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Décisions

CA Montpellier, 2e ch., 8 décembre 2015, n° 14/04525

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Interfimo (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bachasson

Conseillers :

M. Bertrand, M. Ferranet

T. com. Montpellier, du 5 juin 2014, n° …

5 juin 2014

FAITS et PROCEDURE - MOYENS et PRETENTIONS DES PARTIES

Mme X, pharmacienne exploitant une officine de pharmacie à Montpellier, a souscrit, dans le cadre de ses activités professionnelles, cinq prêts auprès du Crédit Lyonnais, les 27 mars 1990, 23 août 1990, 30 août 1990, 19 février 1992 et 14 avril 1995.

En garantie de ces prêts, la société Interfimo s'est portée caution au profit du Crédit Lyonnais.

Mme X ayant rencontré des difficultés financières, le Crédit Lyonnais a alors appelé la société Interfimo, laquelle a réglé à compter du mois d'avril 1991 les échéances mensuelles à la place de l'emprunteur, puis, suite au prononcé de la déchéance des prêts, le capital restant dû, en contrepartie de quittances subrogatives.

Mme X ayant été placée en redressement judiciaire le 2 mars 2000, la société Interfimo a déclaré, le 5 mai suivant, une créance de 899 539,86 euros au titre des cinq prêts, créance qui sera définitivement admise le 19 mars 2003 pour le montant déclaré en principal, dont 584 567 euros à titre privilégié.

Dans le cadre de la répartition du prix de cession de l'officine de pharmacie, suite au jugement du 13 décembre 2002 ayant arrêté le plan de cession de Mme X, la société Interfimo a perçu la somme de 220 000 euros à titre de paiement provisionnel autorisé par ordonnance du juge-commissaire du 28 avril 2004.

La procédure collective ayant été clôturée le 20 septembre 2013 pour insuffisance d'actif, la société Interfimo a présenté, le 4 février 2014, une requête au président du tribunal de commerce de Perpignan en vue de la délivrance d'un titre exécutoire lui permettant de reprendre les poursuites à l'encontre de Mme X et de sa condamnation à lui payer la somme de 655 720,55 euros en principal, outre intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2013.

Par ordonnance du 5 juin 2014, il a été fait droit à cette requête.

Mme X a régulièrement interjeté appel de cette ordonnance en vue de son infirmation, demandant à la cour de limiter à la somme de 25 415,06 euros le montant de sa condamnation, de lui octroyer 24 mois de délais de paiement et de lui allouer 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que :

- les prêts numéros 3 et 4 n'ont pas été souscrits pour les besoins de son activité professionnelle de pharmacienne,

- concernant les prêts professionnels numéros 1 et 2, les cautionnements les garantissant ayant été souscrits sous l'empire de la  loi du 25 janvier 1985, laquelle ne prévoyait pas la possibilité pour la caution de reprendre les poursuites contre le débiteur à l'issue du jugement clôturant sa procédure collective pour insuffisance d'actif,

- la demande de la société Interfimo ne peut donc viser que le prêt numéro 5,

- sa situation financière difficile résulte de la clôture pour insuffisance d'actif de sa procédure collective et justifie l'octroi de délais de paiement.

La société Interfimo a conclu à la confirmation de l'ordonnance entreprise, outre la condamnation de Mme X à lui payer 5 000 euros de frais de procédure.

Elle réplique que :

- sa demande est fondée sur les dispositions de l'article L. 643-11 II du code de commerce dont les dispositions sont, aux termes de l'article 191, alinéa 3, de la loi du 26 juillet 2005, applicables aux procédures collectives en cours,

- la date de conclusion des contrats de prêts importe peu,

- elle a régulièrement déclaré sa créance sur la base des quittances subrogatives que lui a délivrées le Crédit Lyonnais.

C'est en cet état que la procédure a été clôturée par  ordonnance du 13 octobre 2015.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que l'article L. 643-11, II et V, du code de commerce - dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 - prévoit que la caution qui a payé au lieu et place du débiteur peut poursuivre celui-ci après le jugement de clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif et que, dans ce cas, lorsque sa créance a été admise, elle ne peut exercer ce droit de poursuite individuelle sans avoir obtenu un titre exécutoire ;

Que l'article R. 643-20 du même code dispose que le créancier dont la créance a été admise et qui recouvre son droit de poursuite individuelle peut obtenir, par ordonnance du président du tribunal rendue sur requête, le titre prévu au V de l'article précité ;

Qu'aux termes de l'alinéa 3 de l'article 191 de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, l'article L. 643-11 du code de commerce est applicable aux procédures de redressement ou de liquidation judiciaire en cours ;

Attendu qu'en l'espèce, la procédure collective de Mme X, ouverte le 2 mars 2000 et clôturée pour insuffisance d'actif le 20 septembre 2013, était en cours lors de l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2006, de la loi précitée ;

Que les dispositions légales et réglementaires susvisées sont donc applicables comme l'a retenu à bon droit le premier juge ;

Attendu que la société Interfimo a déclaré sa créance, fondée sur les quittances subrogatives que lui a délivrées le Crédit Lyonnais suite au paiement, en sa qualité de caution, des sommes dues par Mme X au titre des cinq prêts qu'elle avait souscrits ;

Que cette créance, d'ailleurs non contestée, a été admise par une décision passée en force de chose jugée ;

Que cette décision d'admission assortie de l'autorité de la chose jugée s'impose à Mme X ;

Attendu que la société Interfimo, ayant déclaré sa créance et ne disposant pas de titre exécutoire pour exercer le droit de poursuite individuelle qu'elle a recouvré envers Mme X, c'est à bon droit qu'elle a saisi le premier juge à cette fin et que celui-ci a fait droit à sa demande en condamnant le débiteur à lui payer la somme réclamée, outre intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2013, date du jugement de clôture de la liquidation judiciaire ;

Que l'ordonnance entreprise sera confirmée ;

Attendu qu'il n'y a pas lieu d'accorder des délais de paiement ;

Attendu que l'appelante, qui succombe, sera condamnée à payer à la société Interfimo la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, verra sa propre demande de ce chef rejetée et supportera les dépens ;

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme l'ordonnance entreprise.

Y ajoutant,

Rejette la demande de délais de paiement.

Condamne Mme X à payer à la société Interfimo la somme de mille cinq cents euros (1 500) en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute Mme X de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne Mme X aux dépens d'appel.