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Décisions

CRE, cordis, 2 juillet 2012, n° 03-38-12

COMMISSION DE RÉGULATION DE L'ÉNERGIE

Arrêt

sur le différend qui oppose les sociétés Ardennes Energy et Solareo à la société Électricité Réseau Distribution France (ERDF) relatif aux conditions de raccordement d’une installation de production photovoltaïque au réseau public de distribution d’électricité

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Racine

Rapporteur :

M. Loutoby

Avocats :

Me Coussy, Me Granjon

CRE n° 03-38-12

1 juillet 2012

Le comité de règlement des différends et des sanctions,

Vu la demande de règlement de différend, enregistrée le 14 février 2012, sous le numéro 03-38-12 présentée, d’une part, par la société Ardennes Energy, société à responsabilité limitée, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Sedan sous le numéro B 505 040 824 dont le siège social est situé, 4, route de Sedan, 08200 Wadelincourt, représentée par son responsable légal en exercice, et, d’autre part, par la société Solareo, société par actions simplifiée, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Versailles sous le numéro B 482 089 752, dont le siège social est situé, 3, rue de Verdun, 78590 Noisy Le Roi, représentée par son président, Monsieur Frédéric SCHRAPP, ayant pour avocat Maître Benoît COUSSY, avocat au barreau de Paris, 4, rue de la tour des Dames, 75009 Paris.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo ont saisi le comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie du différend qui les oppose à la société Électricité Réseau Distribution France (ci-après désignée « ERDF »), sur les conditions de raccordement au réseau public de distribution d’électricité d’un projet de centrale photovoltaïque.

Il ressort des pièces du dossier que la société Ardennes Energy développe un projet de centrale photovoltaïque intégrée au bâti, pour une puissance de production installée de 606,06 kWc, sur le territoire de la commune de Wadelincourt (Ardennes). La société ERDF est le gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité sur le territoire de cette commune.

La société Ardennes Energy a mandaté la société Solareo pour l’assister dans le dépôt des demandes de contrat de raccordement et de contrat d’achat auprès de la société ERDF.

Le 31 août 2010, la société Solareo a déposé une demande de raccordement et une demande de contrat d’achat auprès de la société ERDF pour le projet de centrale photovoltaïque.

Le 6 septembre 2010, la société ERDF a accusé réception de la complétude du dossier de la société Ardennes Energy à la date du 31 août 2010.

Le 23 novembre 2010, la société ERDF a communiqué à la société Solareo une convention de raccordement pour le raccordement du projet photovoltaïque sur le réseau public de distribution par une liaison souterraine en HTA, raccordée en coupure d’artère sur le départ « FLOINC0010 " GLAIRE " » du poste source « Floing ». Cette convention de raccordement a évalué le montant des travaux de raccordement à 8.542,10 euros TTC et prévu leur réalisation pour le mois de juin 2011.

Le 3 décembre 2010, la société Solareo a renvoyé un exemplaire signé, le 30 novembre 2010, de la convention de raccordement, ainsi qu’un chèque d’acompte de 4.271,05 euros.

Le 3 janvier 2011, la société ERDF a fait connaître à la société Solareo, que la « proposition technique et financière » de raccordement ainsi que le chèque d’acompte ayant été envoyés le 3 décembre 2010, son projet était concerné par les dispositions du décret du 9 décembre 2010 suspendant l’obligation d’achat de l’électricité produite par certaines installations utilisant l’énergie radiative du soleil.

La société ERDF a également retourné l’acompte et les pièces du dossier de la société Solareo et l’a invitée à faire une autre demande lorsque les nouvelles dispositions d’obligation d’achat seraient connues.

Estimant que les conditions de raccordement au réseau public de distribution de son installation de production n’étaient pas satisfaisantes, la société Ardennes Energy a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions d’une demande de règlement du différend qui l’oppose à la société ERDF.

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Dans leurs observations, les sociétés Ardennes Energy et Solareo estiment qu’à la différence d’une proposition technique et financière, une convention de raccordement définit le tracé, le coût et les délais de raccordement, conformément à l’article 9.1.1 du référentiel technique. Elles considèrent en conséquence que la convention de raccordement n’a pas la nature d’une simple proposition technique et financière qui, en vertu de l’article 4.5 du référentiel technique, peut être sujette à des aléas auxquels la convention de raccordement échappe.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo estiment que la société ERDF est malvenue de lui opposer les dispositions du décret du 9 décembre 2010 lesquelles n’édictent aucune mesure de suspension à l’égard des conventions de raccordement.

Elles considèrent que la convention de raccordement n’est pas concernée par les dispositions du décret du 9 décembre 2010, et doit être exécutée par la société ERDF dès lors qu’elle a été signée avant l’entrée en vigueur dudit décret et l’expiration de son délai de validité de trois mois, tel que défini par les dispositions de l’article 9.1.4 du référentiel technique applicable en l’espèce.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo soutiennent par ailleurs que le délai de dix-huit mois prévu par l’article 4 du décret du 9 décembre 2010 n’a jamais commencé à courir.

Elles ajoutent que le délai d’exécution des travaux nécessaires au raccordement de l’installation doit être fixé en tenant compte d’un délai raisonnable pour raccorder l’installation, et que la durée de la procédure devant le comité de règlement des différends et des sanctions doit suspendre le cours de ce délai.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo demandent, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie :

- d’ordonner à la société ERDF d’exécuter la convention de raccordement signée le 30 novembre 2010 avec la société Ardennes Energy ;

- de fixer le délai imparti à la société ERDF pour exécuter les travaux nécessaires au raccordement de l’installation de production de la société Ardennes Energy et de fixer le délai imparti à cette dernière pour mettre en service son installation de production.

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Vu les observations en défense, enregistrées le 8 mars 2012, présentées par la société Électricité Réseau Distribution France (ERDF), société anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro B 444 608 442, dont le siège social est situé 102, terrasse Boieldieu, 92085 Paris La Défense Cedex, représentée par la présidente du directoire, Madame Michèle BELLON,, et ayant pour avocat, Maître Romain GRANJON, cabinet ADAMAS, 55, boulevard des Brotteaux, 69006 Lyon.

La société ERDF expose  que, par application des dispositions combinées des articles 1 et 5 du décret du 9 décembre 2010, elle était fondée à refuser d’exécuter la convention de raccordement retournée le 3 décembre 2010 et à inviter les sociétés requérantes à déposer une nouvelle demande.

Elle expose que la convention de raccordement, qui n’est juridiquement qu’une simple proposition de convention, est assimilable à une proposition technique et financière au sens de l’article 3 du décret du 9 décembre 2010, et qu’ainsi toute convention non retournée avant le 2 décembre 2010 a fait entrer le projet dans le champ d’application du moratoire.

La société ERDF ajoute que si l’on considère qu’une convention de raccordement n’est pas assimilable à une proposition technique et financière, le projet des sociétés Ardennes Energy et Solareo doit être considéré comme suspendu en application des dispositions de l’article 1er du décret du 9 décembre 2010, dès lors qu’en l’absence de conclusion d’un contrat d’achat d’électricité, son projet ne peut bénéficier des dérogations de ce décret.

Elle fait valoir qu’elle était fondée à assimiler la proposition de raccordement à une proposition technique et financière, dès lors, que par le jeu combiné des articles 4.5 et 9.1.2 de la procédure de traitement des demandes de raccordement ERDF-PRO-RAC_14E, la convention de raccordement vaut offre de raccordement au même titre que la proposition technique et financière, et que, par ailleurs, la notion de proposition technique et financière n’est pas une notion juridique autonome.

La société ERDF relève, en outre, que l’intention des auteurs du décret du 9 décembre 2010 a été d’exclure du champ d’application du moratoire les projets dont les auteurs avaient exprimé par leur signature et le règlement de l’acompte, leur accord sur la proposition technique et financière, et que cet accord se matérialise par l’acceptation d’une proposition technique et financière ou l’adhésion à une convention de raccordement.

Elle fait valoir que seuls les projets dont les auteurs avaient retourné une proposition ou une convention acceptée avant le 2 décembre 2010 pouvaient bénéficier de la dérogation prévue par l’article 3 du décret du 9 décembre 2010, et constate qu’en l’espèce, les sociétés Ardennes Energy et Solareo ont retourné la convention acceptée accompagnée du chèque d’acompte le 3 décembre 2010.

Elle en conclut que les sociétés Ardennes Energy et Solareo ne pouvaient, donc, pas bénéficier de la dérogation prévue par l’article 3 du décret du 9 décembre 2010.

La société ERDF demande, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions de rejeter les demandes des sociétés Ardennes Energy et Solareo.

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Vu les observations en réplique, enregistrées le 10 avril 2012, présentées par les sociétés Ardennes Energy et Solareo.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo observent que la convention de raccordement a été envoyée à la société ERDF avant le 3 décembre 2010.

Elles estiment que la société ERDF n’est pas fondée à refuser d’exécuter la convention de raccordement et à  les inviter à déposer une nouvelle demande de raccordement.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo  ajoutent que la question du contrat d’achat ne relève pas de la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions.

Elles considèrent que le moratoire ne s’applique pas aux producteurs ayant reçu et accepté une convention de raccordement.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo estiment que le décret du 9 décembre 2010 suspend simplement les demandes des producteurs qui n’auraient pas accepté leur proposition technique et financière avant le 2 décembre 2010 et ne sanctionne nullement ceux qui ont accepté une convention de raccordement signée le 30 novembre 2010, date retenue en l’espèce par la société ERDF comme faisant foi.

Elles ajoutent que la date de réception ne doit être prise en compte que pour la proposition technique et financière qui n’est pas en jeu ici.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo soutiennent que la procédure de traitement des demandes de raccordement applicable prévoit que la convention de raccordement est valable trois mois à compter de sa signature, quand bien même celle-ci aurait été signée postérieurement au décret du 9 décembre 2010.

Elles notent qu’en l’espèce, la société ERDF a signé, sans modification ni réserve, la convention de raccordement datée du 30 novembre 2010.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo considèrent, donc, que le courrier de la société ERDF du 3 janvier 2011 refusant d’exécuter la convention de raccordement ne peut s’analyser comme une réserve susceptible de remettre en cause une convention devenue définitive.

Elles soutiennent, enfin, que les notions de proposition technique et financière et de convention de raccordement sont juridiquement distinctes et qu’ une telle convention, une fois signée par le producteur et le gestionnaire de réseau, doit  pleinement recevoir exécution dans les termes arrêtés par les parties.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo persistent dans leurs précédentes conclusions.

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Vu les observations en duplique, enregistrées le 30 avril 2012, présentées par la société ERDF.

La société ERDF indique que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés Ardennes Energy et Solareo, la convention de raccordement a été envoyée le 3 décembre 2010.

Elle considère, par ailleurs, que le décret du 9 décembre 2010 pose un principe selon lequel l’obligation de conclure un contrat d’achat est suspendue pour une durée de trois mois courant à compter de l’entrée en vigueur du décret et aucune nouvelle demande ne peut être déposée durant la période de suspension.

La société ERDF soutient que ce principe est assorti de deux exceptions, la première bénéficiant aux installations dont la puissance crête cumulée par toiture ou parcelle est inférieure ou égale à 3 kW, la seconde concernant les installations dont le producteur a notifié au gestionnaire de réseau, avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau.

Elle estime que le décret du 9 décembre 2010 suspend les demandes de tous les producteurs à compter du 10 décembre 2010, mais octroie, notamment, une exception pour ceux qui justifient avoir adressé leur proposition technique et financière acceptée avant le 2 décembre 2010.

La société ERDF rappelle que les modalités de mise en œuvre de la seconde exception ont été précisées dans une note de la Direction générale de l’énergie et du climat en date du mois de décembre 2010 suivant laquelle le critère de notification de l’acceptation avant le 2 décembre 2010 s’entend de la date d’envoi par le producteur de la proposition signée, résultant notamment du cachet de la Poste figurant sur l’enveloppe postale.

Elle estime que le projet des sociétés Ardennes Energy et Solareo ne rentre dans aucun des cas dérogatoires envisagés par le décret du 9 décembre 2010.

La société ERDF soutient, en conséquence, qu’elle était fondée à demander aux sociétés Ardennes Energy et Solareo de déposer une nouvelle demande de raccordement en application du décret du 9 décembre 2010.

La société ERDF persiste dans ses précédentes conclusions.

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Vu les observations en triplique, enregistrées le 12 juin 2012, présentées par les sociétés Ardennes Energy et Solareo.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo considèrent que la note de la Direction générale de l’énergie et du climat en date de décembre 2010 suivant laquelle le critère de notification de l’acceptation avant le 2 décembre 2010 s’entend de la date d’envoi par le producteur de la proposition signée, est dépourvue de valeur et qu’il est relatif aux propositions techniques et financières et non aux conventions de raccordement.

Elles estiment que la société ERDF a entendu exécuter la convention de raccordement puisqu’elle a bien encaissé le chèque d’acompte.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo ajoutent que le chèque d’acompte de la proposition technique et financière, qui constitue « un acte de formation du contrat », ne saurait être assimilé au chèque accompagnant la convention de raccordement, qui « entre dans le champ de l’exécution de la convention ».

Elles soutiennent enfin qu’un chèque d’acompte n’est pas nécessaire pour que le contrat de raccordement soit formé et qu’« une simple signature de la part de l’exploitant suffit donc ».

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo demandent, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions :

- de constater que la société ERDF a refusé d’exécuter la convention de raccordement alors qu’elle était signée par les deux parties ;

- d’ordonner la poursuite du raccordement pour qu’il soit effectif au plus vite de manière à ne pas être pénalisé par le décret du 9 décembre 2010 ou par d’éventuelles règles à venir qui seraient de nature à perturber l’exécution de la convention de raccordement.

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo persistent dans leurs précédents moyens et conclusions.

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants ;

Vu le décret n° 2000-894 du 11 septembre 2000 modifié, relatif aux procédures applicables devant la Commission de régulation de l’énergie ;

Vu le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010, suspendant l’obligation d’achat de l’électricité produite par certaines installations utilisant l’énergie radiative du soleil ;

Vu la décision du 20 février 2009, relative au règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie ;

Vu la décision du 14 févier 2012 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie, relative à la désignation d’un rapporteur et d’un rapporteur adjoint pour l’instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 03-38-12 ;

Vu la décision du 12 avril 2012 du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie, relative à la prorogation du délai d’instruction de la demande de règlement de différend introduite par les sociétés Ardennes Energy et Solareo;

Vu la décision numéro 344972 et autres du 16 novembre 2011 du Conseil d’État, société Ciel et Terres et autres.

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Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique du comité de règlement des différends et des sanctions, qui s’est tenue le 25 juin 2012, en présence de :

Monsieur Pierre-François RACINE, président du comité de règlement des différends et des sanctions, Madame Dominique GUIRIMAND, Madame Sylvie MANDEL et Monsieur Roland PEYLET, membres du comité de règlement des différends et des sanctions,

Monsieur Olivier BEATRIX, directeur juridique et représentant le directeur général empêché,

Monsieur Jean-Pierre Loutoby, rapporteur et Monsieur Didier LAFFAILLE, rapporteur adjoint, 

Les représentants des sociétés Ardennes Energy et Solareo, assistés de Maître Benoît Coussy,

Les représentants de la société ERDF, assistés de Maître Romain Granjon.

Après avoir entendu :

- le rapport de Monsieur Jean-Pierre LOUTOBY, présentant les moyens et les conclusions des parties ;

- les observations de Maître Benoît COUSSY pour les sociétés Ardennes Energy et Solareo ; les sociétés Ardennes Energy et Solareo persistent dans leurs moyens et conclusions ;

- les observations de Maître Romain GRANJON ; la société ERDF persiste dans ses moyens et conclusions ;

Aucun report de séance n’ayant été sollicité ;

Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré le 2 juillet 2012, après que les parties, le rapporteur, le rapporteur adjoint, le public et les agents des services se sont retirés.

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Sur la validité de la convention de raccordement signée par la société Solareo pour le compte de la société Ardennes Energy

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo soutiennent que l’acceptation d’une convention de raccordement doit échapper aux dispositions du décret du 9 décembre 2010 qui n’édicte pas de suspension d’exécution des conventions de raccordement.

La société ERDF estime, au contraire, que, l’accord sur l’offre de raccordement matérialisé par la convention de raccordement n’ayant été envoyé que le 3 décembre 2010, le projet d’installation de production développé par les sociétés Ardennes Energy et Solareo entre dans le champ d’application dudit décret.

L’article 1er du décret du 9 décembre 2010 dispose que l’« obligation de conclure un contrat d’achat de l’électricité produite par les installations mentionnées au 3° de l’article 2 du décret du 6 décembre 2000 susvisé est suspendue pour une durée de trois mois courant à compter de l’entrée en vigueur du présent décret. Aucune nouvelle demande ne peut être déposée durant la période de suspension ».

L’article 3 du décret du 9 décembre 2010, prévoit que les « dispositions de l’article 1er ne s’appliquent pas aux installations de production d’électricité issue de l’énergie radiative du soleil dont le producteur a notifié au gestionnaire de réseau, avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau ».

Toutefois, à la différence d’une proposition technique et financière, une convention de raccordement définit  le tracé, le coût et les délais de raccordement en application de l’article 9.1.1 de la procédure de traitement des demandes de raccordement applicable en l’espèce. La distinction entre proposition technique et financière et convention de raccordement est d’ailleurs faite à plusieurs reprises dans le texte même de la procédure de traitement. 

Dès lors, la convention de raccordement, quand bien même elle vaudrait, dans certains cas, offre de raccordement, au sens de l’article 9.1.2 de la procédure de traitement des demandes de raccordement en tant qu’elle inclut les éléments devant figurer dans une proposition technique et financière, ne se résume pas à une simple proposition technique et financière mais se situe à un stade contractuel plus avancé. 

Cette convention, qui a été signée par la société ERDF, s'inscrit dans un dispositif contractuel plus complexe par lequel la société ERDF s'engage sur les conditions techniques, juridiques et financières permettant à une installation de production d'être raccordée au réseau public de distribution géré par la société ERDF.

En conséquence, les dispositions précitées de l’article 3 du décret du 9 décembre 2010 ne permettent pas à la société ERDF, quelles qu’en soient les conséquences sur l’obligation d’achat, laquelle soulève une question distincte, de refuser d’exécuter une convention de raccordement signée et notifiée avant le 10 décembre 2010, date d’entrée en vigueur du décret précité.

La lettre de décembre 2010 de la direction générale de l’énergie et du climat se borne à définir quelle est la date à prendre en compte pour apprécier si la notification de la proposition technique et financière est intervenue avant le 2 décembre 2010 et ne peut, donc, être utilement invoquée compte tenu de ce qui précède.

Dans ces conditions, la société ERDF ne pouvait invoquer le décret du 9 décembre 2010 pour refuser d’exécuter la convention de raccordement signée et notifiée par la société Ardennes Energy.

Sur le délai d’exécution des travaux nécessaires au raccordement de l’installation de la société Ardennes Energy 

Les sociétés Ardennes Energy et Solareo considèrent que le délai d’exécution des travaux nécessaires au raccordement de l’installation doit être fixé en tenant compte d’un délai raisonnable pour raccorder l’installation, et que la durée de la procédure devant le comité de règlement des différends et des sanctions doit suspendre le cours de ce délai. 

L’article 4 du décret du 9 décembre 2010 dispose que le « bénéfice de l’obligation d’achat au titre de l’article 3 est subordonné à la mise en service de l’installation dans un délai de dix-huit mois à compter de la notification de l’acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau ou, lorsque cette notification est antérieure de plus de neuf mois à la date d’entrée en vigueur du présent décret, à la mise en service de l’installation dans les neuf mois suivant cette date. Les délais mentionnés au premier alinéa sont prolongés lorsque la mise en service de l’installation est retardée du fait des délais nécessaires à la réalisation des travaux de raccordement et à condition que l’installation ait été achevée dans les délais prévus au premier alinéa ».

Les dispositions de l’article 3 du décret du 9 décembre 2010 n’étant pas opposables aux sociétés Ardennes Energy et Solareo, les dispositions de l’article 4 ne lui sont pas non plus applicables.

La convention de raccordement prévoit que les travaux de raccordement devaient être réalisés pour le mois de juin 2011 soit dans un délai de six mois et deux jours à compter de la date de signature de la convention de raccordement.

Dans ces conditions, il appartiendra à la société ERDF, dès notification de la présente décision, d’exécuter les travaux de raccordement dans le délai de six mois et deux jours que cette convention prévoit.

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DÉCIDE :

Article 1er. – La société Électricité Réseau Distribution France exécutera la convention de raccordement

Article 2. – La société Électricité Réseau Distribution France exécutera les travaux de raccordement dans le délai de six mois et deux jours à compter de la notification de la présente décision.

Article 3. – La présente décision sera notifiée aux sociétés Ardennes Energy et Solareo et à la société Électricité Réseau Distribution France. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française.