Cass. crim., 12 juin 2012, n° 11-87.799
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Louvel
Rapporteur :
M. Pers
Avocat :
SCP Waquet, Farge et Hazan
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et de la procédure que, par jugement du 27 mai 2010 devenu définitif en ses dispositions pénales, M. X..., gérant de la SARL " La table des épicuriens", a été déclaré coupable d'abus de biens sociaux, pour avoir détourné des comptes de la société qu'il dirigeait, mise en liquidation judiciaire le 19 novembre 2008, des sommes réglées en espèces, par chèques ou par cartes bancaires, et que Mme Y..., sa concubine, a été déclarée coupable de complicité de ce délit ; que, saisie du seul appel du liquidateur sur les intérêts civils, la cour d'appel a, par arrêt du 7 octobre 2011, infirmé les dispositions civiles du jugement déboutant le liquidateur de ses demandes d'indemnisation et condamné les prévenus à payer à celui-ci les sommes visées à la prévention ;
En cet état,
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 641-9 du code de commerce, 1382 du code civil, 2 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné M. X... à payer 323 104 euros de dommages-intérêts à la SELARL Malmezat-Prat es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL « La table des épicuriens » et condamné Mme Y... solidairement avec M. X... à payer à hauteur de la somme principale, une somme de 150 765 euros à la SARL Malmezat-Prat es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL « La table des épicuriens » ;
"aux motifs que la SARL « La table des épicuriens » a été placée en redressement judiciaire le 19 novembre 2008 par jugement du tribunal de commerce de Bordeaux ; que la liquidation judiciaire de la société a été prononcée par jugement du 9 septembre 2009 du tribunal de commerce de Bordeaux qui a désigné la SELARL Malmezat-Prat, liquidateur judiciaire ; que contrairement à ce qui a été dit dans la décision attaquée, seul le liquidateur judiciaire peut exercer l'action au nom de la SARL « La table des épicuriens » en liquidation, afin d'obtenir réparation du préjudice causé par le délit d'abus de biens sociaux et de complicité d'abus de biens sociaux commis par les prévenus ; qu'il ne peut être contesté que le délit d'abus de biens sociaux et de complicité d'abus de biens sociaux commis par les prévenus a causé un préjudice direct à la société ; que dès lors, la cour réforme la décision attaquée, déclare l'action de la SELARL Malmezat-Prat es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL « La table des épicuriens » bien fondée et condamne chacun des prévenus à payer des dommages-intérêts à hauteur des détournements visés à la prévention, qu'ils ont reconnu et pour lesquels ils ont été définitivement condamnés ;
"alors que, le liquidateur judiciaire nommé dans le jugement de liquidation judiciaire n'est habilité à représenter le débiteur dessaisi, pour les actions relatives à son patrimoine, que dans les limites de ce dessaisissement ; qu'en application de l'article L. 641-9 I du code de commerce, en ses dispositions issues de la loi du 26 juillet 2005 applicables à la cause, l'exercice de l'action civile devant la juridiction pénale, y compris en ce qu'elle tend à la réparation du préjudice subi, échappe au principe du dessaisissement, de sorte que le liquidateur judiciaire n'avait pas qualité pour solliciter réparation du préjudice subi par la SARL « La table des épicuriens » ; qu'en faisant néanmoins droit à sa demande, la cour d'appel a violé les dispositions du texte précité ; que la cassation interviendra sans renvoi" ;
Attendu que, pour infirmer le jugement du 27 mai 2010 sur les intérêts civils qui a déclaré mal fondée l'action du liquidateur de la société en l'absence de démonstration d'un préjudice en lien direct avec la liquidation judiciaire et condamner les prévenus au paiement des sommes détournées, la cour d'appel énonce que seul le liquidateur peut exercer l'action au nom de la société afin d'obtenir réparation du préjudice causé par le délit d'abus de biens sociaux et que ce délit est à l'origine d'un préjudice direct pour la société ;
Attendu qu'en statuant ainsi et dès lors que le liquidateur représente la société et non les créanciers et peut se constituer partie civile pour demander des dommages et intérêts au nom de celle-ci qui a subi un préjudice direct consécutivement au délit d'abus de biens sociaux commis par son dirigeant et la complice de celui-ci, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le moyen complémentaire de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil, 2 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné M. X... à payer 323 104 euros de dommages et intérêts à la SELARL Malmezat-Prat es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL « La table des épicuriens » et condamné Mme Y... solidairement avec M. X... à payer à hauteur de la somme principale, une somme de 150 765 euros à la SARL Malmezat-Prat es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL « La table des épicuriens » ;
"aux motifs qu'il ne peut être contesté que le délit d'abus de biens sociaux et de complicité d'abus de biens sociaux commis par les prévenus a causé un préjudice direct à la société ; que dès lors, la cour réforme la décision attaquée, déclare l'action de la SELARL Malmezat-Prat es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL « La table des épicuriens » bien fondée et condamne chacun des prévenus à payer des dommages-intérêts à hauteur des détournements visés à la prévention, qu'ils ont reconnu et pour lesquels ils ont été définitivement condamnés ; qu'il s'ensuit que M. X... sera condamné à payer 323 104 euros de dommages-intérêts à la SELARL Malmezat-Prat es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL « La table des épicuriens », et Mme Ann-Kelly Y... solidairement avec M. X... à hauteur de la somme principale de 150 765 euros seulement, à la SELARL Malmezat-Prat es qualité de liquidateur judiciaire de la SARL « La table des épicuriens » ;
"alors que la réparation ne peut excéder le préjudice subi par la victime ; qu'en ne recherchant pas si, ainsi que les prévenus, qui contestaient la demande en réparation, l'avaient toujours soutenu, les sommes versées sur leurs comptes personnels, en raison de l'interdiction bancaire de la SARL « La table des épicuriens » , n'avaient pas servi à payer, à partir de ces comptes personnels, les employés et les fournisseurs du restaurant « La table des épicuriens », limitant d'autant le préjudice subi par la SARL, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu que pour condamner M. X... au paiement de la somme de 323.104 euros et Mme Y..., solidairement, à hauteur de la somme de 150 765 euros, la cour d'appel retient qu'il convient de condamner chacun des prévenus à payer des dommages-intérêts à hauteur des détournements visés à la prévention, qu'ils ont reconnus et pour lesquels ils ont été définitivement condamnés ;
Attendu qu'en prononçant ainsi et dès lors que les prévenus n'ont pas interjeté appel des dispositions pénales du jugement du 27 mai 2010 et que la prévention visait expressément les montants susvisés, la cour d'appel n'encourt pas le grief invoqué au moyen ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.