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Décisions

Cass. com., 7 décembre 1993, n° 91-22.217

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

Mme Loreau

Avocat général :

Mme Piniot

Avocats :

SCP Boré et Xavier, Me Le Prado

Versailles, du 20 nov. 1991

20 novembre 1991

Sur les deux moyens, réunis, pris en leurs deux branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 20 novembre 1991), rendu sur renvoi après cassation, que M. Henri de X... d'Héritot et ses deux fils François et Alain (les consorts de X... d'Héritot), qui avaient acheté des actions de la Société cotonnière transocéanique, en ont fait apport à la Société nouvelle Cofin et à la Société nouvelle Corinvest, créées à cet effet, et ont reçu en rémunération de ces apports des actions de ces dernières sociétés ; que les actions ainsi reçues ont été cédées par les consorts de X... d'Héritot et à la Société financière et immobilière (la SOFIM) et à la Compagnie de financement industriel (la CFI), qui, par actes datés du 6 mai 1980, ont consenti aux consorts de X... d'Héritot des promesses de vente portant respectivement sur 13 954 actions de la Société nouvelle Cofin et 17 696 actions de la Société nouvelle Corinvest ; que, de leur côté, les consorts de X... d'Héritot se sont engagés, par actes de même date, à acheter aux sociétés SOFIM et CFI les actions visées dans les promesses de ventes souscrites par celles-ci ; que, le 19 avril 1984, les sociétés SOFIM et CFI, qui avaient, le 3 janvier 1984, mis en demeure, sans succès, les consorts de X... d'Héritot de respecter leurs engagements, les ont assignés en régularisation des ventes promises ; que ceux-ci ont soutenu que leur obligation était éteinte dans la mesure où l'objet de cette obligation avait disparu, dès lors que les assemblées générales extraordinaires des actionnaires des Sociétés nouvelle Cofin et nouvelle Corinvest avaient décidé de procéder à une augmentation de capital par annulation des actions anciennes et création d'actions nouvelles ;

Attendu que M. Henri de X... d'Héritot fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné, avec ses deux fils, à payer aux sociétés SOFIM et CFI le montant du prix des actions promises, tel que prévu dans le contrat, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'à titre exceptionnel, le droit français reconnaît l'existence d'action sans valeur nominale pour les actions de travail des sociétés anonymes à participation ouvrière, les actions de jouissance appartenant à l'Etat de certaines sociétés d'économie mixte, les actions de sociétés d'investissement à capital variable ; qu'en l'espèce, il est constant que les Sociétés nouvelle Cofin et nouvelle Corinvest ne rentraient dans aucune des catégories de sociétés susvisées ; que le montant de leurs actions ne pouvait donc être inférieur à 100 francs ; qu'en déclarant dès lors que la valeur des actions de ces deux sociétés, bien que réduite à zéro à la fin de l'année 1982, donc avant la levée de l'option du 3 janvier 1984, n'en existait pas moins pour condamner M. Henri de X... d'Héritot, en dépit de ses écritures sur ce point, à payer la valeur des actions, la cour d'appel a violé l'article 206 du décret du 23 mars 1967 ; et alors, d'autre part, que si le transfert de la propriété des actions et des risques de la chose vendue a eu lieu le 3 janvier 1984, à la charge de M. Henri de X... d'Héritot, les vendeurs qui n'étaient plus propriétaires des actions après cette date, ne pouvaient pas, sans faute de leur part, se livrer, sans lui en référer, ni pour solliciter son avis ni pour l'aviser des décisions prises, aux opérations suivantes jusqu'en 1985 : passation par profits et pertes des actifs sociaux, modification statutaire, changement d'administrateur, poursuite de l'exploitation en dépit des pertes, augmentation de capital, réduction de ce capital et annulation des actions ; que, tout en constatant que postérieurement au 3 janvier 1984, les sociétés venderesses avaient procédé à ces opérations et notamment à l'annulation des actions litigieuses, la cour d'appel a considéré que l'impossibilité de délivrance des actions n'était pas due à la faute des vendeurs ; d'où il suit que la cour d'appel a violé les articles 1134, 1302 et 1138 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'en retenant que si les actions litigieuses avaient perdu toute valeur (" réduite à néant ") par suite de la disparition de l'actif net social des sociétés émettrices, ces actions n'en existaient pas moins au moment de la mise en demeure délivrée par les sociétés SOFIM et CFI, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, d'autre part, qu'après avoir exactement énoncé que l'acheteur restait tenu de payer le prix bien que la chose ait été perdue, à la seule condition que la perte ne puisse être imputée à la faute du vendeur, l'arrêt retient que c'était la diminution des capitaux propres des Sociétés nouvelle Cofin et nouvelle Corinvest, conséquence de la diminution des valeurs des actions de la Société cotonnière transocéanique dont les vendeurs n'assumaient pas la gestion, qui avait nécessité l'augmentation de capital destinée à assurer, conformément à la loi, la reconstitution, par les actionnaires en titre, de ces capitaux à une valeur au moins égale à la moitié du capital social, de sorte que le " périssement " de l'objet de la vente, consistant en l'annulation des actions anciennes, n'était pas dû à la faute du débiteur qui avait, dès le 3 janvier 1984, soit avant la tenue des assemblées générales du 21 novembre 1985 ayant décidé de cette augmentation de capital et de l'annulation des actions anciennes, mis en demeure les acheteurs ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Qu'il s'ensuit que les moyens ne sont fondés en aucune de leurs branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.