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Décisions

CA Nîmes, 4e ch. com., 16 novembre 2017, n° 17/00878

NÎMES

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Codol

Conseillers :

Mme Rochette, Mme Léger

Avocats :

Me Chabaud, Me Itier

T. com. Avignon, du 18 janv. 2017, n° 20…

18 janvier 2017

EXPOSÉ

Vu l'appel interjeté le 3 mars 2017 par Me X… à l'encontre du jugement prononcé le 18 janvier 2017 par le tribunal de commerce d'Avignon dans l'instance nº 201500 4092.

Vu les dernières conclusions déposées le 28 août 2017 par l'appelant et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu les dernières conclusions déposées le 05 septembre 2017 par Y… née A…, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé.

Vu la communication de la procédure au Ministère Public qui l'a visée le 2 avril 2017 en y portant la mention : « qui s'en rapporte » , avis porté le 2 mai 2017 à la connaissance des parties constituées.

Vu l'ordonnance de fixation prise au visa de l'article 905 du code de procédure civile en date du 24 mars 2017 et fixant l'affaire à l'audience collégiale du 7 septembre 2017.

La s.a.s Dds était une société immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'Avignon le 10 mai 1986, ayant pour objet social, le conseil et l'assistance aux entreprises en tout domaine d'activités et notamment en droit du travail, formation, audit, organisation et médiation.

Cette société a été dirigée par Z… jusqu'à son décès intervenu brutalement le 29 juin 2009 date à partir de laquelle sa fille, A… alors âgée de 26 ans a été nommée présidente.

Le 26 novembre 2013, la s.a.s Dds a procédé à une déclaration de cessation de paiement.

Par jugement du 4 décembre 2013, le tribunal de commerce d'Avignon a ouvert une procédure de liquidation judiciaire simplifiée à l'égard de la s.a.s Dds et il a fixé provisoirement la date de cessation de paiement au 26 novembre 2013, Me X… ayant été désigné en qualité de mandataire liquidateur.

Le 17 décembre 2014, le juge-commissaire a signé un état des créances définitif, établi dans le cadre de la liquidation judiciaire simplifiée, mentionnant un montant échu définitif de 12'310,49 euros correspondant à des déclarations de créances à titre super privilégié.

Le 17 mars 2015, Me X… a établi un état de synthèse provisoire de l'ensemble des créances déclarées s'élevant à la somme globale de 280'190,57 euros donnant lieu à la signature par le juge-commissaire le 8 février 2016 d'un état des créances complémentaire définitif mentionnant un total échu définitif de 246'883,50 euros.

L'intégralité de l'actif a été valorisé pour la somme de 220 euros outre un solde en banque positif de 11'482,40 euros.

Par exploit du 11 mai 2015, Me X… a fait assigner Y… née A… en comblement intégral de l'insuffisance d'actif avec prononcé d'une faillite personnelle devant le tribunal de commerce d'Avignon qui, par jugement du 18 janvier 2017, a :

- dit que Y… née A… doit supporter une partie de l'insuffisance d'actif de la s.a.s Dds,

- condamné en conséquence Y… née A… à payer à Me X… ès qualités de liquidateur judiciaire de la s.a.s Dds la somme de 18'000 euros,

- débouté Me X… ès qualités de sa demande tendant à la condamnation de la défenderesse à une mesure de faillite personnelle, en application des articles L. 653'4, L. 653'5 et L. 653'8 du code de commerce,

- condamné Y… née A… à payer à Me X… ès qualités la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Me X… ès qualités de sa demande tendant à l'exécution provisoire du jugement,

- invité Me X… ès qualités à faire signifier la décision à Y… née A…,

- dit que le greffe communiquera le jugement au ministère public en application de l'article R. 651'3 du code de commerce,

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire,

- rejeté tous autres moyens, fins et conclusions des parties.

Me X… a relevé appel de ce jugement pour voir :

- au titre des sanctions patrimoniales, confirmer le jugement quant à l'existence de fautes de gestion imputables à Y… née A…,

- réformer le jugement quant au montant de la condamnation pécuniaire,

- condamner en conséquence Y… née A… née le 8 septembre 1983 à Avignon de nationalité française, domiciliée 439, chemin Saint Dominique à Courthezon (84'350) au comblement intégral de l'insuffisance d'actif et au paiement d'une somme de 268'485,17 euros,

- au titre des sanctions personnelles, et au visa des articles L. 653'4 1º,3º,4º, L. 653'5 6º et L. 653'8 du code de commerce,

- infirmer le jugement ayant écarté toutes sanctions personnelles,

- prononcer la faillite personnelle de Y… née A… née le 8 septembre 1983 à Avignon de nationalité française, domiciliée 439, chemin Saint Dominique à Courthezon (84'350),

- condamner Y… née A… aux entiers dépens de l'instance ainsi qu'au paiement d'une somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Y… née A… forme appel incident pour voir :

- constater que l'état de créances définitif relatif à la liquidation judiciaire de la s.a.s Dds est intervenu à la diligence du mandataire judiciaire le 24 novembre 2014,

- constater que cet état du passif a été signé par le juge-commissaire puis publié au Bodacc,

- constater que l'état du passif n'a pas fait l'objet d'un recours

- dire et juger qu'aucun état du passif provisoire ou définitif ne peut intervenir postérieurement,

- en conséquence dire et juger que le passif de la s.a.s Dds ne peut être fixé qu'au montant figurant à l'état des créances définitif déposé par Me X… le 24 novembre 2014,

- constater l'absence de respect par Me X… des règles relatives à la procédure de liquidation judiciaire simplifiée,

- dire et juger que le montant de l'insuffisance d'actif ne peut être établi qu'à partir du passif figurant sur l'état des créances définitif déposé le 24 novembre 2014,

- sur les fautes de gestion, dire et juger que Me X… ne rapporte pas la preuve d'une quelconque faute de gestion qui lui soit imputable dans le cadre de l'exercice de son mandat social, qui aurait contribué à l'insuffisance d'actif,

- débouter en conséquence Me X… de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- réformer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a retenu les fautes de gestion,

- dire et juger qu'aucune faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif ne peut être retenue à son encontre,

- à titre subsidiaire et dans l'hypothèse où la cour retiendrait une ou plusieurs fautes de gestion, limiter la condamnation à la somme fixée par le juge de première instance en l'état de l'implication de Y… née A… et de ses revenus et de son patrimoine,

- dire et juger qu'il n'y a pas lieu de prononcer sa faillite personnelle,

- condamner Me X… à lui payer la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur la détermination de l'insuffisance d'actif

* Quant à l'état des créances à prendre en considération

L'intimée soutient que seul doit être pris en considération le passif figurant sur l'état des créances définitif déposé par Me X… le 24 novembre 2014, signé par le juge-commissaire le 17 décembre 2014 et publié au Bodacc le 4 janvier 2015 et que la vérification du passif à laquelle Me X… a procédé en mars 2015 aboutissant à l'établissement d'un état provisoire suivi d'un second état définitif n'a aucune valeur juridique car dans le cadre de la liquidation judiciaire simplifiée, seules les créances visées à l'article L. 644'3 devaient être vérifiées sauf à ce que cette procédure soit clôturée et que soit mise en place la passerelle pour solliciter sa transformation en liquidation judiciaire dans le respect des dispositions des articles L. 644'6 et R. 644'4 du code de commerce permettant alors une vérification de la totalité des créances par application de l'article L. 641'4. Or cette procédure n'avait pas été respectée et seul l'état des créances signé le 17 décembre 2014 avait valeur juridictionnelle soulignant encore qu'au visa de l'article R. 624'9 du code de commerce, il s'agit d'un document unique de sorte que le mandataire judiciaire ne pouvait « multiplier » les états de passif soumis à la signature du juge-commissaire puis publié au Bodacc.

Me X… répond que le dépassement du délai de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée conduit de plein droit à une application des règles de la liquidation judiciaire ajoutant que le code du commerce n'établit aucune distinction s'agissant des sanctions patrimoniales, entre liquidation judiciaire et liquidation judiciaire simplifiée mais que l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif impose de considérer tout le passif. Il rappelle que la vérification de l'ensemble des créances avait eu lieu en présence de l'intimée qui les avait approuvées le 10 mars 2015 à l'exception de celle de l'URSSAF en faisant valoir que le passif chirographaire n'était en rien affecté par la décision du juge commissaire initialement limitée au passif privilégié, la seule sanction encourue résidant dans la privation d'une partie de ses émoluments sans que le passif ne puisse « s'évaporer » au motif que dans un premier temps, selon la règle de la liquidation judiciaire simplifiée, seule une partie du passif aurait été vérifiée.

L'article L.644-6 du code de commerce dispose : ' A tout moment, le tribunal peut décider, par un jugement spécialement motivé, de ne plus faire application des dérogations prévues au présent chapitre' et l'article R.644-4 prévoit à cette fin, la convocation du débiteur à l'audience par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

Inséré dans le chapitre IV relatif à la liquidation judiciaire simplifiée, il est précédé de l'article L.644-5 qui fixe à 12 mois, voire 15 mois en cas de prorogation exceptionnelle, la durée légale de la liquidation judiciaire simplifiée.

Ainsi, la possibilité offerte au tribunal de décider 'à tout moment' de ne plus faire application des dérogations afférentes à la procédure de liquidation judiciaire simplifiée ne se comprend que pendant le cours légal de la procédure.

En tout état de cause, la décision du tribunal intervenant au visa de l'article L.644-6 n'est, malgré l'exigence de motivation, qu'une mesure d'administration judiciaire non susceptible de recours ainsi que précisé par l'article R.644-4 de sorte que le défaut d'application de ces dispositions durant la durée légale de la liquidation judiciaire simplifiée voire à son expiration n'occasionnerait aucun grief

En l'espèce, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire simplifiée par jugement du 4 décembre 2013 de sorte que sa durée légale expirait le 04 décembre 2014.

Et le fait que le tribunal n'ait pas fait application des dispositions de l'article L.644-6 précité n'implique pas une prolongation de la durée de la liquidation judiciaire simplifiée ni une clôture de plein droit de cette procédure que A… ne soutient d'ailleurs pas et qu'elle n'a pas demandé en saisissant le tribunal à cette fin.

Du fait de l'absence de décision ordonnant la clôture de la liquidation judiciaire simplifiée et en raison du dépassement des délais de la liquidation judiciaire simplifiée, Me X… invoque à juste titre un retour automatique aux règles générales de la liquidation judiciaire impliquant une vérification de l'intégralité du passif - chirographaire compris- auquel A… a d'ailleurs participé en mars 2015 en approuvant les créances déclarées à l'exception de celle invoquée de l'Ursaff.

Il s'ensuit que A… soutient à tort que seul l'état de créances signé le 17 décembre 2014 serait à prendre en considération alors que le retour aux règles de la liquidation judiciaire implique une vérification de toutes les créances.

Et le principe posé par l'article R.624-9 d'un état de créance unique ne fait pas obstacle à l'établissement d'un état complémentaire en cas de substitution d'un régime de procédure collective à un autre.

Il convient en conséquence de débouter A… de sa demande tendant à ce que ne soit pris en compte que l'état définitif de créances établi en 2014 pendant le cours de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée.

* quant au montant certain de l'insuffisance d'actif

Me X… chiffre à la somme de 280'190,57 euros le montant du passif résultant des déclarations de créance et à la somme non contestée de 11'705,40 euros les éléments d'actifs recueillis.

Il n'est pas discuté que par courrier du 27 février 2015, A… a été convoquée à la réunion tenue le mardi 10 mars 2015 pour procéder à la vérification des déclarations de créance adressées au mandataire liquidateur.

Elle a signé et approuvé les déclarations de créance à l'exception de celle de l'URSSAF mais également de la créance fiscale portant sur une somme de 538 euros déclarée à titre définitif et une autre de 36'717 euros déclarée à titre provisionnel et privilégié, relatives à des cotisations foncières des entreprises, aux impôts sur les sociétés à la taxe sur la valeur ajoutée pour les périodes courants entre le mois de juillet 2012 et le mois de décembre 2013.

Pour autant, elle ne justifie pas avoir donné au mandataire liquidateur un quelconque justificatif susceptible d'étayer le caractère non dû des de créances concernées.

La somme de 280 190,57 euros résulte de l'état provisoire de créance en date du 17 mars 2015 mais l'état complémentaire de créances admises à titre définitif signé par le juge-commissaire le 8 février 2016 mentionne un montant échu définitif admis de 246'883,50 euros, l'écart se rapportant aux sommes dues au titre des supers privilèges de salaire et des sommes dues aux caisses sociales *

Il convient donc de retenir un passif de 246 883,50 euros regroupant 19 créanciers et un actif de 11 705,40 euros de sorte que l'insuffisance d'actif s'établit à 235 178 euros.

Sur les fautes

Aux termes de l'article L.651-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable aux faits de la cause, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion.

La charge de la preuve incombe à celui qui a pris l'initiative des poursuites

Sur les charges fiscales et sociales impayées

Me X… rappelle qu'il s'agit bien d'une faute de gestion ayant un relief particulier en l'espèce, car l'impayé à ce sujet est ancien et a permis le financement de l'activité poursuivie.

Y… née A… explique que le défaut de règlement des charges fiscales et sociales a fait l'objet d'une mesure de redressement fiscal mais que la société avait fait le nécessaire auprès du Trésor public pour la déclaration et le règlement des échéances relatives à la TVA. Ainsi l'absence de règlement de certaines dettes au regard des difficultés de l'entreprise ne peut être retenue comme une faute de gestion

Me X… justifie que le 19 décembre 2013, la direction générale des finances publiques a notifié à la s.a.s Dds, représentée par son liquidateur judiciaire, une modification de la base de calcul du montant de la TVA pour l'exercice clos au 31 décembre 2012, en raison d'une discordance de chiffre d'affaires, se chiffrant en réalité à 359'819 euros et non à 285'874 euros ainsi que déclaré, soit un écart de 158'293 euros impliquant une rectification du montant dû au titre de la TVA de 31'025 euros pour l'exercice 2012.

Il est inexact de la part de A… de prétendre avoir fait le nécessaire auprès de l'administration fiscale puisque la pièce nº 15 à laquelle elle fait référence n'est que la part de TVA dont elle s'est s'acquittée mois par mois au cours de l'exercice 2012 après déclaration du chiffre d'affaires mensuel alors que le contrôle effectué en fin d'exercice par l'administration fiscale laisse conclure à une dissimulation de chiffre d'affaires au cours de la même période ce qui a entraîné une taxation postérieure.

Mais cependant, il est établi que l'administration fiscale n'a appliqué aucune pénalité pour tenir compte de la situation de liquidation judiciaire de la société.

Il ne peut être retenu en conséquence que cette faute de gestion aurait contribué à l'insuffisance d'actif puisque la société aurait dû payer cette somme en tout état de cause.

Sur les irrégularités comptables

Me X… dénonce l'absence pure et simple de comptabilité au sens des articles L 123'1 et suivants du code de commerce pour la période postérieure au 1er juillet 2012 en soutenant que l'absence d'élément intentionnel n'est pas opposable à l'action civile fondée sur l'article L. 651'2 du code de commerce.

Y… née A… répond que la comptabilité a été confiée à un cabinet d'expertise comptable mais que les relations avec ce dernier avaient été difficiles et qu'il n'y avait eu aucun élément intentionnel de sa part.

L'article L.123-12 du code de commerce impose au dirigeant d'une société, la tenue d'une comptabilité et le manquement à cette obligation légale est une faute de gestion.

L'absence de comptabilité pour la période considérée postérieure au 1er juillet 2012 n'est donc pas discutée et la circonstance d'un litige survenu avec l'expert-comptable de la société n'a aucun caractère exonératoire.

Il est constant que l'absence de comptabilité prive l'entreprise d'un outil de gestion qui aurait permis en l'espèce à A… d'appréhender plus tôt l'impossibilité de redressement de la société au regard notamment des impayés nombreux survenus au cours du deuxième semestre 2012. Il convient de retenir le lien de causalité de cette faute avec le préjudice subi.

Sur la poursuite d'une activité déficitaire

Me X… soutient que la société avait connu une forte dégradation après le 1er juillet 2012 sans que sa présidente ne prenne aucune initiative au cours de cette période excluant que les difficultés personnelles de celle-ci puissent être exonératoires.

L'intimée répond que les difficultés de la société étaient liées au décès de l'associé fondateur et à la démission de son directeur B… conjuguée à une perte de clientèle ayant généré une chute importante du chiffre d'affaires en 2011. Mais elle avait pris les mesures structurelles qui s'imposaient pour maintenir l'équilibre financier de la société en procédant à deux licenciements économiques en septembre 2011 puis en octobre 2012 ;

L'exercice clos au 30 juin 2012 fait apparaître une diminution de chiffre d'affaires nette de 18'711 euros par rapport à l'exercice précédent et dans le cadre des déclarations au titre de l'impôt sur les sociétés, le bénéfice net a été déclaré à hauteur de 3923 euros sur l'exercice clos au 30 juin 2011 et à hauteur de 3105 euros au 30 juin 2012.

Pour autant, ce bilan ne peut être tenu pour sincère puisque l'administration fiscale a procédé à un redressement de TVA sur le chiffre d'affaires sur l'exercice 2012 pour le montant conséquent de 31.025euros. De plus, la société était en impayés depuis 2011 pour un total de 6 011 euros à l'égard de deux créanciers (Me Billet et les Editions Législatives) et depuis le début de l'année 2012, au titre des cotisations retraite du 2ème trimestre 2012 et de la société Orange pour un montant de 4170 euros auquel s'ajoute l'impayé de TVA.

S'il n'est pas contesté que la dirigeante a procédé au licenciement économique de deux personnes en raison de la baisse de l'activité conseil de la société, A… ne justifie d'aucune autre mesure susceptible de donner un nouvel élan à la société notamment sur ses autres activités (recherche de clientèle, diversification, réduction des coûts) jusqu'au jour où elle a été placée en arrêt de travail fin 2013.

Il convient donc de retenir cette faute de gestion qui a augmenté le passif de la société au vu des déclarations de créance se rapportant pour les plus nombreuses à la période postérieure au 1er juillet 2012 (Factures avocat: 1 745 euros et 729,59 euros , cotisations retraites: 7 692 euros, factures Orange : 472,29 euros, TVA : 5.692 euros, factures d'impression: 847,32 euros , Cotisation Réunica: 1 097 euros, Urssaf: 34 244 euros, Facture expert-comptable 2 306 euros, impayé de loyers : 1911,21 euros, 3 300,66 euros, 1 456,72 euros).

Sur l'incurie de la dirigeante

Me X… dénonce à ce titre une gestion non conforme à celle d'un bon père de famille ayant consisté à consentir des avances à des tiers, sci ou membres de la famille et à éluder la TVA.

A… se limite à répondre qu'il n'y a eu aucune passivité de sa part ayant au contraire pris des mesures pour maintenir l'équilibre financier de la société et la poursuite de son activité (restructuration, prise en compte des difficultés avec l'administration fiscale).

Mais il a été vu supra que le redressement fiscal lié à la minoration du chiffre d'affaire est postérieur aux déclarations mensuelles de TVA effectuées par A… au cours de l'année 2012 et que la restructuration s'est limitée au licenciement de deux salariés sans être accompagnée d'autres mesures de sorte que l'intimée ne peut valablement contrer ce grief précis par ces deux seules considérations.

Le bilan et le grand livre B… établis pour la période du 01 juillet 2011 au 30 juin 2012 laissent conclure à des mouvements au profit du personnel pour 32 210 euros, d'une sci Christau pour 12 475 euros et au profit d'une autre sci Gic pour 5 600 euros dont il est démontré pour les deux dernières qu'il s'agit de SCI dont A… et sa soeur sont gérantes ou membres.

Et si, Me X… indique en page 10 de ses conclusions : ' il sera important de vérifier que la société a demandé et obtenu au cours de la période s'écoulant entre le 1er juillet 2012 et sa liquidation judiciaire, le remboursement des avances faites à des salariées/associées, ou à des sociétés familialement proche de la dirigeante ' , il n'en demeure pas moins que ces flux ne sont pas davantage expliqués ni davantage l'intérêt que la société a pu en tirer.

Pour autant il n'est pas établi tenant les indications de Me X… ci-dessus reproduites qu'elles aient contribué à l'insuffisance de l'actif puisqu'il n'est pas exclu que la société ait obtenu le remboursement de ces avances.

Il convient de rejeter cette faute.

Sur la contribution à l'insuffisance d'actif

Si les différents manquements relevés ci-dessus ont par leur persistance et leur répétition, incontestablement contribué à l'insuffisance d'actif, il convient, par application du principe de proportionnalité, de prononcer une sanction adaptée à la gravité des fautes commises par une dirigeante dans le contexte particulier qu'elle explique et dont elle justifie (incapacité à poursuivre la dynamique antérieure et maladie) .

Ils ne justifient donc pas un comblement intégral de l'actif mais à tout le moins une contribution à cette insuffisance à hauteur de 50 % du passif soit la somme de 117 589 euros.

Sur les sanctions professionnelles

Au visa de l'article L.653-4, 1º, 3º, 4º et de l'article L.653-5 du code de commerce, Me X… maintient sa demande tendant au prononcé d'une faillite personnelle par la nécessité d'éviter la réitération d'actes illustrant une pratique déloyale du commerce et une gestion frauduleuse.

L'intimée répond que pour les mêmes motifs précédemment invoqués, aucune faillite personnelle ne peut être prononcée à son égard.

Il n'a été retenu contre A… que deux fautes de gestion tenant à l'absence de comptabilité et la poursuite d'une activité déficitaire et Me X… ne démontre pas la réunion des éléments constitutifs des agissements permettant l'application des dispositions de l'article L.653-4 précité.

Mais tenant les circonstances particulières exposés, il convient de faire application des dispositions de l'article L. 653-8 du code de commerce, de rejeter la demande de faillite personnelle et de prononcer une interdiction de diriger, gérer administrer et contrôler directement ou indirectement une entreprise commerciale ou artisanale pendant une durée de 2 ans.

Sur les frais de l'instance :

A… , qui succombe, devra supporter les dépens de l'instance et payer à Me X… ès qualités une somme équitablement arbitrée, à 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a dit que Mme Y… née A… devait supporter une partie de l'insuffisance d'actif.

L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau.

Dit que l'insuffisance d'actif s'établit à 235 178 euros.

Condamne Y… née A… à supporter 50 % de l'insuffisance d'actif et à verser à ce titre à Me X… ès qualités une somme de 117 589 euros.

Dit que cette somme sera productive d'intérêts au taux légal à compter de ce jour

Rejette la demande tendant au prononcé d'une faillite personnelle à l'encontre de Y… née A….

Prononce une interdiction de gérer, diriger ou administrer, une entreprise commerciale ou artisanale ou une personne morale pour une durée de 2 ans à l'encontre de Y… née A… née le 8 septembre 1983 à Avignon de nationalité française, domiciliée 439, chemin Saint Dominique à Courthezon (84'350)

Dit qu'en application de l'article R653-3 du code du commerce, la présente décision sera notifiée à la diligence du greffier de la cour dans les 15 jours de son prononcé, aux parties et au B….

Dit que la présente décision indépendamment des mentions portées au casier judiciaire fera l'objet des mesures de publicités prévues par l'article R.621-8 du code de commerce à la diligence du greffe de la cour

Dit que Y… née A… supportera les dépens de première instance et d'appel et payera à Me X… ès qualités une somme de 1500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.