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Décisions

Cass. com., 15 mai 2012, n° 11-12.999

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Rapporteur :

M. Le Dauphin

Avocat général :

M. Mollard

Avocats :

SCP Blanc et Rousseau, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Paris, du 10 déc. 2010

10 décembre 2010

Sur la recevabilité du pourvoi, examinée d'office après avis donné aux parties :

Vu l'article 1843-4 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 décembre 2010), que MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E..., et Mme F...(les consorts X...), associés de la société civile des Mousquetaires, en ont été exclus par différentes assemblées générales de 1998 à 2003 ; que les consorts X... ayant saisi le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil, pour faire déterminer la valeur de leurs droits sociaux, un expert a été désigné à cette fin par ordonnance du 7 mars 2007 ; que par une nouvelle ordonnance du 17 mai 2010, le président du tribunal a désigné, aux mêmes fins, un expert en remplacement du premier ;

Attendu que la société des Mousquetaires fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'appel de l'ordonnance du 17 mai 2010, alors, selon le moyen :

1°/ que seule la décision du président du tribunal de grande instance ordonnant une expertise sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil n'est pas susceptible de recours ; qu'en revanche, aucun texte ne prévoit que l'ordonnance de ce juge par lequel il désigne un nouvel expert, en remplacement d'un premier expert déjà désigné, soit elle-même sans recours possible ; qu'en déclarant irrecevable l'appel de la SCM en ce qu'il tendait à la réformation de la décision, la cour d'appel a violé l'article 1843-4 du code civil ;

2°/ que commet un excès de pouvoir le juge qui remplace l'expert désigné en application de l'article 1843-4 du code civil sans mettre préalablement fin à sa mission ; qu'en refusant de sanctionner l'excès de pouvoir du premier juge qui avait désigné un nouvel expert sans s'être préalablement prononcé sur la fin de mission du premier expert désigné, la cour d'appel a elle-même méconnu les pouvoirs qu'elle tenait de l'article 1843-4 code civil ;

3°/ que le juge n'a le pouvoir de procéder au remplacement de l'expert désigné en application de l'article 1843-4 du code civil qu'à la condition que celui-ci n'ait pas accepté sa mission ou que les parties y aient mis fin d'un commun accord ; que dans ses conclusions d'appel, la SCM soutenait que l'expert G...n'avait pas refusé sa désignation mais qu'il avait au contraire commencé à instruire, dénotant ainsi son acceptation de la mission qui lui avait été confiée ; qu'en s'arrogeant le pouvoir de désigner un nouvel expert en remplacement de M. G...sans rechercher s'il n'avait pas accepté sa mission, toute renonciation ultérieure de sa part étant dépourvue d'effet sur ce mandat accepté, la cour d'appel a méconnu les pouvoirs qu'elle tenait de l'article 1843-4 du code civil ;

4°/ que par sa lettre du 14 août 2009, l'expert initialement désigné ne faisait que prendre acte, à la suite d'un échange de courriers avec le conseil de MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E..., et Mme F..., du refus exprimé par ceux-ci de le confirmer en sa qualité d'expert après les hésitations dont il avait lui-même fait preuve à cette égard en 2007 ; qu'en affirmant néanmoins que, dans cette lettre du14 août 2009, l'expert avait confirmé avoir décliné sa mission en 2007, refus dont elle a ensuite déduit le pouvoir du premier juge pour procéder au changement d'expert, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis et ainsi violé l'article 1134 du code civil ;

5°/ qu'en retenant que l'expert avait, dans sa lettre du 14 août 2009, « réitéré » le refus de poursuivre sa mission qui aurait été initialement formulée en 2007, sans rechercher comme elle y était pourtant invitée si l'expert n'avait pas poursuivi les opérations d'expertise en 2008, ce qui rendait impossible toute réitération d'un refus exprimé en 2007, lequel était devenu caduc, la cour d'appel a encore excédé les pouvoirs qu'elle tient de l'article 1843-4 du code civil ;

6°/ que la renonciation de l'expert désigné en application de l'article 1843 du Code civil à la mission qu'il a préalablement acceptée doit être claire et sans équivoque ; qu'en procédant au remplacement de M. G...au motif de la prétendue défection de celui-ci, sans s'être assurée que celui-ci avait manifesté une volonté claire et non-équivoque de renoncer à sa mission et que celle-ci ne résultait pas d'une confusion de l'expert, entretenue par les consorts X..., lequel avait cru, à tort, qu'il ne pouvait poursuivre sa mission, la cour d'appel a encore excédé les pouvoirs qu'elle tient de l'article 1843-4 du code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'il résulte de l'article 1843-4 du code civil que la décision par laquelle le président du tribunal de grande instance, statuant en application de ce texte, procède à la désignation d'un expert chargé de déterminer la valeur de droits sociaux, fût-ce en remplacement d'un premier expert ayant renoncé à sa mission, est sans recours possible ; que cette disposition s'applique, par sa généralité, au pourvoi en cassation comme à toute autre voie de recours ; qu'il n'y est dérogé qu'en cas d'excès de pouvoir ;

Attendu, en second lieu, que les griefs articulés par les deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches ne sont pas de nature à caractériser un excès de pouvoir ;

D'où il suit que, formé contre une décision qui n'est pas entachée d'excès de pouvoir et qui n'a pas consacré un excès de pouvoir, le pourvoi n'est pas recevable ;

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi.