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Décisions

Cass. 2e civ., 7 avril 2016, n° 15-10.126

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Cass. 2e civ. n° 15-10.126

6 avril 2016

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite de la destruction d'un local appartenant à la SCI Latour (la SCI), assurée auprès de la sociétés Prudence créole (la société Prudence), donné à bail commercial à la société Dindar autos (la société Dindar), assurée auprès de la société Allianz IARD (la société Allianz), un tribunal de grande instance a jugé la société Dindarresponsable du sinistre, fixé les créances respectives des sociétés Prudence et Latour à l'encontre de la société Dindar et condamné la société Allianz à payer par priorité à la SCI une certaine somme et à régler le solde dû au titre de sa garantie aux sociétés Prudence et Dindar à proportion de leurs créances respectives ; que la société Allianz a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été signifié par la société Latour ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :

Vu les articles 324 et 529 du code de procédure civile ;

Attendu que c'est seulement dans le cas où le jugement profite solidairement ou indivisiblement à plusieurs parties que chacune peut se prévaloir de la notification faite par l'une d'elles ;

Attendu que pour déclarer irrecevable comme tardif l'appel de la société Allianz, la cour d'appel, après avoir rappelé les termes de l'article 529, alinéa 2, du code de procédure civile et relevé que le jugement avait été signifié à la demande de la SCI à toutes les autres parties dont la société Allianz le 12 novembre 2013, retient que les décisions prises par le tribunal dans son dispositif ont un caractère indissociable, le jugement ayant condamné la société Allianz à garantir la société Dindar à hauteur du plafond de sa garantie, de sorte que toutes les parties intimées bénéficient de manière indivisible du jugement, que les condamnations prononcées par le tribunal procèdent en effet d'un fait générateur unique, l'incendie survenu dans les locaux de la SCI, avec mise en oeuvre de la garantie de l'assureur du locataire, la société Allianz, qu'il en résulte que chacune des parties pouvait se prévaloir de la notification faite par l'une d'elles, de sorte que l'appel formé par la société Allianz le 6 janvier 2014 a été déclaré à bon droit irrecevable à l'égard de toutes les parties, et non pas à l'égard de la seule SCI ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il n'existait aucune impossibilité d'exécuter séparément les dispositions du jugement concernant chacune des parties, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel :

Attendu que la société Dindar fait grief à l'arrêt de dire la requête en déféré recevable, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge est tenu, en toutes circonstances, de respecter le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur des pièces qui n'ont pas fait l'objet d'un débat contradictoire ; qu'en retenant qu' « il est justifié par la société Allianz de ce que la requête en déféré a été adressée par RPVA à la cour », cependant que la société Allianz, dans ses dernières conclusions d'appel, déposées et signifiées le 29 septembre 2014, ne produisait aucun justificatif de dépôt de sa requête par la voie du RPVA, comme le faisait valoir la société Dindar autos qui soutenait que le dépôt n'était pas conforme aux prescriptions de l'article 930-1 du code de procédure civile, la cour d'appel, qui a statué sur un élément de preuve qui n'avait pas été discuté contradictoirement, sans avoir invité les parties à présenter des observations sur ce point, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ qu'à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédures sont remis à la juridiction par voie électronique ; qu'en considérant, pour déclarer recevable la requête en déféré de la société Allianz, qu'elle avait en outre fait l'objet d'un dépôt à la cour dans les délais requis, sans s'expliquer davantage sur les modalités dans lesquelles ce dépôt est intervenu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 930-1 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la requête en déféré étant un acte de la procédure en application de l'article 727 du code de procédure civile, c'est sans violer le principe de la contradiction que la cour d'appel a, pour confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état, préalablement constaté que la requête en déféré lui avait été adressée par la voie électronique ;

Et attendu que la seconde branche du moyen, qui critique un motif surabondant, est inopérante ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen unique du pourvoi principal :

REJETTE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré irrecevable comme tardif l'appel formé par la société Allianz IARD le 6 janvier 2014 en tant que dirigé contre la SCI Latour, l'arrêt rendu le 6 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;

Condamne les sociétés Dindar, Prudence créole et Holdar aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société Dindar, de la société Prudence créole et de la société Holdar ; les condamne in solidum à payer à la société Allianz la somme globale de 3 000 euros ; condamne la société Allianz a payer à la société Latour la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept avril deux mille seize.