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Décisions

Cass. 3e civ., 18 novembre 2009, n° 08-18.029

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lacabarats

Rapporteur :

Mme Nési

Avocat général :

M. Badie

Avocats :

Me Bertrand, Me Foussard, SCP Tiffreau, SCP Waquet, Farge et Hazan

Rennes, du 6 mai 2008

6 mai 2008

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 6 mai 2008), que le 11 octobre 2003, la banque Delubac et compagnie et la société SDBO, aux droits de laquelle ont succédé le CDR créances, puis les sociétés financière Suffren 2 et Accofi conseil courtage crédit (Accofi 3C) ont consenti à la société en nom collectif Eva Charenton (la SNC) un contrat de crédit-bail immobilier, pour laquelle M. Y... s'est porté caution solidaire ; que la SNC a été placée en règlement judiciaire le 6 février 1996 et M. Y... en liquidation judiciaire par arrêt du 22 novembre 1995 ; que la banque Delubac et compagnie et le CDR créances ont déclaré leur créance de loyers et d'indemnité de résiliation qui a été contestée par Mme Z..., ès qualités de mandataire liquidateur de M. Y..., et par ce dernier ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de M. Y..., pris en sa première branche, qui est préalable :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'admettre la créance au passif de la liquidation judiciaire, alors, selon le moyen, que tout justiciable a droit à un procès équitable, ce qui suppose un tribunal objectivement impartial ; qu'en application de ce droit, des juges ne peuvent intervenir dès lors qu'ils ont déjà examiné l'affaire à un titre quelconque ; qu'il ressort de la composition de la cour d'appel que M. le président Yves N... et le conseiller Mme Rosine O... sont déjà intervenus dans deux procédures antérieures visées à l'arrêt du 6 mai 2008, à savoir l'arrêt du 29 novembre 2005 relatif à l'inopposabilité de la forclusion de la banque Delubac et l'arrêt du 4 avril 2006 relatif à l'acceptation de la créance de la banque Delubac au titre des sous-loyers dus par la société Gym Charenton ; qu'ils sont également intervenus dans d'autres procédures à l'encontre des époux Y... ; qu'en se prononçant dans une composition comprenant deux des magistrats qui avaient déjà porté une appréciation sur les faits de l'affaire, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Mais attendu que les débats ayant eu lieu devant une formation collégiale dont la composition pouvait être connue de M. Y... représenté par son avoué, celui-ci n'est pas recevable à invoquer devant la Cour de cassation la violation de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il n'a pas fait usage de la possibilité d'en obtenir le respect en récusant M. N... et Mme O... par application de l'article 341 5° du code de procédure civile et qu'en s'abstenant de le faire avant la clôture des débats, il a ainsi renoncé sans équivoque à s'en prévaloir ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en ses autres branches :

Vu l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble 455 et 458 du code de procédure civile ;

Attendu que pour admettre la créance de la banque Delubac et compagnie et de la société financière Suffren 2, l'arrêt se borne au titre de sa motivation à reproduire sur tous les points en litige les conclusions d'appel de cette banque ;

Qu'en statuant ainsi, par une apparence de motivation pouvant faire peser un doute légitime sur l'impartialité de la juridiction, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal et sur le moyen unique du pourvoi incident de Mme Z... :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.