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Décisions

CA Metz, ch. com., 30 janvier 2018, n° 15/03497

METZ

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Hittinger

Conseillers :

Mme Flauss, Mme Devignot

TGI Thionville, du 19 mars 2015

19 mars 2015

EXPOSE DU LITIGE

La société LORRAINE PROPRETE SERVICES, gérée par Madame M., avait pour activité le nettoyage de bâtiments et le nettoyage industriel.

A la requête de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES, la chambre commerciale du Tribunal de grande instance de THIONVILLE a ouvert une procédure de liquidation judiciaire de cette dernière par jugement du 30 juin 2011 et désigné la SCP N. N. L., prise en la personne de Maître Jean-Marc N., en qualité de liquidateur.

Par acte d'huissier du 11 août 2014, la SCP N. N. L., prise en la personne de Maître Jean-Marc N., en qualité de liquidateur de l'EURL LORRAINE PROPRETE SERVICES, a fait signifier à Mme M., gérante de droit de la société et M. M., regardé comme gérant de fait de ladite société, l'acte introductif d'instance enregistré au greffe de la chambre commerciale du Tribunal de grande instance de THIONVILLE le 23 juin 2015 aux fins de condamner ceux-ci à supporter l'insuffisance d'actif de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES et de prononcer à leur encontre une mesure de faillite personnelle de cinq ans.

Par jugement réputé contradictoire du 19 mars 2015, le Tribunal de grande instance de THIONVILLE a :

- condamné Madame Nadia M. née K. à payer à la SCP N. N. L., prise en la personne de Maître Jean-Marc N., ès qualités de mandataire liquidateur de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES, la somme de 46.173,86 €;

- dit que ces sommes entreront dans le patrimoine de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES et seront réparties entre les créanciers au marc le franc;

- prononcé la faillite personnelle de Madame Nadia M. née K. pour une durée de cinq ans;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire;

- condamné Madame Nadia M. née K. à payer à la SCP N. N. L., prise en la qualité de Maître Jean-Marc N., ès qualité de mandataire liquidateur de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES, la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile;

- condamné Madame Nadia M. née K. à payer les dépens, qui seront employés en frais privilégiés de la procédure collective ;

- débouté les parties de toute autre demande.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont jugé, en premier lieu, que Madame Nadia M. avait commis une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif en poursuivant l'activité déficitaire de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES dans son intérêt personnel et celui de son époux, Monsieur Idris M.. Ils l'ont ainsi condamnée à supporter l'insuffisance d'actif, s'élevant à la somme de 46 173,86 €.

En second lieu, les juges ont souligné que Madame Nadia M. s'était rendue coupable d'agissements contraires à ses responsabilités de chef d'entreprise et incompatibles avec l'exercice d'une profession commerciale justifiant ainsi que soit prononcée à son encontre une mesure de faillite personnelle.

En dernier lieu, les premiers juges ont cependant considéré qu'il n'était pas établi que le rôle de Monsieur Idris M. avait excédé celui d'un simple salarié et ils ont ainsi rejeté les demandes de la SCP N. N. L. à son encontre.

Par déclaration en date du 13 novembre 2015, enregistrée au greffe de la Cour d'Appel de METZ sous le n° RG 15/03497, Monsieur et Madame M. ont interjeté appel du jugement.

Par conclusions du 16 novembre 2015, Monsieur Idris M. s'est désisté de l'appel formé pour son compte à l'encontre du jugement du 19 mars 2015.

Par arrêt mixte du 9 mars 2017, la présente Cour a :

- constaté le désistement de M. Idris M. ;

- annulé l'acte de signification du jugement entrepris à Mme Nadia M. le 10 juin 2015;

- écarté la fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel de Mme Nadia M. et déclaré recevable l'appel formé par cette dernière ;

- rejeté la demande de nullité de l'acte de signification et d'assignation transformé en procès verbal de recherches infructueuses du 11 août 2014 ;

- écarté l'exception de prescription de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif ;

- sursis à statuer sur le surplus des demandes ;

- ordonné la réouverture des débats ;

- invité les parties à présenter leurs explications sur l'existence d'un actif de l'EURL LORRAINE PROPRETE SERVICES ;

- renvoyé l'affaire pour être plaidée à l'audience du 31 octobre 2017.

Aux termes de ses ultimes écritures en date du 30 octobre 2017, Madame Nadia M. sollicite de la Cour de :

- rejeter les demandes de la SCP N. N. L. dirigées contre elle et les dire mal fondées ;

- subsidiairement, réduire considérablement et en tout état de cause à de plus justes proportions la somme mise à sa charge au titre de l'insuffisance d'actif de l'EURL LORRAINE PROPRETE SERVICES ;

- condamner la SCP N. N. L. prise en la personne de Maître Jean-Marc N., ès qualités de mandataire-liquidateur de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES, en tous les frais et dépens de la première instance et d'appel ainsi qu'au paiement d'une somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile;

- dire et juger que ces dépens et que cette indemnité seront employés en frais privilégiés de la procédure collective.

Madame Nadia M. fait valoir que l'insuffisance d'actif ne peut être établie au vu du seul état provisoire de synthèse du passif et des créances, ainsi qu'il se déduit du second alinéa de l'article L.641-4 du code de commerce. Elle ajoute que la société LORRAINE PROPRETE SERVICES disposait en outre d'actifs que le liquidateur avait omis de mentionner.

Elle relève que le liquidateur judiciaire, dans ses conclusions du 16 octobre 2017, mentionne l'existence d'un actif de 4 029,15€ et fait valoir que l'insuffisance d'actif ne saurait dès lors excéder 42 144,71€

Elle conteste en outre l'existence d'une faute de gestion et le fait qu'elle aurait poursuivi abusivement l'activité de l'entreprise. Elle rappelle à ce titre que le redressement fiscal et les dettes de l'URSSAF n'ont pas été admis au passif et qu'ils sont sans incidence sur l'insuffisance d'actif. Enfin, elle affirme que les rémunérations de Monsieur Idris M. ne peuvent être considérées comme des détournements ou des abus quelconques dès lors que le statut de salarié de celui-ci a été reconnu par un arrêt irrévocable.

Dans ses dernières écritures en date du 16 octobre 2017, la SCP N. N. L. demande à la Cour de :

- dire irrecevable et subsidiairement mal fondé l'appel interjeté le 13 novembre 2015 par Madame M. contre le jugement rendu le 19 mars 2015 par le Tribunal de grande instance de THIONVILLE;

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions;

- condamner Madame M. en tous les frais et dépens d'instance et d'appel;

- condamner Madame M. à verser à la SCP N. N. L., prise en la personne de Maître N. es qualités de mandataire judiciaire à la liquidation de l'EURL LORRAINE PROPRETE SERVICES, une somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

En premier lieu, sur la validité des significations, la SCP N. N. L. fait valoir que l'huissier s'est présenté à la dernière adresse connue de Madame Nadia M. puis a dressé un procès verbal de recherches infructueuses. Elle soutient alors qu'à la date de l'introduction de la demande en justice, aucun élément n'avait été porté à la connaissance du mandataire judiciaire lui permettant de supposer un changement d'adresse, seul M. M. ayant fait état d'un changement d'adresse. Elle rappelle qu'en application des dispositions de l'article R662-1 du code de commerce, les notifications adressées aux débiteurs personnes physiques sont régulièrement faites à l'adresse déclarée au greffe du début de la procédure. Elle ajoute que Mme M. n'a jamais déclaré sa véritable adresse, qu'elle a demandé à la mairie de ne pas communiquer sa nouvelle adresse et qu'elle n'a pas fait état de son changement d'adresse au registre du commerce et des sociétés.

La SCP N. N. L. en déduit que les significations de l'acte introductif d'instance et du jugement querellé sont régulières.

Elle soutient ainsi que l'appel de Madame Nadia M. est irrecevable pour avoir été formé cinq mois après la signification du jugement entrepris.

Elle expose qu'en tout état de cause, l'acte introductif d'instance n'est pas argué d'irrégulier et que donc l'effet dévolutif joue pleinement de telle sorte que la Cour d'appel a l'obligation de trancher sur le fond.

Sur la fin de non recevoir tirée de la prescription de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, la SCP N. N. L. soutient que l'instance devant le Tribunal de grande instance de THIONVILLE a été introduite par un acte introductif d'instance et que c'est donc à la date de l'ordonnance présidentielle ayant appelé l'affaire à l'audience qu'il convient de se placer pour savoir si la prescription est acquise, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Sur le fond, la SCP N. N. L. expose que le chiffrage précis de l'insuffisance d'actif n'est pas nécessaire pour engager la responsabilité du dirigeant dès lors que cette insuffisance est établie.

Elle indique qu'en l'espèce, le passif admis s'élève à la somme de 46 173,86€ tandis que l'actif s'élève à une somme de 4 029€ correspondant à :

- actif inventorié et vendu aux enchères publiques, le solde revenant à la procédure après déduction des frais liés à la vente, selon décompte de l'huissier instrumentaire : 15,36€ ;

- solde du compte à la SOCIETE GENERALE : 206,08€ ;

- relances clients effectuées : 3 807,71€.

Elle soutient ensuite que Madame Nadia M. a poursuivi une activité déficitaire dans son intérêt personnel, que la société qu'elle gérait a fait l'objet d'un redressement fiscal et de majoration de l'URSSAF du fait de ses manquements. Elle affirme que ces agissements constituent une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif, justifiant sa condamnation et le prononcé d'une mesure de faillite personnelle à l'encontre de la gérante.

Par conclusions du 14 décembre 2017, le Procureur général fait valoir qu'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif peut être engagée avant que l'état des créances ne soit arrêté dès lors que le montant du passif s'avère indiscutablement supérieur à l'actif au moment où le juge statue.

Il expose que le passif est manifestement supérieur à l'actif en l'espèce et estime que Mme M. a commis une faute de gestion ayant contribué à une aggravation du passif en se versant ainsi qu'à son époux des salaires respectifs de 4 000€ et 3 028€ alors que le chiffre d'affaires stagnait et que des cotisations sociales restaient impayées. Il requiert en conséquence la confirmation du jugement entrepris.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il convient de rappeler que la Cour s'étant prononcée sur la validité des significations ainsi que sur l'exception de prescription de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif par arrêt mixte du 9 mars 2017, de sorte qu'elle ne peut, sans méconnaître l'autorité de sa propre décision,se prononcer à nouveau sur la recevabilité de l'appel de Mme M..

La demande tendant à dire l'appel de Mme M. irrecevable est donc elle-même irrecevable.

Sur l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif

L'article L. 651-1 du code de commerce énonce que « les dispositions de ce chapitre [intitulé « De la responsabilité pour insuffisance d'actif »] sont applicables aux dirigeants d'une personne morale de droit privé soumise à une procédure collective, ainsi qu'aux personnes physiques représentants permanents de ces dirigeants personnes morales et aux entrepreneurs individuels à responsabilité limitée ».

Il s'évince de l'article L. 651-2 du code de commerce que « lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance sera supporté, en tout ou partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux ayant contribué à la faute de gestion ».

Aux termes de l'article L651-2 du Code de commerce, « lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée ».

- Sur l'insuffisance d'actif

L'article L641-4 du Code de commerce dispose : « il n'est pas procédé à la vérification des créances chirographaires s'il apparaît que le produit de la réalisation de l'actif sera entièrement absorbé par les frais de justice et les créances privilégiées, à moins que, s'agissant d'une personne morale ou d'un entrepreneur individuel à responsabilité limitée, il n'y ait lieu de mettre à la charge des dirigeants sociaux de droit ou de fait ou de cet entrepreneur tout ou partie du passif conformément à l'article L. 651-2 ».

Cependant, il n'est pas nécessaire pour qu'il soit fait application de l'article L.651-2 du code de commerce que le passif soit entièrement chiffré ni que l'actif ait été réalisé, il suffit que l'insuffisance d'actif soit certaine.

L'existence et le montant de l'insuffisance d'actif sont appréciés au moment où statue la juridiction saisie de l'action tendant à la faire supporter par le dirigeant social.

Le moyen tiré de ce que la cour ne pourrait faire droit à la demande faute pour l'insuffisance d'actif d'être définitivement établie doit être rejeté.

Par ailleurs, en l'espèce, il n'est nullement établit que le liquidateur aurait été dispensé de vérifier les créances déclarées au passif de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES et l'état des créances provisoire versé aux débats tend à démontrer l'inverse. De plus, l'acte introductif d'instance fait mention de la signature de l'état des créances par le juge commissaire au 31 août 2012.

Il en résulte que le moyen tiré de ce qu'il n'aurait pas été procédé à une vérification des créances de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES manque également en fait.

En l'espèce, l'état de synthèse du passif provisoire (pièce 7 Me N.) fait apparaître un passif admis pour un montant de 46 173,86€, seule une créance d'un montant de 85,50 euros ayant été contestée sur l'ensemble des créances déclarées.

Aux termes des conclusions du liquidateur judiciaire, la société LORRAINE PROPRETE SERVICES ne dispose pour seul actif que d'une somme de 4 029,15€, se décomposant comme suit:

- actif inventorié et vendu aux enchères publiques: 15,36€;

- solde du compte de la société: 206,08 euros

- créances clients recouvrées : 3 807,71 euros.

Le montant de l'actif vendu aux enchères est corroboré par l'huissier chargé de la vente (pièce 17 Me N.).

En revanche, l'appelante se prévaut du défaut de justification des créances client ayant pu être recouvrées. A ce titre, le liquidateur ne verse aux débat aucun document comptable de synthèse sur le montant de l'actif ou de documents explicatifs précis sur l'état des créances détenues par la société LORRAINE PROPRETE SERVICES au jour de sa liquidation.

Il convient de relever que l'état de synthèse de l'exercice clos au 31 décembre 2010 de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES, joint à la liasse fiscale de déclaration pour l'impôt sur le revenu 2011 ( pièce 10 Me N.) faisait état de créances clients d'un montant de 18 896 euros et de créances diverses à hauteur de 15 054 euros.

Après l'arrêt mixte de la cour, le liquidateur expose que 3 807,71 euros de créances ont été recouvrées. Aucune information n'est donnée sur les autres créances inscrites en comptabilité de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES à l'exercice clos six mois avant son placement en liquidation judiciaire.

Eu égard aux éléments en sa possession au jour où elle statue, l'actif de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES au titre des créances détenues sur des tiers devant être retenu pour évaluer l'insuffisance d'actif est celui inscrit en comptabilité au 31 décembre 2010, soit la somme totale de 33.950 euros (18 896 + 15 054).

En ajoutant les sommes recouvrées au titre de l'actif inventorié et du solde du compte de la société, l'actif de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES à retenir s'élève à 34 171,44 euros.

Il en résulte qu'au regard du montant des créances non contestées et de l'actif à retenir, l'insuffisance d'actif doit être considérée comme certaine. Elle s'élève, au minimum, à la somme de 12 002,42 euros.

- Sur l'existence de fautes de gestion

Il n'est pas contesté que Mme M. s'est octroyé un salaire annuel d'environ 48 000€ au cours de l'année 2010 alors que cette même année, l'activité de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES se trouvait être déficitaire à hauteur de 100 528€. Au titre de l'exercice clos le 3 décembre 2008 (pièce 1 Me N.), Mme M. avait perçu un salaire annuel de 21 000€. Il s'en évince que l'appelante a doublé sa rémunération en l'espace de deux années dans un contexte qu'elle savait difficile, l'EURL ayant accusé une perte de 2 180€ en 2009. Il est en outre démontré que les prélèvements se sont poursuivis jusqu'en avril 2011 alors même que les difficultés de la société étaient patentes.

En revanche, la faute de gestion tenant au versement d'un salaire de 3028 euros à M. M. est insuffisamment démontrée, alors que la qualité de salarié de ce dernier a été reconnue par arrêt de la cour d'appel de Metz du 18 novembre 2014 (pièce 11 Me N.) et qu'il ressort de ce même arrêt que le contrat de travail de M. M. a été conclu le 5 juin 2006, avant que la société LORRAINE SERVICES ne rencontre des difficultés.

De même, le fait que les créances de l'URSSAF auraient été minorées en 2010 et que Mme M. a omis de payer certaines cotisations et d'en déclarer d'autre sur la même période ne peut être retenu comme ayant contribué à l'insuffisance d'actif en l'absence d'admission au passif de la créance de l'URSSAF correspondante.

Enfin, s'il la société LORRAINE PROPRETE SERVICES a fait l'objet d'un redressement fiscal en juin 2010 ayant conduit à mettre à sa charge la somme de 19 701 euros au titre des pénalités et charges, il résulte des comptes de la société clos en 2010 que cette somme n'a pas été acquittée (pièce 10 Me N.). L'administration fiscale n'ayant en outre déclaré aucune créance (pièce 6 Me N.), il n'est pas établi que la faute de gestion de Mme M. au titre de ses obligations fiscales ait contribué, directement ou indirectement à l'insuffisance d'actif.

- Sur la condamnation

Le comportement de Mme M. qui n'a pas tenu compte de la situation de la société qu'elle dirigeait en poursuivant des versements importants sur les comptes de cette dernière justifie que Mme M. soit condamnée à supporter l'intégralité de l'insuffisance d'actif.

Elle sera condamnée à payer au liquidateur la somme de 12 002,42 euros.

Le jugement entrepris est infirmé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Sur la faillite personnelle

Aux termes de l'article L653-4 du Code de commerce, « le tribunal peut prononcer la faillite personnelle de tout dirigeant, de droit ou de fait, d'une personne morale, contre lequel a été relevé l'un des faits ci-après :[...]

3° Avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ['];

4° Avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale».

Il résulte de ce qui précède que Mme M. a commis une faute de gestion, notamment en se versant un salaire mensuel moyen de 4 000€ tandis que l'EURL accusait une perte de 100 528€ au titre de l'exercice de l'année 2010 et en poursuivant ces versements en 2011.

Ce comportement est de nature à caractériser les cas visés aux 3° et 4° de l'article L.653-4 précité.

La nature et la gravité de la faute justifient de fixer la durée de la mesure à cinq ans.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement sur ce point.

Sur les demandes accessoires

En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Pour se déterminer, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut, pour ces motifs, même d'office, dire n'y avoir lieu à ces condamnations.

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, les dépens sont laissés à la charge de la partie perdante.

L'équité commande de rejeter les demandes au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Mme M. succombant, elle sera condamnée aux dépens

PAR CES MOTIFS

Vu l'arrêt mixte de la cour d'appel de céans du 9 mars 2017,

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

- Déclare irrecevable la demande réitérée tendant à ce que l'appel de Mme M. soit déclaré irrecevable ;

- Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a fixé le montant de la condamnation de Mme M. en comblement de l'insuffisance d'actif à la somme de 46.173,86 euros ;

Statuant à nouveau dans cette mesure :

- Condamne Madame Nadia M. née K. à payer à la SCP N. N. L., prise en la personne de Maître Jean-Marc N., ès qualités de mandataire liquidateur de la société LORRAINE PROPRETE SERVICES, la somme de 12 002,42 €;

- Rejette les demandes exposées au titre des frais irrépétibles exposées en appel.

- Condamne Madame Nadia M. en tous les frais et dépens.