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Décisions

CA Nancy, 2e ch. soc., 7 avril 2017, n° 13/01186

NANCY

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Finadvance (Sté)

Défendeur :

AGS de Nancy Nord-Est

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jobert

Conseillers :

M. Bruneau, M. Bocciarelli

Avocats :

Me Rivals, Me Genin, Me Segaud, Me Clement, Me Rilov

Cons. prud’h. Nancy, du 22 mars 2013, n°…

22 mars 2013

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Intergestion exerçait une activité de distribution en matière de quincaillerie d'ameublement et de bâtiment, l'aménagement intérieur, le rayonnement mural et l'agencement de magasins sur trois sites sis à Ludres, Vaudricourt et Ernée.

Le 20 juillet 2006, les détenteurs du capital de cette société l'ont cédée au fonds d'investissement Finadvance pour le prix de 15 millions d'Euros.

Pour ce faire, un holding de reprise a été constitué - la société Interges -, lequel a racheté les parts de la SA Société de Développement commercial et industriel (SDCI), société mère de la société Intergestion ; le fonds commun de placement à risque FCPR Finadvance Capital III, géré par la société Finadvance, a acquis 85 % du capital de la société Interges.

Par jugement du 30 mars 2010, le tribunal de commerce de Nancy a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Intergestion.

Par jugement du 9 août 2010, ce même tribunal a adopté un plan de cession dont la teneur est la suivante : le site de Ludres a été repris par la SA Norail, pour le compte d'une société en cours de constitution. Cette reprise s'est accompagnée du transfert de 102 salariés sur les 195 que comptait le site.

Le site d'Ernée a été repris par l'EURL Mirwault pour le compte d'une filiale à créer. 70 des 79 salariés du site ont été transférés.

Enfin, le site de Vaudricourt a été repris par la SAS Comptoir de Picardie, 101 des 140 salariés ayant été transférés.

Les salariés dont les contrats de travail n'ont pas été transférés ont été licenciés pour motif économique.

Par jugement du 28 septembre 2010, le tribunal de commerce de Nancy a placé la société Intergestion en liquidation judiciaire, Maîtres Y… et X… étant désignés en qualité de mandataires liquidateurs.

Par acte introductif d'instance en date du 14 avril 2011, Z…, un des salariés licenciés (désigné 'le salarié' dans l'arrêt), a fait citer devant le conseil de prud'hommes de Nancy Maître Y… et Maître X…, en qualité de mandataires liquidateurs de la société Intergestion, l'AGS/CGEA de Nancy et la société Finadvance en vue de faire dire et juger que les sociétés Intergestion et Finadvance avaient la qualité de coemployeurs, que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'obtenir la condamnation in solidum des coemployeurs à lui payer des dommages et intérêts.

Par jugement du 22 mars 2013, ce conseil de prud'hommes a dit que la société Finadvance était coemployeur avec la société Intergestion, dit que le plan de sauvegarde de l'emploi mis en place par la société Intergestion était nul, dit que le licenciement de le salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse, respectivement condamné et fixé une créance de dommages et intérêts au profit de le salarié.

Par ailleurs, la société Finadvance a été condamnée à rembourser à l'AGS/CGEA de Nancy les sommes que celle-ci avait versées à le salarié au titre de sa garantie dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Intergestion.

Par déclaration faite le 22 avril 2013 au greffe de la cour, la société Finadvance a interjeté appel de ce jugement.

Selon des écritures récapitulatives soutenues oralement à l'audience, l'appelante conclut à l'infirmation du jugement entrepris.

Elle demande à la cour de constater qu'elle n'a pas la qualité de coemployeur du salarié et de le débouter en conséquence de tous ses chefs de demande.

A titre subsidiaire, elle demande à la cour de déclarer irrecevable les prétentions nouvelles du salarié fondée sur sa responsabilité délictuelle, de l'en débouter.

A titre encore plus subsidiaire, elle demande à la cour de constater qu'elle n'était tenue ni de contribuer au plan de sauvegarde de l'emploi de la société Intergestion ni à une obligation de reclassement.

En tout état de cause, elle sollicite la condamnation du salarié à lui payer la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

A l'appui de son recours, la société Finadvance fait valoir en substance que :

- il n'a jamais existé de situation de coemploi entre elle et la société Intergestion, de sorte qu'elle ne devait pas contribuer au plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) de cette dernière et n'était pas tenue d'une obligation de reclassement à l'égard des salariés licenciés, en outre, il n'existe pas de groupe de reclassement entre les deux sociétés,

- la demande nouvelle formée à hauteur d'appel par le salarié sur le fondement de l'article 1240 du code civil (anciennement 1382) est irrecevable par application de l'article 564 du code de procédure civile, de plus, cette demande ne relève pas de la compétence des juridictions prud'homales,

- le salarié ne justifie ni d'une faute de sa part, ni d'un préjudice ni d'un lien de cause à effet entre l'une et l'autre.

Selon des écritures récapitulatives soutenues à l'audience, le salarié demande à la cour de dire et juger que les sociétés Intergestion et Finadvance sont ses coemployeurs, de constater en conséquence la nullité de son licenciement en raison de l'illégalité du plan de sauvegarde de l'emploi, de condamner les deux sociétés susvisées in solidum à lui payer des dommages et intérêts, de fixer une créance de ce montant au passif de la société Intergestion.

A titre subsidiaire, il demande à la cour de dire et juger que les sociétés Intergestion et Finadvance sont ses coemployeurs, de constater que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse du fait de l'inexécution de leur obligation de reclassement par les coemployeurs et de l'absence de motif économique de licenciement à l'égard de la société Finadvance, et de condamner les coemployeurs, in solidum, à lui payer des dommages et intérêts.

A titre encore plus subsidiaire, il forme les mêmes demandes pour insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi au regard des moyens du groupe dont fait partie la société Intergestion et, le cas échéant, pour insuffisance dudit plan au regard des moyens de la société Intergestion elle-même.

En tout état de cause, le salarié demande à la cour de constater la violation par l'employeur des dispositions de l'article L. 6323-18 du code du travail sur la portabilité du droit individuel à la formation, de condamner in solidum les sociétés Intergestion et Finadvance à lui payer les sommes de 5000 € à titre de dommages et intérêts et 5000 € sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

Il sollicite enfin la condamnation des Intergestion et Finadvance à lui payer la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose en substance que :

- il existait une situation de coemploi entre les sociétés Finadvance et Intergestion si bien que le plan de sauvegarde de l'emploi est insuffisant en ce qu'il n'a pas pris en compte les moyens de la société Finadvance, le plan est également insuffisant au regard tant des moyens du groupe d'entreprises constitué autour de cette société que des moyens propres de cette entreprise,

- la société Intergestion n'a pas exécuté son obligation de reclassement en interne et dans le groupe,

- le licenciement économique n'est pas motivé vis à vis de la société Finadvance,

- celle-ci a commis des fautes délictuelles à l'origine de son licenciement,

- il n'a pas été informé dans la lettre de licenciement de la portabilité de son droit individuel à la formation.

Selon des écritures récapitulatives soutenues à l'audience, Maître Y… et Maître X…, en qualité de mandataires liquidateurs de la société Intergestion, concluent à l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement du salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Ils demandent à la cour de le débouter de tous ses chefs de demande et de le condamner à leur payer la somme de 600 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils exposent en substance que :

- ils s'en remettent quant à l'existence d'une situation de coemploi entre les sociétés Intergestion et Finadvance,

- la société Intergestion ne fait pas partie du groupe Finadvance, celle-ci n'avait pas à contribuer au plan de sauvegarde de l'emploi, le reclassement du salarié n'avait pas à être recherché au sein de ce prétendu groupe,

- les mesures minimales légales retenues dans le plan de sauvegarde de l'emploi étaient en adéquation avec les moyens de la société Intergestion lors de sa liquidation, elle ne pouvait pas aller au-delà,

- le salarié ne justifie pas de son préjudice.

Selon des écritures soutenues oralement à l'audience, l'AGS/CGEA de Nancy conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a ordonné le remboursement des sommes qu'elle a avancées.

Elle demande à la cour de dire que le plan de sauvegarde de l'emploi est parfaitement régulier et de débouter en conséquence le salarié de l'ensemble de ses prétentions au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A titre subsidiaire, elle demande à la cour de dire et juger que les créances éventuellement fixées ne lui seront opposables que dans la stricte limite de sa garantie.

A l'audience de la cour du 26 janvier 2017, le salarié s'est désistée de sa demande en paiement de dommages et intérêts fondée sur l'article 1240 du code civil dirigée à l'encontre de la société Finadvance.

MOTIFS

1- Sur l'existence d'une situation de coemploi entre les sociétés Finadvance et Intergestion vis à

vis du salarié

Attendu que, hors existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur à l'égard du personnel employé par une autre que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière;

Attendu qu'il convient d'examiner successivement les trois critères cumulatifs du coemploi qui, en outre doivent être l'expression d'une intrusion de la société dominante dans la gestion économique et sociale des autres sociétés du groupe qui aille au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre celles-ci et de la prépondérance de la première sur les autres qui en découle :

1) Sur la confusion d'intérêts

Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats que la société Finadvance a pour objet social la gestion de portefeuilles et a créé et gère un fonds commun de placement à risque intitulé 'Finadvance Capital III', lequel détient 85 % du capital de la société Interges, société holding ;

Attendu que la société Interges a été créée (cf pacte d'associés du 20 juillet 2006) dans le but unique de reprendre la totalité du capital de la SA Société de Développement commercial et industriel (SDCI), laquelle détenait le capital de la SA Intergestion, société dont l'objet social était la distribution d'articles de quincaillerie d'ameublement ;

Attendu qu'il s'agissait donc d'un ensemble de sociétés dont les liens étaient étroits et qui avaient un intérêt commun au développement et à la croissance de la société Intergestion afin de la valoriser dans le but d'une cession future au meilleur prix pour en retirer un profit ;

Attendu qu'il existait donc bien une confusion d'intérêts entre les sociétés Finadvance, Interges et Intergestion ;

2) Sur la confusion de direction

Attendu que cette confusion s'entend de l'exercice effectif du pouvoir de direction par la société dominante sur la ou les autres sociétés du groupe, ce qui peut notamment se traduire par une identité de dirigeants ;

Attendu d'abord qu'il ressort du rapport établi par la société d'expertise comptable Organisation Conseil Audit selon ordonnance du 27 juin 2011 émanant du juge-commissaire de la liquidation judiciaire de la société Intergestion, et daté du 9 mai 2012, qu'entre le 20 juillet 2006 et le 2 avril 2007, ladite société a été dirigée par un 'conseil d'administration' composé des sociétés Interges, Finadvance et Associés et A… ;

Attendu ensuite qu'à compter du 2 avril 2007, date de la transformation de la société Intergestion de SA en SAS, elle a été dirigée par la société Interges et ce jusqu'au 30 mars 2010, date d'ouverture de son redressement judiciaire ;

Attendu ainsi qu'il n'a pas existé d'identité de dirigeants entre les sociétés Finadvance et Intergestion;

Attendu, d'autre part, que les échanges de courriels intervenus entre les deux sociétés de 2008 à 2010 versés aux débats révèlent que la première exerçait une surveillance stricte sur l'évolution de la trésorerie et des résultats de la seconde ;

Attendu toutefois que ces courriels ne contiennent aucune directive ni instruction concernant la conduite des affaires de la société Intergestion, qu'il s'agisse aussi bien des choix stratégiques que des actes de gestion courante ;

Attendu que le fait qu'un de ces courriels indique qu'une réunion se tiendra au siège de la société Finadvance n'est pas suffisant pour être analysé comme un indice de confusion de direction, s'agissant d'un événement unique ;

Attendu que les témoignages de salariés de la société Intergestion (Yannick Defolie, Annie Pelissier, Elisabeth Prevot, Liliane Thiéry, Hervé Delaumosne, Michèle Charpentier) qui ont été versés aux débats ne mettent pas plus en lumière une confusion de direction en ce qu'ils relatent que des dirigeants de la société Finadvance avaient assisté à des réunions et leur avaient annoncé au cours de l'une d'elle le renvoi du dirigeant de la société Intergestion, ce dont il ne peut être tiré la conclusion que la société Finadvance s'immisçait de façon continue dans la marche de l'entreprise ;

Attendu qu'il y a lieu de souligner que les salariés auraient été les témoins privilégiés d'une confusion de direction si elle avait existé car elle aurait eu des traductions concrètes et perceptibles pour eux ;

Attendu par ailleurs que le document datant de 2010 dans lequel la société Finadvance expose les principes qui commandent sa politique d'investissement dans des petites et moyennes entreprises ne présente pas des éléments qui démontreraient une volonté de principe et affichée d'immixtion dans ces entreprises assimilables à une confusion de direction :

Attendu en effet que ce document indique que son rôle consiste à orienter la stratégie de la société dont elle prend le contrôle, préparer sa sortie, lui donner des conseils et contrôler son activité, ce qui ne relève pas de la direction de l'entreprise ;

Attendu que 'le pacte d'associés' conclu le 20 juillet 2006 entre les associés de la société Interges, d'un côté, et la société Interges, de l'autre, prévoyait en son article 11 que les associés disposent d'un ' droit de consultation spécifique et d'information (...) leur permettant de suivre l'évolution de leur investissement et de s'assurer du respect de leurs droits tels qu’ils résultent du pacte. ..';

Attendu que cet article précisait que pour préserver les droits des actionnaires, ' le dirigeant et la société s'engagent, se portant fort en tant que de besoin du respect de ces engagements par chacune des filiales, à ce qu'aucune décision concernant la société et/ou chacune de ses filiales ' n'interviennent sans leur accord préalable pour les décisions susceptibles de porter atteinte même indirectement au projet d'entreprise et à l'obligation d'établir des comptes consolidés, à l'exercice par la société ou une de ses filiales d'une activité substantiellement différente de celle du groupe, de toute décision d'acquisition d'achat ou de cession de valeurs mobilières, de fonds de commerce ou d'entreprises, de prise d'intérêt dans une entreprise entraînant une responsabilité indéfinie, la cessation de toute branche d'activité, toute décision engageant la société ou ses filiales au-delà de 100 000 €, toute décision de recrutement d'un salarié avec un salaire élevé, tout octroi de sûretés réelles ou personnelles, tout engagement en bourse ;

Attendu toutefois qu'il ne s'agissait que d'interventions ponctuelles portant sur des décisions stratégiques limitativement énoncées et non d'une participation permanente à la direction de l'entreprise;

Attendu en outre que si les associés de la société Interges disposaient d'un droit de veto concernant un certain nombre de décisions susceptibles d'être prises tant par la société que par ses filiales, dont la société Intergestion, ils ne pouvaient se substituer à ses dirigeants dans la prise desdites décisions, ce qui exclut toute immixtion dans la direction de la société et de ses filiales;

Attendu ainsi que ce pacte d'associés ne pouvait être considéré comme un indice d'une confusion de direction ;

Attendu qu'il ne faisait que refléter la situation de domination inhérente à tout groupe de sociétés;

Attendu qu'il résulte du rapport précité établi par la société Organisation Conseil Audit établi à la demande du juge-commissaire de la liquidation judiciaire de la société Intergestion, qu'en août 2007, après avoir été une holding purement financière, la société Interges était devenue une holding animatrice et que selon une convention du 26 avril 2007, elle s'était engagée auprès de la société Intergestion à lui fournir 'des prestations administratives et de direction', de 'direction générale et de management' de 'direction administrative et financière' ainsi que des prestations comptables (page 44 du rapport);

Attendu que l'auteur du rapport a également constaté que la société Interges avait facturé ses services à la société Intergestion (page 45 du rapport) ;

Attendu néanmoins que si ces éléments constituent d'incontestables indices d'une confusion de direction entre ces deux sociétés, il ne peut en être tiré l'existence d'une telle confusion entre les sociétés Finadvance et Intergestion même indirectement par le biais de la société Interges ;

Attendu qu'il y a lieu de rappeler qu'aux termes du pacte d'associés du 20 juillet 2006 qui organisait les liens entre la société Interges et ses associés, ces derniers ne disposaient pas de pouvoirs leur permettant de s'immiscer dans la direction de la société mais seulement d'en contrôler un certain nombre d'actes ;

Attendu que les liens juridiques unissant les sociétés Finadvance et Interges, d'une part, et les sociétés Interges et Intergestion, d'autre part, n'avaient pas la même nature :

Attendu que les premiers étaient des liens de contrôle et de surveillance tandis que les autres étaient des liens pouvant conduire à une confusion de direction entre les sociétés ;

Attendu par ailleurs qu'il convient de remarquer que dans son rapport, la société Organisation Conseil Audit n'a pas relevé, au-delà de ces liens juridiques, une ingérence de fait constante et prégnante de la société Finadvance dans la direction de la société Intergestion, ce qu'elle n'aurait pas manqué de faire si elle l'avait constatée aux termes de ses minutieuses investigations dans la mesure où une de ses missions était justement de rechercher s'il n'avait pas existé une direction de fait de cette entreprise ;

Attendu qu'au vu des pièces versées aux débats, la confusion de direction n'est pas établie ;

3) Sur la confusion d'activité

Attendu que si le rapport susvisé met en évidence une confusion d'activité entre les sociétés Interges et Intergestion, il ne permet pas de dégager une confusion d'activité entre les sociétés Finadvance et Intergestion, même par le biais de ce qui aurait été 'son bras armé', à savoir la société Interges ;

Attendu que comme il l'a été indiqué ci-dessus, en vertu du pacte d'actionnaires du 20 juillet 2006, la société Finadvance n'exerçait qu'un contrôle sur la société Interges, excluant ainsi toute immixtion et il n'est pas établi qu'au-delà de l'organisation juridique de leurs rapports, la société Finadavance se soit immiscée de fait dans l'activité de la société Interges et par ce biais, dans celle de la société Intergestion;

Attendu qu'au vu des pièces versées aux débats, il n'est pas plus établi que la société Finadvance se soit directement ingéré dans l'activité de la société Intergestion, ce qui se serait traduit par la gestion du personnel, des relations avec les fournisseurs, de l'organisation de la production, des relations avec les organismes sociaux et les administrations ;

Attendu que pas plus que pour la direction de cette entreprise, le rapport de la société Organisation Conseil Audit ne met en exergue une telle immixtion de la société Finadvance dans l'activité de la société Intergestion ;

Attendu enfin que le salarié a soutenu l'existence d'une situation de coemploi trouvant son origine non dans une confusion d'intérêts, de direction et d'activité mais dans un état de subordination vis à vis de la société Finadvance ;

Attendu cependant que les éléments qui ont été examinés ci-dessus ne révèlent pas que la société Finadvance exerçait directement à l'égard des salariés de la société Intergestion les prérogatives d'un employeur, c'est à dire le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de ses subordonnés ;

Attendu qu'au vu de ce qui précède, il n'est pas établi que les sociétés Finadvance et Intergestion aient été les coemployeurs du salarié ;

Attendu dès lors que le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a dit que la SA Finadvance était coemployeur de celui-ci avec la SAS Intergestion ;

Attendu que, statuant à nouveau à ce sujet, il y a lieu de dire qu'il n'existe pas de situation de coemploi du salarié par les sociétés Finadvance et Intergestion ;

Attendu en conséquence que la lettre de licenciement n'est pas insuffisamment motivée en ce qu'elle n'aurait pas pris en compte la situation économique de la société Finadvance ;

Attendu de plus que le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a condamné la société Finadvance à rembourser à l'AGS/CGEA de Nancy les sommes que cette dernière a versées à le salarié en application de sa garantie ;

Attendu que, statuant à nouveau sur ce point, l'AGS/CGEA de Nancy doit être déboutée de ce chef de demande ;

2- Sur l'exécution par l'employeur de son obligation de reclassement

Attendu qu'aux termes de l'article L. 1233-4 alinéa 1 du code du travail, dans sa rédaction applicable au présent litige, ' le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ' ;

A/ Sur l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi

Attendu que le plan de sauvegarde de l'emploi doit contenir des mesures concrètes et précises de reclassement interne et dans le groupe, propres à éviter des licenciements ou à en réduire le nombre, ainsi que des dispositions destinées à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne peut pas être évité ;

Attendu que l'obligation de reclasser les salariés dont le licenciement est envisagé et d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi répondant aux moyens du groupe n'incombe qu'à l'employeur;

Attendu cependant que l'article L.1235-10 alinéa 2 du code du travail (abrogé par la loi nº 2013-504 du 14 juin 2013), dans sa rédaction issue de la loi nº 2008-67 du 21 janvier 2008, applicable au présent litige, dispose que : ' la validité du plan de sauvegarde de l'emploi est appréciée au regard des moyens dont dispose l'entreprise ou l'unité économique et sociale ou le groupe ' ;

Attendu que le groupe dont les moyens financiers doivent être mobilisés pour l'établissement du plan de sauvegarde de l'emploi s'entend des entreprises unies par le contrôle ou l'influence d'une entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 2331-1 du code du travail, c'est à dire une entreprise qui en contrôle d'autres ' dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce ' ou une entreprise qui exerce ' une influence dominante sur une autre entreprise dont elle détient au moins 10 % du capital, lorsque la permanence et l'importance des relations de ces entreprises établissent l'appartenance de l'une ou de l'autre à un même ensemble économique ' ;

Attendu que l'article L. 233-3 1º du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige, énonce qu'une société est réputée en contrôler une autre notamment ' lorsqu'elle détient directement ou indirectement une fraction du capital lui conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de cette société' ;

Attendu que l'article L. 233-4 précise que : ' toute participation au capital même inférieure à 10 % détenue par une société contrôlée est considérée comme détenue indirectement par la société qui contrôle cette société ' ;

Attendu qu'il résulte du rapport de la société Organisation Consultation Audit (page 8 du rapport) que le fonds commun de placement à risque Finadvance Capital III, qui n'a pas la personnalité morale et qui est géré par la société Finadvance, détenait 85 % de la société Interges;

Attendu qu'à défaut de connaître précisément les détenteurs du portefeuille de valeurs gérés collectivement au sein du fonds commun de placement à risque Finadvance Capital III, il n'est pas apporté la preuve que la société Finadvance détenait directement ou indirectement une fraction du capital de la société Interges lui conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de cette société ;

Attendu qu'il s'ensuit que la société Finadvance ne faisait pas partie du groupe de sociétés dont les moyens financiers auraient dû être mobilisés pour l'élaboration et la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Intergestion de sorte que ledit plan ne saurait être déclaré insuffisant du seul fait que la société Finadvance n'y avait pas contribué ;

Attendu par ailleurs que ce plan de sauvegarde de l'emploi a été élaboré alors que la société Inter- gestion était en redressement judiciaire confrontée à d'importantes difficultés économiques et financières illustrée par un passif de 658 450 € au jour de la cessation des paiements ;

Attendu que la société Interges était également confrontée à des difficultés économiques aigues comme en témoigne le fait qu'elle ait été placée en liquidation judiciaire en même temps que la société Inter- gestion;

Attendu que le plan de sauvegarde de l'emploi prévoyait des mesures de reclassement externes, la possibilité offerte à tous les salariés susceptibles d'être licenciés de bénéficier d'une convention de reclassement personnalisé avec toutes les mesures qui y sont incluses, d'une convention d'allocation temporaire dégressive et d'une cellule de reclassement assurée par un cabinet spécialisé (la société Altedia) sur tous les sites de l'entreprise pour une durée d'un an ;

Attendu que certains salariés pouvaient bénéficier d'une aide à la création d'entreprises tandis que quatre d'entre eux étaient éligibles à une convention F.N.E. préretraite licenciement ;

Attendu enfin qu'il était prévu que les salariés qui retrouveraient un travail ou qui créeraient une entreprise, seraient dispensés du préavis qui leur seraient payé et que par ailleurs, leurs droits en matière de droit individuel à la formation pourraient être mobilisés avec l'aide de l'organisme collecteur, l'organisme de formation et un cabinet spécialisé ;

Attendu qu'au vu de ce qui précède, il convient de constater que le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Intergestion contenait les mesures propres à éviter des licenciements ou à en réduire le nombre, ainsi que celles destinées à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pouvait pas être évité, qui était adapté aux possibilités limitées et contraintes des sociétés Intergestion et Interges ;

Attendu que les licenciements qui ont suivi ce plan de sauvegarde de l'emploi ne sauraient donc être déclarés dépourvus de cause réelle et sérieuse pour insuffisance dudit plan, étant précisé que les licenciements économiques postérieurs à un plan de sauvegarde de l'emploi insuffisant dans une entreprise en redressement ou liquidation judiciaire, ne sont pas nuls mais dépourvus de cause réelle et sérieuse ;

B/ Sur l'exécution de l'obligation de reclassement par l'employeur

Attendu que l'obligation pour l'employeur d'élaborer et de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi n'épuise pas son obligation de reclassement;

Attendu ainsi qu'il est tenu avant tout licenciement économique, d'une part, de rechercher toutes les possibilités de reclassement existant dans le groupe dont il relève, parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation, ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, d'autre part, de proposer ensuite aux salariés dont le licenciement est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou, à défaut, d'une catégorie inférieure ;

Attendu toutefois que l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur, fût-il en liquidation judiciaire, de rechercher tous les emplois disponibles dans l'entreprise ou parmi les entreprises appartenant au même groupe, dans lesquelles une permutation est possible, trouve sa limite dans la cessation d'activité des entreprises qui composent ledit groupe ;

Attendu en l'espèce qu'il est constant que les sociétés Intergestion et Interges ont été placées en liquidation judiciaire le 28 septembre 2010 et qu'elles ont cessé toute activité ;

Attendu qu'il n'existait aucune possibilité de reclassement au sein de ces entreprises ;

Attendu par ailleurs qu'il n'existait aucune possibilité de reclassement au sein de la société Finadvance qui est une société financière et non une entreprise industrielle comme l'était la société Intergestion ;

Attendu la nature radicalement différente de leurs activités respectives interdisait toute permutation de tout ou partie du personnel dont les tâches et les qualifications n'avaient rien en commun ;

Attendu enfin qu'alors qu'il n'y était pas obligé par la convention collective applicable, l'administrateur judiciaire de la société Intergestion a procédé à une recherche de reclassement parmi les entreprises du même secteur ;

Attendu qu'au vu de ce qui précède, il convient de constater que l'employeur a exécuté son obligation de reclassement ;

Attendu en conséquence que le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il dit que le plan de sauvegarde de l'emploi mis en place par la société Intergestion était nul, en ce qu'il a dit que le licenciement du salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse, respectivement condamné et fixé une créance de dommages et intérêts à son profit ;

Attendu que, statuant à nouveau à ce sujet, il convient de dire que le plan de sauvegarde de l'emploi mis en place par la société Intergestion était adapté à ses possibilité, qu'elle a exécuté son obligation de reclassement, que le licenciement de le salarié est fondée sur une cause réelle et sérieuse et de la débouter de sa demande en fixation d'une créance de dommages et intérêts ;

3- Sur les autres dispositions du jugement entrepris

Attendu que le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a dit que l'AGS/CGEA de Nancy n'était pas tenue de garantir le paiement des dommages et intérêts fixés au profit du salarié ;

Attendu que, statuant à nouveau à ce sujet, l'AGS/CGEA deNancy doit être mise hors de cause, faute pour l'employeur d'avoir été condamné au paiement d'une créance entrant dans le champs d'application de sa garantie;

Attendu que le salarié ayant été débouté de ses demandes dirigées à l'encontre de la société Finadvance, le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il l'a condamnée à lui payer la somme de 250 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance ;

Attendu que, statuant à nouveau sur ce point, le salarié doit être déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que celui-ci n'apporte pas la preuve du préjudice qu'il aurait subi du fait du défaut de mention dans la lettre de licenciement de la portabilité du droit individuel à la formation si bien qu'il doit être débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts à ce titre ;

Attendu qu'à hauteur d'appel, il est équitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu'elles y ont exposés si bien qu'elles doivent être déboutées de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu que chaque partie conservera à sa charge les dépens exposés dans la procédure ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant contradictoirement,

CONSTATE que Z… s'est désisté à l'audience de la cour du 26 janvier 2017 de sa demande en paiement de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil dirigée à l'encontre de la société Finadvance ;

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

DIT qu'il n'existe pas de situation de coemploi entre les sociétés Finadvance et Intergestion;

DÉBOUTE l'AGS/CGEA de Nancy de sa demande en remboursement par la société Finadvance des sommes versées à le salarié au titre de sa garantie ;

DIT que le plan de sauvegarde de l'emploi mis en place par la société Intergestion était adapté à ses possibilité et que celle-ci a exécuté son obligation de reclassement ;

DIT que le licenciement Z… repose sur une cause réelle et sérieuse ;

LE DÉBOUTE de sa demande en fixation d'une créance de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

DÉBOUTE Z… de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile dirigée à l'encontre de la société Finadvance ;

DIT que chaque partie gardera à sa charge les dépens exposés en première instance ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE Z… de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour défaut d'information sur la portabilité du droit individuel à la formation ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile formées à hauteur d'appel ;

DIT que chaque partie gardera à sa charge les dépens exposés en appel.