CA Douai, 2e ch. sect. 2, 28 avril 2016, n° 14/07776
DOUAI
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Fontaine
Conseillers :
Mme Andre, Mme Cordier
FAITS ET PROCEDURE
La SAS Embassy, créée en 1986, avait pour activité la fabrication et le commerce de produits textiles et, à l'origine spécialisée dans la fabrication de vêtements d'image pour des enseignes de la grande distribution, s'est ensuite développée en distribuant aussi des produits textiles 'sous licence'.
Elle a embauché M. D., en 1998, en qualité de 'commercial'.
À compter de 2002, Embassy est devenue distributeur exclusif de la société de droit allemand United labels AG (UL.AG) et de sa filiale United labels France, la deuxième étant 'licenciée Disney' pour l'Allemagne, l'Autriche, la Suisse et la Pologne.
En 2004, Embassy a conclu avec la société Amistyle, créée en 1996 par M. D., un contrat d'agent commercial et un contrat de prestations de service.
La société Montesquieu finances, présidée par M. B., était l'associée unique d'Embassy.
Le capital social de Montesquieu finances était détenu par UL.AG à 45%, par M. D. à 30%, par M. D. (ancien dirigeant) à 20% et par la société Amistyle à 5%.
M. D. est devenu président de la SAS Embassy, sans rémunération, à compter du 9 juillet 2008.
Un différend est survenu en mai 2012 entre la société UL.AG et la société Disney au sujet de l'exploitation de la licence Disney, à la suite d'une saisie en douane de produits Disney importés et vendus -prétendument à leur insu - par une société française Unimode, qui se serait vu accorder ce droit de distribution par la société Embassy.
Sur demande de M. D., en date du 18 juillet 2012, le tribunal de commerce de Lille Métropole a ouvert la procédure de sauvegarde de la société Embassy le 24 juillet 2012.
Le 25 juillet 2012, la société Montesquieu finances a révoqué M. D. de son mandat de président et l'a remplacé par M. F..
La procédure collective de la société Embassy a été convertie en redressement judiciaire le 30 avril 2013 puis en liquidation judiciaire le 25 juin 2013.
Une procédure de liquidation judiciaire simplifiée a été ouverte à l'égard de Montesquieu finances par jugement du 21 mai 2013.
Soutenant que sa révocation était intervenue de façon brutale, abusive et vexatoire, M. D. a, le 17 décembre 2013, assigné la SELURL D., ès qualités de liquidateur des sociétés Embassy et Montesquieu finances, devant le tribunal de commerce de Lille Métropole, en paiement de 150 000 euros de dommages et intérêts.
Le 17 mai 2014, M. B. a été assigné en intervention forcée aux fins de condamnation solidaire.
Le jugement du 12 novembre 2014 :
- déboute M. D. de ses demandes,
- le condamne à payer 'respectivement' à la SELURL D., ès-qualités de liquidateur des sociétés Embassy et Montesquieu Finances, et à M. B. la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
M. D. a formé un appel (total) le 23 décembre 2014.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses conclusions récapitulatives signifiées par voie électronique le 19 janvier 2016, M. D. demande à la cour de :
- infirmer le jugement,
- en conséquence,
- constater que la révocation ad nutum a été décidée brutalement sans respect du principe de la contradiction,
- constater que sa révocation repose sur des motifs fallacieux, est intervenue dans des circonstances vexatoires et malveillantes,
- dire qu'elle est abusive,
- en conséquence,
- condamner solidairement la SAS Embassy, représentée par son liquidateur judiciaire, la SELURL D., M. B. et la SELURL D., ès-qualités de liquidateur de Montesquieu finances, à lui payer une somme de 150 000 euros à titre de dommages et intérêts,
- condamner les mêmes à lui payer 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il expose que, selon l'article 13 des statuts de la SAS Embassy, la révocation du président et, le cas échéant, d'un directeur général, peut intervenir par décision des actionnaires à tout moment sans préavis et sans motif ; qu'il est cependant de jurisprudence constante que 'la liberté de révocation des dirigeants et mandataires sociaux trouve ses limites dans le caractère abusif de la résiliation, eu égard aux circonstances' ; que, notamment, le principe du contradictoire impose que le dirigeant soit informé que sa révocation est envisagée, afin qu'il puisse s'expliquer et présenter ses observations ; qu'une révocation doit servir l'intérêt collectif, social, et non des intérêts ou désirs individuels ou catégoriels.
Il soutient que l'associé unique de la société Embassy ne l'a jamais informé de son intention et des motifs de la révocation envisagée ; qu'elle n'était pas prévue à l'ordre du jour de l'assemblée générale du 25 juillet 2012 et a fait suite à son refus de démissionner ; qu'il a su, par le seul procès-verbal de cette réunion, que lui était reprochée 'l'absence de toute information et concertation préalable préalable à sa demande - jugée prématurée - d'ouverture d'une procédure de sauvegarde ; que ce motif était fallacieux, puisque le dépôt d'une telle demande relève des pouvoirs du président et qu'en l'espèce la mise sous sauvegarde judiciaire était justifiée ; qu'il craignait en effet une perte de chiffre d'affaires de près de 3 millions d'euros, le contrat de licence Disney n'ayant pas été reconduit.
Il ajoute que, selon les intimés, il n'aurait pas déclaré toutes les ventes Disney de son client Unimode (dont les marchandises ont été bloquées en douane) ce qui aurait été à l'origine de la résiliation du contrat par Disney ; que les mails adressés par United labels démontrent la fausseté de ces allégations ; qu'en outre, il avait préalablement informé l'associé unique (Montesquieu finances) de son intention ; que ni elle ni les associés de celle-ci n'avait contesté son initiative.
Il invite la cour à 'apprécier l'intérêt de l'associée majoritaire de Montesquieu finances (United labels, également dirigée par M. B.) quant à la survie de la société Embassy', en indiquant que, le jour-même où il s'entretenait avec M. B. sur la procédure de sauvegarde (le 17 juillet 2012), United labels mettait Embassy en demeure de lui régler sans délai les encours dus pour un montant total de 579 771, 90 euros, au plus tard le 20 juillet suivant ; que l'intention de United labels AG. et M. B. de vider Embassy de toute sa substance s'est confirmée par la suite, puisqu'ils ont proposé que les commandes passées par elle soient transférées à d'autres 'entités'.
Il prétend également que l'intention de lui nuire se manifeste par le fait que, le jour de sa révocation, le nouveau président de la société Embassy s'est empressé de notifier à la société Amistyle (dont lui-même est le gérant) la rupture du contrat de prestations de services du 8 novembre 2004 puis de l'assigner devant le tribunal de commerce en résolution judiciaire et en paiement de 861 120 euros, refusant aussi de verser les commissions qui lui étaient dues au titre de ce contrat d'agent commercial.
Il réfute les considérations du tribunal, selon lesquelles il aurait 'ponctionné la SAS Embassy pendant des années dans le cadre des contrats signés avec elle', en rappelant qu'il a exercé son mandat social à titre gracieux ; que les contrats conclus avec cette société étaient rémunérés en contrepartie de missions déterminées ; qu'un jugement du 12 novembre 2014 a condamné cette société à lui verser ses commissions d'agent commercial ; que le liquidateur n'a pas fait appel mais refuse toute exécution volontaire.
Sur son préjudice, après avoir rappelé que la situation d'Embassy état florissante sous sa présidence, il fait valoir qu'aucune faute de gestion ne résulte du fait qu'il a demandé une mesure de sauvegarde lors de la perte du client principal ; qu'il n'avait aucun intérêt à la liquidation judiciaire d'Embassy puisqu'il était associé de Montesquieu finances et avait près de 269 000 euros en compte courant ; qu'il a ainsi perdu la moindre chance de recouvrer son apport et, en outre, rembourse toujours le crédit souscrit pour acquérir ses parts dans Montesquieu finances; que l'attitude de Embassy lui a causé un préjudice personnel, qui doit être indemnisé à hauteur de 150 000 euros.
Sur la responsabilité personnelle de la société Montesquieu et de M. B., il expose qu'il 'est de jurisprudence constante qu'une décision de révocation prise en violation des règles légales relatives à la tenue et à la révocation des assemblées des associés, inspirée par une intention vexatoire et contraire à l'intérêt social, caractérise de la part des associés une volonté de nuire constitutive d'une faute engageant leur responsabilité personnelle' ; qu'en l'espèce les manoeuvres de M. B., agissant tant en qualité d'associé que de président de Montesquieu finances, démontrent son attitude déloyale et malveillante ; que, notamment, M. B. s'est toujours opposé au remboursement de son compte courant d'associé, sollicitant (sans concertation préalable avec ses associés !) la liquidation judiciaire de la société Montesquieu ; que le courriel de chantage et de menace écrit par M. B. le 25 mars 2013 est ainsi particulièrement éloquent.
Il reproche au tribunal 'd'avoir fait fi des échanges entre les parties, qui pourtant démontraient l'état d'esprit de M. B. et sa volonté de nuire' ; d'avoir fait une mauvaise application de la loi et de la jurisprudence applicables à la responsabilité des associés en cas de révocation abusive, puisque le fondement qu'il invoque à l'encontre de M. B. est celui applicable aux associés et que celui-ci est bien associé d'United labels - contrairement à ce qu'a dit le tribunal.
Il explique que, même si la qualité de dirigeant de M. B. était prise en cause, il n'en demeure pas moins que le caractère vexatoire et la démission forcée qu'il a tenté de lui imposer révèlent une faute séparable de ses fonctions et un 'outre-passement' grossier de sa fonction de dirigeant, en rappelant que celui-ci contrôle chaque entité du groupe et en concluant qu'il devra donc être déclaré solidairement responsable avec les sociétés Montesquieu et Embassy du préjudice moral et financier que lui-même a subi.
Les intimés ont fait signifier leurs conclusions récapitulatives le 15 février 2016 pour solliciter de la cour, au visa des articles L. 227-1 et suivants du code de commerce , qu'elle confirme le jugement et, y ajoutant, qu'elle condamne M. D. à leur payer 'respectivement' la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils exposent que, dans les sociétés par actions simplifiées, les conditions dans lesquelles le président et les autres dirigeants peuvent être relevés de leurs fonctions sont librement fixées par les statuts, tant pour leurs causes que pour leurs modalités ; que l'article 13§4 des statuts d'Embassy prévoit ainsi que 'la révocation du président (...) peut intervenir par décision des actionnaires à tout moment sans préavis et sans motif' ; que, certes, ce principe trouve ses limites dans l'usage abusif de son exercice ; qu'en l'espèce M. B., représentant de l'associé unique, a précisément pris le soin d'informer M. D., le 19 juillet 2012, de l'intention de l'associé de prendre des décisions relatives à l'orientation stratégique de la société et à sa direction ; que ce n'est que lorsqu'il a été informé de la demande d'ouverture de la sauvegarde de justice, sollicitée par M. D. sans concertation, que l'associé unique a pris la décision de le révoquer ; que, contrairement à ce que M. D. tente de faire croire, M. B., lors de la convocation pour l'assemblée générale, le 19 juillet, n'était pas 'au courant du dépôt déjà effectué' ; que, par ailleurs, lors de la réunion du 25 juillet, M. D. a été en mesure de présenter ses observations et qu'ainsi le principe du contradictoire a été respecté.
Ils soulignent que, s'agissant d'une SASU, les règles relatives à la tenue d'une assemblée générale avec envoi d'une convocation et communication d'un projet de résolution ne s'appliquent pas.
Sur les motifs de la révocation, ils font état du comportement déloyal de M. D., de l'absence de réponse de sa part au courrier de M. B. du 17 juillet 2012, du dépôt du dossier de sauvegarde à l'insu de l'associé unique et avant l'assemblée générale, du caractère précipité de cette demande, et font leurs les motifs du jugement sur ces différentes questions.
Sur l'absence de préjudice de M. D. lié à la révocation de son mandat, ils font valoir que celui-ci ne percevait aucune rémunération à ce titre ; que d'ailleurs il ne justifie d'aucun dommage et se contente d'affirmer que la révocation lui a causé un préjudice personnel évalué à 150 000 euros ; qu'il a ponctionné la société Embassy pendant des années par le biais d'un contrat de management dépourvu de toute cause et d'un contrat d'agent commercial extrêmement coûteux, alors même que la société - dont il était le président - était déjà dotée d'une équipe de commerciaux ; qu'il a aussi fait bénéficier sa fille Julie du même traitement.
Sur l'absence de toute responsabilité de la société Montesquieu finances, ils rappellent que, dans une société par actions simplifiées unipersonnelle, l'associé unique exerce seul les pouvoirs dévolus à la collectivité des associés (article L. 227-1 du code de commerce ) ; que l'associé unique est le seul organe habilité à décider de la nomination et de la révocation du président, sous la forme d'une décision unilatérale ; qu'en l'espèce la décision du 25 juillet a été prise dans le respect des règles légales et statutaires ; que les agissements de M. D. lui-même sont à l'origine de cette décision.
Sur l'absence de toute responsabilité de M. B., ils rappellent qu'il n'est associé ni de la société Embassy, ni de Montesquieu finances, qu'il n'est que le dirigeant de la société United labels AG ; que M. D. opère une confusion entre la société Embassy et Montesquieu finances ; qu'il n'y a qu'à l'encontre de cette dernière, associée unique de la précédente, que M. D. pourrait prétendre se retourner ; que, cependant, celui-ci ne démontre ni l'existence d'une faute personnelle de celle-ci à l'occasion de la décision de révocation, ni l'existence d'un préjudice qui aurait été causé de ce fait.
Ils ajoutent, sur l'absence de responsabilité de M. B. en tant que président de Montesquieu finances, que les dirigeants de sociétés ne sont en principe, et exceptionnellement, responsables à l'égard des tiers que s'ils ont commis une faute séparable de leurs fonctions et qui leur soit imputable personnellement ; qu'il faut alors caractériser une faute intentionnelle d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales ; qu'en l'espèce, il n'est démontré ni l'existence d'une quelconque faute personnelle de M. B. à l'égard de M. D., ni même et surtout d'une faute séparable de ses fonctions de président de Montesquieu finances ; qu'en effet il n'a fait qu'exercer le droit de cette société de révoquer M. D. de son mandat.
Ils précisent que les circonstances de la révocation sont en réalité bien différentes de celles décrites par l'appelant ; que le courriel du 25 mars 2013, postérieur de plus de huit mois à la décision de révocation, ne fait que révéler le conflit et ne prouve pas les manoeuvres déloyales alléguées.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande à l'égard de la société Embassy
1 - Aux termes de l'article 13 ( § 4) des statuts de la société Embassy, 'la révocation du président peut intervenir par décision des actionnaires à tout moment sans préavis et sans motif'.
Il résulte d'une jurisprudence constante que, en cas de telle révocation ad nutum, seul l'abus dans l'exercice de ce droit engage la responsabilité de la société.
Le juge n'a pas à se prononcer sur le bien fondé des griefs émis par la société et doit seulement apprécier si les circonstances dans lesquelles est intervenue la révocation étaient abusives ou vexatoires.
Tel est le cas lorsque, par exemple, elle est prise dans des conditions qui portent atteinte à la réputation ou à l'honneur du dirigeant révoqué, ou si elle a été décidée brutalement, sans respect du principe de la contradiction.
2 - En l'espèce, M.D. fait grief à la société Embassy d'une violation du principe du contradictoire.
Cependant, l'ordre du jour de la réunion du 25 juillet 2012 - envoyé par mail du 19 juillet 2012 et dont il ne conteste pas l'avoir reçu en temps utile -, certes laconique, visait sans équivoque possible (outre 'l'orientation stratégique de la société') la 'direction de la société', termes qui ne pouvait que l'alerter sur les sujets devant être abordés.
Le désaccord - ou en tout cas l'absence d'accord et la nécessité d'une discussion - entre lui et l'associé unique de la société, quant à la nécessité de déposer une demande de sauvegarde de justice, avait été exprimé antérieurement à cette réunion, ainsi qu'en attestent les courriers et mails échangés entre les parties les 16, 17 et 20 juillet 2012.
Selon les mentions du document (non argué de faux) intitulé 'décisions de l'associé unique en date du 25 juillet 2012" (pièce n°11 de l'appelant), 'les participants ont échangé leurs points de vue relatifs à l'orientation stratégique de la société et notamment à la demande d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, ainsi qu'à la direction de la société, puis le représentant de l'associé unique a informé M. D. de son intention de mettre fin à son mandat de président' et, 'après avoir entendu les explications de M. D., l'associé unique a pris les décisions suivantes' :
- 'Première décision : l'associé unique prend acte de l'absence de toute information et concertation préalable à la décision du président de demander l'ouverture d'une procédure de sauvegarde à l'encontre de la société et désapprouve cette initiative, qui semble prématurée eu égard à la situation de la société',
- 'Deuxième décision : l'associé unique constate l'existence de divergences de vues profondes et insurmontables entre le président de la société et l'associé unique, quant à la gestion de la société et à ses orientations stratégiques ; constate en
conséquence l'impossibilité de maintenir le mandat du président, dans l'intérêt social ; par conséquent, décide de révoquer M. D. avec effet immédiat'.
Le fait que l'associé unique ait préparé, outre ce 'procès-verbal' des décisions prises, un autre document prévoyant non pas une révocation mais une démission de l'intéressé, pour le cas où, à l'issue des discussions, M. D. aurait présenté celle-ci, est inopérant dès lors que la cour est en mesure de constater, au vu des pièces et explications fournies par les parties, que, d'une part, M. D. ne pouvait se méprendre sur l'objet de la réunion et sur la signification de la deuxième question inscrite à l'ordre du jour : 'direction de la société', d'autre part, il a pu s'expliquer sur les points en discussion avant de se voir signifier sa révocation.
L'appelant ne démontre donc pas qu'il y aurait eu une méconnaissance du principe de la contradiction rendant abusive sa révocation ad nutum.
Et le fait que le dépôt de cette demande de sauvegarde de justice ait été, ou non, justifié et nécessaire, est lui aussi inopérant dès lors que la seule existence d'un désaccord entre la société et le président sur ce point légitimait cette décision.
3 - M. D. ne justifie pas d'autres circonstances de nature à rendre abusive cette révocation, les différents arguments relatifs aux motifs de celle-ci - et au bien-fondé de sa propre décision de déposer une demande de sauvegarde de justice - étant à cet égard inopérants, puisque, ainsi que rappelé précédemment, le caractère abusif de la révocation ad nutum s'apprécie au regard des circonstances dans lesquelles elle intervient et non en fonction des raisons invoquées par la société pour y procéder.
Il peut être observé que, c'est par une seule phrase, au bas de la page 8 de ses conclusions, dans un paragraphe 'iii', que M. D. se borne à indiquer que 'l'administrateur de la société n'a pas été convoqué à cette assemblée générale' (visant ainsi l'absence de l'administrateur désigné par le tribunal de commerce à l'occasion de l'ouverture de la sauvegarde), sans en tirer une quelconque conséquence juridique ni formuler de demande précise de ce chef (et alors-même qu'il ne s'agissait que d'une procédure de sauvegarde).
Par ailleurs, le seul fait qu'ait été envisagée la démission de M. D. - et préparé un document en ce sens - ne peut suffire pour caractériser un quelconque abus dans l'exercice de la faculté de révocation.
Enfin, l'appelant ne démontre aucunement en quoi la rupture (le même jour) du contrat liant les sociétés Embassy et Amistyle ou l'action en paiement diligentée par la première à l'encontre de cette dernière, ou encore le licenciement de sa fille, salariée de Embassy, tels que cités aux paragraphes (iv) des pages 10 et 11 de ses conclusions, seraient de nature à constituer des 'circonstances vexatoires et abusives' au sens de la jurisprudence précitée régissant la révocation ad nutum du mandataire.
4 - De surcroît, à supposer-même que M. D. n'ait pas échoué dans l'administration de la preuve du caractère abusif de sa révocation, force est de constater que, ainsi que le soulignent les intimés, il se borne à affirmer que cette décision lui a causé un préjudice réparable par l'octroi de 150 000 euros de dommages et intérêts.
Or, il exerçait ce mandat sans rémunération, il n'allègue pas l'existence d'un quelconque dommage financier ou matériel qu'il aurait subi, personnellement et directement, à la suite de cette révocation (sinon que par des arguments concernant soit les rapports entre les sociétés Embassy et Amistyle soit ses intérêts financiers liés à la situation de Montesquieu finances), ne s'explique aucunement sur un quelconque préjudice moral qu'il aurait subi du fait des conditions d'intervention de cette éviction.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. D. de cette demande.
Sur la demande à l'égard de la société Montesquieu finances et de M. B.
M. B. était le président de Montesquieu finances, elle-même l'associée unique de la société Embassy.
L'argumentation développée à leur encontre par M. D., en pages 14 à 16 de ses conclusions, mélange les fondements et griefs à l'encontre de chacun, ainsi que leurs qualités.
Il en ressort toutefois, pour l'essentiel, que, à l'égard de Montesquieu finances comme de M. B., M. D. vise 'la jurisprudence constante selon laquelle une décision de révocation prise en violation des règles légales relatives à la tenue et à la 'révocation' (lire sans doute 'convocation') des assemblées des associés, inspirée par une intention vexatoire et contraire à l'intérêt social caractérise de la part des associés une volonté de nuire constitutive d'une faute engageant leur responsabilité personnelle' et cite 'en l'occurrence les manoeuvres de M. B. agissant tant en qualité d'associé que de président de la société Montesquieu finances'.
Cependant, force est de constater que M. D. ne cite aucunement les règles légales qui auraient été violées à l'occasion de la tenue de la réunion du 25 juillet 2012, alors même qu'il s'agit d'une SASU ; que les griefs énumérés pages 14 et 15 citent M. B. sans que l'on sache s'il s'agit de lui à titre personnel ou de lui en qualité de président et représentant légal de Montesquieu finances ; qu'il vise des faits concernant la vie sociale de cette dernière et non celle d'Embassy ; que la circonstance selon laquelle M. B. est associé au sein d'United labels est inopérant au regard d'une éventuelle responsabilité en tant qu'associé d'Embassy, qu'il n'est pas.
Ensuite, à l'égard de M. B. visé précisément à titre personnel, l'appelant soutient que 'le caractère vexatoire et la démission forcée que celui-là a tenté de lui imposer révèle une faute séparable de ses fonctions et un outre-passement grossier de sa fonction de dirigeant', faute intentionnelle détachable de ses fonctions, tout comme l'intention de nuire révélée par ses autres agissements (refus de déposer une demande de sauvegarde de justice, contraire à l'intérêt social, et menaces de révocation et d'actions judiciaires civiles ou pénales).
Toutefois, M. D. se borne à énumérer toujours la même litanie de reproches, sans aucunement caractériser de la part de M. B., à l'occasion de cette décision de révocation, une faute intentionnelle, d'une particulière gravité et incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions de président de la société de Montesquieu finances (dont il importe de rappeler qu'il était lui-même un des quatre associés, pour 30%, avec United labels, à 45%, Amistyle (représentée par lui) à 5%, et M. D. à 20 %), la proposition d'une démission, présentée lors des discussions du 25 juillet, avant que son refus n'entraîne la décision de révocation, ne pouvant en constituer une.
Enfin, là encore, force est de constater que M. D. se contente d'affirmer qu'il a subi un préjudice financier et moral, sans aucunement les caractériser ni en justifier.
Le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté M. D. de ses demandes à l'égard de Montesquieu finances et de M. B..
Sur les demandes accessoires
Succombant en ses prétentions, M. D. sera condamné aux dépens, en application de l'article 696 du code de procédure civile, et débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Il sera condamné à payer - selon les termes des conclusions des intimés - 'respectivement à la SELURL D., ès-qualités de liquidateur des sociétés Embassy et Montesquieu finances, et à M. B., une somme de' 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile', soit 2 x 2 500 euros.
PAR CES MOTIFS,
CONFIRME le jugement,
Y AJOUTANT,
DEBOUTE M. D. de sa demande fonde sur l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE M. D. à payer à la SELURL D., ès qualités pour les sociétés Embassy et Montesquieu finances, et à M. B., respectivement, une somme de 2 500 euros (soit 5 000 euros au total),
CONDAMNE M. D. aux entiers dépens d'appel.