Cass. com., 19 mai 2015, n° 14-10.348
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocat :
SCP Richard
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 23 mai 2013), qu'après la résolution du plan de redressement de la société LM Les 5 éléments (la société), dont M. X... était le gérant, celle-ci a été mise en liquidation judiciaire le 22 avril 2009, la date de cessation des paiements étant fixée au 10 décembre 2008 ; que, le 31 janvier 2011, le liquidateur a assigné M. X... en paiement de l'insuffisance d'actif et prononcé d'une mesure d'interdiction de gérer ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à supporter partie de l'insuffisance d'actif de la société alors, selon le moyen :
1°/ que la cessation des paiements est définie comme l'impossibilité, pour le débiteur, de faire face au passif exigible avec son actif disponible ; qu'en se bornant à affirmer que la société se trouvait en état de cessation des paiements à la date du 10 décembre 2008, pour en déduire que M. X... avait commis une faute de gestion en s'abstenant de déclarer la cessation des paiements dans le délai qui lui était imparti, sans indiquer quels étaient, à cette date précise, l'actif disponible et le passif exigible de la société, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la cessation des paiements de l'entreprise à la date qu'elle a retenue, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 631-1 du code de commerce, ensemble au regard de l'article L. 651-2 du même code ;
2°/ que ne commet pas une faute de gestion, le dirigeant social qui, pour les besoins de la vie courante, prélève une rémunération qui n'est pas excessive, ni inconciliable avec la situation économique et financière de l'entreprise ; qu'en se bornant à affirmer, pour décider que M. X... avait commis une faute de gestion, à relever qu'il s'était attribué une rémunération de 8 400 000 FCFP, sans pour autant constater que cette rémunération aurait été excessive et inconciliable avec la situation économique et financière de la société, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la faute de gestion qu'elle a retenue à l'encontre de M. X..., a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
3°/ que le dirigeant social qui a commis une faute de gestion ne peut être tenu de supporter tout ou partie de l'insuffisance d'actif de la société, qu'à la condition que cette faute se trouve en relation de cause à effet avec l'insuffisance d'actif ; qu'en se bornant, pour condamner M. X... à supporter une partie de l'insuffisance d'actif de la société, à relever qu'il n'avait pas remis les pièces comptables de l'entreprise au mandataire liquidateur, qui avait ainsi été empêché de connaître avec précision la situation de la société, sans pour autant relever le moindre élément permettant d'établir que cette omission se serait trouvée en relation de cause à effet avec l'insuffisance d'actif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
4°/ que le dirigeant social qui a commis une faute de gestion ne peut être tenu de supporter tout ou partie de l'insuffisance d'actif de la société, qu'à la condition que cette faute se trouve en relation de cause à effet avec l'insuffisance d'actif ; qu'en se bornant, pour condamner M. X... au paiement d'une partie de l'insuffisance d'actif, à relever qu'il avait procédé au remboursement de son compte courant d'associé à hauteur de la somme de 4 000 000 FCFP, sans pour autant relever le moindre élément permettant d'établir que ce prélèvement se serait trouvé en relation de cause à effet avec l'insuffisance d'actif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
5°/ que le dirigeant social qui a commis une faute de gestion ne peut être tenu de supporter tout ou partie de l'insuffisance d'actif de la société, qu'à la condition que cette faute se trouve en relation de cause à effet avec l'insuffisance d'actif ; qu'en se bornant, pour condamner M. X... à supporter une partie de l'insuffisance d'actif, à relever qu'il avait profité à titre personnel du véhicule de la société, sans pour autant relever le moindre élément permettant d'établir que ce véhicule n'aurait pas été utilisé par la société, ni par là même relevé que la location de ce véhicule aurait présenté un lien de causalité avec l'insuffisance d'actif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
Mais, attendu, en premier lieu, que l'omission de déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal, susceptible de constituer une faute de gestion, s'apprécie au regard de la seule date de la cessation des paiements fixée dans le jugement d'ouverture ou dans un jugement de report ; qu'ayant retenu, pour déterminer que M. X... avait déclaré tardivement l'état de cessation des paiements, la date fixée par le jugement prononçant la liquidation judiciaire de la société, la cour d'appel n'avait pas à caractériser la cessation des paiements à cette date ;
Attendu, en deuxième lieu, qu'en constatant que M. X... s'était attribué, au cours de l'année 2008, une rémunération de 8 400 000 FCFP quand la société présentait un passif de 63 000 000 FCFP et ne réglait plus ses impôts, ses charges sociales et ses fournisseurs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Et attendu, en dernier lieu, que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt relève que M. X... a procédé, au cours de l'année 2008, au remboursement de son compte courant d'associé à concurrence de 4 000 000 FCFP et a souscrit un contrat de location au nom de la société pour un véhicule dont il a profité à titre personnel quand la société réalisait à la même époque des pertes importantes et ne pouvait faire face à ses impôts, ses charges sociales et ses fournisseurs ; qu'il relève encore que l'absence de comptabilité a empêché le gérant de connaître avec précision la situation de la société ; que, par ses constatations et appréciations, faisant ressortir que M. X... a cessé d'apporter son aide financière à la société à un moment où celle-ci en avait besoin et lui a fait, en outre, supporter des dépenses dans son intérêt personnel, la cour d'appel a ainsi caractérisé le lien de causalité existant entre les fautes qu'elle relevait et l'insuffisance d'actif ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de prononcer à son encontre une interdiction de gérer pour une durée de dix ans alors, selon le moyen, que la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation du chef de l'arrêt ayant condamné M. X... à combler une partie de l'insuffisance d'actif, au motif qu'il avait commis des fautes de gestion, devra entraîner la cassation par voie de conséquence du chef de l'arrêt ayant prononcé à son encontre une interdiction de gérer, en se fondant sur les mêmes motifs, et ce, par application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Mais, attendu que le rejet du premier moyen rend le second sans objet ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.