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Décisions

CA Versailles, 1re ch. sect. 2, 22 septembre 2009, n° 08/06795

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Mme Cohen

Défendeur :

M. Alan

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lonne

Conseillers :

M. Chauvelot, Mme Morice

Avocats :

Me Treynet, Me Chouai, SCP Keime Guttin Jarry, Me Prevot

TI Gonesse, du 21 juill. 2008, n° 11-08-…

21 juillet 2008

FAITS ET PROCEDURE,

Par jugement contradictoire du 21 juillet 2008 auquel la cour se réfère pour l'exposé du litige opposant les parties, ainsi que pour les demandes et moyens soutenus par celles-ci en première instance, le tribunal d'instance de GONESSE a déclaré Monsieur Sauveur COHEN et Madame Sarah COHEN née CASSOUTO irrecevables en leur demande de validation de congé pour vendre, pour défaut de qualité à agir et les a condamnés aux dépens.

Sur appel de cette décision par déclaration au greffe du 22 août 2008 et aux termes de leurs dernières écritures déposées le 7 avril 2009, auxquelles il est expressément fait référence pour le détail de leur argumentation, les époux COHEN demandent à la cour de:

- déclarer recevable et fondé leur appel et à tout le moins celui interjeté par Madame COHEN,

Y faisant droit,

- réformer en toutes ses dispositions la décision entreprise et, statuant à nouveau,

- déclarer valable le congé délivré le 9 mai 2007 aux époux ALAN,

- déclarer que les époux ALAN sont occupants sans droit ni titre depuis le 31 janvier 2008,

- ordonner, en conséquence, l'expulsion tant de la personne que des biens des époux ALAN et de tous occupants de leur chef, au besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier, et ce sous astreinte de 1.000 € par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir,

- condamner, in solidum, les époux ALAN à leur payer une indemnité mensuelle d'occupation équivalente au montant du loyer augmenté des charges du 31 janvier 2008 jusqu'au départ effectif des lieux,

- condamner, in solidum, les époux ALAN à leur verser la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner, in solidum, les époux ALAN aux dépens.

Les époux ALAN, intimés, aux termes de leurs dernières conclusions déposées le 17 mars 2009 auxquelles la cour se réfère également pour l'exposé de leurs moyens et prétentions, demandent de:

- confirmer le jugement du 21 juillet 2008 du tribunal d'instance de GONESSE,

- déclarer les époux COHEN irrecevables en leurs conclusions,

- condamner solidairement les époux COHEN à leur payer la somme de 2.000 € au titre des dommages et intérêts pour procédure abusive,

Subsidiairement, débouter les époux COHEN de toutes leurs prétentions,

Plus subsidiairement, leur accorder un délai de 36 mois à compter de la signification de l'arrêt pour quitter les lieux,

- condamner les époux COHEN à leur payer la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les époux COHEN aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 avril 2009.

MOTIFS

Considérant que le 30 janvier 1982, Madame Sol CASSOUTO qui est décédée le 24 octobre 1996, a donné en location à Monsieur et Madame Feyzi ALAN un appartement situé au [...],

Considérant que le 9 mai 2007, les époux COHEN ont donné congé pour le 31 janvier 2008 aux époux ALAN pour vendre avec offre de prix de 135.000 €, Madame Sarah COHEN étant venue aux droits de Madame Sol CASSOUTO,

Que les époux ALAN étant restés dans les lieux à l'expiration du congé, sans avoir levé l'option de vente dans le délai imparti, les époux COHEN les ont fait assigner le 10 mars 2008 en validation de congé et expulsion,

Considérant que par décision du 21 juillet 2008, le tribunal d'instance de GONESSE a déclaré les époux COHEN irrecevables en leur demande pour défaut de production de la copie de l'acte de partage établissant l'attribution au profit de Madame COHEN de l'appartement donné en location,

SUR LA QUALITÉ A AGIR DE MADAME OU DE MONSIEUR COHEN

Considérant que les intimés prétendent que ni Madame COHEN, ni Monsieur COHEN n'ont qualité pour agir,

Considérant qu'il résulte des documents produits par les appelants et notamment d'une attestation de propriété dressée le 9 octobre 1997 par Maître Ronan BOURGES, notaire à Paris, que la pleine propriété des biens et droits immobiliers dépendant de la communauté ayant existé entre Monsieur Salomon CASSOUTO et Madame Sol CASSOUTO appartient, pour moitié indivise, à Madame Sarah CASSOUTO, épouse COHEN (ci-après Madame COHEN) et au frère de cette dernière, Monsieur Joseph CASSOUTO,

Et que suivant acte de partage en date du même jour, Madame COHEN s'est vue attribuer l'appartement et la cave formant les lots 103 et 342 de l'ensemble l'immobilier «Le Bois de l'Avarice» à GARGES LES GONESSE,

Considérant que le fait que le numéro de la [...], dans laquelle se situe l'immeuble ne soit pas expressément indiqué dans l'acte de partage, alors que le bail vise un immeuble situé au [...] importe peu, dès lors que les lots susvisés correspondent bien aux locaux loués aux époux ALAN, à savoir l'appartement et la cave, ainsi que l'atteste l'acte notarié mentionné précédemment,

Considérant que l'attribution des lieux loués à Madame COHEN a été au surplus portée à la connaissance des époux ALAN par lettre du même notaire du 28 octobre 1997,

Que ces derniers ont d'ailleurs réglé des loyers à Madame COHEN, sans protestation ni réserve, ainsi qu'il ressort des quittances de loyer versées aux débats, en particulier celle du 16 mars 2009,

Considérant qu'au vu de ce qui précède, la cause de l'irrecevabilité retenue par le premier juge n'existe plus à l'égard de Madame COHEN,

Que la décision entreprise mérite donc d'être infirmée, sauf en ce qu'elle a déclaré Monsieur Sauveur COHEN irrecevable en sa demande, pour défaut de qualité pour agir, pour lequel la preuve n'est pas rapportée qu'il soit propriétaire des lieux loués,

SUR LA VALIDITÉ DU CONGÉ POUR VENDRE

Considérant que les intimés contestent la validité du congé au motif qu'ils n'ont pas été en mesure d'apprécier le montant total de la vente «en ce compris le prix et les frais accessoires»,

Considérant que le congé délivré le 9 mai 2007 par les époux COHEN aux époux ALAN les informe dans les termes suivants: «Ce congé vous est donné afin de permettre au requérant de vendre l'immeuble objet de la location et ce moyennant le prix de 135.000 € hors frais. »,

Considérant que l'expression "hors frais" signifie, que s'ajoutent au versement de la somme de 135.000 €, les frais d'actes et autres accessoires à la vente lesquels sont, par principe, à la charge de l'acheteur conformément aux dispositions de l'article 1593 du code civil,

Que ces frais sont tarifés et donc déterminables dans leur quantum, contrairement aux commissions à verser à un intermédiaire dont le montant est variable selon les contrats de mandat,

Considérant que les époux ALAN sont donc mal fondés à soutenir que le prix aurait été indéterminé et qu'ils n'auraient pas "été mis en mesure d'apprécier toute l'étendue de l'offre d'achat portée dans le congé" et à prétendre que le bail doit être reconduit jusqu'au 31 janvier 2011,

Considérant dès lors que l'indication dans le congé du prix de vente et la précision que celui-ci s'entendait hors frais suffisent à rendre le congé conforme aux exigences de l'article 15 ' II de la loi du 6 juillet 1989,

Que cet article stipule en effet que « Lorsqu'il est fondé sur la décision de vendre le logement, le congé doit, à peine de nullité, indiquer le prix et les conditions de la vente projetée. Le congé vaut offre de vente au profit du locataire: l'offre est valable pendant les deux premiers mois du délai de préavis.

['] A l'expiration du délai de préavis, le locataire qui n'a pas accepté l'offre de vente est déchu de plein droit de tout titre d'occupation sur le local. »

Qu'il s'ensuit que le congé délivré le 9 mai 2007 pour le 31 janvier 2008 par Madame COHEN aux époux ALAN est régulier et doit être validé et que les époux ALAN doivent être déclarés occupants sans droit ni titre depuis le 31 janvier 2008, expulsés, et condamnés à payer une indemnité d'occupation jusqu'à la libération des lieux, et déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive qui n'est pas fondée,

SUR LES DÉLAIS POUR QUITTER LES LIEUX

Considérant que les intimés sollicitent un délai de trois ans pour quitter les lieux dans les meilleures conditions possibles,

Considérant que l'octroi des délais dépend de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations et des situations respectives de l'occupant et du propriétaire, quant à l'âge, l'état de santé, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux,

Considérant que les intimés ne justifient d'aucune diligence en vue de leur relogement, ni ne produisent de pièces quant à leur situation financière au soutien de leur demande,

Que Madame COHEN, âgée de plus de 77 ans et de santé fragile justifie de son côté que la seule pension de retraite de son mari ne permet pas au couple de pourvoir à leurs besoins,

Que les époux ALAN ayant déjà bénéficié d'un délai de fait d'un an et demi, compte tenu de la date d'expiration du congé au 31 janvier 2008, il convient de rejeter leur demande de délai,

Qu'en revanche, il n'y a pas lieu d'assortir l'expulsion d'une astreinte, comme le demande Madame COHEN qui sera donc déboutée de sa demande sur ce point,

Considérant que les époux ALAN seront, en outre, condamnés à payer à Madame COHEN une indemnité mensuelle d'occupation équivalente au montant du loyer augmenté des charges jusqu'à la libération des lieux concrétisée par la remise des clefs,

SUR L'ARTICLE 700 DU CPC ET LES DÉPENS

Considérant que les époux ALAN qui succombent, seront condamnés à payer à Madame COHEN la somme de 1.000 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles qu'elle a dû exposer ainsi qu'aux dépens,

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement

Infirme en toutes ses dispositions la décision entreprise, sauf en ce qui concerne l'irrecevabilité à agir de Monsieur COHEN,

Et, statuant à nouveau,

Déclare valable le congé délivré le 9 mai 2007 par Madame COHEN aux époux ALAN, pour le 31 janvier 2008,

Déclare, en conséquence, les époux ALAN occupants sans droit ni titre depuis le 31 janvier 2008,

Déboute les époux ALAN de leur demande de délais pour quitter les lieux, et de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Dit que les époux ALAN devront quitter les lieux donnés à bail et les rendre libres de tous occupants de leur chef et de tous biens dans le délai de 2 mois à compter du commandement qui leur sera délivré et qu'à défaut il pourra être procédé à leur expulsion et à l'évacuation du mobilier dans les conditions prévues par la loi 91-650 du 9 juillet 1991 et au besoin avec l'assistance de la force publique,

Dit n'y avoir lieu à astreinte,

Condamne solidairement les époux ALAN à payer à Madame COHEN une indemnité mensuelle d'occupation équivalente au montant du loyer augmenté des charges locatives à compter du 31 janvier 2008 jusqu'à la libération des lieux, caractérisée par la restitution des clefs,

Condamne in solidum les époux ALAN à payer à Madame COHEN la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum les époux ALAN aux dépens qui pourront être recouvrés directement par Maître TREYNET, avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.