CA Paris, 1re ch. H, 13 septembre 2005, n° 2005/04058
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Association pour la défense des actionnaires minoritaires
Défendeur :
Hyparlo (SA), Autorité des Marchés Financiers
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Avoués :
SCP Fisselier-Chiloux-Boulay, SCP Dubosc et Pellerin, SCP Naboudet-Hatet
Avocats :
Me Geniteau, Me Peltier, Me Vergnole, Me Cascas
La société anonyme Hyparlo, dont les actions sont admises aux négociations sur l'eurolist d'Euronext Paris, exploite dans le cadre d'un contrat de franchise 16 hypermarchés à l'enseigne Carrefour, dont 12 en France et 4 en Roumanie.
Cette société, dans laquelle la société Carrefour détient une participation de 20 % en capital et 20,8 % en droits de vote, était contrôlée, jusqu'à l'entrée en vigueur, le 14 janvier 2005, des accords ci-après mentionnés, par les membres de la famille Arlaud (le groupe familial Arlaud) lesquels détenaient, via deux holdings, les sociétés Hofidis et Arlco. 57,8 % du capital d'Hyparlo et 67,2 % des droits de vote. Le groupe familial Arlaud et la société Carrefour agissaient de concert vis-à-vis de la société Hyparlo en vertu d'un pacte d'actionnaires en date du 11 janvier 1999.
Le 24 décembre 2004, le groupe familial Arlaud et la société Carrefour ont conclu un "protocole d'accord" visant à redéfinir certaines modalités de leur collaboration, afin de renforcer leur action de concert, sans pour autant remettre en cause l'équilibre de celle-ci, partant la prédominance des membres de la famille Arlaud au sein de cette action de concert, selon les déclarations des parties figurant dans le préambule de ce protocole.
Aux termes de celui-ci, Carrefour s'engage irrévocablement à acquérir, à compter du 1er janvier 2012 et pendant une durée de trois ans, renouvelable, les actions d'Hofidis II détenues par les membres de la famille Arlaud, à un prix déterminé par un expert financier, à défaut d'accord entre les parties. Il est précisé que "le terme du 1er janvier 2012 sera anticipé en cas de cessation par Gilles Pardi ou Jean-Michel Arlaud de leurs fonctions respectives de dirigeants d'Hofidis II, pour quelque raison que ce soit, et sera fixé à la date de cessation desdites fonctions".
Ce renforcement de l'action de concert - qui s'est inscrit dans une démarche de simplification, par le groupe familial Arlaud, des structures de contrôle d'Hyparlo, obtenue par la fusion des sociétés Hofidis et Arlco, celle-ci étant transformée en une société par actions simplifiée dénommée Hofidis II - s'est traduit notamment par la présence de Carrefour au capital de Hofidis II à hauteur de 50 % du capital et des droits de vote, en raison d'une part de l'apport à Hofidis II de la participation de Carrefour dans la société Bearbull, société tête de groupe des activités d'Hyparlo en Roumanie, et d'autre part d'une acquisition d'actions Hofidis II auprès des membres de la famille Arlaud, la société Hofidis II étant à l'issue de ces opérations détenue à parité, en capital et en droits de vote, par le groupe familial Arlaud et par la société Carrefour.
Les statuts d'Hofidis II, définitivement approuvés lors de l'assemblée générale du 30 décembre 2004, prévoient notamment :
- la nomination de Gilles Pardi comme président et de Jean-Michel Arlaud comme directeur général jusqu'au 31 décembre 2011,
- un conseil de surveillance de 6 à 12 membres, composé paritairement entre le groupe familial Arlaud et Carrefour, ledit conseil devant comprendre plus de la moitié de ses membres pour valablement délibérer et devant statuer à la majorité qualifiée de deux tiers des membres présents ou représentés, aussi longtemps que les actions B ne disposent pas d'un droit de vote double,
- l'attribution à la société Carrefour d'un droit de vote double sur une fraction de sa participation dans Hofidis II (les actions B) :
. soit dès lors que Gilles Pardi ou Jean-Michel Arlaud ne serait plus respectivement président et directeur général de la société, étant toutefois précisé qu'au cas où l'un d'entre eux seulement quitterait ses fonctions, le titulaire des actions B pourra différer l'obtention du droit de vote double à la date de cessation des fonctions de l'autre,
. soit dès lors que la direction générale aurait pris une décision relevant de l'article 10.3 (b) des statuts - analysé ci-après - et sur laquelle le conseil de surveillance n'aurait pas donné un avis positif,
. soit le 31 décembre 2011 si aucun des cas ci-dessus mentionnés ne survient.
La participation directement détenue par Carrefour dans Hyparlo, soit 20 % du capital et 20,8 % des droits de vote, est demeurée inchangée.
Par lettre du 19 janvier 2005, les conseils de la société Carrefour, faisant notamment valoir que l'appréciation de la prédominance d'un concertiste sur un autre ne se réduit pas à la simple constatation d'un niveau de participation et que l'AMF peut prendre en compte des éléments extérieurs à la simple pesée comparative des pourcentages de capital ou de droits de vote et que c'était donc dans les statuts d'Hofidis II qu'il convenait d'analyser le poids relatif de chacun des concertistes, ont demandé à l'AMF de constater, sur le fondement des articles 234-6 1º et 234-3 de son règlement général, qu'il n'y avait pas lieu pour les membres du concert de déposer un projet d'offre publique sur les titres de la société Hyparlo.
Par décision nº 205C0262 en date du 16 février 2005, publiée le 18 février 2005 au Bulletin des annonces légales obligatoires, l'AMF a fait le constat qu'il n'y avait pas matière à déposer, en l'état, un projet d'offre publique sur la base des dispositions réglementaires invoquées par les requérants.
A l'appui de cette décision, l'AMF relève que :
- d'une part, les statuts de la société par actions Hofidis II, dont le capital est détenu à parité par Carrefour et les membres de la famille Arlaud, prévoient que les représentants légaux de celle-ci sont désignés parmi les représentants de ladite famille de manière irrévocable, hormis les cas où Carrefour viendrait à prendre le contrôle de cette société,
- d'autre part, la direction et la gestion effectives du groupe Hyparlo, dont les organes sociaux sont inchangés, continuera à être assurée effectivement par des représentants de cette famille, et qu'ainsi cette dernière demeurera prédominante,
- la prédominance de la famille Arlaud ne pourra être remise en cause que par la prise de contrôle d'Hofidis II par Carrefour lorsque cette dernière en deviendra l'actionnaire majoritaire, soit à compter du 1er janvier 2012, soit avant cette date en cas de départ des dirigeants issus de la famille Arlaud ou de désaccord entre ladite famille et Carrefour, et que cette prise de contrôle aura pour conséquence l'application des dispositions réglementaires relatives au dépôt obligatoire d'un projet d'offre visant les titres Hyparlo,
- en outre, l'évolution du concert formé entre les membres de la famille Arlaud et Carrefour s'inscrit dans le cadre du partenariat commercial noué entre cette dernière et Hyparlo, matérialisé notamment par l'existence d'un contrat de franchise.
La cour ;
Vu le recours régulièrement formé, le 28 février 2005, par l'Association pour la Défense des Actionnaires Minoritaires (l'ADAM) à l'encontre de cette décision ;
Vu le mémoire contenant l'exposé des moyens de la requérante, déposé le 14 mars 2005, dans le délai prévu à l'article 28 du décret nº 2003-1109 du 21 novembre 2003 relatif à l'Autorité des marchés financiers, par lequel la requérante demande à la cour :
- d'annuler la décision déférée,
- de dire en conséquence qu'un projet d'offre publique sur les actions Hyparlo devra être déposé sous astreinte de 10.000 euros par jour,
- de condamner l'AMF aux entiers dépens ;
Vu le mémoire en réplique déposé le 16 mai 2005 par la société Carrefour, tendant au rejet du recours ;
Vu le mémoire en réplique déposé le 16 mai 2005 par M. Robert Arlaud, M. Jean-Michel Arlaud, Mme Catherine Arlaud, M. Olivier Arlaud, M. Dominique Arlaud, la société par actions simplifiée Hofidis II et la société civile Finarlo tendant au rejet du recours ;
Vu le mémoire de l'AMF, déposé le 30 mai 2005, tendant au rejet du recours ;
Vu le mémoire récapitulatif de l'ADAM, déposé le 20 juin 2005 ;
Vu les mémoires "en intervention volontaire" déposés les 20 juin et 24 juin 2005 par M. André Rousseau, par lesquels ce dernier demande à la cour :
- de le recevoir dans son intervention volontaire, en sa qualité d'actionnaire de la société Hyparlo,
- de déclarer qu'en application des articles 234-3-2º et 234-6-1º du Règlement général de l'AMF, la demande de Carrefour visant à bénéficier d'une exception à l'obligation de déposer une offre ne peut prospérer,
- d'annuler, en conséquence, la décision nº nº 205C0262 du 16 février 2005,
- de dire qu'en application de l'article 235-1 du Règlement général de l'AMF un projet de garantie de cours devra être déposé par Carrefour au prix de cession par action Hyparlo, résultant de la prise de contrôle indirect de la SAS Hofidis II ;
Vu le mémoire en duplique déposé le 27 juin 2005 par la société Carrefour ;
Vu les conclusions récapitulatives déposées le 27 juin 2005 par les consorts Arlaud ;
Vu les conclusions de l'AMF, déposées le 27 juin 2005 en réponse à celles déposées par M. Rousseau ;
Vu les conclusions du représentant du ministère public, mises à la disposition des parties avant l'ouverture des débats, tendant au rejet du recours ;
Sur ce :
Sur la recevabilité de l'intervention volontaire de M. Rousseau :
Considérant que M. André Rousseau, se déclarant actionnaire de la société Hyparlo, a déposé au greffe de la cour, les 20 et 24 juin 2005, des écritures intitulées "mémoire en intervention volontaire" aux termes desquelles il entend voir annuler la décision de l'AMF nº 205C0262 du 16 février 2005 et juger qu'il y a lieu à la mise en œuvre par la société Carrefour d'une procédure de garantie de cours "au prix de cession par action Hyparlo, résultant de la prise de contrôle indirecte de la SAS Hofidis II" ;
Considérant cependant que selon l'article 26 du décret nº 2003-1109 du 21 novembre 2003 relatif à l'Autorité des marchés financiers, le délai de recours contre les décisions prises par l'AMF est de dix jours, sauf en matière de sanctions, où il est de deux mois ; que ce délai court pour les personnes qui font l'objet de la décision, à compter de sa notification et, pour les autres personnes intéressées, à compter de sa publication ; que selon l'article 28, lorsque la déclaration de recours ne contient pas l'exposé des moyens invoqués, le demandeur doit déposer cet exposé au greffe de la cour d'appel dans les quinze jours qui suivent le dépôt de la déclaration ; que les pièces et documents justificatifs produits sont remis au greffe en même temps que la déclaration ; que ces textes n'opèrent aucune distinction entre requérants à titre principal et intervenants volontaires ;
Qu'il s'ensuit que, la décision ayant été publiée le 18 février 2005, l'intervention volontaire de M. Rousseau est, comme le relèvent la société Carrefour et les consorts Arlaud, irrecevable ;
Sur le recours de l'Adam :
Sur la légalité externe de la décision déférée :
Considérant que la requérante fait en premier lieu valoir que l'AMF ne pouvait valablement faire le constat qu'il n'y a pas lieu à la mise en œuvre de l'obligation de dépôt d'un projet d'offre publique sur la base de documents à l'état de simple projet et dont rien n'établit qu'ils reflètent les accord intervenus sous leur forme définitive ;
Mais considérant qu'il résulte des éléments soumis à l'appréciation de la cour que les membres du collège de l'AMF ont disposé, lors de la séance du 8 février 2005, de tous les documents pertinents pour se prononcer sur la demande dont ils étaient saisis, observation étant faite que des copies des versions signées des documents transmis le 19 janvier 2005 par les conseils de Carrefour leur ayant été communiquées le 1er février 2005, les services de l'AMF ont été mis en mesure - comme l'est aujourd'hui la cour - de s'assurer qu'il n'existait entre ces pièces et celles constituant le dossier remis aux membres du collège aucune différence propre à exercer une influence sur l'appréciation par ces derniers de leur sens et de leur portée au regard de l'application à l'opération déjà mise en œuvre des dispositions du règlement général de l'AMF ; que le moyen est sans fondement ;
Considérant que l'Adam soutient en second lieu qu'il appartient à l'AMF de justifier de la régularité de la procédure ayant abouti à la décision litigieuse au regard des règles qui régissent son fonctionnement et spécialement des dispositions des articles L.621-4 du Code monétaire et financier et 2 du décret nº 2003-1109 du 21 novembre 2003 ; qu'elle ajoute que ni les pièces du dossier déposé le 4 mars 2005 au greffe de la cour, ni les mentions de la décision déférée, laquelle n'indique pas les noms des membres du collège ayant délibéré le 8 février 2005, ne permettent de contrôler si cette décision a été rendue dans le strict respect du principe d'indépendance et d'impartialité garanti par la Convention européenne des droits de l'homme et l'article L. 621-4 du Code monétaire et financier ;
Mais considérant qu'il résulte du procès-verbal de la séance du 8 février 2005, au cours de laquelle a été délibérée la décision attaquée, que celle-ci a été prise dans le respect des prescriptions des articles L.621-4 du Code monétaire et financier et 2 du décret nº 2003-1109 du 21 novembre 2003 ; qu'en particulier, il n'est justifié d'aucun élément de nature à caractériser une méconnaissance du principe d'impartialité en raison de la participation à cette délibération des deux membres du collège dont les noms sont mentionnés par la requérante ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le bien-fondé de la décision déférée :
Considérant que la société civile Arlco, qui était contrôlée de manière exclusive par le groupe familial Arlaud, s'est transformée, après avoir fusionné avec la société Hofidis, en une société par actions simplifiée dénommée Hofidis II laquelle a pour unique objet la détention d'une participation majoritaire au capital de la société Hyparlo et la réalisation de tout acte lié à cette participation ;
Considérant que l'évolution, voulue par les parties, du concert préexistant entre le groupe familial Arlaud et la société Carrefour a conduit à une répartition égalitaire entre les membres de ce concert du capital et des droits et des droits de vote de la société Hofidis II ; que les personnes, agissant de concert, sont ainsi venues à prendre le contrôle de ladite société dont la participation dans la société cotée Hyparlo constitue la part essentielle de ses actifs ;
Considérant que selon l'article 234-3 du règlement général de l'AMF, lorsque plus du tiers du capital ou des droits de vote d'une société dont les titres de capital sont admis sur un marché réglementé est détenu par une autre société et constitue une part essentielle de ses actifs, l'obligation de déposer un projet d'offre publique visant la totalité du capital et des titres donnant accès au capital s'applique quand un groupe de personnes agissant de concert vient à prendre le contrôle de la société détentrice au sens des textes applicables à cette dernière, sauf si l'une ou plusieurs d'entre elles disposaient déjà de ce contrôle et demeurent prédominantes et, dans ce cas, tant que l'équilibre des participations respectives n'est pas significativement modifié ;
Considérant que la requérante fait valoir qu'une offre publique s'impose, en l'espèce, en application de ces dispositions ;
Considérant que la société Carrefour et les consorts Arlaud répliquent que tel n'est pas le cas dès lors que, conformément à la volonté clairement exprimée par les parties aux accords intervenus à la fin de l'année 2004, l'entrée de Carrefour au capital d'Hofidis II, nouvelle structure de contrôle de la société Hyparlo, n'a pas mis en cause la prédominance de la famille Arlaud dans l'action de concert existant avec Carrefour ; que les consorts Arlaud font valoir que la prédominance du groupe familial Arlaud est assurée dès lors que la direction générale, c'est-à-dire la représentation légale et la direction opérationnelle de la société Hofidis II, a été statutairement confiée à deux de ses membres ; que la société Carrefour souligne, de son côté, que la parité entre le groupe familial Arlaud et Carrefour au capital d'Hofidis II n'est pas incompatible avec le maintien de la prédominance du premier, qu'il y a lieu, en effet, d'analyser les prérogatives des concertistes quant au contrôle effectif de la société Hyparlo, et que dés lors que les dirigeants d'Hyparlo, à savoir Gilles Pardi et Jean-Michel Arlaud, qui font partie du groupe familial Arlaud, sont nommés statutairement, jusqu'au 31 décembre 2011, président et directeur général d'Hofidis II, le groupe familial Arlaud s'est assuré la maîtrise, jusqu'à cette date de la direction d'Hofidis II et donc d'Hyparlo ;
Considérant que s'il appartient à l'AMF, pour apprécier si les conditions de la dérogation à l'obligation de dépôt d'une offre publique prévue par l'article 234-3 de son règlement général sont réunies, de rechercher si, nonobstant la parité observée en l'espèce des participations en capital et en droits de vote, les prérogatives conférées par les parties à ceux des membres du concert qui disposaient du contrôle de la société détentrice de plus du tiers du capital et des droits de vote de la société cotée leur permettent de demeurer prédominants, il résulte du texte susvisé que cette prédominance doit être constatée dans l'exercice du contrôle de la société détentrice ;
Or considérant que selon l'article 9.2 des statuts de la société Hofidis II, le président et le directeur général doivent recueillir l'accord du conseil de surveillance préalablement aux actes et opérations qui y sont énumérés, parmi lesquels toute acquisition ou cession d'action Hyparlo, toute acquisition ou cession d'actifs pour un montant supérieur à 100.000 euros, l'octroi de tous concours financiers comme de toutes sûretés portant sur tout actif de la société, tout recours à l'emprunt ou la délivrance de garanties réelles ou personnelles de quelque nature, y compris de lettres de confort ;
Considérant, surtout, que l'article 10.3 (b) desdits statuts énonce que le conseil de surveillance doit donner son avis, préalablement à toute assemblée d'actionnaires de la société Hyparlo, sur le sens du vote que devra exprimer la société Hofidis II avec les actions qu'elle détient au capital de cette société et qu'aux termes de l'article 13.2, les actions B détenues par la société Carrefour bénéficieront d'un droit de vote double "dès lors que la direction générale aurait pris une décision relevant de l'article 10.3 (b) des présents statuts, sur laquelle le conseil de surveillance n'aurait pas donné un avis positif" ;
Considérant que les limitations ainsi apportées par les statuts aux pouvoirs des dirigeants de la société Hofidis II quant à la gestion de la participation détenue dans Hyparlo, objet même de la société, conjuguées avec les dispositions desdits statuts relatives à la composition, nécessairement paritaire, et aux délibérations du conseil de surveillance, ci-dessus rappelées, ont pour objet et pour effet de donner à la société Carrefour un pouvoir de co-décision pour toutes les décisions prises dans toutes les assemblées générales de la société Hyparlo ;
Et considérant que les défendeurs au recours ne peuvent utilement soutenir que les dirigeants de la société Hofidis II ont la faculté de s'affranchir de ce régime de co-décision dès lors que tout vote émis au nom de la société holding lors d'une assemblée générale d'Hyparlo qui n'aurait pas été précédé d'un avis positif du conseil de surveillance, lequel est subordonné à l'accord de la société Carrefour, emporterait immédiatement l'attribution à celle-ci de droits de vote double pour une partie de ses actions, que Carrefour deviendrait ainsi l'actionnaire majoritaire d'Hofidis II et que ce changement de contrôle au profit de Carrefour impliquerait, comme le rappelle justement la décision déférée, le dépôt obligatoire d'un projet d'offre publique visant les titres Hyparlo, observation étant faite que le coût d'une telle prise de contrôle pour la société Carrefour n'apparaît pas de nature à la dissuader d'user des prérogatives que lui confèrent les statuts d'Hofidis II, alors surtout que le protocole d'accord du 24 décembre 2004 marque clairement sa volonté de réaliser l'intégration totale d'Hyparlo dans son groupe ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les personnes agissant de concert contrôlent conjointement la société Hofidis II, dans des conditions exclusives du maintien de la prédominance du groupe familial Arlaud dans l'exercice de ce contrôle ;
Considérant, en conséquence, que l'AMF n'était pas fondée à faire le constat qu'il n'y a pas matière à déposer, en l'état, un projet d'offre publique visant les actions de la société Hyparlo en application des dispositions de l'article 234-3 de son règlement général et qu'il y a lieu d'annuler la décision déférée, sans qu'il soit besoin d'examiner l'argumentation de la requérante selon laquelle une offre publique s'impose aussi en application de l'article 234-6 du règlement général, ces dispositions étant, au demeurant, en l'état, inapplicables en l'espèce ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 233-10 du Code de commerce, les personnes agissant de concert sont tenues solidairement aux obligations qui leur sont faites par les lois et les règlements ;
Considérant qu'il s'ensuit que l'obligation de déposer un projet d'offre publique visant la totalité du capital et des titres donnant accès au capital ou aux droits de vote de la société Hyparlo, et libellé à des conditions telles qu'il puisse être déclaré recevable par l'AMF - laquelle devra être mise en œuvre dans un délai de trois mois à compter du jour où le présent arrêt deviendra exécutoire, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette obligation d'une astreinte - s'applique à la société Carrefour comme aux membres de la famille Arlaud parties à la présente instance ;
PAR CES MOTIFS,
Déclare l'intervention volontaire de M. André Rousseau irrecevable ;
Annule la décision de l'Autorité des marchés financiers nº 205C0262 du 16 février 2005 ;
Dit qu'un projet d'offre publique visant la totalité du capital et des titres donnant accès au capital ou aux droits de vote de la société Hyparlo, et libellé à des conditions telles qu'il puisse être déclaré recevable par l'Autorité des marchés financiers, devra être déposé par la société Carrefour et/ou par les membres de la famille Arlaud parties à la présente procédure, à savoir M. Robert Arlaud, M. Jean-Michel Arlaud, Mme Catherine Arlaud, M. Olivier Arlaud et M. Dominique Arlaud, et ce dans un délai de trois mois à compter du jour où le présent arrêt deviendra exécutoire ;
Condamne la société Carrefour aux dépens.