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Décisions

CA Nîmes, 4e ch. com., 9 février 2017, n° 15/05316

NÎMES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Banque Populaire Méditerranée (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Codol

Conseillers :

Mme Rochette, Mme Lefeuvre

T. com. Nîmes, du 26 nov. 2015, n° 2015J…

26 novembre 2015

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 1er décembre 2015 par la s.a "Banque C." à l'encontre du jugement prononcé le 26 novembre 2015 par le tribunal de commerce de Nîmes dans l'instance n° 2015 J 47.

Vu les dernières conclusions déposées le 29 novembre 2016 par la Banque Populaire Méditerranée venant aux droits de la s.a 'Banque C.' et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu les dernières conclusions déposées le 26 octobre 2016 par M.V. et M.P., intimés et appelants incidents, et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu l'ordonnance de clôture de la procédure à effet différé au 1er décembre 2016 en date du 27 juillet 2016.

Le 2 mai 2006, la s.a 'Banque C.' a consenti à la s.a.s Château Haut Musiel un prêt de 100'000 € remboursable 24 échéances semestrielles de 5.257,21 euros chacune au taux contractuel de 3,9 %, afin de financer l'aménagement d'un chaix.

Par actes distincts du 30 mai 2006, M.V. et M.P. se sont portés cautions personnelles et solidaires du remboursement de ce prêt à hauteur de 130'000 € couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités de retard.

Dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte à l'égard de la s.a.s Château Haut Musiel par jugement du 29 janvier 2014, la s.a Banque C. a déclaré une créance entre les mains de Me J. par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 17 mars 2014 de la manière suivante :

- prêt 0 300 6897 :

' capital restant dû au 29 janvier 2014 : 43'013,18 euros

' indemnité contractuelle de 5 % :.......... 2 150,65 euros

' intérêt à échoir : ....................................4 309,71 euros

soit un total chirographaire de 49'465,54 euros

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du même jour, elle mettait en demeure les deux cautions d'avoir à lui payer ce montant total.

Le 12 novembre 2014, le juge de l'exécution près le tribunal de Grande instance de Nîmes l'a autorisée à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur un bien appartenant à M. V..

Au visa des dispositions de l'article 215 du décret N° 92'755 du 31 juillet 1992 codifié à l'article R. 511'7 du code des procédures civiles d'exécution et dans le but d'obtenir la validation de cette ordonnance, la s.a 'Banque C.' a, par exploits du 19 et 22 janvier 2015, assigné M.V. et M.P. aux fins d'obtenir leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 49.465,54 euros en demandant également à la juridiction de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure de redressement judiciaire ouverte en faveur de la s.a.s Château Haut Musiel.

Par jugement prononcé le 3 mars 2015, le tribunal de commerce de Nîmes a arrêté le plan de redressement en faveur de la s.a.s Château Haut Musiel et par ordonnance du juge-commissaire en date du 25 novembre 2015, la créance de la Banque Populaire Méditerranée a été admise au passif de la s.a.s Château Haut Musiel à hauteur de 45'163,83 euros.

Par jugement du 26 novembre 2015, le tribunal de commerce de Nîmes a :

- débouté la s.a Banque C. de toutes ses demandes, fins et conclusions

- ordonné la mainlevée de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire prise sur le bien de M.V., sis à [...] cadastré section FK 25, volume 2, lots n° 118,166, 142,143,

- condamné la s.a 'Banque C.' à payer à M.V. et M.P. la somme de 2000 € à chacun d'entre eux à titre de dommages-intérêts,

- condamné la s.a 'Banque C.' à payer à M.V. et M.P. la somme de 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la s.a 'Banque C.' aux dépens de l'instance que le tribunal a liquidés et taxés à la somme de 94,56 euros en ce non compris le coût de la citation introductive d'instance, le coût de la signification de la décision, ainsi que tous autres frais et accessoires

Dans le dernier état de ses conclusions, la Banque Populaire Méditerranée venant aux droits de la s.a 'Banque C.' conclut pour voir :

-dire et juger que du fait de la mesure conservatoire et du plan de redressement, seule l'exécution du titre à obtenir est reportée mais en aucun cas l'obtention d'un titre à l'encontre de M. V.,

-dire et juger qu'elle est fondée à obtenir un jugement de condamnation contre M. V. avant l'exigibilité de sa créance à son égard,

-dire et juger que M. V. est irrecevable à solliciter devant la cour des prétendus dommages intérêts à son encontre pour prise d'une mesure conservatoire, la présente juridiction n'ayant pas compétence pour se prononcer sur une telle demande,

-dire et juger que M. V. n'a pas contesté la mesure conservatoire qui lui a été régulièrement dénoncée,

-dire et juger que M. P. ne peut opposer les dispositions du plan de redressement, et qu'en vertu de son engagement il est tenu des engagements contractuels initiaux du débiteur cautionné,

- en conséquence,

-condamner in solidum M. P. et M. V. à lui payer la somme de 45'163,83 euros en leur qualité de cautions personnelles et solidaires de la s.a.s Château Haut Musiel,

-dire que cette somme sera productive d'intérêts au taux contractuel du prêt soit 3,9 % à compter du 17 mars 2014 jusqu'à règlement intégral,

-condamner in solidum M. P. et M. V. à lui payer la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

-condamner M. V. aux entiers dépens de l'instance en ce compris les frais d'inscription d'hypothèque judiciaire dont distraction au profit de M.H.-B., avocat associé de la selarl V. Associés Avignon

- condamner M. P. aux entiers dépens de l'instance en ce compris les frais d'inscription d'hypothèque judiciaire dont distraction au profit de M.H.-B., avocat associé de la selarl V. Associés Avignon.

M.V. et M.P. forment appel incident pour voir :

-juger la Banque Populaire Méditerranée infondée en sa demande d'indemnité contractuelle de 5 % au visa de l'article 13 du contrat de prêt,

-tenant l'ordonnance du juge commissaire du 25 novembre 2015 admettant la créance de la Banque Populaire Méditerranée à la somme de 45'163,83 euros portant intérêt au taux de 3,90 % et tenant le paiement par l'emprunteur des échéances de juillet 2015, janvier et juillet 2016 à hauteur de 5257,21 euros chacune, réduisant le montant du capital restant dû à ce jour par la banque à la somme de 24'815,66 euros,

-juger qu'à défaut de justifier de la défaillance du débiteur, la Banque Populaire Méditerranée ne dispose à l'encontre des cautions d'aucune créance échue ou à échoir,

-juger qu'à défaut d'avoir prononcé la déchéance du terme antérieurement à l'ouverture de la procédure collective, la Banque Populaire Méditerranée est infondée en sa demande de condamnation de l'intégralité du prêt à leur encontre,

- juger qu'en introduisant la présente instance alors qu'elle ne disposait d'aucune créance échue à l'égard de l'emprunteur et uniquement dans le but de régulariser la mesure conservatoire consistant en une inscription d'hypothèque judiciaire provisoire à l'égard d'une des cautions, la Banque Populaire Méditerranée a commis un abus de droit préjudiciable à leur égard,

-en conséquence, confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la Banque Populaire Méditerranée de ses demandes,

-condamner la Banque Populaire Méditerranée à réparer le préjudice causé par ce comportement déloyal,

-fixé leur préjudice à la somme de 5000 € chacun et condamner la banque à leur payer cette somme à chacun,

-subsidiairement,

- dans l'hypothèse où la cour condamnerait les cautions au paiement des deux échéances impayées au cours de période d'observation,

-leur allouer 24 mois de délai pour s'acquitter de ses deux échéances,

-dans l'hypothèse où la cour condamnerait les cautions au paiement de l'intégralité du prêt,

-juger que cette condamnation ne pourra porter que sur la somme de 24'815,66 euros en l'état du règlement des échéances de juillet 2015, de janvier et juillet 2016 par l'emprunteur,

-juger que l'exécution de la condamnation qui pourrait être prononcée à leur égard sera suspendue au constat d'une défaillance de l'emprunteur par la banque, selon la procédure prévue à l'article 16 du contrat de prêt,

-condamner la banque à leur payer la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Faisant grief au premier juge de l'avoir déboutée aux motifs qu'elle ne détenait aucune créance exigible à l'encontre du débiteur principal en l'absence de déchéance du terme, la Banque Populaire Méditerranée soutient la validité de la procédure en paiement engagée contre M. V. car en vertu des dispositions combinées des articles L. 622'28 et R. 622'26 du code de commerce et R. 511'7 du code des procédures civiles d'exécution, elle avait la possibilité de poursuivre la caution, personne physique, pour prendre une mesure conservatoire et devait la faire valider dans le mois de la prise de la mesure sous peine de caducité, en invoquant les jurisprudences concordantes visant à concilier ces différentes dispositions dont un arrêt de la Cour de cassation en date du 1er mars 2016 publié au bulletin. Elle ajoute que par application de l'article L. 631'20 du code de commerce le plan de redressement ne profite pas à la caution, son action étant seulement suspendue jusqu'au jugement arrêtant le plan de redressement. Elle ajoute enfin que seul, le juge de l'exécution était compétent pour prononcer une mainlevée d'inscription d'hypothèque.

En ce qui concerne M.P., elle soutient que son action est recevable au visa de l'article L. 631'20 du code de commerce, rappelant que l'action régulièrement engagée contre la caution est suspendue par l'effet du jugement d'ouverture du redressement judiciaire du débiteur principal mais qu'elle peut être reprise sans nouvelle assignation après le jugement arrêtant le plan. Sur le fond, elle se prévaut de l'article 16 du contrat et des dispositions du cautionnement pour en conclure que M. P. est tenu des échéances ayant couru et continuant à courir depuis l'ouverture de la procédure judiciaire sans pouvoir se prévaloir du plan de redressement dont les échéances retenues ne correspondent en rien aux échéances contractuellement prévues.

M.P. pose une double question tenant la première à la possibilité pour la banque d'exiger le remboursement de la totalité du prêt alors que celui-ci n'est pas exigible à l'égard de l'emprunteur principal et la seconde étant de savoir à quelle somme, il pourrait être condamné eu égard le défaut de mise en œuvre de la clause du contrat imposant l'envoi d'une mise en demeure à défaut de paiement de la moindre somme, concluant à cet égard à une interprétation des clauses du contrat et du cautionnement dans un sens qui lui soit favorable. Au visa des articles 1134 et 2298 du Code civil, il ajoute que la caution ne pourrait être poursuivie en paiement qu'en cas de défaillance de l'emprunteur principal mais qu'il n'y avait eu en l'espèce aucune défaillance puisque la suspension des paiements par le débiteur principal résultait de l'obligation légale d'ordre public posée par les articles L. 622'7 et L. 622'17 du code du commerce.

M. V. reprend quant à lui ses observations mais ajoute qu'une mesure conservatoire ne peut être prise pour garantir une créance purement hypothétique et que la possibilité d'agir en obtention d'un titre exécutoire pour valider la mesure conservatoire prise antérieurement, nonobstant l'absence d'exigibilité de la créance, doit être limitée à hauteur de la créance que la banque détient à l'égard de l'emprunteur soit en l'occurrence deux échéances impayées faisant en outre valoir qu'à ce jour la totalité de la créance ne s'élève plus qu'à 24'815,66 euros compte tenu du paiement des échéances de juillet 2015, janvier et juillet 2016 et que l'exécution d'une éventuelle condamnation devrait être suspendue au constat d'une défaillance de l'emprunteur selon la procédure prévue par l'article 16 du contrat.

Selon l'article L. 622'28 al.2 et al.3, le jugement d'ouverture suspend jusqu'au jugement arrêtant le plan ou prononce la liquidation toute action contre les personnes physiques co-obligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie et les créanciers bénéficiaires de ces garanties peuvent prendre des mesures conservatoires.

Selon l'article R. 622'26 du même code, les instances et les procédures civiles d'exécution suspendues en application du deuxième alinéa de l'article L. 622'28 sont poursuivies à l'initiative des créanciers bénéficiaires de garantie mentionnée au dernier alinéa de cet article, sur justification du jugement arrêtant le plan, selon les dispositions applicables à l'opposabilité de ce plan à l'égard des garants.

Faisant valoir que la banque n'avait aucune formalité à engager pour sauvegarder une mesure conservatoire le concernant, M. P. ne soutient cependant aucune fin de non-recevoir de l'action dirigée à son encontre au regard de l'interdiction d'agir contre la caution pendant la période d'observation étant rappelé que ce moyen s'analyserait comme une fin de non-recevoir susceptible d'être écartée dès lors que sa cause aurait disparu au moment où le juge a statué.

Or en l'espèce, le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire est du 29 janvier 2014, l'assignation dirigée contre les cautions est du 19 et 22 janvier 2015, le jugement arrêtant le plan de redressement est du 3 mars 2015 et les débats devant les premiers juges ont eu lieu le 22 octobre 2015 de sorte qu'à cette date, la cause d'une éventuelle irrecevabilité avait disparu.

Il est exact qu'aux termes de l'article L. 622-29 du code du commerce, le jugement d'ouverture ne rend pas exigibles les créances non échues à la date de son prononcé et qu'ainsi le maintien du terme à l'égard du débiteur principal profite à la caution, en raison du caractère accessoire du cautionnement.

Il n'est pas discuté en l'espèce qu'aucune déchéance du terme n'a été prononcée à l'égard de l'emprunteur principal ni davantage que deux échéances de remboursement du prêt n'ont pas été réglées par l'emprunteur principal en conséquence de l'interdiction posée à l'article L.622-7 du code de commerce.

Mais l'interdiction de payer toute créance née après le jugement d'ouverture imposée par l'article L. 622'7, répond à l'objectif d'organiser un paiement encadré par la loi de toutes les dettes de l'entreprise en difficulté économique par reconstitution d'une trésorerie et le non-paiement des échéances en conséquence de cette situation s'analyse bien à l'égard de la caution comme une défaillance de l'emprunteur principal.

Et les cautions ne peuvent se prévaloir des dispositions du plan de redressement par application des dispositions de l'article L. 631-20 du code du commerce et en l'occurrence du report en fin de plan des deux échéances impayées ainsi que décidé par le tribunal de commerce ayant arrêté le plan de redressement et d'apurement du passif en faveur de la s.a.s Château Haut Musiez, le 03 mars 2015.

L'action de la banque est donc recevable et fondée

Mais il convient de distinguer à ce stade la situation de M. V. de celle de M. P. puisque la banque a pris sur le premier une mesure conservatoire régie par des dispositions particulières consistant dans une prise d'hypothèque à titre provisoire sur un bien lui appartenant.

Sur la demande en paiement dirigée contre M.V.

Il est constant qu'en vertu de l'article L.622-28 du code de commerce, les créanciers peuvent pratiquer des mesures conservatoires contre les cautions dans les conditions prévues aux articles R. 511'1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution.

Si en vertu de la règle de l'article L. 622'29 précité, le jugement d'ouverture ne rend pas exigibles les créances non échues à la date de son prononcé et si le maintien du terme à l'égard du débiteur principal profite à la caution en raison du caractère accessoire du cautionnement, il reste que :

- par application de l'article 511 du code des procédures civiles d'exécution, le créancier est tenu d'assigner la caution en vue d'obtenir contre elle un titre exécutoire couvrant la totalité des sommes dues ( Cour de cassation com 02 juin 2015 n° 14-10.673).

- par application de l'article L. 631-20 du code du commerce les coobligés et les personnes ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie ne peuvent se prévaloir des dispositions du plan.

Ainsi, le créancier bénéficiaire d'un cautionnement consenti par une personne physique, en garantie de la dette d'un débiteur principal mis en redressement judiciaire, peut prendre des mesures conservatoires sur les biens de la caution et doit, en application des articles R. 511'4 et R. 511'7 du code des procédures civiles d'exécution, introduire dans le mois de leur exécution une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire, à peine de caducité de ces mesures sans que l'obtention d'un tel titre ne soit subordonnée à l'exigibilité de la créance contre la caution.

La Banque Populaire Méditerranée est donc fondée à obtenir à l'encontre de M.V. un jugement de condamnation avant l'exigibilité de sa créance.

Il résulte de ce qui précède que l'action en paiement dirigée contre celui-ci est fondée à concurrence de la somme de 45 163,83 euros correspondant au montant de la créance admise au passif de la s.a.s Château Haut Musiel, emprunteur principal, déduction faite de l'indemnité contractuelle.

Sur la demande en paiement dirigée contre M.P.

Si en vertu de l'article L. 622'29 du même code, le jugement d'ouverture de redressement judiciaire ne rend pas exigibles les créances non échues à la date de son prononcé il n'en demeure pas moins qu'en application de l'article L. 631'20 du code de commerce, les coobligés et les personnes ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie ne peuvent se prévaloir des dispositions du plan.

Il en résulte que l'obligation à paiement de M.P. dépend de l'exigibilité de la dette principale indépendamment des reports du plan et à cet égard, la banque est fondée à lui réclamer le montant admis de sa créance déclarée dans le cadre de la procédure collective ouverte à l'égard de l'emprunteur principal.

L'article 16 du contrat de prêt prévoit effectivement que :

- « toutes les sommes dues en principal, intérêts et accessoires par l'emprunteur deviendront immédiatement et de plein droit exigibles si bon semble à la banque sans l'accomplissement d'aucune formalité, dans tous les cas prévus par la loi et notamment en cas de non-paiement à son échéance de toutes sommes dues et en cas de non-respect des engagements pris au présent acte (...)»

- « la banque pourrait exiger le paiement de toutes les sommes à elle due et ce après un simple avis par lettre recommandée adressé à l'emprunteur au domicile ci-après élu ».

S'il n'est pas discutable que la banque n'a pas mis en œuvre ces dispositions tenant les dispositions de l'article L. 622'29 qui s'imposent à elle, il n'en demeure pas moins que l'acte de cautionnement stipulait quant à lui que la caution était « tenue de payer à la banque ce que doit et devra le débiteur cautionné en principal, intérêts, commissions, frais et accessoires... », la banque pouvant exiger d'elle «le paiement de ce qui lui est dû sans avoir à poursuivre préalablement le débiteur cautionné ni à diviser les poursuites contre chacune des autres cautions ».

Dans les conditions générales du cautionnement, il était également stipulé « en cas de défaillance du débiteur cautionné pour quelque cause que ce soit, la caution sera tenue de payer à la banque ce que lui doit le débiteur cautionné, y compris les sommes devenues exigibles par anticipation »

La caution ayant renoncé au bénéfice de discussion, M. P. ne peut donc pas soutenir l'absence de mise en demeure adressée au débiteur principal, et sans qu'il n'y ait à interpréter les dispositions claires des conventions, il convient de faire droit à son égard à la demande de la banque tendant à l'obtention d'un titre exécutoire à hauteur de la somme de 45'163,83 euros.

Au regard de ce qui précède, M.V. et M.P. seront condamnés solidairement au paiement de cette somme assortie des intérêts au taux contractuel de 3,9 % à compter du 17 mars 2014, dont à déduire les règlements effectués par le débiteur principal dans le cadre de l'exécution du plan de redressement.

Il sera également dit et jugé que l'exécution forcée de la présente condamnation ne pourra être mis en œuvre tant que le plan de redressement sera respecté.

Sur la demande de délais de paiement

L'article L. 622'28 du code de commerce prévoit qu'au terme de la période d'observation après qu'un plan de redressement ait été arrêté, le tribunal peut accorder aux personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie, un délai ou un différé de paiement dans la limite de 2 ans.

Les intimés sollicitent le bénéfice de cette dernière disposition mais force est de constater qu'ils ne justifient nullement de leur situation financière exacte et qu'ils ont de fait bénéficié de délais de paiement

Ils seront déboutés de leur demande de délais de paiement.

Sur l'appel incident

M. V. soutient que la procédure a été engagée uniquement pour valider une mesure conservatoire prise abusivement à hauteur de la totalité du prêt dont la déchéance n'a pas été prononcée relevant encore que le certificat de non contestation dressé par le greffier du juge de l'exécution le 25 avril 2016 est erroné car faisant état d'une dénonciation de l'ordonnance autorisant l'inscription d'hypothèque judiciaire en date du 19 janvier 2016 alors que la dénonce de l'ordonnance correspondante est intervenue le 19 janvier 2015. Or en matière d'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire, la demande de mainlevée peut être faite jusqu'à la publicité définitive par application des articles L. 512 '1 et R. 512 '1 du code des procédures civiles d'exécution dès lors que le créancier ne dispose pas de titre exécutoire. Il fait aussi grief à la banque de demander à son encontre une condamnation pleine et entière alors qu'elle ne conteste pas les jurisprudences invoquées posant le principe de la suspension des effets du titre exécutoire dont elle poursuit l'obtention, dans le seul but de mettre en œuvre les dispositions de l'article 533'4 du code des procédures civiles d'exécution permettant de convertir l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire en inscription définitive. M. P. soutient quant à lui un préjudice résultant du fait d'avoir été assigné à même temps que M. V..

La banque répond que la procédure de mesure conservatoire de créances a été soumise à l'autorisation du juge de l'exécution qu'elle a obtenue et que l'inscription d'hypothèque provisoire a été régulièrement dénoncée à M. V. qui n'a exercé aucun recours contre cette dernière, rappelant également qu'en vertu de l'article L. 213'6 du code de l'organisation judiciaire, la cour d'appel n'a pas compétence pour se prononcer sur la contestation d'une mesure conservatoire et encore sur un prétendu abus de saisie.

Si l'article L.213-6 du code de l'organisation judiciaire donne compétence au juge de l'exécution pour autoriser les mesures conservatoires et connaître des contestations relatives à leur mise en oeuvre ou encore des demandes en réparation fondées sur l'exécution ou l'inexécution dommageables des mesures d'exécution forcée ou des mesures conservatoires, il reste que le juge saisi au fond a compétence pour ordonner la radiation d'une mesure conservatoire lorsqu'il a examiné la créance qui fondait le nantissement provisoire.

Le tribunal de commerce a donc à bon droit examiné cette demande

Si le droit pour un créancier de pratiquer une mesure conservatoire n'est pas discrétionnaire, il n'en demeure pas moins que l'engagement d'une telle mesure n'était pas en l'occurrence abusive dès lors que le principe de la créance n'était pas discutable et que les difficultés économiques de l'emprunteur principal pouvaient laisser craindre un non-remboursement. La procédure engagée par la Banque Populaire Méditerranée pour obtenir une garantie supplémentaire au paiement effectif de sa créance non discutée dans son quantum n'est donc pas abusive et la demande en dommages-intérêts sera rejetée

Par ailleurs, le droit d'agir en justice ne dégénère en abus de droit que s'il révèle une faute. La preuve de cette faute n'est pas rapportée et M.P. qui ne démontre pas davantage l'existence d'un préjudice . Il sera débouté de cette demande

Sur les frais de l'instance :

M.V. et M.P. qui succombent, devront supporter les dépens de première instance et d'appel sans application de l'article 700 du code de procédure civile au regard de l'équité

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions

Dit que l'action de la Banque Populaire Méditerranée est recevable

Condamne solidairement M.V. et M.P. à payer à la Banque Populaire Méditerranée la somme de 45'163,83 euros avec intérêts au taux contractuel de 3,9 % à compter du 17 mars 2014 sur laquelle seront déduits les versements effectués par le débiteur principal dans le cadre de l'exécution du plan de redressement.

Dit l'exécution forcée de la présente condamnation sera suspendue à l'égard de M. V. et M. P. tant que le plan de redressement sera respecté

Dit qu'en cas de non-respect du plan par le débiteur principal, la Banque Populaire Méditerranée pourra reprendre l'exécution forcée de cette condamnation dont à déduire les règlements effectués par le débiteur principal.

Déboute M.V. et M.P. de leurs demandes de délais de paiement et en dommages-intérêts

Déboute la Banque Populaire Méditerranée de ses demandes plus amples ou contraires

Dit que M.V. et M.P. supporteront solidairement les dépens de première instance et d'appel.

Dit que Me H.-B. avocat associé de la selarl V. Associés Avignon pourra recouvrer directement contre la partie ci-dessus condamnée, ceux des dépens dont elle aura fait l'avance sans en recevoir provision, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.