Cass. com., 17 novembre 2015, n° 14-18.980
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Marc Lévis
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 6 mars 2014, rectifié par un arrêt du 27 mars 2014), que M. X... a ouvert le 28 février 2006 dans les livres de la société Le Crédit lyonnais (la banque) un compte personnel sur livret sur lequel il a déposé des fonds provenant de la vente d'un immeuble dépendant de la communauté ayant existé avec son épouse, Mme Y... ; que prétendant avoir découvert en septembre 2008 l'existence d'opérations de débit effectuées entre juin 2006 et juillet 2007, notamment par son épouse, sans procuration, M. X... a assigné la banque en restitution des fonds correspondants et paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ que le banquier dépositaire des fonds ne doit restituer les fonds déposés qu'à celui au nom duquel le dépôt a été effectué ou à celui qui a été indiqué pour les recevoir ; qu'en refusant d'engager la responsabilité du Crédit lyonnais qui a pourtant restitué les fonds à une personne autre que M. X..., seul titulaire du compte sur livret, sur ordre de l'épouse de ce dernier, la cour d'appel a violé l'article 1937 du code civil, ensemble l'article 221 du code civil ;
2°/ que si la réception sans protestation ni réserve des avis d'opérer et des relevés de compte fait présumer l'existence et l'exécution des opérations qu'ils indiquent, elle n'empêche pas le client, pendant le délai convenu ou, à défaut, pendant le délai de la prescription, de reprocher à celui qui a effectué ces opérations d'avoir agi sans mandat ; qu'en retenant, pour débouter M. Alain X... de sa demande de restitution des fonds indûment prélevés sur son compte sur livret par l'épouse de ce dernier, dépourvue de toute procuration sur ce compte, qu'il n'avait pas protesté alors qu'il était pourtant constant que l'épouse ne bénéficiait pas d'une procuration sur le compte de son époux, la cour d'appel a violé les articles 1937 et 1989 du code civil, ensemble l'article 221 du code civil ;
3°/ qu'en se bornant à relever que M. X... s'était abstenu de toute contestation pendant plus de deux ans à réception de ses relevés de compte sur livret alors qu'il avait reçu les intérêts créditeurs de son compte bancaire au début de l'année 2008 et que nombre d'opérations avaient été effectuées au profit d'un compte commun dont il était cotitulaire ou de l'Eurl dont il était le gérant et l'associé unique, y compris pour régler le salaire des employés, éléments pourtant impropres à caractériser une volonté non équivoque de ratification, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1937 et 1998 du code civil ;
4°/ qu'en retenant que M. X... avait ratifié les opérations litigieuses en ne protestant pas à la réception de ses relevés de compte sur livret et des comptes de son Eurl, sans rechercher si la procuration donnée par M. X... à son épouse sur le compte de l'Eurl, entreprise constituant un bien commun, ne légitimait pas l'absence de contrôle, par ce dernier, des fonds déposés sur le compte de cette société constituant le bien commun de M. et Mme X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1937 et 1989 du code civil ;
5°/ qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions de M. Alain X... faisant valoir qu'en toute hypothèse deux opérations de caisse d'un montant total de 11 000 euros n'étaient pas justifiées ni quant à l'identité de la personne ordonnant le retrait ni quant à la destination de ces sommes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la responsabilité de la banque teneur du compte sur lequel sont effectuées des opérations, sans procuration par le conjoint du titulaire de celui-ci ou un tiers, n'est pas engagée si le titulaire du compte les ratifie conformément aux règles du mandat, cette ratification pouvant être tacite ; que l'arrêt retient que M. X..., en signant la convention d'ouverture du compte, a reconnu avoir pris connaissance de l'envoi par la banque d'un relevé mensuel, qu'il a ensuite lui-même effectué de multiples opérations sur le compte, que celles estimées litigieuses, loin d'être isolées ou limitées dans le temps, consistent en trente retraits ou virements et en l'émission d'un chèque de banque étalés sur plus d'un an, entre juin 2006 et juillet 2007, que les sommes prélevées ont été versées sur des comptes communs ou sur ceux de l'entreprise de M. X... et que les opérations n'ont fait l'objet, de la part de M. X..., d'aucune réclamation avant les deux années qui ont suivi l'exécution des premiers virements ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, rendant inopérantes la recherche invoquée par la quatrième branche et les conclusions visées à la cinquième, la cour d'appel, qui a souverainement retenu que M. X... avait tacitement ratifié l'ensemble des opérations litigieuses, y compris les deux pour lesquelles le donneur d'ordre n'était pas identifiable avec certitude, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.