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Décisions

Cass. com., 7 avril 1998, n° 96-13.400

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Métivet

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, Me Baraduc-Benabent

Bordeaux, 6e ch., du 7 févr. 1996

7 février 1996

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Bordeaux, 7 février 1996) d'avoir rejeté sa demande tendant à voir constater qu'il avait existé entre lui et Mme Bastier A..., avec qui il avait vécu en concubinage, une société de fait qu'il convenait de liquider, et à voir cette dernière condamnée à lui payer une certaine somme au titre de cette liquidation alors, selon le pourvoi, que la société est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent d'affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter;

que le bénéfice s'entend non pas exclusivement du profit pouvant provenir d'une activité lucrative mais de tout gain pécuniaire ou matériel qui ajoute à la fortune des associés;

qu'en érigeant en principe qu'une acquisition immobilière ne pouvait constituer un objet social et qu'il n'y avait pas d'oeuvre commune faute d'exercice en commun d'une quelconque activité, apportant ainsi au texte une restriction qu'il ne comporte pas en présumant qu'il ne pourrait y avoir société que dans la seule mesure où les associés exercent une activité lucrative, la cour d'appel a violé l'article 1832 du Code civil ;

Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé que l'existence d'une société créée de fait entre concubins, suppose la réunion des éléments caractérisant tout contrat de société, à savoir l'existence d'apports, l'affectio societatis et le partage des bénéfices et des pertes, l'arrêt énonce par motifs propres et adoptés qu'en l'espèce, de l'aveu même du demandeur, son rôle s'était borné à participer aux dépenses communes et à assurer en tout ou en partie les dépenses afférentes à un immeuble acquis par Mme Bastier A... en son nom personnel, payé de ses deniers et ayant servi à la résidence du couple;

qu'en l'état de ces constatations, la cour d'appel a pu décider qu'aucune société créée de fait n'avait existé entre M. Y... et Mme Bastier A...;

d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant au remboursement par Mme Bastier A... d'une certaine somme comprenant notamment celle de 150 000 francs versée par un chèque tiré sur son compte ouvert à la BNP alors, selon le pourvoi, que le juge est tenu en toutes circonstances de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction;

qu'en se déterminant au vu d'un témoignage non invoqué par Mme Bastier A... dans ses écritures, sans constater que cette pièce lui aurait été communiquée et aurait fait l'objet devant elle d'une discussion entre les parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a également retenu, par motifs adoptés que le chèque de 150 000 francs a été employé, non comme l'indiquait M. Y... au financement de l'acquisition d'un immeuble, déjà acheté depuis dix mois, mais à un placement au profit de Mme Bastier A... qui a souscrit une assurance vie, ce qui traduit une intention libérale de la part de M. Y..., cette somme devant dès lors être regardée comme un don manuel dont il n'est pas fondé à réclamer la restitution ;

qu'ainsi l'arrêt se trouve justifié, abstraction faite du motif surabondant dont fait état le moyen;

que celui-ci ne peut donc être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.