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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 8, 6 novembre 2018, n° 18/04962

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

SCP BTSG

Défendeur :

La Société Générale (SA), CIC Est (SA), Paris Keller (SCI), Manger (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Hebert-Pageot

Conseillers :

M. Bedouet, Mme Texier

T. com. Paris, du 7 nov. 2017, n° 201704…

7 novembre 2017

FAITS ET PROCÉDURE

La SAS Manger a été mise en redressement judiciaire le 25 février 2015 puis en liquidation judiciaire le 21 juillet 2015, la SCP BTSG étant désignée liquidateur.

Par décisions du 22 mars 2016, le juge-commissaire a admis au passif les créances déclarées par la Société Générale, à titre chirographaire pour 70 967,99 euros et à titre privilégié, à raison d'un nantissement consenti par la société Manger sur son fonds de commerce, pour 346 063,76 euros, outre les intérêts contractuels.

Par ordonnance du 9 novembre 2015, le juge-commissaire a autorisé le liquidateur à céder le fonds de commerce pour un prix de 579 323 euros.

Se prévalant d'un nantissement sur le fonds de commerce, la Société Générale, par requête du 24 mai 2017, a demandé le paiement provisionnel de sa créance à hauteur de 343 063,76 euros sur le fondement de l'article L. 643-3 du code de commerce.

Après avoir retenu que, selon le rapport du liquidateur, la créance de la Société Générale ne venait pas en rang utile dans la répartition des fonds, le juge-commissaire a rejeté cette demande par ordonnance du 12 juillet 2017.

Statuant sur le recours formé par la Société Générale contre cette ordonnance, le tribunal de commerce de Paris, par jugement du 7 novembre 2017 a infirmé celle-ci au motif que le courrier du liquidateur du 22 juin 2017 n'était pas suffisamment précis sur l'affectation de la somme encaissée au titre de la vente du fonds de commerce.

Le liquidateur a relevé appel du jugement par déclaration du 7 mars 2018 en intimant la Société Générale, le CIC Est, la SCI Paris Keller et la SAS Manger.

Dans ses conclusions signifiées le 17 avril 2018, le liquidateur demande à la cour d'infirmer le jugement, de rejeter la demande de la Société Générale et de condamner cette dernière à lui payer 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Dans ses conclusions signifiées le 23 mai 2018, la Société Générale demande à la cour :

- de confirmer le jugement,

- à titre subsidiaire, en cas d'infirmation, d'ordonner que lui soit payée, à titre provisionnel, la somme de 12 439,57 euros ;

- de rejeter les demandes du liquidateur ;

- de condamner le liquidateur à lui payer 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens dont distraction au profit de la SELARL 2H Avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

Intimées, les sociétés CIC Est, Paris Keller et Manger, auxquelles la déclaration d'appel a été signifiée, pour la première par acte d'huissier du 23 mars 2018 remis à une personne habilitée et, pour les deux autres, par actes d'huissier délivrés le 26 mars 2018 selon les modalités prévues par l'article 659 du code de procédure civile, n'ont pas constitué avocat.

SUR CE

Au soutien de sa demande de confirmation du jugement et, à titre subsidiaire, de paiement d'une somme de 12 439,57 euros, fondée sur l'article L. 643-3 du code de commerce, la Société Générale fait valoir que le liquidateur n'a justifié de l'affectation du produit de la vente du fonds de commerce qu'en cause d'appel et fait état d'un solde résiduel de 12 439,59 euros.

Le liquidateur réplique que la créance de la Société Générale ne vient pas en rang utile dans la répartition des fonds et que la demande de paiement provisionnel doit, en conséquence, être rejetée.

Le jugement dont appel, qui se borne à infirmer l'ordonnance et, partant, ne statue pas sur la demande de la Société Générale, ne peut qu'être infirmé.

L'article L. 643-3, alinéas 1 et 2, du code de commerce, dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er janvier 2014, dispose : « Le juge-commissaire peut, d'office ou à la demande du liquidateur ou d'un créancier, ordonner le paiement à titre provisionnel d'une quote-part d'une créance définitivement admise. / Ce paiement provisionnel peut être subordonné à la présentation par son bénéficiaire d'une garantie émanant d'un établissement de crédit ou d'une société de financement. »

Les créances de la Société Générale ont fait l'objet de décisions d'admission sans contestation du juge-commissaire le 22 mars 2016 et figurent sur le récapitulatif des créances établies par le liquidateur comme ayant été admises à titre définitif.

La condition tenant à l'admission définitive de la créance prévue par l'article L. 643-3, alinéa 1, du code de commerce est donc remplie.

En outre, il ressort du décompte produit par le liquidateur que l'actif net disponible, correspondant à l'actif recouvré (608 464,53 euros) sous déduction des sommes prélevées (272 233,71 euros), s'élève à 336 230,22 euros et que les créances à payer par priorité à la créance privilégiée de la Société Générale représentent une somme de 323 781,25 euros, ce qui laisse subsister un solde de 12 449,57 euros (et non de 12 439,57 euros comme indiqué par erreur dans les écritures du liquidateur).

Il y a donc lieu d'accueillir la demande formulée à titre subsidiaire par la Société Générale tendant à obtenir le paiement, à titre provisionnel, d'une somme de 12 439,57 euros.

Chaque partie, qui succombe partiellement, conservera la charge de ses propres dépens et les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement,

Statuant à nouveau,

ORDONNE le paiement à titre provisionnel, par la SCP BTSG, en qualité de liquidateur de la SAS Manger, à la Société Générale, de la somme de 12 439,57 euros,

REJETTE les demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens.