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Décisions

Cass. com., 5 juillet 2017, n° 15-22.936

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SCP Marlange et de La Burgade, SCP Odent et Poulet

Douai, du 4 juin 2015

4 juin 2015

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 juin 2015), que M. X... a été nommé le 1er octobre 2010 directeur général de la société Groupe Maisonneuve, qui exerce une activité de promotion immobilière ; qu'aux termes des statuts de cette société, la révocation du directeur général ne pouvait intervenir que pour un motif grave ; qu'ayant été révoqué de ses fonctions le 14 novembre 2011 et contestant l'existence d'un tel motif, M. X... a assigné la société Groupe Maisonneuve en paiement de dommages-intérêts pour révocation abusive ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de nullité de l'assemblée générale ayant procédé à sa révocation pour défaut de représentation de la société Gomafi alors, selon le moyen, que dans les sociétés par actions simplifiées, les personnes morales associées ne peuvent être représentées que par leur représentant légal en personne, ou, à défaut, par les personnes autorisées par les statuts ; que l'article 28 des statuts de la SAS Groupe Maisonneuve stipulait : « Les associés peuvent se faire représenter aux délibérations de l'assemblée par son conjoint ou un autre associé » ; qu'il devait nécessairement s'en déduire que la société Gomafi, associée majoritaire de la SAS Groupe Maisonneuve, ne pouvait se faire représenter aux assemblées de cette SAS que par son dirigeant légal en personne ou, à défaut, un autre associé de la SAS ; qu'en considérant au contraire que la société Gomafi aurait pu être régulièrement représentée, à l'assemblée générale du 14 novembre 2011, non par son dirigeant légal, ni par un autre associé de la SAS, mais par un tiers, M. Y..., qui aurait reçu pouvoir de M. Z..., président de la société Gomafi, la cour d'appel a violé les articles L. 227-9 du code de commerce et 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, qu'il ressortait du procès-verbal de l'assemblée générale ordinaire de la société Groupe Maisonneuve et de la feuille de présence qui y était annexée que la société Gomafi, représentée par un mandataire habilité, était présente, ce qui excluait ainsi l'application de la clause des statuts de la société Groupe Maisonneuve stipulant qu'un associé peut, au moyen d'un pouvoir, se faire représenter aux délibérations de l'assemblée par un autre associé, la cour d'appel en a exactement déduit que l'assemblée générale ayant décidé la révocation du mandat de directeur général de M. X... n'était pas entachée de nullité ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de dommages-intérêts alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque les statuts d'une société par actions simplifiées prévoient, comme en l'espèce, que la révocation du président ou d'un directeur général ne peut intervenir que pour un motif grave, il appartient à l'auteur de la décision de révocation de prouver ce motif grave ; qu'en jugeant que la révocation de M. X... serait intervenue pour un motif grave, aux motifs adoptés du jugement entrepris qu'il n'aurait « pas démontré avoir mis en oeuvre les moyens appropriés pour remédier » aux dysfonctionnements de la société ni « initié des solutions efficaces », et en laissant ainsi à M. X... la charge d'établir l'absence de motif grave de révocation, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;

2°/ qu' il ressort de l'arrêt attaqué qu'en application des statuts, le directeur général ne pouvait être révoqué que pour un motif grave ; que pour contester l'existence d'un tel motif, M. X... faisait valoir que le président de la SAS Maisonneuve avait obtenu quitus de sa gestion pour les années 2010 et 2011 ; que compte tenu de ce quitus, et dans la mesure où M. X... avait, avec le président, la charge de la gestion et de l'administration de la société, sans qu'aucune répartition statutaire des pouvoirs ne soit prévue, il ne pouvait donc être révoqué pour « compromission de l'intérêt social » ou « atteinte portée au bon fonctionnement de la société » ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce qui précède, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 227-5 du code de commerce ;

3°/ que pour contester l'existence d'un motif grave de révocation, M. X... faisait valoir, concernant l'augmentation tarifaire qui lui est reprochée, d'une part, qu'il s'agissait de l'aboutissement d'un travail de groupe de plusieurs mois réalisé dans un contexte où les résultats commerciaux étaient conformes aux objectifs avec « lancement de nouveaux modèles, d'innovations liées à des contraintes techniques supplémentaires » et à « l'augmentation du coût des matériaux », d'autre part, qu'il avait fait preuve d'adaptabilité et non d'incohérence en permettant aux commerciaux une latitude de négociation de 3 à 4 %, pour ne pas perdre d'affaire ; qu'en affirmant que la hausse tarifaire aurait été inadéquate, sans s'expliquer sur ce qui précède, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 227-5 du code de commerce ;

4°/ qu'au surplus, pour contester l'existence d'un motif grave de révocation, M. X... faisait valoir que, malgré une équipe de vente diminuée, passée de 35 salariés au 31 décembre 2008 à 20 salariés au 31 décembre 2010, ses équipes et lui-même avaient réalisé 127 ventes à fin août 2011, contre 126 à fin août 2010 ; qu'en affirmant que la politique tarifaire de M. X... aurait fait perdre des marchés au Groupe Maisonneuve qui aurait vendu « 138 maisons en 2011 contre 190 maisons en 2010 », sans s'expliquer sur la diminution du nombre des commerciaux invoquée par M. X..., qui avait été révoqué en toute hypothèse le 14 novembre 2011, et avait encore permis la vente de onze maisons pendant les mois de septembre et octobre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 227-5 du code de commerce ;

5°/ que sur la force de vente, il faisait valoir, dans ses conclusions d'appel , en se fondant notamment sur les témoignages de MM. A... et B..., que les commerciaux étaient « formés à plusieurs niveaux » et que « la mise en place de challenges réguliers a(vait) permis l'émulation et la motivation de la force de vente » ; qu'en affirmant, par motifs adoptés des premiers juges, que M. X... « ne démontre nullement avoir fourni aux forces de vente les moyens de sa politique commerciale de développement », sans s'expliquer sur ce qui précède, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 227-5 du code de commerce ;

6°) que sur la prétendue absence de communication entre les services et de réunions pour traiter les problèmes, se fondant toujours sur les témoignages des salariés de l'entreprise ou de consultant associé, M. X... faisait valoir que la SAS Groupe Maisonneuve procédait par voie d'affirmation, en évoquant des « situations très marginales », « dans un contexte d'audit perdurant », qui ne reflétait pas l'ambiance de travail instaurée depuis des années ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce point, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 227-5 du code de commerce ;

7°) que sur les dérives des compagnons, M. X... faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, que « pour la période de janvier 2011 à mi-septembre 2011, 34 courriers (avaient) été notifiés au personnel ouvrier » et que des « licenciements individuels (étaient) intervenus », ce qui justifiait le « plan d'action » et les « mesures répressives » de M. X... qui cherchait toujours en même temps « à augmenter le niveau de compétences et de performances des équipes (compagnons et conducteurs) grâce à la formation interne aux techniques de fabrication et à la formation externe au management » ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce qui précède, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 227-5 du code de commerce ;

Mais attendu que l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que M. X... a pris, en 2011, une décision inadaptée d'augmentation des tarifs de vente des biens commercialisés, suivie presque aussitôt de décisions contradictoires qui, provoquant une désorganisation des équipes commerciales ainsi qu'un manque de clarté tarifaire pour la clientèle, ont été à l'origine d'une perte de parts de marchés qui s'est traduite par un exercice 2011 en baisse par rapport au précédent ; que l'arrêt retient encore que les revirements successifs de M. X... démontrent son inadaptation aux fonctions de direction, au détriment du bon fonctionnement et des résultats de la société qu'il dirigeait ; que de ces constatations et appréciations, faisant ressortir l'existence de fautes personnelles imputables au directeur général qui portaient atteinte à l'intérêt social, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve et qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu déduire que la révocation de M. X... était intervenue pour un motif grave, peu important le quitus donné au président de la société pour sa gestion ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.