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Décisions

Cass. com., 17 novembre 2009, n° 08-11.198

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

Mme Orsini

Avocat général :

Mme Batut

Avocats :

Me Balat, Me Foussard

Orléans, du 12 nov. 2007

12 novembre 2007

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y... ont été mis en redressement judiciaire le 28 juin 1995, la procédure étant ultérieurement convertie en liquidation judiciaire, puis clôturée le 2 novembre 2005 pour insuffisance d'actif ; que M. Z..., qui leur avait prêté une certaine somme antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, et dont les débiteurs avaient omis de signaler la créance au représentant des créanciers a recherché leur responsabilité à raison de leur comportement frauduleux ; que le tribunal, accueillant la demande, a condamné M. X... et Mme Y... à payer à M. Z..., à titre de dommages intérêts, l'équivalent de la créance non déclarée ; que la cour d'appel a confirmé le jugement ;

Sur le moyen unique pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que M. X... et Mme Y... font grief à l'arrêt de les avoir condamnés in solidum à verser à M. Z... la somme de 86 173, 38 euros avec intérêt au taux légal alors, selon le moyen :

1° / que la renaissance du droit de poursuite individuelle d'un créancier pour le recouvrement d'une créance ayant son origine antérieurement au jugement d'ouverture est subordonnée à la non-extinction de la créance ; que, partant, même en cas de fraude du débiteur, le créancier qui n'a pas déclaré sa créance et qui n'a pas été relevé de la forclusion ne retrouve pas son droit de poursuite individuelle et ne peut plus agir, pour faire sanctionner la faute du débiteur, que sur le fondement de l'article 1382 pour faire réparer son préjudice ; qu'en décidant le contraire, pour dire qu'en raison de la fraude commise par M. X... et Mme Y..., M. Z... avait recouvré son droit de poursuite individuelle et était fondé à réclamer l'équivalent de sa créance, tandis qu'à défaut d'avoir été déclarée et d'avoir bénéficié d'un relevé de forclusion, sa créance était éteinte, la cour d'appel a violé les articles L. 621 46 et L. 622-32 III du code de commerce, applicables aux faits de l'espèce et 1382 du code civil ;

2° / que seul le préjudice directement causé par la faute du débiteur peut être réparé sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; qu'en cas de procédure collective, l'extinction de la créance résulte du défaut de déclaration et non pas du silence gardé par le débiteur, fût-il fautif ; qu'en accueillant la demande de M. Z... tandis que ce dernier réclamait l'indemnisation du préjudice né de l'extinction de sa créance faute d'avoir été en mesure de la déclarer, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'un créancier n'ayant pas bénéficié de l'avertissement aux créanciers connus d'avoir à déclarer leur créance par suite de son omission de la liste certifiée des créanciers et du montant des dettes, est recevable à agir contre le débiteur, après la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, en réparation du préjudice lié à l'extinction de sa créance sur le fondement de l'article 1382 du code civil, à charge pour lui d'établir que ce dernier a commis une fraude en dissimulant intentionnellement sa dette ;

Et attendu qu'ayant retenu que M. X... et Mme Y... avaient commis une fraude la cour d'appel, se fondant sur l'article 1382 du code civil et abstraction faite de la référence erronée mais surabondante à l'article L. 622-32 du code de commerce, a, à bon droit, accueilli la demande de M. Z... en réparation du préjudice lié à l'extinction de sa créance ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur la troisième branche :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que pour condamner M. X... et Mme Y... à verser à M. Z... une certaine somme à titre de dommages intérêts, l'arrêt retient que le créancier peut réclamer l'équivalent de la totalité de sa créance impayée, et non pas seulement de la portion de sa créance qui aurait été susceptible de lui être réglée dans le cadre de la procédure collective et qu'il importe dès lors peu que M. Z..., simple créancier chirographaire, n'aurait rien perçu, ou seulement une partie de sa créance, s'il avait déclaré celle-ci ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le préjudice lié à l'extinction de la créance ne correspond pas nécessairement au montant de cette créance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges.