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Décisions

Cass. com., 24 mai 2017, n° 15-15.547

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Spinosi et Sureau

Bastia, du 10 déc. 2014

10 décembre 2014

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 10 décembre 2014), qu'en 2001, M. X...a été déclaré adjudicataire de la gérance d'un débit de tabac ; que soutenant qu'une société en participation avait été constituée entre eux pour l'exploitation de ce débit de tabac, M. Y...a assigné M. X..., à titre principal, en paiement de sa part de bénéfices au titre des années 2001 et suivantes et, à titre subsidiaire, en remboursement de sommes qu'il estimait lui être dues ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Y...fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de renvoi à l'audience du 9 octobre 2014 alors, selon le moyen, que le juge ne peut refuser un renvoi à une audience ultérieure d'une affaire fixée pour être plaidée, qu'à la condition que les parties aient été mises en mesure d'exercer leur droit à un débat oral ; qu'en rejetant la demande de renvoi formulée par M. Y..., tandis qu'elle constatait l'existence d'un mouvement de grève des avocats, qui constituait pour lui un obstacle insurmontable à faire valoir oralement ses observations par l'intermédiaire d'un avocat, la cour d'appel a violé les articles 432 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le principe du respect des droits de la défense et du droit au procès équitable ;

Mais attendu que si les parties ont la libre disposition de l'instance, l'office du juge est de veiller au bon déroulement de celle-ci dans un délai raisonnable ; que la faculté d'accepter ou de refuser le renvoi, à une audience ultérieure, d'une affaire fixée pour être plaidée, relève du pouvoir discrétionnaire du juge, dès lors que les parties ont été mises en mesure d'exercer leur droit à un débat oral ; que le renvoi de l'audience de plaidoirie ayant été demandé en raison d'un mouvement de grève des avocats, c'est sans violer le principe du procès équitable et les droits de la défense que la cour d'appel, devant laquelle les parties, régulièrement convoquées par la voie de leurs conseils, n'ont pas été privées de l'exercice de leur droit à un débat oral, a rejeté cette demande ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que M. Y...fait grief à l'arrêt de dire qu'il ne peut justifier de sa qualité d'associé et qu'il est irrecevable à solliciter la moitié des bénéfices et, en conséquence, de rejeter la demande de partage de bénéfice alors, selon le moyen :

1°/ que le juge, tenu de statuer sur les demandes dans l'ordre fixé par les parties, ne peut examiner la demande subsidiaire avant la demande principale ; qu'en affirmant que M. Y...se fondait sur un document qui, avant d'être envisagé comme fondateur d'une société, fondait sa demande de remboursement tandis que les conclusions de M. Y...sollicitaient d'abord le partage des bénéfices de la société en participation et subsidiairement, le remboursement de la somme versée à M. X..., la cour d'appel a dénaturé les conclusions dont elle était saisie et a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que par une attestation datée du 6 juin 2001, M. X...avait reconnu avoir perçu de M. Y...la somme de 215 000 francs « dans le cadre de sa participation égalitaire concernant un bureau de tabac » ; qu'en considérant que « si le document litigieux peut valoir reconnaissance de dette, il ne peut valoir document fondateur d'une société en participation », l'analysant ainsi comme un simple prêt, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé l'article 1134 du code civil ;

3°/ que la disproportion entre la valeur des apports n'exclut pas l'existence d'un contrat de société ; qu'en déniant l'existence d'un contrat de société, après avoir constaté le versement par M. Y...à M. X...de la somme de 215 000 francs, au motif impropre que M. Y...n'établissait pas avoir réalisé 50 % des apports nécessaires à la constitution de la société, la cour d'appel a violé les articles 1832 et 1843-2 du code civil ;

4°/ qu'en déniant l'existence d'un contrat de société à raison de ce que M. Y...n'établissait pas avoir réalisé 50 % des apports nécessaires à la constitution de la société et de ce que la redevance due à la direction régionale de Corse était précomptée sur les remises allouées lors de livraisons, de sorte que pour le fonctionnement du débit de tabac, M. X...n'avait pas besoin du soutien financier de M. Y..., sans répondre au moyen déterminant de M. Y...soutenant que la création du débit de tabac nécessitait l'engagement d'autres frais que le seul paiement de la redevance, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que l'absence de participation effective aux bénéfices et aux pertes est impropre à écarter la qualification de contrat de société, seule l'intention de participer aux bénéfices et aux pertes devant être recherchée ; qu'après avoir constaté que « M. Y...a souhaité être associé aux bénéfices du débit de tabac adjugé à M. X...», l'arrêt attaqué écarte néanmoins l'existence d'un contrat de société à raison de ce que M. Y...ne démontre pas « sa participation aux pertes et aux bénéfices » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 1832 et 1871 du code civil ;

6°/ que l'affectio societatis ne suppose pas, dans une société en participation, l'intention de gérer les affaires courantes de la société ; qu'en déduisant l'absence d'affectio societatis de ce que M. Y...ne démontrait pas être intervenu dans la gestion quotidienne du débit de tabac, la cour d'appel a violé les articles 1832 et 1871 du code civil ;

Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt retient que les documents produits par M. Y..., s'ils établissent qu'il a eu la volonté de se rapprocher des activités de M. X..., ne prouvent pas qu'il s'est occupé de la vie de l'entreprise, qu'il est intervenu dans la gestion quotidienne du débit de tabac ou qu'il s'est activement impliqué en qualité d'associé ; qu'en l'état de ces appréciations souveraines, desquelles elle a déduit l'absence d'affectio societatis, la cour d'appel a retenu à bon droit que l'existence d'une société en participation n'était pas démontrée ; que le moyen, qui manque en fait en sa première branche et qui critique des motifs surabondants en ses deuxième, troisième, quatrième et cinquième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.