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Décisions

CA Lyon, 3e ch. a, 16 août 2018, n° 18/01718

LYON

Arrêt

Autre

PARTIES

Défendeur :

La Procureure Générale

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Esparbes

Conseillers :

Mme Homs, M. Bardoux

Avocats :

Me Aguiraud, Me Bes, Me Laffly, Me Dumont-Latour, Me Jeantet

T. com. Lyon, du 1 mars 2018, n° 2018122…

1 mars 2018

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

La SAS V Industrie immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Lyon le 27 décembre 1979 avait pour président, à compter du 1er juillet 2013, la SAS V Développement dont le président était M. Emmanuel A et le directeur général, M. Robert V

Par jugement du 28 juillet 2015, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la résolution du plan de sauvegarde de la société V Industrie et ouvert le redressement judiciaire lequel a été converti en liquidation judiciaire par jugement du 7 janvier 2016. Me Sabourin a été désigné en qualité de liquidateur judiciaire.

Par assignation du 29 mai 2017, MM. A et V ont été attraits devant le tribunal de commerce de Lyon par Me Sabourin ès qualités de liquidateur judiciaire aux fins de les voir condamner solidairement à payer, sur le fondement de I ’article L. 651-2 du code de commerce, la somme de 3 170 508 € en réparation du préjudice subi par la société V Industrie en raison de I ’insuffisance d’actif résultant d’opérations réalisées avec la société de droit tunisien Energy Industrie dont M. Robert V est dirigeant et associe.

Par écrit du 10 janvier 2018, intitule “avis sur requête en transaction”, le juge-commissaire, sur requête de Me Sabourin ès qualités, a autorisé ce dernier à transiger selon les modalités fixées par le protocole qui lui avait été soumis et dit que conformément à I ‘article L. 642-24 du code de commerce, la transaction serait soumise a I ‘homologation du tribunal.

Par jugement du 1er mars 2018, le tribunal de commerce de Lyon, statuant sur requête du liquidateur en date du 8 janvier 2018, a rejeté la demande d'homologation du protocole transactionnel et dit que les dépens sont tires en frais privilégiés de la procédure.

Par déclaration reçue le 5 mars 2018, M. A à interjeté appel de cette décision. Par déclaration reçue le 22 mars 2018, M. V a également forme appel. 

Par ordonnance du 5 avril 2018, les deux procédures ont été jointes.

Par conclusions déposées le 16 avril 2018, fondées sur les articles L. 642-24 et R. 642-41, L. 651, L. 651-1, R. 662-12, L. 662-3 alinéa 2, ('article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de I ’homme et des libertés fondamentales et les articles 455 et 458 du code de procédure civile, M. A demande à la cour de :

au principal,

-             constater I ‘absence de convocation et d'audition du débiteur dans les formes et conditions de la loi et son absence procédurale tant devant le tribunal que devant la cour,

-             prononcer en conséquence la nullité du jugement entrepris et renvoyer les parties à mieux se pourvoir devant le tribunal de la procédure conformément à la loi,

-             constater I ‘absence de rapport du juge-commissaire, écrit ou oral, devant les premiers juges et juger cette formalité substantielle s'agissant du processus d'homologation juridictionnelle d'une transaction,

-             annuler le jugement entrepris,

-             renvoyer les parties à mieux se pourvoir devant le tribunal de la procédure,

-             constater que les débats ont eu lieu devant le tribunal en chambre du conseil en violation des dispositions impératives de la loi sur la publicité des débats,

-             prononcer en conséquence la nullité du jugement entrepris,

-             renvoyer les parties à mieux se pourvoir devant le tribunal de la procédure,

-             constater I ‘insuffisance de motivation du jugement entrepris qui équivaut à son absence,

-             annuler en conséquence le jugement entrepris,

-             renvoyer les parties à mieux se pourvoir à nouveau devant le tribunal de la procédure, subsidiairement et en toute hypothèse sur le fond,

-             reformer le jugement entrepris et statuant à nouveau,

-             dire y avoir lieu a homologation du protocole transactionnel régularisé par les parties le 8 janvier 2018,

-             dire que les dépens seront tires en frais privilégiés de la procédure.

Par conclusions déposées le 26 avril 2018, fondées sur les articles R. 662-2, R. 662-3 alinéa 2, L. 651 et L. 651-1 du code de commerce, 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de I ‘homme et des libertés fondamentales, I ‘article 47 de la Charte des droits fondamentaux de I ’Union européenne, M. V' : demande à la cour de :

au principal,

-             prononcer la nullité du jugement du 1er mars 2018,

subsidiairement, sur le fond,

-             reformer le jugement du 1er mars 2018,

statuant à nouveau,

-             homologuer la transaction signée entre les parties le 8 janvier 2018.

Par conclusions déposées le 14 mai 2018, fondées sur les articles L. 642-24, L. 651-2, L. 651-3 du code de commerce, Me Sabourin ès qualités demande à la cour de :

-             constater la recevabilité de l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif,

-             constater que sur l’homologation du protocole transactionnel, il s’en rapporte à la décision de la cour d’appel.

-             condamner MM. A et V . à lui payer 2 500 € chacun au titre de I ‘article 700 du code de procédure civile,

-             condamner solidairement M. A et M. V’ aux entiers dépens distraits au profit de la SELARL Les avoue avocats sur son affirmation de droit. 

Par observations du 15 mai 2018, communiquées aux parties, le ministère public s'en rapporte sur les causes de nullité mises en avant par M. A, Subsidiairement au fond, il sollicite la confirmation du jugement faute pour la transaction de prévoir une contribution suffisamment significative des appelants au regard de I ‘insuffisance d’actif constatée.

MOTIFS DE LA DECISION

Tout d’abord, il y a lieu de rejeter la demande de Me Sabourin ès qualités relative à la recevabilité de l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif qu’il a introduit à l’encontre de MM. A et V En effet, la cour n’est pas saisie d’un jugement rendu sur cette action mais d’un jugement rendu sur requête de Me Sabourin ès qualités, aux fins d’homologation d’une transaction sur le fondement de l’article L. 642-24 du code de commerce.

Aux termes du texte précité, le liquidateur peut transiger sur toutes les contestations qui intéressent collectivement les créanciers avec l’autorisation du juge-commissaire, le débiteur entendu ou dument appelé ; si l’objet de la transaction est d’une valeur indéterminée ou excède la compétence en dernier ressort du tribunal, la transaction est soumise à l’homologation.

L’article R. 642-41 précise que lorsqu’en application de I ‘article L. 642-24, il y a lieu, pour le juge-commissaire, d’autoriser le liquidateur à transiger, le greffier convoque le débiteur a [’audience quinze jours avant celle-ci en joignant a cette convocation la requête du liquidateur ; que si la transaction est soumise à l’homologation du tribunal, le débiteur est convoqué dans les mêmes conditions.

En l’espèce, la société V Industrie, qui est la débitrice dans la procédure collective, n’a pas été convoquée devant le tribunal de commerce ce qui constitue une irrégularité entamant la nullité du jugement.

II n’y a pas lieu de renvoyer les parties à mieux se pouvoir devant le tribunal de la procédure collective, la cour étant saisie du litige par l’effet dévolutif.

L’article 2044 définit la transaction comme un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naitre.

Une transaction implique [’existence de concessions réciproques des parties.

En I ‘espèce la transaction met fin à une contestation née. En effet, elle énonce que MM. A et V ont été assignée en responsabilité pour insuffisance d’actif ; que M. A à soulevé, par conclusions l’irrecevabilité de l’action à son encontre au motif qu’il n’est pas représentant permanent de la personne morale dirigeant de droit de la société débitrice et que la nomination de la société Vincent investissement comme présidente de la société Industrie est postérieure aux faits fautifs allégués au soutien de l’action ; que M. conteste également sa responsabilité contestant le caractère fautif des faits invoques.

S’agissant des concessions réciproques, il est mentionné que bien que contestant leur responsabilité. MM. A et V acceptent de contribuer à I ‘insuffisance d’actif de la société V industries, M. A à hauteur de 50 000 € et M. V à hauteur de 150 000 € et que Me Sabourin accepte en contrepartie de ces versements d’abandonner la procédure, sous réserve de l’autorisation du juge-commissaire et de l’homologation par le tribunal de commerce.

Le paiement est prévu des acquisitions par le jugement d’homologation de son caractère définitif.

Le moyen invoque par le ministère public pour s’opposer à l’homologation de la transaction a savoir I ‘insuffisance de la contribution mise à la charge des MM. A et V compte tenu de l’importance de I ‘insuffisance d’actif constate est inopérant. 

En effet, d’une part, l’action ne vise pas à la condamnation de MM. A et V à la totalité de l’insuffisance d’actif de la société Vincent industries et d’autre part, l’insuffisance de la contribution ne pourrait etre appréciée que si la responsabilité de MM. A et V dans l’insuffisance d’actif a la contribution duquel leur condamnation était sollicitée est certaine.

Or, en l’espèce, elle est contestée par les intéressés et sa reconnaissance par le tribunal de commerce présente comme, pour toute action, un alea judiciaire. De plus, dans le cadre de l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif, un autre alea tient au caractère facultatif de la condamnation et au pouvoir souverain d’appréciation du tribunal sur le montant de la condamnation.

Aucun autre moyen n’étant invoque par le ministère public, en l’état des concessions réciproques consenties par les parties pour mettre fin à leur différend, il y a lieu d’homologuer la transaction.

L’appel de MM. A et V   étant fonde, les dépens ne peuvent etre mis à leur charge pas plus qu’une indemnité procédurale ; les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure collective ce qui ne permet pas l’application de l’article 699 du code de procédure civile et la demande formée par Me Sabourin sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile doit etre rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,

Rejette la demande de Me Sabourin ès qualités de liquidateur de la société V’ industrie relative à la recevabilité de l’action en responsabilité pour insuffisance d’accord engagée à l’encontre de MM. A et V

Annule le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Homologue la transaction signée le 8 janvier 2018 par Me Sabourin ès qualités de liquidateur de la société V industrie et MM. A et V

Rejette la demande de Me Sabourin ès qualités de liquidateur de la société V industrie en paiement d’une indemnité sur fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonne l’emploi des dépens de première instance et d’appel en frais privilégiés de la procédure collective.