Cass. 3e civ., 27 juillet 2017, n° 16-14.317
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvin
Avocats :
Me Balat, SCP Richard
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 26 novembre 2015), que la société L'Immobilière groupe Casino (la société Casino) a confié des travaux de rénovation et d'extension d'un centre commercial à la société Marraud ingénierie (la société Marraud), maître d'oeuvre, afin de concevoir les aménagements et modifications à entreprendre ; que le lot charpente métallique a été confié à la société Le Baron constructions (la société Le Baron) ; qu'en cours de chantier, la société Marraud a demandé à la société Le Baron des travaux supplémentaires ; que, la société Casino ayant refusé de payer au motif que les travaux supplémentaires n'avaient pas fait l'objet d'un ordre d'exécution, la société Le Baron l'a assignée en paiement de ceux-çi ;
Attendu que la société Le Baron fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article 1793 du code civil, « lorsqu'un architecte ou un entrepreneur s'est chargé de la construction à forfait d'un bâtiment, d'après un plan arrêté et convenu avec le propriétaire du sol, il ne peut demander aucune augmentation de prix, ni sous le prétexte de l'augmentation de la main-d'oeuvre ou des matériaux, ni sous celui de changements ou d'augmentations faits sur ce plan, si ces changements ou
augmentations n'ont pas été autorisés par écrit, et le prix convenu avec le propriétaire » ; que lorsque les travaux en cause ne constituent pas la construction d'un bâtiment, les dispositions de l'article 1793 du code civil ne leur sont pas applicables ; que dans ses écritures d'appel, la société Le Baron constructions faisait valoir que les travaux qui lui avaient été confiés ne portaient pas sur la construction d'un bâtiment mais sur la réalisation d'une extension de la coque d'un immeuble déjà construit ; qu'en affirmant que les dispositions de l'article 1793 étaient applicables au litige, en raison de « l'ampleur » des travaux de rénovation et de réhabilitation confiés à la société Le Baron constructions, cependant que la question de l'ampleur des travaux litigieux était sans pertinence et que seul importait le point de savoir si les travaux en cause portaient sur la construction d'un bâtiment, ce qui était exclu en l'espèce puisque le bâtiment était déjà construit, la cour d'appel, qui s'est déterminée par un motivation inopérante, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1793 du code civil ;
2°/ qu'à supposer même applicables les dispositions de l'article 1793 du code civil, la société Le Baron constructions faisait valoir, dans ses écritures d'appel, que la société Marraud Ingénierie avait qualité pour commander des travaux supplémentaires au nom du maître de l'ouvrage, aux termes de l'article 4.3 du « contrat de maîtrise d'oeuvre générale » conclu le 31 janvier 2006 entre la société L'Immobilière groupe Casino, maître d'ouvrage, et la société Marraud Ingénierie, maître d'oeuvre ; qu'en affirmant que la société Marraud Ingénierie ne disposait d'aucun mandat pour représenter le maître de l'ouvrage aux fins de passer commande de travaux supplémentaires, sans répondre aux conclusions de la société Le Baron constructions qui établissaient l'existence d'un tel mandat, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que l'entreprise ayant réalisé les travaux est fondée à se prévaloir de sa croyance légitime en un mandat apparent détenu par le maître d'oeuvre, rendant opposable au maître de l'ouvrage une commande de travaux supplémentaires émanant du mandataire apparent ; que dans ses écritures d'appel, la société Le Baron constructions invoquait l'existence du mandat apparent dont était, pour le moins, titulaire la société Marraud Ingénierie aux fins de représenter la société L'Immobilière groupe Casino vis-à-vis des tiers ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la société Marraud Ingénierie n'était pas titulaire d'un mandat apparent, ce qui était d'autant plus vraisemblable que les juges du fond ont
retenu les travaux supplémentaires avaient été expressément commandés par le maître d'oeuvre et que la société Le Baron constructions avait effectué les travaux litigieux « en toute bonne foi », ce dont il résultait qu'elle croyait travailler sur ordre du maître de l'ouvrage, passé par l'intermédiaire d'un mandataire apparent, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1998 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé qu'à l'occasion de la rénovation et de l'extension du magasin, la société Le Baron avait signé un acte d'engagement pour le lot charpente métallique concernant l'extension de la coque du magasin, la cour d'appel a pu en déduire que ces travaux, en raison de leur ampleur, entraient dans le champ d'application de l'article 1793 du code civil ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu, répondant aux conclusions, que le contrat liant la société Casino à la société Marraud ne conférait pas à cette dernière un mandat de la représenter aux fins de passer commande de travaux supplémentaires, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Le Baron aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Le Baron et la condamne à payer à la société Casino la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept avril deux mille dix-sept.