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Décisions

Cass. 3e civ., 9 juillet 2020, n° 18-25.329

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Avocats :

Me Le Prado, SCP Piwnica et Molinié

Basse-Terre, du 12 nov. 2018

12 novembre 2018

1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 12 novembre 2018), le 14 novembre 2002, la société Atlantique Pierre 11, aux droits de laquelle se trouve la société Nettle immo, a donné à bail à la société Royal Food Store des locaux commerciaux dépendant d'un ensemble immobilier.

2. Le 26 juillet 2011, la société Royal Food Store a sollicité le renouvellement du bail, moyennant une réduction du loyer en raison de la baisse du taux d'occupation des galeries marchandes.

3. Le 6 octobre 2011, la société bailleresse a refusé le renouvellement du bail et a offert à la société locataire le paiement d'une indemnité d'éviction.

4. En l'absence d'accord entre les parties, la société Royal Food Store a assigné la société SIAIA en fixation de cette indemnité, que l'expert judiciaire a évaluée à 1 599 890,31 euros.

5. Le 30 juillet 2015, la société Nettle immo a exercé son droit de repentir.

Examen des moyens

Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. La société Nettle immo fait grief à l'arrêt de dire que le droit de repentir était nul, d'évaluer l'indemnité d'éviction à la somme totale de 1 599 890,31 euros, de la condamner à payer cette somme à titre d'indemnité d'éviction et de la condamner à rembourser à la société Royal Food Store la différence des sommes perçues entre l'indemnité réglée depuis la résiliation du bail et l'indemnité déterminée à dire d'expert, alors, « que le droit de repentir est un droit statutaire par lequel le bailleur notifie au preneur son intention de se soustraire au paiement de l'indemnité d'éviction et de consentir de manière irrévocable au renouvellement du bail, lequel s'opère toujours aux clauses et conditions du bail venu à expiration ; que le preneur ne peut s'y opposer que s'il a engagé un processus irréversible de départ des lieux, rendant impossible la continuation de l'exploitation du fonds dans les lieux ; que le fait que le droit de repentir soit exercé pour éviter le paiement d'une indemnité d'éviction ne peut caractériser un exercice fautif de ce droit ; qu'en retenant en l'espèce, pour juger fautif l'exercice du droit de repentir et le dire nul et de nul effet, qu'il avait été exercé avec l'intention de faire échec à tout risque de paiement d'une indemnité d'éviction, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a violé l'article L. 145-58 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 145-58 du code de commerce :

8. Il résulte de ce texte que le propriétaire peut, jusqu'à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la date à laquelle la décision fixant le prix ou les conditions du nouveau bail est passée en force de chose jugée, se soustraire au paiement de l'indemnité d'éviction, à charge pour lui de supporter les frais de l'instance et de consentir au renouvellement du bail.

9. Le fait que le droit de repentir soit exercé pour éviter le paiement d'une indemnité d'éviction ne peut caractériser, à lui seul, un exercice fautif de ce droit.

10. Pour juger fautif l'exercice du droit de repentir et le dire déclarer nul et de nul effet, l'arrêt retient qu'il a été exercé avec l'intention de faire échec à tout risque de paiement d'une indemnité d'éviction.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le droit de repentir est nul et de nul effet, l'arrêt rendu le 12 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre autrement composée.