Cass. 2e civ., 16 février 2012, n° 11-12.617
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Loriferne
Rapporteur :
M. Salomon
Avocat général :
Mme Lapasset
Avocats :
Me Foussard, SCP Célice, Blancpain et Soltner
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail , 10 novembre 2010), que M. X..., salarié de la société Munch (la société), a déclaré, le 18 janvier 2001, une maladie professionnelle ; que la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle (la caisse) lui ayant attribué une rente calculée sur un taux d'incapacité permanente partielle de 67 %, la société a contesté devant un tribunal du contentieux de l'incapacité l'opposabilité de cette décision; que ce tribunal ayant accueilli ce recours en raison du défaut de communication du rapport d'évaluation des séquelles, la caisse a interjeté appel devant la Cour nationale ; qu'en cours d'instance, elle a sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture, prononcée le 15 décembre 2009, au motif que les dispositions de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 et du décret n 2010-424 du 28 avril 2010 permettaient d'enjoindre au service du contrôle médical de transmettre au secrétariat de la juridiction copie du rapport ayant contribué à la fixation du taux d'incapacité ;
Sur les premier et troisième moyens :
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture, alors, selon le moyen :
1°/ que les dispositions de l'article L. 143-10, issues de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, et les articles R. 143-32 et R. 143-33, issus du décret n° 2010-424 du 28 avril 2010, applicables à compter du 1er mai 2010, et régissant tant la procédure devant le tribunal de l'incapacité que la procédure devant la Cour nationale, commandaient, dès lors que la Cour nationale était tenue de s'y conformer, la révocation de l'ordonnance de clôture précédemment intervenue ; qu'en refusant de ce faire, l'arrêt attaqué a violé l'article 2 du code civil, en tant qu'il prescrit l'application immédiate des règles de procédure, les articles 4 du code civil et 12 du code de procédure civile, en tant qu'ils obligent le juge à statuer conformément aux règles de droit applicables, ensemble les articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale, outre les articles R. 143-27 et R. 143-29 anciens du code de la sécurité sociale ;
2°/ que le droit au procès équitable, tel que résultant de l'article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est garanti, dès lors que la procédure de communication étant organisée dans les mêmes conditions, pour la première instance comme pour l'instance d'appel, l'employeur est en mesure, devant le juge d'appel qui a le pouvoir de réexaminer le litige en droit et en fait, de connaître les éléments médicaux afférents à la contestation, et de s'expliquer sur les documents ou de les combattre ; que de ce point de vue, l'arrêt doit être regardé comme rendu en violation de l'article 2 du code civil, en tant qu'il prescrit l'application immédiate des règles de procédure, des articles 4 du code civil et 12 du code de procédure civile, en tant qu'ils obligent le juge à statuer conformément aux règles de droit applicables, des articles R. 143-27 et R. 143-29 anciens du code de la sécurité sociale, des articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale, ensemble de l'article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ que les juges du second degré étaient tenus de statuer en conformité avec l'article L. 143-10, issu de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009, et les articles R. 143-32 et R. 143-33, issus du décret n° 2010-424 du 28 avril 2010, et dès lors, ils étaient tenus d'admettre la communication des documents médicaux en cause d'appel ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 2 du code civil, en tant qu'il prescrit l'application immédiate des règles de procédure, les articles 4 du code civil et 12 du code de procédure civile, en tant qu'ils obligent le juge à statuer conformément aux règles de droit applicables, ensemble les articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale ;
4°/ que le droit au procès équitable, tel que garanti par l'article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, était suffisamment assuré par la circonstance qu'une communication pouvant intervenir en cause d'appel selon une procédure organisée par les textes, l'employeur était, en l'espèce, en mesure d'en débattre ; que de ce point de vue, l'arrêt doit être regardé comme rendu en violation de l'article 2 du code civil en tant qu'il prescrit l'application immédiate des règles de procédure, des articles 4 du code civil et 12 du code de procédure civile en tant qu'ils obligent le juge à statuer conformément aux règles de droit applicables, des articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale, ensemble de l'article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain et sans violer les dispositions de l'article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que la Cour nationale, ayant retenu que la caisse devait produire, en application de l'article R. 143-8 du code de la sécurité sociale, avant l'ouverture des débats devant le tribunal du contentieux de l'incapacité, les documents médicaux concernant l'affaire et que cette carence ne pouvait être réparée devant la Cour nationale par la production du rapport du médecin-conseil du contrôle médical, selon les modalités fixées par l'article R. 142-32 du même code, dans sa rédaction issue du décret du 28 avril 2010, a refusé de révoquer l'ordonnance de clôture ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et, sur le deuxième moyen :
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de refuser de rouvrir les débats, alors, selon le moyen, qu'à supposer par impossible que la Cour nationale n'ait pas été tenue de révoquer l'ordonnance de clôture, à tout le moins avait-elle l'obligation de rouvrir les débats, sous une autre forme, pour appliquer la loi nouvelle et permettre aux parties d'exercer les droits qui en découlaient ; qu'en refusant de ce faire, les juges ont violé l'article 2 du code civil, en tant qu'il prescrit l'application immédiate des règles de procédure, les articles 4 du code civil et 12 du code de procédure civile, en tant qu'ils obligent le juge à statuer conformément aux règles de droit applicables, ensemble les articles L. 143-10, R. 143-32 et R. 143-33 du code de la sécurité sociale, outre les articles R. 143-27 et R. 143-29 anciens du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que la faculté, accordée au président par l'article 444 du code de procédure civile, d'ordonner la réouverture des débats, hors les cas où celle-ci est obligatoire, relève de son pouvoir discrétionnaire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.