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Décisions

Cass. 2e civ., 2 février 2012, n° 11-12.308

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Boval

Rapporteur :

Mme Bardy

Avocat général :

M. Lathoud

Avocats :

Me Foussard, SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau

Versailles, du 28 oct. 2010

28 octobre 2010

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 octobre 2010), que la société Compagnie européenne de garanties et de cautions (la banque) a, en vertu d'une ordonnance sur requête rendue le 23 juillet 2009, fait procéder, le 29 juillet 2009, à l'inscription provisoire d'une hypothèque conservatoire sur des biens immobiliers appartenant à M. et Mme X... ; qu'elle leur a fait signifier l'ordonnance et la requête par un acte d'huissier de justice, délivré le 3 août 2009, reproduisant les mentions prévues aux 2° et 3° de l'article 255 du décret du 31 juillet 1992 ; que M. et Mme X... ont fait assigner la banque devant un juge de l'exécution aux fins d'obtenir la mainlevée de la mesure ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'ordonner la mainlevée de l'inscription d'hypothèque provisoire, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article 255 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992, s'il prévoit que le créancier ayant inscrit une hypothèque judiciaire provisoire sur un immeuble de son débiteur doit signifier à celui-ci, huit jours au plus tard après le dépôt des bordereaux d'inscription, une copie de l'ordonnance du juge ayant autorisé la mesure, en revanche, il ne prévoit en aucune façon, qu'une copie des bordereaux eux-mêmes doit être signifiée ; qu'au cas d'espèce, en jugeant que l'inscription provisoire d'hypothèque prise par la banque était caduque et que sa mainlevée devait être ordonnée, motif pris de ce que le créancier n'avait pas signifié aux débiteurs, en même temps qu'une copie de l'ordonnance du juge ayant autorisé la mesure conservatoire, une copie des bordereaux d'inscription, les juges du fond ont violé l'article 255 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 ;

2°/ que la caducité emportant mainlevée prévue par l'article 255 du décret du 31 juillet 1992 ne s'attache de plein droit qu'au non-respect du délai de huit jours prévu par le texte ; qu'en revanche, la mainlevée de la mesure conservatoire ne peut être prononcée, lorsqu'est en cause le non-respect du contenu de la signification qui doit être faite au débiteur par le créancier, que, par voie de conséquence de la nullité de l'acte de procédure que constitue la signification ; que cette nullité, comme celle de tout acte de procédure, lorsqu'elle est poursuivie pour irrégularité de forme, ne peut être prononcée qu'à charge pour le débiteur concerné de démontrer le grief que lui a causé l'irrégularité ; qu'au cas d'espèce, à supposer, par impossible, que l'article 255 du décret du 31 juillet 1992 doive être interprété en ce sens qu'il impose au créancier, outre la signification au débiteur d'une copie de l'ordonnance par laquelle le juge a autorisé la mesure conservatoire, d'une copie des bordereaux d'inscription provisoire d'hypothèque, à défaut, l'acte est atteint d'une irrégularité de forme et sa nullité, seule à même d'entraîner la caducité de la mesure dès lors que le délai de huit jours a par ailleurs été respecté, est subordonnée à la démonstration d'un grief ; qu'au cas d'espèce, étant constant que le délai de huit jours avait été respecté par la banque, les juges du fond ne pouvaient prononcer la mainlevée de l'inscription provisoire d'hypothèque au seul motif que les débiteurs ne s'étaient pas vus signifier copie des bordereaux d'inscription d'hypothèque sans constater que cette absence leur avait causé un grief ; qu'à cet égard l'arrêt attaqué manque de base légale au regard des articles 255 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 et 114 du code de procédure civile ;

3°/ que la signification prévue par l'article 255 du décret du 31 juillet 1992 a pour but de permettre au débiteur, le cas échéant, de former un recours pour obtenir la mainlevée de la sûreté judiciaire prise par le créancier ; qu'à cet égard, son information est suffisamment assurée par la signification de la copie de l'ordonnance du juge ayant autorisé la mesure conservatoire, ainsi que par les mentions obligatoires prévues par le texte qui sont notamment relatives aux voies et modalités de recours, sans qu'il soit besoin qu'une copie des bordereaux d'inscription de l'hypothèque judiciaire provisoire lui soit en outre adressée, étant rappelé que cette inscription étant publiée à la conservation des hypothèques, le débiteur peut en prendre connaissance comme n'importe quel intéressé ; qu'au cas d'espèce, en considérant caduque l'inscription provisoire d'hypothèque prise par la banque, motif pris de ce que les débiteurs ne s'étaient pas vus signifier une copie des bordereaux d'inscription, les juges du fond ont violé l'article 255 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992, ensemble les articles 2428 et 2449 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'acte délivré le 3 août 2009 par la banque à M. et Mme X..., qui se bornait à leur signifier l'ordonnance rendue le 23 juillet 2009 par le juge de l'exécution l'autorisant à prendre une inscription d'hypothèque provisoire sur leurs biens immobiliers, en leur remettant copie de cette décision et de la requête et en rappelant les modalités légales de mainlevée de l'inscription, ne mentionnait pas que la banque avait procédé à l'inscription provisoire d'hypothèque le 29 juillet 2009, et justement retenu que le défaut d'information des débiteurs sur l'existence de l'inscription d'hypothèque était sanctionné par la caducité de l'inscription, la cour d'appel a exactement décidé qu'il y avait lieu d'ordonner la mainlevée de la mesure conservatoire ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.