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Décisions

Cass. com., 1 juillet 2020, n° 18-25.931

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Vallansan

Avocat général :

Mme Guinamant

Avocat :

SCP Claire Leduc et Solange Vigand

Rennes, du 16 oct. 2018

16 octobre 2018

Faits et procédure

  1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 16 octobre 2018), la société [...] a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 3 juillet et 4 septembre 2015. La société O... G..., liquidateur, a assigné M. D..., le dirigeant de la société, en faillite personnelle pour absence volontaire de coopération avec les organes de la procédure .
  2. Examen du moyen unique

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

2. M. D... fait grief à l'arrêt de prononcer contre lui une mesure de faillite personnelle pour une durée de cinq ans, alors « qu'encourt la faillite personnelle le dirigeant qui, en s'abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, a fait obstacle à leur bon déroulement ; qu'il appartient aux juges du fond de s'assurer du caractère volontaire de l'abstention du dirigeant poursuivi, laquelle ne saurait être déduite du seul fait de sa carence ; qu'en se bornant à relever que M. D... n'avait pas répondu aux convocations qui lui avaient été adressées, qu'il n'avait fourni au mandataire liquidateur aucune des pièces que celui-ci lui avait réclamées, qu'il s'était également abstenu de communiquer les éléments et informations nécessaires à la défense de la liquidation judiciaire dans les procédures prud'homales l'opposant à d'anciens salariés et qu'il avait encore omis d'informer le mandataire de l'existence d'un navire, sans faire ressortir en quoi les carences ainsi relevées procédaient d'une volonté consciente et délibérée du dirigeant poursuivi de ne pas coopérer avec les organes de la procédure, ni s'être assurée qu'il eût été effectivement en mesure de satisfaire à ses obligations nonobstant l'état gravement dépressif par lui invoqué, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 653-5, 5° du code de commerce ».

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 653-5, 5° du code de commerce :

3. Il résulte de ce texte que l'abstention du dirigeant de la société débitrice à coopérer avec les organes de la procédure collective, qui peut être sanctionnée par la faillite personnelle lorsque cette abstention fait obstacle au bon déroulement de la procédure collective, doit être volontaire.

4. Pour condamner M. D... à la faillite personnelle, l'arrêt relève qu'en dépit des demandes réitérées du mandataire judiciaire, il n'a répondu à aucune de ses convocations, ni adressé les pièces réclamées et s'est abstenu de toute communication des informations nécessaires au déroulement de la procédure et des instances prud'homales. Il retient que les rares pièces produites pour démontrer les graves difficultés personnelles du dirigeant ne sont pas de nature à justifier les graves carences constatées.

5. En se déterminant par de tels motifs, impropres à caractériser une abstention volontaire de coopérer avec les organes de la procédure, quand M. D... soutenait, sans être contredit par le liquidateur, qu'au moment de l'ouverture de la procédure, les ennuis personnels familiaux qu'il rencontrait avaient provoqué un grave état dépressif rendant impossible toute réaction de sa part aux difficultés financières qu'il rencontrait, et que, sans domicile fixe, il ne pouvait recevoir les convocations qui lui étaient adressées, la cour d'appel, qui n'a procédé à aucune analyse, même sommaire, des pièces produites par M. D..., a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs,
la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.