE de ses demandes au titre des frais et des intérêts échus ;
- juger en application des dispositions de l'article 1343-5 du code civil que la somme due en principal portera intérêt au taux légal ;
- statuer ce que de droit quant aux dépens.
Au soutien de leurs prétentions, M. et Mme G. font notamment valoir que l'arrêt de la cour d'appel de BOURGES ne décide pas d'une condamnation solidaire. Ils estiment par ailleurs que l'intimée ne justifie pas des frais engagés, les derniers actes d'exécution signifiés à un jour d'intervalle seulement, les 13 novembre 2017 (procès-verbal de saisie-vente) et 14 novembre 2017 (procès-verbal de saisie attribution) ne tenant compte à ce titre que des 'frais avancés par le créancier' à hauteur de 1 500 €, sans autre précision. Ils avancent également que la banque ne justifie pas non plus du calcul des intérêts.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 27 mai 2019, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des moyens et prétentions qu'elle développe, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE demande à la cour de :
- débouter les époux G. de l'ensemble de leurs prétentions ;
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
- condamner solidairement les époux G. au paiement d'une indemnité de 1 700 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner solidairement les époux G. aux dépens d'appel.
A l'appui de ses demandes, la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE expose notamment détenir un titre exécutoire constatant une créance certaine, liquide et exigible, qui ne prévoit pas de condamnation solidaire, ce qui a été constaté par le premier juge et qu'elle ne conteste pas. Elle relève que le calcul des intérêts figure dans l'acte de saisine du tribunal d'instance, ainsi que dans les actes d'exécution, que les appelants ont déjà bénéficié de très larges délais de paiement et qu'il ne peut pas être envisagé de leur accorder un délai de grâce sous quelque forme que ce soit, dont l'une des modalités pourrait être d'appliquer le taux légal à la créance.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 octobre 2019.
MOTIFS
A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes tendant simplement à voir «dire et juger», «rappeler» ou «constater» ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu'il soit tranché un point litigieux mais des moyens, de sorte que la cour n'y répondra pas dans le dispositif du présent arrêt.
Sur la demande principale en saisie des rémunérations formée par la SAS MCS et Associés :
Aux termes de l'article R.3252-1 du code du travail, le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la saisie des sommes dues à titre de rémunération par un employeur à son débiteur.
L'article R.3252-19 du même code dispose qu'à défaut de conciliation des parties, il est procédé à la saisie après que le juge a vérifié le montant de la créance en principal, intérêts et frais.
Aux termes de l'article 1353 du code civil, il revient à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver, et réciproquement à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
L'article L111-8 du code des procédures civiles d'exécution dispose que les frais de l'exécution forcée sont à la charge du débiteur, sauf s'il est manifeste qu'ils n'étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés.
Il est constant qu'un acte d'exécution s'analyse comme nécessaire dès lors que son absence bloquerait le déroulement de la mesure d'exécution, ou compromettrait sa validité.
En l'espèce, il n'est pas contesté que M. et Mme G. ont été condamnés par arrêt contradictoire rendu le 23 mars 2017 par la Cour d'appel de Bourges et devenu définitif à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 47 470,99 euros, avec intérêts au taux contractuel de 0,733 % à compter du 3 septembre 2014, 150 euros au titre de la clause pénale, avec intérêts au taux légal, outre la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La SA BNP Paribas Personal Finance dispose ainsi à l'encontre de M. et Mme G. d'un titre exécutoire lui permettant de faire procéder à la saisie des rémunérations des débiteurs. Elle ne conteste nullement que l'arrêt en cause n'ait prononcé aucune condamnation solidaire à l'encontre de M. et Mme G., les condamnations déterminées étant ainsi nécessairement conjointes et ne lui ouvrant que la possibilité de ne réclamer que la moitié de chacune des sommes à M. G. d'une part, et à Mme G. d'autre part.
Concernant le décompte des intérêts échus calculés sur la somme due en principal (s'élevant pour chacun des débiteurs à hauteur de 23 511,39 euros), il convient d'observer que leur calcul figure clairement dans l'acte de saisine du Tribunal d'instance, ainsi que dans les actes d'exécution signifiés. La SA BNP Paribas Personal Finance justifie ainsi de la créance réclamée à ce titre, qui s'élève pour chacun des débiteurs à hauteur de 851,67 euros.
Concernant les frais de recouvrement dont le montant est réclamé par la SA BNP Paribas Personal Finance, le premier juge a avec pertinence rappelé qu'un acte pouvant correspondre à des diligences utiles mais qui pouvaient être effectués par le créancier lui-même, lequel a préféré en confier la réalisation à un huissier par commodité, n'est pas forcément estimé nécessaire au sens des dispositions légales précitées. Il a ainsi à juste titre retenu les frais correspondant aux commandement de saisie-vente, procès-verbal de saisie vente, procès-verbal de saisie attribution, requêtes BETEILLE et FICOBA, levée d'extraits de la matrice cadastrale et d'état auprès des services d'immatriculation de la préfecture, procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation et son dénoncé, ainsi que la requête en saisie des rémunérations au titre des frais relevant des dépens d'instance et de l'exécution forcée. Il doit être observé que M. et Mme G. ne démontrent pas en quoi la mention de « frais avancés par le créancier » à hauteur de 1 500 euros portée au procès-verbal de saisie vente du 13 novembre 2017 et au procès-verbal de saisie attribution du 14 novembre 2017 compromettrait la validité de ces actes, dès lors que la SA BNP Paribas Personal Finance justifie de chacun des actes d'exécution accomplis par leur production aux débats.
Le montant de 635,81 euros peut ainsi légitimement être réclamé par la SA BNP Paribas Personal Finance à chacun des débiteurs.
Aux termes de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.
Au soutien de leur demande de délais de grâce et de réduction du taux d'intérêts au taux légal, M. et Mme G. ne produisent aucun élément tenant à leur situation financière actuelle ni à leurs capacités de s'acquitter de leur dette dans le délai légal maximal de deux ans. Il peut au surcroît être relevé qu'ils ont déjà bénéficié de délais conséquents depuis le prononcé de l'arrêt constituant le titre exécutoire.
Il n'est ainsi pas opportun de donner suite aux demandes de délais de grâce et de réduction du taux d'intérêts au taux légal présentées par M. et Mme G..
Sur l'article 700 et les dépens :
L'équité et la prise en considération de la situation économique respective des parties, ainsi que l'issue donnée au litige par la présente décision, commandent de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner in solidum M. et Mme G., qui succombent en l'intégralité de leurs prétentions, à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie. M. et Mme G., succombant en l'intégralité de leurs prétentions, devront supporter in solidum la charge des dépens en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
CONFIRME le jugement rendu le 25 octobre 2018 par le Tribunal d'instance de Nevers en l'intégralité de ses dispositions ;
Et y ajoutant,
DÉBOUTE M. Roger G. et Mme Marie G. de leur demande de délais de grâce et de réduction du taux d'intérêts au taux légal ;
REJETTE toutes autres demandes, plus amples ou contraires ;
CONDAMNE in solidum M. Roger G. et Mme Marie G. à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE in solidum M. Roger G. et Mme Marie G. aux entiers dépens en cause d'appel.