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Décisions

Cass. 3e civ., 21 mai 2014, n° 12-35.025

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Terrier

Avocats :

Me Foussard, Me Spinosi

Paris, du 24 oct. 2012

24 octobre 2012

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 octobre 2012), que par acte du 20 janvier 1997, les sociétés Vendôme commerces et Centre bourse ont donné à bail à la société Commerces Méditerranée (la société Commerces) un local commercial ; que par acte du 12 avril 2007, la société Commerces a notifié aux bailleresses son intention de céder son bail pour cause de retraite de son gérant majoritaire, M. X..., et a conclu une cession avec la société Cinq sur cinq en juillet 2007, notifiée le 30 juillet suivant aux bailleresses, dans laquelle était insérée une condition suspensive tenant à l'autorisation des bailleresses des travaux d'aménagement envisagés par le cessionnaire ; que la société Commerces et M. X... ont sommé en vain les bailleresses d'avoir à intervenir à l'acte authentique de cession le 12 octobre 2007 ; que la société Cinq sur cinq a finalement acquis le droit au bail par acte authentique du 30 avril 2008, les bailleresses intervenant à la cession et un nouveau bail étant conclu ; que soutenant que les sociétés bailleresses leur avaient causé un préjudice en retardant de façon illégitime la cession du fonds, la société Commerces et M. X... les ont assignées en paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que la société Commerces et M. X... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque le locataire ayant demandé à bénéficier de ses droits à la retraite ou ayant été admis au bénéfice d'une pension d'invalidité attribuée par le régime d'assurance invalidité-décès des professions artisanales ou des professions industrielles et commerciales, a signifié à son propriétaire et aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce son intention de céder son bail en précisant la nature des activités dont l'exercice est envisagé ainsi que le prix proposé, le bailleur a, dans un délai de deux mois, une priorité de rachat aux conditions fixées dans la signification ; qu'à défaut d'usage de ce droit par le bailleur, son accord est réputé acquis si, dans le même délai de deux mois, il n'a pas saisi le tribunal de grande instance ; qu'il résulte d'une telle disposition d'ordre public qu'à l'expiration du délai imparti, le bailleur ne peut ni préempter, ni s'opposer à la cession, ce qui entraîne de plein droit la réalisation de la condition suspensive incluse dans l'acte de cession du droit au bail et subordonnant la perfection de l'acte à la renonciation par le bailleur à son droit de préemption et à l'autorisation par lui des travaux inhérents à la déspécialisation ; qu'en décidant que la condition suspensive figurant à l'acte de cession et tenant à l'autorisation du bailleur des travaux d'aménagement envisagée par le cessionnaire n'était pas remplie, tout en relevant que l'acte extrajudiciaire du 12 avril 2007 répondait aux conditions de l'article L. 145-51 du code de commerce et que le bailleur ne s'était pas opposé dans le délai légal, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article L. 145-51 du code de commerce ;

2°/ que la nature des activités dont l'exercice est envisagé à l'occasion de la déspécialisation doit être compatible avec la destination, les caractères et la situation de l'immeuble ; qu'en décidant que la condition suspensive figurant à l'acte de cession et tenant à l'autorisation du bailleur des travaux d'aménagement envisagée par le cessionnaire n'était pas remplie, sans rechercher si les travaux envisagés étaient de nature à porter atteinte à la destination, aux caractères ou à la situation de l'immeuble, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 145-51 du code de commerce ;

3°/ que l'acte de cession du droit au bail en date du 30 avril 2008 stipule que le bail du cédant se termine le 31 août 2008 et que le cessionnaire, concomitamment à la signature de l'acte de cession, signe un nouveau bail dont le loyer est fixé à la somme de 83 850 euros ; qu'il s'évince clairement et précisément d'un tel écrit que dès l'acte de cession, soit le 30 avril 2008, les parties sont convenues de la conclusion d'un nouveau bail prévoyant une augmentation du loyer ; qu'en énonçant toutefois, pour estimer que le bailleur n'avait pas augmenté le loyer à l'occasion de la cession du droit au bail, que l'augmentation du loyer n'était pas consécutive à la cession elle-même, mais à la conclusion d'un nouveau bail du fait de l'arrivée à échéance au 31 août 2008 du droit au bail cédé, la cour d'appel a dénaturé le sens clair et précis de l'acte de cession et a, partant, violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'acte extrajudiciaire du 12 avril 2007 comportant intention de cession répondait aux conditions de l'article L. 145-51 du code de commerce et que le bailleur ne s'y était pas opposé dans le délai légal et n'avait pas exercé son droit de préemption dans le délai d'un mois stipulé à l'article 34 du bail à la réception de la lettre du 30 juillet 2007, mais que la condition suspensive figurant à l'acte de cession signé en juillet 2007 entre la société Commerces et la société Cinq sur cinq et tenant à l'autorisation du bailleur des travaux d'aménagement envisagée par le cessionnaire n'était pas remplie, le mandataire des bailleresses ayant refusé le 12 octobre 2007 l'autorisation de travaux sollicitée en l'absence de descriptif précis, la cour d'appel en a justement déduit, sans dénaturation et sans être tenue d'effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que la non-réalisation de la cession à la date initialement convenue ne pouvait être imputée à faute au bailleur ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.