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Décisions

CA Nîmes, ch. com., 4 juin 2015, n° 14/06246

NÎMES

Arrêt

Autre

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Filhouse

Conseillers :

M. Gagnaux, Mme Hairon

Avocats :

Me Gouin, Me Hilaire-Lafon

T. com. Nîmes, du 16 déc. 2014, n° 2014F…

16 décembre 2014

Vu le jugement rendu le 16/12/2014 par le tribunal de commerce de Nîmes dans l'affaire opposant Maître Bernard ROUSSEL - ès qualités de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de X - à X ,

Vu la déclaration d'appel de Maître Bernard ROUSSEL ès qualités de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de X en date du 22/12/2014,

Vu les dernières conclusions adressées au greffe de la Cour le 16/03/2015 par Maître Bernard ROUSSEL ès qualités et le bordereau de pièces qui y est annexé,

Vu les dernières conclusions (numéro 2) adressées au greffe de la Cour le 20/03/2015 par X, et le bordereau de pièces qui y est annexé,

Vu la communication au Parquet Général et son avis de rapport à l'appréciation de la Cour en date du 29/01/2015, porté à la connaissance des parties,

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par jugement en date du 12/09/2012 le Tribunal de commerce de Nîmes a ouvert une procédure de liquidation judiciaire simplifiée à l'égard de Madame X - dite aussi parfois en la procédure X -.

Maître Bernard ROUSSEL ès qualités liquidateur de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de celle-ci a présenté une requête pour que soit appliquée le régime général de la liquidation judiciaire, en considération de faits rendant impossibles selon lui la clôture dans les délais prescrits par la loi : révélation d'un actif immobilier.

Estimant que " la liquidation judiciaire devait être close à la date du 13/12/2013 (clôture de la liquidation judiciaire simplifiée dans un délai de 1 an sauf jugement spécialement motivé pouvant proroger le terme pour une durée ne pouvant excéder 3 mois)." Que "(...) la liquidation judiciaire devait être close à la date du 13/12/2013",

Le Tribunal de Commerce de NÎMES, par jugement attendu 16/12/2014, a jugé :

"Le ministère public avisé,

Vu l'article L 643-9 et L644.6 du Code de Commerce ;

Déboute Maître Roussel es qualité de sa requête pour les motifs sus énoncés,

PRONONCE la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de :

Madame X (...)

DIT que les créanciers ne recouvrent l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur que dans les cas prévus (...)

DIT que s'il apparaît que des actifs n'ont pas été réalisés ou que des actions dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été engagées pendant le cours de la procédure, celle-ci peut être reprise. Le Tribunal est saisi par le liquidateur précédemment désigné, par le ministère public ou par tout créancier intéressé. Il peut également se saisir d'office. S’il est saisi par un créancier, ce dernier doit justifier avoir consigné au greffe du Tribunal les fonds nécessaires aux frais des opérations.

ORDONNE les mesures de publicité prescrites par la Loi ;

DIT que la présente décision sera notifiée par le greffier au débiteur conformément à l'article R 643- 18 du code de commerce.

PASSE les dépens en frais privilégiés de ladite procédure collective ; "

Maître Bernard ROUSSEL ès qualités - appelant- fait essentiellement valoir que la découverte d'un actif immobilier est incompatible avec la procédure de liquidation judiciaire simplifiée et que la loi a prévu en ce cas une "passerelle légale.".

Il demande à la Cour au dispositif de ses dernières écritures :

'Vu les articles L. 641-2 et L. 644-6 du Code de Commerce.

(...)

Statuant à nouveau,

Dire et juger recevable et bien fondée la demande (...) d'application du régime général de la liquidation judiciaire.

Dire et juger que la procédure de liquidation judiciaire de Madame X ne doit pas être soumise aux dispositions des articles L. 6441 à L. 644-5 du Code de Commerce régissant la procédure de liquidation judiciaire simplifiée.

Dire et juger que la liquidation judiciaire de Madame X est une procédure de liquidation judiciaire du régime général des articles L. 640-1 à L. 643-13 du Code de Commerce.

Maintenir Maître Bernard ROUSSEL es qualité de liquidateur judiciaire de Madame X et tous les organes de la procédure collective.

Ordonner les mesures de publicité prévues par la Loi en la matière.

Renvoyer la procédure de liquidation judiciaire soumise au régime général de Madame X devant le Tribunal de Commerce de NIMES.

Dire et juger les dépens privilégiés de la liquidation judiciaire de Madame X."

X - intimée - fait essentiellement valoir au soutien de sa demande de réformation que la requête même de Maître Bernard ROUSSEL est irrecevable en l'état de l'autorité de chose jugée du jugement d'ouverture de la procédure collective en 2012 ayant choisi la liquidation judiciaire simplifiée, et subsidiairement mal fondée car elle n'a pas d'actif immobilier ; que de plus la procédure collective pourrait être reprise après clôture en cas d'apparition d'un actif , en application de l'article L 643-13 du Code de commerce.

Elle demande à la Cour au dispositif de ses dernières écritures :

"Vu la décision rendue 12 septembre 2012 par le Tribunal de commerce de Nîmes ayant ouvert à l'encontre de la concluante une procédure de liquidation judiciaire simplifiée,

Vu les articles L .641-2 et L. 641-2-1, L. 644-5 du Code du Commerce,

Vu le délai écoulé depuis la décision du 12 septembre 2012,

STATUER ce que de droit sur l'appel interjeté par Monsieur ROUSSEL (...)

REFORMER la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré la requête de Monsieur ROUSSEL recevable.

Si mieux n'aime la cour, CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu par le juge commissaire de Nîmes le 16 décembre 2014 ayant prononcé la clôture de la liquidation judiciaire simplifiée dont fait l'objet Madame X.

CONDAMNER Monsieur ROUSSEL à porter et payer à la concluante la somme de 2000 € par application des dispositions de l'art. 700 du code de procédure civile.

Le CONDAMNER en tous les dépens de première instance et d'appel."

SUR CE

Attendu qu'il ne ressort pas des pièces de la procédure d'irrecevabilité de l'appel que la Cour devrait relever d'office, et les parties n'élèvent aucune discussion sur ce point ;

Attendu - en droit- que la liquidation judiciaire simplifiée est conçue par la loi comme un régime dérogatoire au droit commun de la liquidation judiciaire ; que l'article L. 644-6 du Code de commerce dispose :

"À tout moment, le tribunal peut décider, par un jugement spécialement motivé, de ne plus faire application des dérogations prévues au présent chapitre." ;

Attendu par ailleurs que l'article L. 644-5 du Code de commerce - dans sa version alors applicable avant l’Ordonnance nº 2014-326 du 12 mars 2014 -

"Au plus tard dans le délai d'un an à compter de la décision ayant ordonné ou décidé l'application de la procédure simplifiée, le tribunal prononce la clôture de la liquidation judiciaire, le débiteur entendu ou dûment appelé.

Il peut, par un jugement spécialement motivé, proroger la procédure pour une durée qui ne peut excéder trois mois";

Attendu que le non-respect du délai d'un an n'est assorti d'aucune sanction ; que le tribunal peut en conséquence "à tout moment", dès lors que la clôture n'est pas intervenue, revenir au droit commun de la procédure collective ; qu'il a même d'ailleurs été soutenu en doctrine que la procédure de liquidation judiciaire classique serait ou devrait être de plein droit substituée à la liquidation judiciaire simplifiée à défaut de clôture dans le délai précité ;

Attendu encore que la loi n'a pas prévu que le retour au droit commun pouvait intervenir si - et seulement si - il apparaissait que la liquidation judiciaire simplifiée avait été à tort prononcée, notamment parce que par exemple la condition d'absence de bien immobilier n'aurait pas été remplie ;

Attendu que - en fait - il est constant que Maître Bernard ROUSSEL n' a pu mener à son terme les opérations de réalisation de tout l'actif du débiteur en procédure collective ;

Attendu que le liquidateur explique en effet, sans être contredit au niveau des faits eux-mêmes mais en leur seule analyse et pièces à l'appui :

- que selon les termes d'une location-vente immobilière de 2002 le preneur (débiteur en procédure collective X et son compagnon) devait devenir propriétaire d'une maison à usage d'habitation située à GARONS, après le règlement au « bailleur » (CAMMARATA - BOREL) d'un prix global de 182.938,83 € payable par mensualités

- qu'ès qualités le liquidateur 's'est donc rapproché du notaire expressément désigné dans la location-vente pour obtenir la copie de la réitération par acte authentique et de tous les éléments devant permettre d'apprécier les droits et obligations du débiteur en liquidation' - que le "notaire confirmait au liquidateur la volonté de son client de procéder en accord avec les consorts Y... à la réalisation de l'immeuble à un tiers" "à condition de conserver la somme de 85.344 € correspondant à la différence entre le prix de vente et les sommes versées depuis la prise d'effet du contrat par le « preneur »

- que "le montant important des redevances mensuelles (1.524 €) payées par le « preneur » comporte un loyer, contrepartie de la jouissance, et une quote-part du prix d'achat du bien immobilier "

- qu'il existe donc un actif potentiel à terme à réaliser dans l'intérêt des créanciers de la procédure collective ;

Attendu que cette circonstance (potentialité ou réalité prochaine) suffit en soit d'une part à ne pas clôturer en l'état la liquidation judiciaire simplifiée de X mais aussi à la convertir à toutes fins en liquidation judiciaire de droit commun ;

PAR CES MOTIFS

La Cour

Statuant publiquement et contradictoirement, en dernier ressort,

Dit recevable l'appel de Maître Bernard ROUSSEL ès qualités de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de X,

Vu l'avis du Parquet Général,

Réformant et statuant à nouveau,

Dit n' y avoir lieu à clôture de la liquidation judiciaire simplifiée de X,

Convertit la liquidation judiciaire simplifiée de X en liquidation judiciaire de droit commun, sans changement du liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire ni des autres organes de la procédure collective,

Ordonne la publication du présent arrêt à la diligence du greffier du Tribunal de commerce de Nîmes,

Dit les frais de la présente procédure frais privilégiés de la procédure collective.