Livv
Décisions

CA Paris, 5e ch. A, 18 octobre 2005, n° 04/04322

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Patrimoine Management et Technologies (Sté), 3D Nexus (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Chagny

Conseillers :

Mme Le Jan, M. Le Dauphin

Avoués :

SCP Narrat-Peytavi, Me Teytaud

Avocats :

Me Bouyer, Me Itearu

T. com. Paris, 17e ch., du 20 janv. 2004…

20 janvier 2004

Vu le jugement, prononcé le 20 janvier 2004 par le tribunal de commerce de Paris, qui

- déboute M. Robert Hermann de ses demandes, lui fait injonction d’exécuter ses obligations conformément à l’article 6 du pacte d’actionnaires, et en conséquence lui ordonne de proposer la cession de ses 20 040 actions au prix de 5, 37 euros par action, soit au prix global de 107 622, 53 euros aux deux actionnaires salaires, M. Jean-Yves Fradier et Mme Katayon Pourrastegar-Ducamus, sous astreinte, la transaction devant intervenir dans le délai d’un mois à compter de le proposition de M. Hermann, délai au-delà duquel ce dernier sera libéré de cette obligation,

- à défaut pour les salariés d’acquérir tout ou partie des actions, ordonne à M. Hermann d’offrir le solde ou la totalité de ses actions au prix unitaire de 5,37 euros aux actionnaires mandataires. MM. Vlieghe et Nasseri ainsi qu’à la société 3D Nexus, sous astreinte,

- ordonne à M. Hermann de régulariser le ou les ordres de mouvement de titres correspondant au(x) transfert(s) de ses 20 040 actions au bénéfice du ou des actionnaire(s) salarié(s) ou mandataire(s) qui se sera porté acquéreur de tout ou partie de ses actions afin de permettre l’inscription sur les registres de la société, ainsi que les déclarations auprès de la recette des impôts,

- prend acte de l’intervention volontaire de la société Patrimoine management et technologies (PMT),

- dit que PMT pourra, sur présentation de la preuve du paiement des titres au bénéfice de M. Hermann, procéder à l’inscription du ou des mouvements de titres et sur les fiches individuelles des actionnaires concernés,

- déboute PMT de sa demande de remboursement de dividende, cette dernière étant irrecevable pour défaut d’intérêt,

- ordonne l'exécution provisoire,

- déboute les parties de leurs demandes de dommages et intérêts,

- condamne M. Hermann à payer à M. Vlieghe et Nasseri, respectivement à chacun 3 000 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile et à M. Fradier, à M. Dereumaux, à Mme Pourrastegar-Ducamus et à la société Nexus respectivement chacun 1 000 euros sur le même fondement,

- et déboute les parties de leurs autres demandes ;

Vu l’appel relevé de cette décision par M. Hermann ;

Vu les dernières conclusions déposées au greffe le 5 septembre 2005 pour l’appelant qui prie la cour, à la lumière de la directive européenne n° 77/91/CE du 13 décembre 1976 et au visa des articles 1129,1131, 1589, 1591 et 1142 du code civil, des articles 225-206 et suivants et spécialement des articles 225-131,225-215,225-216 et 225- 251 ainsi que des articles L.242-6, L.242-17 et L.242-24 du code de commerce, et des articles 31, 32,328 et 329 du nouveau code de procédure civile de :

- juger son appel recevable et bien fondé,

- prononcer le nullité du jugement déféré,

- dans tout état de cause, le réformer,

statuant à nouveau:

- lui donner acte qu’il propose que, de l’accord des parties, la cour désigne un expert, à la condition que les intimés s’engagent un acquérir les actions en cause au prix ainsi déterminer,

- prononcer la nullité du pacte du 19 février 1999 et de ses avenants des 16 mai 2000 et 14 décembre 2001 et déclarer abusive la demande initialement faite par MM. Vlieghe et Nasseri,

- prononcer la nullité des prêts accordés par PMT en vue de la souscription ou de l’achat de ses propres actions via l'opération de LBO dans cours, de même que la nullité des gages assortissant ces prêts,

- prononcer aussi le nullité des souscriptions d'actions et des libérations de celles-ci de MM. Fradier et Dereumaux et Mme Pourrastegar-Ducamus, celle de l’augmentation du capital de la société PP2 réservée à M. Dereumaux du 16 mai 2000, celle de l’augmentation de capital autorisée par l’assemblée générale extraordinaire du 8 août 2000 avec toutes conséquences de droit,

- Désigner un mandataire pour procéder aux rectifications nécessaires et aux formalités de publicité légal consécutive à ces annulations,

- dire que MM. Vlieghe et Nasseri ont, en leur qualité de président directeur général et de directeur général et d’administrateurs, engagé leur responsabilité en ce titre,

- juger irrecevable et abusive l’intervention volontaire de PMT en première instance et condamner celle-ci au paiement d’une amende civile et de la somme de 5 000 euros au titre de dommages et intérêts outre celle de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

- « confirmer l’irrecevabilité de l’intervention de M. Dereumaux, et juger irrecevables en leur intervention M. Fradier et Mme Pourrastegar-Ducamus ainsi que MM. Vlieghe et Nasseri dans leurs demandes reconventionnelles,

à titre subsidiaire,

- dire que le calcul concernant le prix des actions de M. Hermann est non seulement inapplicable, comme fondé sur une clause nulle ne permettant pas la détermination d'un juste prix, mais qu’en outre le nombre exact d’actions de M. Hermann doit être déterminé après prise en compte de la nullité des souscriptions et libérations fictives réalisées par MM. Dereumaux et Fradier et par Mme Pourrastegar-Ducamus,

à titre infiniment subsidiaire,

- dire en tout état de cause que les « défendeurs » principaux et les intervenants sont irrecevables et mal fondés à demander qu’il soit fait injonction à M. Hermann « d’offrir » ses actions et encore plus d’ordonner d’office le transfert de ses actions et ce par application de l’article 1142 du code civil,

- Débouter les intimés de toutes demandes reconventionnelles,

- Déclarer irrecevables et mal fondés MM. Vlieghe, Nasseri, la société 3D Nexus, MM. Dereumaux et Fradier, Mme Pourrastegar-Ducamus et PMT dans leurs demandes et les en débouter,

- ordonner la restitution sous astreinte des actions transférées à M. Fradier et à Mme Pourrastegar-Ducamus, le prix en étant payé par M. Hermann par compensation avec les dommages et intérêts alloués,

- condamner conjointement et solidairement MM. Vlieghe, Nasseri, Dereumaux et Fradier, Mme Pourrastegar-Ducamus et PMT à payer à M. Hermann la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts, ainsi que celle de 65 000 euros HT au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Vu les Dernières conclusions déposées au greffe le 29 aout 2005 pour PMT, MM. Fradier, Dereumaux, Nasseri, Vlieghe, la société 3D Nexus et Mme Pourrastegar-Ducamus, qui demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ses dispositions ayant débouté M. Hermann de ses demandes et ayant fait injonction à M. Hermann d’exécuter ses obligations conformément aux termes de l’article 6 du pacte d’actionnaires,

- le réformer pour le surplus,

et jugeant à nouveau,

- dire recevable l’intervention de M. Dereumaux,

- condamner M. Hermann à payer à MM. Vlieghe, Nasseri, Fradier et Dereumaux, à Mme Pourrastegar-Ducamus et à la société 3D Nexus la somme de 30 000 euros chacun « à titre de dommages et intérêts » , outre celle de 5 000 euros chacun « à titre de réparation du préjudice par eux subi du fait de sa résistance abusive et de son comportement »,

- condamner M. Hermann à payer à Mme Pourrastegar-Ducamus et à M. Fradier la somme de 2 705,40 euros pour chacun au titre des dividendes qu’il a perçu en juillet 2003 compte tenu des bénéfices dégagés par la société Patrimoine à l’occasion de son exercice comptable 2002,

- condamner M. Herman à payer à MM. Vlieghe et Nasseri la somme de 8 000 euros chacun au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile,

- là condamner M. Hermann à payer à la société 3D Nexus, MM. Dereumaux et Fradier, Mme Pourrastegar-Ducamus la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

SUR CE, LA COUR

Considérant que le 19 février 1999, MM. Vlieghe, Nasseri, Lengaigne, Rousselle, Fradier, Hermann et Mme Pourrastegar-Ducamus, ces trois derniers salariés de PMT, ont constitué la société anonyme PP2 à l’effet de prendre le contrôle de la société PMT ayant pour activité la réalisation de logiciels appliqués au secteur de la banque et des assurances ; 

que le même jour, a été signé entre M.M. Vlieghe, Nasseri et Rousselle, désignés comme « actionnaires mandataires », et MM. Hermann, Fradier et Mme Pourrastegar-Ducamus désignés comme « actionnaire salariés », un acte précisant les modalités de prise de participation et de cessions des actions de PP2 ;

que le 16 mai 2000, a été signé un avenant au pacte d’actionnaires par les mêmes intervenants et par M. Dereumaux, nouvel actionnaire de PP2, avenant constatant que les engagements de l’article 2 du pacte du 19 février étaient remplis par anticipation et entérinant l’adhésion de M. Dereumaux aux dispositions de ce pacte en la qualité « d’actionnaire salarié » ; 

que le 18 décembre 2000, est intervenue la fusion-absorption de PP2 par PMT et que le 14 décembre 2001 a été signé un avenant par les mêmes intervenants et par la société 3D Nexus (Nexus) aux lieu et place de M. Rousselle, avenant entérinant l’adhésion de Nexus et l’application du pacte d’actionnaires de 1999 aux mêmes actionnaires devenus actionnaires de PMT à la suite de la fusion;

qu’à l’issue de l’opération, qualifiée de « LBO », M. Hermann détenait 20.040 actions de PMT;

Considérant qu’ayant, à la suite de son licenciement intervenu le 13 Février 2002, refusé de transférer aux signataires du pacte d’actionnaires et de ses avenants les actions de PMT qu’il détenait comme prévu par l’article 6 du pacte du 19 février 1999, au motif que son engagement de céder ses actions n’était pas valable comme concernant des actions de PP2 et non celles de PMT et que les parties avaient omis de prévoir le cas de fusion, M. Hermann à engagé une instance devant le tribunal de commerce de Paris en nullité du pacte du 19 février 1999 et de ses avenants des 16 mai 2000 et 14 décembre 2001, en nullité de ses engagements et pour voir juger abusive la demande de MM. Vlieghe et Nasseri à son égard de vendre ses actions à un prix de surcroit très inférieur à leur valeur ;

Considérant que par le jugement déféré, le tribunal s’est prononcé dans les termes ci-avant reproduits ;

Considérant que M. Hermann a aussi engagé devant le tribunal de commerce de Nanterre une action en nullité des souscriptions et libérations selon lui fictives et des augmentations de capital correspondantes de mai et juillet 2000 ; que par jugement du 17 décembre 2004, ce tribunal s’est dessaisi au profit de la cour ;

Sur la procédure :

Considérant que, par écritures déposées le 7 septembre 2005, les intimés sollicitent le rejet des dernières conclusions signifiées par la partie adverse le jour de la clôture contenant, selon eux, une demande nouvelle au sens des articles 564 et suivants du nouveau code de procédure civile, constituée par la désignation d’un expert par la cour, demande sur laquelle, de surcroit, ils n’ont pas été mis en mesure de s’expliquer, ce qui constitue une violation du principe de contradiction ; que, par conclusions en réponse déposées le 8 septembre 2005, M. Hermann prie la cour d’écarter cette prétention ;

Mais considérant que la demande de donner acte n’est pas une demande en justice ; que par ailleurs le dépôt le 5 septembre 2005 de conclusions répondant elles-mêmes à des conclusions récentes du 29 aout 2005 et ne contenant ni moyens nouveaux ni prétentions nouvelles, ne porte pas atteinte au principe de contradiction ; que ces écritures sont recevables ;

Considérant que M. Hermann sollicite la nullité du jugement pour défaut de motivation (absence de réponse aux questions de principe primordiales concernant essentiellement les régies de droit applicables aux exclusions et au moyen relevé de l’article 1142 du code civil) ; mais considérant que le jugement n’est pas dénué de motivation, laquelle peut certes donner lieu a critique par les parties dans le cadre d'un appel mais ne lui fait pas encourir la nullité sollicitée ;

Considérant que M. Hermann conclut à l'irrecevabilité de l’intervention de PMT devant le tribunal pour avoir été régularisée à l’occasion d’une réouverture des débats, ordonnée par le tribunal sur une question précise, qui ne permettait pas une telle intervention ;

Mais considérant que, des lors que par le jugement du 14 octobre 2003, le tribunal a ordonné la réouverture des débats pour les clore définitivement le 2 novembre 2003, il n’avait pas à écarter l’intervention volontaire de PMT au motif que cette intervention était étrangère à la question posée par le jugement ordonnant le réouverture des débats ; que l’exception n’est pas fondée non plus que les demandes présentées à ce propos d’amende civile, de dommages et intérêts et d’indemnité de procédure ;

Considérant que M. Hermann demande que soit confirmée l’irrecevabilité selon lui reconnue par le jugement des prétentions de M. Dereumaux pour défaut de qualité "d’actionnaire salarié" faute par celui-ci, non actionnaire d’origine de PP2, d’avoir régulièrement acquis ses actions lors des augmentations de capital décidées par le pacte d’actionnaires du 19 février 1999 ;

Qu’il estime que M. Fradier et Mme Pourrastegar-Ducamus doivent également être déclarés irrecevables dans leur intervention et en leurs demandes au motif que si à la différence de M. Dereumaux, ils détenaient avant les augmentations de capital de PP2 quelques actions à eux distribuées par l’ancienne direction de PMT et dont ils avaient fait l’apport, la qualité "d’actionnaires salariés” dans le pacte était liée à la souscription d’actions nouvelles en numéraire qui, selon lui, est illicite pour avoir été opérée grâce à des prêts « clandestins et illégaux » ;

Qu’il invoque encore une absence de bonne foi et de loyauté tirée de la résistance des intéressés à produire les pièces nécessaires aux débats ;

Qu’il excipe enfin de l’irrecevabilité de la demande reconventionnelle de MM. Vlieghe et Nasseri également pour absence de bonne foi et de loyauté ;

Mais considérant qu’il va être démontre dans le cadre de la discussion au fond qui va suivre que M. Dereumaux, M. Fradier et Mme Pourrastegar-Ducamus sont des actionnaires salariés qui ont acquis régulièrement leurs titres lors des augmentations de capital de la société PP2; que la preuve de la mauvaise foi ou de la loyauté des intimés mis en cause n’est pas apportée et que ces derniers répliquent à juste raison que les nombreuse demandes de M. Hermann sont susceptibles de faire grief à leurs intérêts ; que les exceptions ainsi soulevées ne sont pas fondées ;

Sur le fond :

1) sur la nullité du pacte et de ses avenants :

Considérant que l’appelant soutient d’abord que le pacte du 19 février 1999 et ses avenants sont nuls pour fausse cause et à raison du dol dont il a été victime ;

Considérant que, sur le premier moyen, il expose qu’en participant à la souscription d’actions de PP2. il espérait bénéficier de l’accroissement de valeur de celles-ci découlant du développement d’une entreprise auquel il entendait contribuer non seulement par ses apports en capital mais aussi par son industrie et que le pacte proposé à sa signature allait à l’encontre de ses intentions et des buts officiellement exposés puisqu’il se voyait contraint, en cas de licenciement nécessairement opéré par les dirigeants, d’offrir ses actions aux « actionnaires salariés », puis aux actionnaires « mandataires », pour un prix contestable, ajoutant que l’actionnaire « exproprié » se voyait tenu d’offrir la cession de ses actions alors que les bénéficiaires de cette offre étaient libres de l’accepter ou de la refuser ; que ces avantages consentis à sens unique ont abouti à un acte nul pour fausse cause ;

Mais considérant qu’un pacte d’actionnaires est une convention par laquelle ces derniers cherchent à régler le contrôle de la conduite des affaires et la composition du capital de leur société ; que les intimés répliquent à juste raison que la cause du pacte litigieux et de ses avenants, clairement déterminée et classique en la matière, est le désir d’établir une procédure de sortie de la société; qu’il à été prévu à cet effet de maintenir les actions entre les mains des actionnaires mais aussi de proposer le rachat par priorité aux « actionnaires salariés » pour conserver, si faire se peut, l’équilibre initial entre « actionnaires salariés » et « actionnaires mandataires » ; que la cause d’un pacte d’actionnaires ne se confond pas avec les mobiles de l’actionnaire non plus qu’avec les chances de succès de l’opération ; que les conditions du retrait critiquées par M. Hermann sont étrangères à la notion de cause invoquée ; que la démonstration d’une fausse cause de nature à provoquer la nullité du pacte et de ses avenants n’est pas faite ;

Considérant qu'au soutien de son moyen relevé du dol, M. Hermann soutient que, s’il a, pour sa part, libéré les actions souscrites lors de l’augmentation de capital avec ses fonds propres, il n’en a pas été de même des autres « actionnaires salariés » qui, n’ayant pas les moyens de respecter cet engagement (dont, selon l'appelant on peut même penser qu’il était fictif) ont bénéficié de « prêts illicites et clandestins » ; qu’il prétend que, s’il avait su pouvoir obtenir de tels prêts, il n’aurait pas manqué lui aussi d’en solliciter pour bénéficier des mêmes avantages que les autres; qu’outre la violation de l’obligation d’information pesant sur les dirigeants quant à l’existence de ces prêts, le estime avoir été victime de la mauvaise foi des autres actionnaires ;

Mais considérant que le dol ne se présume pas et doit être prouvé ; que dans le cas présent, si l’on devait considérer que M. Hermann n’était pas au courant de ces prêts, il ne met aux débats aucun élément de nature à établir l’existence de manœuvres dolosives de la part des autres actionnaires ou même un défaut d’information de la part des dirigeants ayant pour objet de le tromper pour l’amener à contracter ; que par ailleurs M. Hermann n’apporte pas la preuve de ce qu’il n’aurait pas contracté comme il l’a fait s’il avait eu connaissance de la possibilité qui lui était offerte d’obtenir un prêt aux mêmes conditions que les autres salariés ;

Considérant que l’appelant se prévaut encore de la nullité du pacte faute de limitation dans le temps de ses effets et à raison des causes et modalités de sortie qui y figurent ; qu’il prétend aussi que ces actes sont devenus inapplicables par suite de la fusion ;

Considérant sur ce dernier point que, dans l’avenant du 14 décembre 2001, il est précisé « La société PP2 a été absorbée par PMT. Les dispositions du pacte d’actionnaires signé le 19 février 1999 et de son avenant n°1 signé le 16 mai 2000, s 'appliquent depuis cette fusion aux actions PMT reçues en échange des actions PP2 détenues par les signataires du pacte dont M. Hermann ; que la fusion des sociétés a eu pour conséquence que les actionnaires de PP2 sont devenus actionnaires de PMT et que les actions PMT sont depuis cet événement soumises aux pacte et à ses avenants ; que de plus, en dépit de ce que prétend l’appelant, les salariés de PMT sont restés salariés de la même société après la fusion et que les « actionnaires salariés », dont M. Hermann, pouvaient faire l’objet d’un licenciement par PMT ;

Considérant que l’absence de limitation dans le temps des effets du pacte n'est pas une cause de nullité ;

Considérant pour le surplus que M. Hermann critique d’abord la clause du pacte dans ce que, loin de s’analyser en une promesses de vente, elle contraint l’actionnaire à « offrir » ses actions aux autres associés et constitue un processus d’exclusion contraire au droit européen comme au droit français ;

Que, se référant à l’article 36 de la directive européenne n° 77/91/CE du 13 décembre 1976, M. Hermann prétend que le retrait forcé d’actions « doit être prescrit et autorisé par les statuts avant la souscription des actions qui font l’objet du retrait » ; qu’il soutient que le pacte du 19 février 1999 était contraire aux statuts de PP2 qui ne prévoyaient pas d’exclusion, que les motifs d’exclusion n’étaient pas objectivement prévus, que l’exclusion n’a pas été soumise à la vérification par le juge quant à son motif et quant à la compétence de l’organe ayant décidé l’exclusion, que les droits de la défense n’ont pas été respectés et que le bénéficiaire éventuel du rachat forcé doit être déterminé ou désigné par l’organe compétent de la société ;

Considérant cependant que tout associé est libre de s’engager, lorsqu’il acquiert ses titres, à ce que ses actions lui soient un jour rachetées soit à un prix déterminé, soit à un prix déterminable et que les intimés répondent à bon droit que la clause litigieuse n’est pas une clause d’exclusion contraire aux statuts mais une promesse unilatérale de cession d’actions par laquelle les « actionnaires salariés » s’engageaient un céder leurs actions en cas de cessation de leurs fonctions, quelle qu’en soit la cause au sein de la société ; qu’il s’agit donc d’une promesses de vente, conclue sous la condition suspensive qu’un événement déterminé survienne, telle en l’espèce la perte de la qualité de salarié, qui n’est dès lors pas soumise aux dispositions de la directive visée par l’appelant, non plus qu’aux autres principes rappelés ci-dessus par l’appelant ;

Considérant que M. Hermann conclut ensuite à la nullité du pacte au regard de la clause de fixation du prix par application des articles 1589 et 1591 du code civil ; qu’il relève que cette clause nulle dès l’origine parce qu’elle ne prévoyait pas une seule formule objective mais plusieurs formules distinctes privilégiant les dirigeants majoritaires, l’est de plus fort à raison de ce que la détermination du prix n’est pas libérée de l’intervention arbitraire de la volonté de l’acheteur dès lors que les dirigeants majoritaires de PP2 pouvaient licencier abusivement un salarié et que la formule utilisée fait référence à des bénéfices « non distribués » que les dirigeants majoritaires étaient à même de fixer ; qu’il ajoute que la clause est, par suite de la fusion et de la disparition de PP2 sur la valeur de laquelle était appuyée la fixation du prix, devenue inapplicable pour la revente d’actions PMT et que le transfert de propriété doit en toute hypothèse être opéré moyennant « un prix dans rapport avec la valeur du bien » ;

Mais considérant que l’existence de plusieurs formules de détermination du prix n’est pas en elle-même critiquable puisqu’elles correspondent à des situations de fait et de droit différentes ; que, comme l’a été rappelé ci-avant, l’avenant du 14 décembre 2001 a, d’accord entre toutes les parties signataires au nombre desquelles figure M. Hermann, prévu que les dispositions du pacte initial et de l’avenant s’appliqueront à compter de la fusion aux actions PMT reçues en échange des actions PP2 ; qu’il s’ensuit que les formules de détermination du prix de rachat ont été validées pour le rachat des titres PMT et spécialement la valorisation de la société devenue PMT, cette valorisation comportant, pour tenir compte des changements à intervenir, un correctif se référant à l’ensemble des sociétés du groupe, à savoir une augmentation du prix de base de la société (25 millions de francs) constitué du surplus des bénéfices non distribués de toutes les sociétés du groupe à compter de l’exercice 1999 ; qu’en outre la détermination des bénéfices non distribués se fonde sur des éléments indépendants de la volonté des parties au rachat d’actions dès lors que la distribution de bénéfices ou l’affectation de ceux-ci en réserve relèvent de la décision non des dirigeants mais de l’assemblée générale des actionnaires et qu’il en est de même des rémunérations des dirigeants (qualifiées par l’appelant d’exorbitantes) dont le montant est fixé par les organes sociaux (assemblée générale ou conseil d’administration) ; qu’enfin concernant la condition relative au licenciement, s’il émane du dirigeant de la société, il ne demeure pas sans contrôle puisqu’il peut être contesté devant les juridictions compétentes, ce qui a été le cas pour M. Hermann dont le licenciement aété reconnu, par arrêt de la cour d’appel de Versailles du 16 mars 2005 devenu irrévocable comme opéré pour cause réelle et sérieuse ; que la nullité tirée de l’existence d’une clause « potestative » n’est donc pas encourue ;

Considérant enfin qu’en dépit de ce que soutient M. Hermann, les bénéficiaires de la clause sont déterminés et qu’il n’importe que la proportion d’une éventuelle répartition entre eux ne soit pas précisée ;

D’où il suit que ni le pacte ni ses avenants ne sont entachés de nullité et que la clause prévue à l’article 6 du pacte doit recevoir application ;

2) Sur les demandes formulées devant le tribunal de commerce de Nanterre 

Sur les prêts

Considérant que M. Hermann conclut à la nullité des prêts consentis à MM. Fradier et Dereumaux et à Mme Pourrastegar-Ducamus motif pris de ce qu’ils n’entrent pas dans le cadre de l’objet social et pour avoir été consentis à des salariés également associés en vue de l’achat d’actions de la société prêteuse ; qu’il conclut encore à la nullité des gages consentis en garantie de ces prêts comme contraire aux dispositions de l’article L. 225-215 du code de commerce ;

Mais considérant que si l’article 217-9 du code des sociétés, dans sa rédaction applicable à l’époque où les prêts ont été consentis, énonce dans son alinéa 1er qu'une société ne peut pas avancer des fonds, accorder des prêts ou consentir une sureté en vue de la souscription ou de l’achat de ses propres actions par un tiers, il précise, dans son linéa 2, qui cette prohibition ne s’applique pas aux opérations effectuées en vue de l’acquisition par les salaires d’actions de la société ou de l’une de ses filiales ; que les prêts litigieux étaient donc licites ; qu’ils ont de plus été régulièrement autorisés par un conseil d’administration de PMT du 17 avril 2000 pour permettre aux trois salariés concernés de souscrire aux augmentations de capital dont la réalisation à été anticipée comme il résulte de 1’avenant n°1 en date du 16 mai 2000 ;

que par ailleurs la demande de nullité des gages éventuellement encourue est sans incidence sur la validité des prêts eux-mêmes et dépourvue d’intérêt dès lors que les prêts ont été intégralement remboursés sans mise en œuvre de cette garantie ;

Considérant que M. Hermann suggère que les salariés n’ont pu rembourser que grâce à un nouveau prêt illicite mais qu’il n’en apporte nullement la preuve ; 

Sur les souscriptions et libérations d’actions

Considérant que M. Hermann demande que soit prononcé la nullité des souscriptions et des libérations d’actions par MM. Fradier et Dereumaux et par Mme Pourrastegar-Ducamus dans le cadre des augmentations de capital décidées les 5 janvier 2000 et 16 mai 2000, souscriptions selon lui fictives ou même simulées ; qu’il soutient que les trois salariés, bénéficiaires de prêts pour la totalité du montant de leurs souscriptions, ne sont intervenus qu’en qualité de prête-nom des deux dirigeants et associés majoritaires puisque les prêts étaient remboursables in fine au bout de trois ans à une date ou il était prévu une introduction en bourse ce qui leur permettaient de vendre leurs actions et de rembourser officiellement leur prêt sans bourse délier ; qu’il relève que les prêts sont tous datés du 25 mai 2000 alors que le conseil d’administration avait constaté la réalisation des augmentations de capital et la libération des actions antérieurement et qu’ils n’ont pas date certaine ; qu’il conclut qu’actionnaire très minoritaire il a été victime de fraudes conçues et mises dans œuvre par MM. Vlieghe et Nasseri avec la complicité de MM. Fradier et Dereumaux et de Mme Pourrastegar-Ducamus ;

Mais considérant qu’aucun élément n’est mis aux débats de nature à justifier du climat de fraude alléguée par l’appelant ni du caractères irrégulier ou fictif tant des souscriptions et augmentations de capital décidées par l’assemblée générale extraordinaire du 7 Janvier 2000 (et non du 5) que de la souscription opérée ultérieurement par M. Dereumaux d’un montant de 350 000 francs ; qu’il ressort au contraire des pièces versées que l’augmentation de capital décidée par l’assemblée du 7 Janvier 2000 à hauteur de 450 000 francs a été réalisée en deux fois, que les fonds correspondant à la première tranche ont été versés par les trois salariés concernés en février et mars 2000 et que le paiement de ceux de la deuxième tranche ainsi que de ceux dus par M. Dereumaux, seuls concernés par l’octroi des prêts autorisés par le conseil d’administration de PMT du 17 avril 2000, est intervenu les 15 et 30 mai 2000 ; que la souscription et la libération des actions nouvelles émises en représentation de ces augmentations de capital a été, en dépit de ce que soutient l’appelant, régulièrement constatée par le conseil d’administration dans sa réunion du 5 juin 2000, soit postérieurement la libération effective des actions et que cette libération est encore confirmée par l’attestation du Crédit du Nord datée du 29 juin 2000, lequel certifie détenir dans ses livres la somme de 575 000 francs représentant le montant des versements des augmentations de capital en cause ; qu’au vu de ces éléments, il n’importe que les actes de prêts n’aient pas date certaine et soient datés du 25 mai 2000 ;

d’où il suit qu’aucune des souscriptions et libérations d’actions querellées par M. Hermann n’encourent la nullité ;

Sur les demandes reconventionnelles des intimés :

Considérant que la demande de M. Fradier et Mme Pourrastegar-Ducamus que le pacte d’actionnaires et ses avenants doit au regard de ce qui précède recevoir application ;

Considérant que M. Hermann fait encore valoir que, contrairement à l’opinion du tribunal, l’article 1142 du code civil aux termes duquel toute obligation de faire ou de ne pas faire se résout en dommages et intérêts, en cas d’inexécution de la part du débiteur, s’oppose à tout transfert forcé d'actions ;

Mais considérant que dans une promesses de vente, l’obligation du promettant ne demeure une obligation de faire que pour autant que les bénéficiaires n’ont pas déclaré acquérir et levé l'option avant la rétractation du promettant ; que, se bornant à rappeler un principe, l’appelant n’allègue même pas avoir se rétracté son offre avant la levée d’option ; que celle-ci s’est au demeurant matérialisée par l’envoi d’une lettre recommandée AR de MM. Vlieghe et Nasseri en date du 4 mars 2002, lettre qui rappelait la clause 6 du pacte prévoyant la cession par ordre de priorité aux autres « actionnaires salariés », puis aux « actionnaires mandataires », le nombre des actions dans cause et le prix de 107 622,53 euros, au demeurant supérieur à celui résultant de l’application de la clause sus-visée qui conduit à un prix de 4.90 euros l’action alors que le prix proposé s’établit à 5,37 euros ; que cette levée d’option, ratifiée en tant que de besoin par les « actionnaires salariés » dans leurs conclusions déposées devant le tribunal le 29 octobre 2002, étant intervenue avant le refus de M. Hermann de se conformer à sa promesses exprimé par lettre du 12 mars 2002, la vente était parfaite avant la rétractation du promettant et que l’article 1142 du code civil invoquée par l’appelant ne trouve plus matière à s’appliquer ;

que, par ailleurs, le prix des actions proposé par les acquéreurs étant comme rappelé ci-avant supérieur un celui résultant d’une application stricte de la convention, donc favorable à M. Hermann, doit être entériné ;

Considérant que les intimes qui concluent à la confirmation du jugement déféré admettent par là-même que le transfert de propriété a été différé jusqu’en avril 2004 ; qu’ils ne sont en conséquence pas fondés à solliciter le remboursement par M. Hermann des dividendes attachés aux actions en cause afférents à l’exercice 2002 ; que par ailleurs, et en l’état de cette prétention, ils ne sont pas davantage fondés à soutenir que l’appelant a agi abusivement en résistant à la cession et à demander le remboursement des mêmes sommes à titre de dommages et intérêts ;

Sur les autres demandes des parties

Considérant qu’au regard de ce qui vient d’être jugé, la demande de dommages et intérêts présentée par M. Hermann ne peut être accueillie ;

Considérant qu’au soutien de leur propre demande de dommages et intérêts, les actionnaires intimés incriminent le comportement de M. Hermann qui, dépourvu de toute affectio societatis, a multiplié menaces et procédures à leur encontre et provoqué une situation de blocage que le pacte voulait éviter ; que, lors d’une des dernières assemblées générales, il a démontré sa volonté de perturber les débats en adressant à M. Nasseri une liste de 36 questions avec demande d’inscription et de modification de résolutions démontrant ainsi ses intentions perturbatrices ; qu’ils ajoutent que l’accès dont a, selon eux, abusivement bénéficié l’appelant en sa qualité d’actionnaire aux informations relatives à l’entreprise est susceptible de nuire à la société et par conséquent à chacun des actionnaires ;

Mais considérant que les actionnaires intimés ne démontrent pas que les faits qu’ils reprochent à M. Hermann leur ont causé un préjudice ; qu’il n’y a lieu à dommages et intérêts ;

Considérant qu’au vu de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, il y a lieu de condamner M. Hermann à verser aux intimés actionnaires la somme globale de 10 000 euros qui s’ajoutera à celles allouées sur le même fondement par les premiers juges ;

PAR CES MOTIFS

Déclare les conclusions signifiées le 5 septembre 2005 pour M. Hermann recevables.

Déboute M. Hermann de sa demande de nullité du jugement déféré.

Confirme le jugement déféré, sauf sur l’irrecevabilité de l’intention de M. Dereumaux,

Statuant à nouveau de ce chef

Dit l’intervention de M. Dereumaux recevable,

Y ajoutant :

Condamne M. Hermann à verser, au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile, aux associés actionnaires la somme globale de 10 000 euros,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,

Condamne M. Hermann aux Dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.