CA Aix-en-Provence, 8e ch. C, 29 mars 2018, n° 17/18427
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Sim Investissements (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ponsot
Conseillers :
Mme Cesaro-Pautrot, Mme Demarbaix
Vu l'ordonnance du président du tribunal de commerce de Nice du 5 octobre 2017 ayant, notamment, rejeté la requête présentée par M. Georges B. et la société SIM Investissements ;
Vu la déclaration du 11 octobre 2017, par laquelle M. Georges B. et la société SIM Investissements ont relevé appel de cette décision ;
Vu les uniques conclusions notifiées le 22 novembre 2017, aux termes desquelles M. Georges B. et la société SIM Investissements demandent à la cour de :
- les recevoir en leurs demandes, fins et conclusions et les y dire bien fondés,
Y faisant droit,
- ordonner la réformation de l'ordonnance entrepris,
- ordonner en conséquence la désignation de tel mandataire ad'hoc avec pour mission de convoquer l'assemblée générale de la société CLV destinée à statuer sur l'approbation des comptes de l'exercice 2016, et sur toute question que les associés demanderont de porter à l'odre du jour,
- dire et juger que la société CLV devra leur verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dire et juger que les entiers dépens seront supportés par la société CLV, dont distraction ;
Vu les uniques conclusions notifiées le 16 janvier 2018, aux termes desquelles la SAS CLV demande à la cour de :
- constater que les appelants n'invoquent aucun du droit au soutien de leur prétention,
- constater que le président du tribunal de commerce de Nice a ordonné la prorogation du délai pour réunir l'assemblée générale des associés de la SAS CLV appelé à statuer sur les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2016,
- déclarer irrecevable l'ensemble des prétentions adverses,
- condamner M. B. et la société SIM Investissements à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction ;
SUR CE, LA COUR,
Attendu qu'il sera rappelé que la société CLV, société par action simplifiée, détient un certain nombre de participations dans des sociétés civiles et commerciales ; qu'elle est elle-même détenue très majoritairement par Mme Karine Z., son ex-époux, M. B. n'y détenant, directement ou indirectement, via la société SIM Investissements, que des intérêts minoritaires ; qu'un conflit oppose les associés, ayant conduit à la désignation de Me Nathalie T., en qualité d'administrateur provisoire, par ordonnance de référé du président du tribunal de commerce de Cannes du 17 octobre 2013, confirmé par arrêt de la cour du 22 mai 2014 ;
Que par requête du 17 septembre 2017, M. B. et la société SIM Investissements ont saisi le président du tribunal de commerce de Nice, lieu du siège social et d'immatriculation de la société CLV, d'une demande tendant à la désignation d'un commissaire aux comptes, en remplacement du précédent, dont le mandat était venu à échéance, et à la désignation d'un mandataire ad'hoc, en remplacement de MeT. (sic), afin de convoquer l'assemblée générale ordinaire de la société CLV, appelée à statuer sur les comptes de l'exercice, outre, diverses questions devant être inscrites à l'ordre du jour ;
Que par l'ordonnance entreprise, le président du tribunal de commerce de Nice a rejeté la requête au motif, d'une part, que par ordonnance en date du 4 octobre 2017, il avait procédé, sur requête de Me T., à la désignation d'un commissaire aux comptes, et, d'autre part, qu'au regard de la complexité du dossier et des multiples procédures, il convenait de ne pas procéder au remplacement de Me T. ;
Attendu qu'au soutien de leur appel, M. B. et la société SIM Investissements s'étonnent en premier lieu de constater une inversion dans la suite chronologique des numéros de rôle attribués aux ordonnances rendues, respectivement le 4 et 5 octobre 2017, et s'étonnent également de la date de la requête censée avoir été déposée par Me T. le 16 août 2017, laissant présumer, selon eux, que l'ordonnance du 4 octobre 2017 aurait été antidatée ; qu'ils en tirent la conséquence que l'ordonnance entreprise du 5 octobre 2017 apparaît contestable en ce qu'elle a motivé le rejet de la demande de désignation d'un commissaire aux comptes par référence à la désignation, prétendument la veille, d'un commissaire aux comptes sur le fondement d'une requête antidatée ;
Qu'ils soutiennent également que l'ordonnance du 4 octobre 2017 serait irrégulière, en ce que la désignation d'un commissaire aux comptes ne pourrait intervenir qu'aux termes d'une procédure contentieuse, le représentant ayant été dûment appelé ;
Qu'en second lieu, ils contestent le refus de désignation d'un mandataire ad'hoc, au motif qualifié de dénaturant, qu'il s'agirait d'une demande de changement de l'administrateur provisoire, ce qui n'est pas le cas ; qu'ils constatent que l'obligation de convocation de l'assemblée générale actuelle, incombant aux dirigeants de la société et, au cas d'espèce, à l'administrateur provisoire, n'a jamais été respectée, malgré leurs demandes expresses ;
Qu'en réponse, la SAS CLV soulève tout d'abord l'irrecevabilité des demandes au motif qu'aucun fondement juridique ne serait invoqué ; qu'elle rappelle les dispositions de l'article 15 du code de procédure civile imposant aux parties de produire les moyens de droits qu'elles invoquent afin que chaque partie soit à même d'organiser sa défense ; qu'en l'espèce, aucun fondement à la désignation d'un mandataire ad'hoc pour convoquer une assemblée générale de ses actionnaires n'est invoqué ; qu'il n'est pas justifié de la possibilité qu'une telle demande puisse être présentée par voie d'une simple requête ; que le seul texte invoqué, à savoir l'article L. 823-4 du code de commerce, ne concerne pas la désignation d'un mandataire ad'hoc en vue de convoquer une assemblée générale d'actionnaire ;
Que la SAS CLV fait ensuite valoir que les demandes seraient irrecevables, dès lors que par des ordonnances successives des 4 juillet 2017 et 27 décembre 2017, le président du tribunal de commerce de Nice a, à la requête de l'administrateur provisoire, ordonné la prolongation du délai pour réunir une assemblée générale des actionnaires de la société ; qu'ainsi, l'absence de réunion de l'assemblée des actionnaires ne résulte pas d'un défaut de diligence de l'administrateur provisoire ;
Qu'elle relève, en outre, qu'en l'absence de désignation d'un commissaire aux comptes, les délibérations de l'assemblée générale encourent la nullité, ainsi qu'il résulte de l'article L. 820-3-1 du code de commerce ; que pourtant, M. B. et la société SIM Investissements ont sollicité la rétractation de l'ordonnance du 4 octobre 2017 ayant désigné un commissaire aux comptes à la requête de l'administrateur provisoire, ayant, parallèlement, sollicité en référé la désignation d'un commissaire aux comptes ; que, dès lors, rien ne justifie d'un point de vue factuel que soit réunie en urgence une assemblée dont les délibérations encourent, en l'état, la nullité ; qu'au surplus, le différend opposant actuellement les actionnaires sur la répartition du capital fait que, de toute façon, l'assemblée générale ne pourra pas, selon elle, délibérer ;
Attendu, en premier lieu, que c'est en vain que la société CLV invoque l'article 15 du code de procédure civile, ce texte n'imposant aux parties que de se faire mutuellement connaître, en temps utile, les moyens de droits qu'elles invoquent ; qu'il appartient au juge, en application de l'article 12 du même code, de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, le cas échéant en l'absence de toute précision sur le fondement de la demande ;
Qu'en l'espèce, les demandes présentées par les appelants reposent sur un raisonnement juridique qui, peu important qu'il ne vise pas expressément les textes de loi applicables, n'en a pas moins été formulé en des termes permettant à la société intimée, qui a disposé du temps nécessaire pour préparer sa défense, d'y répliquer ; que le moyen sera écarté ;
Attendu, en deuxième lieu, que la cour n'étant pas, dans le cadre du présent appel, saisie d'un recours formé à l'encontre de l'ordonnance du 4 octobre 2017 désignant un commissaire aux comptes, les critiques adressées à cette décision par les appelants sont inopérantes ; que la cour ne peut que constater qu'en l'état, un commissaire aux comptes a été désigné, ce qui prive d'objet l'appel formé contre l'ordonnance déférée du 5 octobre 2017, en ce qu'elle a rejeté la demande de désignation d'un commissaire aux comptes ; que l'ordonnance sera confirmée de ce chef ;
Attendu, en troisième lieu, qu'en application de l'article L. 225-103, 2°, du code de commerce, applicable aux SAS par renvoi de l'article L. 227-1 dudit code, l'assemblée générale des actionnaires peut être convoquée par un mandataire, désigné en justice, à la demande, soit de tout intéressé en cas d'urgence, soit d'un ou plusieurs actionnaires réunissant au moins 5 % du capital ; qu'il n'est pas sérieusement contesté que les parts détenues par la société SIM Investissement et M. Georges B. représentent plus de 5 % du capital de la société, Mme Z. détenant 152.652 actions de catégorie A, la société SIM Investissement 18.000 actions de catégorie B, et M. B. 1 action de catégorie B et 80.647 actions de catégorie A, selon le procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire du 23 décembre 2016 produit aux débats par la société CLV ; que par suite, la demande de désignation d'un mandataire ad'hoc n'est pas soumise à la condition d'urgence ;
Que pour autant, la convocation d'un mandataire ad'hoc pour convoquer une assemblée générale de actionnaires n'apparaît pas justifiée en l'état des prolongations de délai accordées par le président du tribunal de commerce de Nice, et notamment l'ordonnance du 27 décembre 2017 prolongeant jusqu'au 30 juin 2018 le délai de convocation de l'assemblée générale ordinaire des actionnaires appelée à statuer sur les comptes de l'exercice clos au 31 décembre 2016 ;
Que l'ordonnance déférée sera confirmée ;
Attendu que M. B. et la société SIM Investissements, qui succombent dans leur appel, seront condamnés aux dépens ;
Que l'équité justifie d'accorder à la SAS SLV une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
CONFIRME en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise ;
Y AJOUTANT
- CONDAMNE M. Georges B. et la SA SIM Investissements à payer à la SAS CLV la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toute autre demande des parties,
CONDAMNE solidairement M. Georges B. et la SA SIM Investissements aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.