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Décisions

Cass. com., 8 janvier 2020, n° 18-17.039

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Avocat :

SCP Waquet, Farge et Hazan

Réunion, du 15 nov. 2017

15 novembre 2017

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 15 novembre 2017), que la société Peinture du Sud, dont l'associé unique et le gérant était M. H..., a été mise en liquidation judiciaire le 9 août 2012, M. T..., remplacé par la société [...], étant désigné liquidateur ; que ce dernier a assigné M. H... en responsabilité pour insuffisance d'actif et en prononcé de sa faillite personnelle ;

Attendu que M. H... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir ordonner la production en original par la société [...] des données comptables à savoir des pièces adverses n° 5, 6 et 7, de le condamner à payer à cette société, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Peinture du Sud la somme de 150 000 euros à titre de contribution à l'insuffisance d'actif et de prononcer à son encontre une sanction de faillite personnelle pendant une durée de cinq ans, alors, selon le moyen :

1°/ que le jugement doit être motivé ; qu'en se fondant pour écarter la contestation par M. H... de l'exactitude des documents comptables produits en copie par le liquidateur judiciaire (en pièces n° 5, 6 et 7) et rejeter sa demande tendant à voir ordonner la production des originaux des documents comptables invoqués, sur l'affirmation selon laquelle la société [...] n'aurait fait que produire des pièces déposées en photocopie par M. H... lui-même dans son dossier de déclaration de cessation des paiements et que seul ce dernier pourrait donc disposer des documents originaux, sans aucun motif propre à justifier cette affirmation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile et le principe de proportionnalité ;

2°/ qu'en affirmant que les photocopies litigieuses produites en pièces 5, 6 et 7 à savoir les photocopies du bilan simplifié, du compte de résultat simplifié, du grand livre provisoire 2012 et de la balance provisoire 2012 seraient celles-là mêmes que M. H... aurait déposée dans son dossier de déclaration de cessation des paiements, tout en constatant que ces documents comptables photocopiés avaient été éditées le 17 septembre 2012 soit postérieurement à la déclaration de cessation des paiements régularisée par M. H... le 7 août 2012, ce dont il résulte qu'ils ne pouvaient avoir été déposés dans le dossier de déclaration de cessation des paiements par M. H..., la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile et du principe de proportionnalité ;

3°/ qu'en retenant un détournement d'actifs à la charge de M. H... tout en constatant que ce dernier avait déclaré que les actifs en cause étaient à la disposition du liquidateur judiciaire ou encore s'agissant du véhicule Hyundai, qu'il était entre les mains d'un tiers qui refusait de le restituer, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et a violé les articles L. 651-2, L. 653-4 du code de commerce et le principe de proportionnalité ;

4°/ qu'en se fondant pour condamner M. H... au comblement de l'insuffisance d'actif sur un prétendu détournement de divers matériels, après avoir constaté que M. H... déclarait que les biens qu'il aurait prétendument détournés étaient à la disposition du liquidateur judiciaire, ce dont il résulte qu'à la supposer caractérisée, cette prétendue faute de gestion ne pouvait être à l'origine d'une insuffisance d'actifs, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce et le principe de proportionnalité ;

5°/ qu'en se fondant pour condamner M. H... au comblement de l'insuffisance d'actif sur la circonstance que M. H... n'a pas mentionné le véhicule Hyundai dans l'actif social, dans la déclaration de cessation des paiements et dans l'inventaire établi par l'huissier et que c'est M. H... personnellement et non la société Peinture du Sud ou son liquidateur qui est désigné comme la victime du détournement de ce véhicule par le garage Q..., sans préciser en quoi la prétendue faute imputée à M. H... serait à l'origine d'une insuffisance d'actif dès lors que le véhicule litigieux détourné par le garage Q... qui en avait la possession ne pouvait en toute hypothèse être restitué au liquidateur judiciaire, la cour d'appel n'a pas caractérisé le lien de causalité entre la prétendue appropriation de ce véhicule par M. H... et l'insuffisance d'actif et violé l'article L. 651-2 du code de commerce et le principe de proportionnalité ;

6°/ qu'en se fondant pour prononcer une sanction de faillite personnelle contre M. H... sur le prétendu débit du compte courant de ce dernier, sans préciser en quoi le débit du compte courant qui caractérise l'existence d'une dette de son titulaire à l'égard de la société, serait de nature à démontrer que M. H... aurait disposé des biens de la personne morale comme des siens propres ou aurait détourné ou dissimulé des actifs, la cour d'appel a violé l'article L. 653-4 du code de commerce et le principe de proportionnalité ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant relevé que la société [...] ne faisait que produire des pièces que M. H... avait lui-même déposées en photocopie dans son dossier de déclaration de cessation des paiements, le 7 août 2012, la cour d'appel en a déduit, par une décision motivée et sans se contredire, dès lors que la date d'édition de ces pièces le 17 septembre 2012 n'avait aucune incidence sur leur établissement antérieur, qu'il n'y avait pas lieu d'ordonner leur production en original ;

Attendu, en deuxième lieu, que la cour d'appel a relevé que M. H... ne contestait pas ne pas avoir remis certains biens au liquidateur au motif qu'ils étaient sans valeur, considération qu'infirmait le rapport d'expertise judiciaire pour l'ensemble des biens évalués à 4 351 euros, à l'exception de l'un d'eux acquis 1 euro en 2010, faute pour le débiteur d'avoir communiqué à l'expert les éléments permettant son estimation, de sorte que, nonobstant sa faible valeur, ce détournement d'actif avait contribué à l'insuffisance d'actif; que c'est ainsi sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, qui caractérisait la faute qu'elle retenait et son lien de causalité avec l'insuffisance d'actif, a statué comme elle l'a fait ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel ayant retenu que le compte courant d'associé de M. H... présentait un solde débiteur, ce qui était interdit par la loi, et qu'une partie des actifs de la société avait été détournée, elle en a justement déduit que celui-ci avait disposé des biens de la personne morale comme des siens propres et détourné ou dissimulé tout ou partie de ses actifs ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.