Cass. com., 29 novembre 2016, n° 15-14.249
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocat :
SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite de la mise en liquidation judiciaire de la société New Innovation One Adesium (la société débitrice), le ministère public a assigné M. X..., dirigeant, aux fins de prononcé de la sanction de la faillite personnelle ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de prononcer contre lui une mesure d'interdiction de gérer alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque plusieurs fautes sont retenues pour motiver le prononcé d'une sanction personnelle contre le dirigeant de la personne morale en procédure collective, chacune d'elle doit être légalement justifiée ; que si le dirigeant poursuivi en sanction personnelle ne peut remettre en cause la date de cessation des paiements retenue par le jugement d'ouverture, il n'en demeure pas moins que le grief de déclaration tardive de la cessation des paiements suppose que les juges du fond s'expliquent tant sur le passif exigible que sur l'actif disponible à cette date ; qu'au cas d'espèce, en ne s'attachant qu'au passif de la société Innovation à la date de cessation des paiements, sans s'expliquer sur l'actif disponible à cette date, au motif inopérant que la date retenue par le jugement d'ouverture ne pouvait être modifiée, la cour d'appel a violé les articles L. 653-8, L. 631-4, L. 631-8 et R. 653-1 du code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ;
2°/ qu'en retenant, sur la question de l'actif disponible au regard du grief de déclaration tardive de la cessation des paiements, que M. X... ne produisait aucune pièce établissant que la société Innovation avait droit au crédit d'impôt recherche et qu'en tout état de cause, le montant de ce crédit, d'environ 50 000 euros, était insuffisant au vu du montant du passif, sans s'expliquer sur les conclusions et les pièces de M. X..., qui faisait valoir que c'est un montant total de 361 205 euros qui était dû à la société Innovation par l'administration au titre du crédit d'impôt recherche, comme le démontraient les comptes de l'entreprise et les courriels de l'expert-comptable, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 653-8, L. 631-4 et L. 631-8 du code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ;
Mais attendu qu'il résulte des articles L. 653-8, alinéa 3, et R. 653-1, alinéa 2, du code de commerce que, pour prononcer l'interdiction de gérer contre le dirigeant qui n'a pas déclaré dans le délai légal la cessation des paiements, les juges ne peuvent retenir une autre date de cessation des paiements que celle fixée dans le jugement d'ouverture de la procédure collective ou dans un jugement de report de cette date ; qu'ayant constaté que cette date avait été fixée au 19 janvier 2010 et que la cessation des paiements n'avait été déclarée que le 7 juillet 2011, la cour d'appel n'avait pas, pour prononcer la sanction de l'interdiction de gérer, à effectuer les recherches invoquées par le moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu les articles L. 653-8, et L. 653-4, 5° du code de commerce, dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008, ensemble le principe de proportionnalité ;
Attendu que, pour considérer que M. X... avait commis une faute, qualifiée d'augmentation frauduleuse du passif dans l'assignation, consistant à avoir détourné les parts salariales de l'URSSAF à hauteur de la somme de 168 088 euros, l'arrêt retient que, quelle qu'ait été l'intention de M. X..., sa société a conservé les parts salariales ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser en quoi l'absence de reversement du précompte salarial caractérisait une augmentation du passif et son caractère frauduleux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et attendu que la condamnation au titre de l'interdiction de gérer du dirigeant ayant été prononcée en considération de plusieurs faits, la cassation encourue à raison de l'un d'eux entraîne la cassation de l'arrêt de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 septembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.