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Décisions

Cass. 3e civ., 12 juin 2002, n° 01-01.236

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Weber

Rapporteur :

M. Martin

Avocat général :

M. Guérin

Avocat :

Me Cossa

Lyon, aud. sol., du 4 déc. 2000

4 décembre 2000

Sur les premier et deuxième moyens, réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 4 décembre 2000), rendu sur renvoi après cassation (CIV1, 8 octobre 1996 n° 338 B), que la Société niçoise d'économie mixte (SNEM), devenue société Le Logis Familial, maître de l'ouvrage, assurée suivant polices dommages-ouvrage par la compagnie les Assurances générales de France (AGF), a entrepris la construction d'un groupe d'immeubles ; que la compagnie les AGF ayant refusé de prendre en charge certains des travaux nécessités par l'apparition de désordres, la société Le Logis Familial l'a assignée en garantie ;

Attendu que la société Le Logis Familial fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :

1 / que, dans l'hypothèse où elle s'est déterminée en considération de la nature des travaux de reprise rendus nécessaires par les désordres litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de tout fondement légal au regard de l'article 1792 du Code civil, en excluant l'application du régime de la garantie décennale, sans rechercher si les travaux originels qui avaient eux-mêmes été affectés de ces désordres constituaient des ouvrages au sens du texte précité ;

2 / que constituent des ouvrages au sens de l'article 1792 du Code civil les travaux de génie tels que les talus, murs de soutènement et enrochements dès lors que, par leur nature même, ces travaux imposent l'emploi des techniques des travaux de bâtiment ; qu'en décidant, en l'espèce, le contraire pour exclure du champ de la garantie décennale tous les ouvrages de génie civil autres que ceux réalisés entre les bâtiments I et J, au motif inopérant que ces ouvrages ne consistaient pas en l'édification d'un immeuble, la cour d'appel a violé le texte précité ;

3 / qu'à supposer même que le champ d'application de la garantie décennale se réduise à la construction d'un immeuble, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 1792 du Code civil en ne recherchant pas si les travaux de génie civil litigieux ne constituaient pas des "éléments constitutifs", au sens de ce dernier texte, de "l'ouvrage" constitué par les immeubles édifiés dans le cadre de la réalisation du programme des "Terrasses de la Costière" ;

4 / que, dans ses conclusions d'appel, elle faisait valoir que la compagnie AGF, assureur dommages-ouvrage, lui devait en toute hypothèse sa garantie au titre des désordres résultant de l'inexécution, au stade de la construction de l'ensemble immobilier, des ouvrages qui auraient permis d'éviter la survenance des désordres et qui ont dû être réalisés dans le cadre des opérations de reprise ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant retenu, au vu des travaux réalisés : remblai, enrochement, que le talus à l'entrée du bâtiment A, n'ayant nécessité aucun ouvrage de soutènement, le talus sous le bâtiment C, protégé par des blocs d'enrochement, les enrochements du talus entre les bâtiments E et F n'ayant aucune fonction de soutènement, et le talus à l'aval du bâtiment I ne constituaient pas la construction d'ouvrages, par incorporation de matériaux dans le sol, au moyen de travaux de construction, la cour d'appel en a exactement déduit, par ces seuls motifs, sans être tenue de rechercher si ces talus auraient été des éléments constitutifs des immeubles, recherche qui ne lui était pas demandée ni de répondre à des conclusions concernant l'application des polices dommages-ouvrage que ses constatations rendaient inopérantes, que seuls les désordres affectant les talus entre les bâtiments I et J concernaient un ouvrage au sens de l'article 1792 du Code civil, le contrat prévoyant expressément les travaux de voies et réseaux divers ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 1792 du Code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande au titre de la réparation des désordres affectant le talus entre les bâtiments I et J, l'arrêt retient qu'il n'est pas établi qu'ils portent atteinte à la solidité des immeubles construits sur le site et les rendent impropres à leur destination ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si ces désordres portaient atteinte à la solidité du talus entre les bâtiments I et J, dont elle avait retenu qu'il constituait un ouvrage au sens de l'article 1792 du Code civil, ou le rendaient impropre à sa destination, le cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de la société Le Logis Familial contre la compagnie les AGF au titre de la réparation des désordres affectant le talus entre les bâtiments I et J, l'arrêt rendu le 4 décembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon.