Cass. 1re civ., 15 mai 1984, n° 83-12.721
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL, REUNIE EN ASSEMBLEE DES CHAMBRES POUR STATUER SUR UNE ACTION DISCIPLINAIRE ENGAGEE CONTRE UN AVOCAT D'AVOIR ETE PRESIDEE PAR UN CONSEILLER A LADITE COUR, EN VIOLATION DES ARTICLES R 213-3 ET 213-6 DU CODE DE L'ORGANISATION JUDICIAIRE, SELON LESQUELS SEUL UN PRESIDENT DE CHAMBRE PEUT SUPPLEER LE PREMIER PRESIDENT POUR PRESIDER L'ASSEMBLEE DES CHAMBRES ;
MAIS ATTENDU QUE, S'IL RESULTE DES ARTICLES R 213-3 ET R 213-6 DU CODE DE L'ORGANISATION JUDICIAIRE QUE SEUL UN PRESIDENT DE CHAMBRE PEUT SUPPLEER LE PREMIER PRESIDENT POUR PRESIDER L'ASSEMBLEE DES CHAMBRES DE LA COUR D'APPEL, L'ARTICLE 430 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE PRESCRIT QUE LES CONTESTATIONS RELATIVES A LA REGULARITE DE LA COMPOSITION D'UNE JURIDICTION DOIVENT ETRE PRESENTEES, A PEINE D'IRRECEVABILITE, DES L'OUVERTURE DES DEBATS, FAUTE DE QUOI, AUCUNE NULLITE NE POURRA ETRE ULTERIEUREMENT PRONONCEE DE CE CHEF, MEME D'OFFICE ;
QU'IL NE RESULTE NI DE L'ARRET ATTAQUE, NI DES PIECES DE LA PROCEDURE, QU'UNE NULLITE AIT ETE INVOQUEE DEVANT LA COUR D'APPEL POUR IRREGULARITE DE SA COMPOSITION ;
QU'IL S'ENSUIT QU'UN TEL GRIEF, PRESENTE POUR LA PREMIERE FOIS DEVANT LA COUR DE CASSATION, EST IRRECEVABLE ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL EST ENCORE REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE STATUANT SUR UNE ACTION DISCIPLINAIRE ENGAGEE CONTRE UN AVOCAT, D'AVOIR, TOUT EN ENONCANT QUE CELUI-CI AVAIT EXPOSE SES CONCLUSIONS ORALES, OMIS DE PRECISER SES PRETENTIONS ET SES MOYENS ;
MAIS ATTENDU QU'AUCUN TEXTE DE LOI NE DETERMINE SOUS QUELLE FORME DOIT ETRE FAITE DANS UN JUGEMENT LA MENTION DES PRETENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES ET DE LEURS MOYENS, ET QU'IL SUFFIT QU'ELLE RESULTE, MEME SUCCINTEMENT, DE LA DECISION ;
QUE LA COUR D'APPEL, QUI A RAPPELE LES FAITS REPROCHES A L'AVOCAT MIS EN CAUSE ET LA DECISION DE SURSIS A STATUER PRONONCEE PAR LE CONSEIL DE L'ORDRE, ET QUI A EXAMINE SUCCESSIVEMENT LES QUESTIONS CONCERNANT LA NECESSITE DE SURSEOIR A STATUER, LA POSSIBILITE POUR LA JURIDICTION DU SECOND DEGRE D'EVOQUER L'AFFAIRE AU FOND, ET LA QUALIFICATION DES FAITS DONNANT LIEU A LA POURSUITE, A, PAR LA MEME, FAIT APPARAITRE QU'ELLE REPONDAIT AINSI AUX MOYENS INVOQUES PAR L'AVOCAT ;
QUE, DES LORS, LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
SUR LE TROISIEME MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QUE, SELON L'ARRET ATTAQUE, L'ADMINISTRATION DES FINANCES A SIGNALE AU PARQUET L'ATTITUDE DE M X..., AVOCAT, QUI, DEPUIS PLUSIEURS ANNEES, AVAIT OMIS D'ETABLIR DES DECLARATIONS DE REVENUS ET DE PAYER LE MONTANT DES IMPOTS QUI LUI ETAIENT RECLAMES, ET QUI, MENACE DE VOIR PRATIQUER UNE SAISIE SUR UN BATEAU DE PLAISANCE LUI APPARTENANT, AVAIT FAIT DISPARAITRE CELUI-CI DE SON PORT D'ATTACHE ;
QU'APRES PLUSIEURS INTERVENTIONS SANS RESULTAT POUR INCITER M X... A REGULARISER SA SITUATION FISCALE, LE PARQUET, SUR PLAINTE DE L'ADMINISTRATION, A REQUIS CONTRE LUI L'OUVERTURE D'UNE INFORMATION, DU CHEF D'ORGANISATION D'INSOLVABILITE, DELIT PREVU PAR L'ARTICLE 1741 DU CODE GENERAL DES IMPOTS, ET A DEMANDE AU BATONNIER DE L'ORDRE D'ENGAGER UNE POURSUITE DISCIPLINAIRE POUR NON DECLARATION D E REVENUS, NON PAIEMENT D'IMPOTS ET ORGANISATION D'INSOLVABILITE ;
QUE LE CONSEIL DE L'ORDRE A DECIDE DE SURSEOIR A STATUER SUR L'ACTION DISCIPLINAIRE JUSQU'A CE QU'IL EUT ETE STATUER SUR L'ACTION PENALE, MAIS QUE, SAISIE D'UN RECOURS DU PROCUREUR GENERAL CONTRE CETTE DECISION, LA COUR D'APPEL A DECIDE QU'IL N'Y AVAIT PAS LIEU DE SURSEOIR A STATUER, QU'IL CONVENAIT D'EVOQUER ET DE STATUER AU FOND ET, RETENANT QUE LE COMPORTEMENT REPROCHE A M X... CONSTITUAIT UNE FAUTE DISCIPLINAIRE, A INFLIGE A CET AVOCAT UNE PEINE DE DEUX MOIS DE SUSPENSION AVEC PRIVATION DU DROIT DE FAIRE PARTIE DU CONSEIL DE L'ORDRE PENDANT TROIS ANNEES ;
ATTENDU QUE M X... REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR AINSI STATUE, ALORS QUE, D'UNE PART, LA JURIDICTION DU SECOND DEGRE, QUI AURAIT ESTIME QUE LES FAITS VISES PAR L'ACTION DISCIPLINAIRE NE CONSTITUAIENT PAS DES INFRACTIONS PENALES, ET QUI AURAIT NEANMOINS RETENU LE FAIT, POUR L'AVOCAT, D'AVOIR ORGANISE SON INSOLVABILITE, FAIT CONSTITUANT LE FONDEMENT DE LA POURSUITE PENALE, N'AURAIT PAS TIRE DE SES CONSTATATIONS LES CONSEQUENCES LEGALES QUI S'IMPOSAIENT, ALORS QUE, D'AUTRE PART, LE DROIT D'EVOCATION, PREVU PAR L'ARTICLE 568 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, CONSTITUE, POUR LA COUR D'APPEL, EN MATIERE CIVILE, UN DROIT EXORBITANT DU DROIT COMMUN, PUISQUE PRIVANT LES PARTIES DU DOUBLE DEGRE DE JURIDICTION, ET QUE CE DROIT NE SAURAIT ETRE ETENDU, EN L'ABSENCE DE DISPOSITIONS SPECIALES A LA JURIDICTION DISCIPLINAIRE ;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL N'A PAS ENONCE QUE LES FAITS VISES PAR L'ACTION DISCIPLINAIRE NE CONSTITUAIENT PAS DES INFRACTIONS PENALES ;
QU'AYANT RETENU A BON DROIT QUE L'ACTION DISCIPLINAIRE NE POUVAIT ETRE CONDITIONNEE PAR LA SOLUTION DE L'ACTION PENALE QUE LORSQUE LE FAIT POURSUIVI PENALEMENT S'IDENTIFIAIT DE FACON PRECISE AVEC LE COMPORTEMENT REPROCHE A L'AVOCAT SUR LE PLAN DISCIPLINAIRE, ET LORSQU'UN DOUTE POUVAIT EXISTER SUR LA REALITE DE CE FAIT ET SUR L'INTENTION COUPABLE, LA COUR D'APPEL A CONSTATE QUE LA POURSUITE PENALE NE VISAIT QUE LE SEUL FAIT, POUR L'AVOCAT, D'AVOIR ORGANISE SON INSOLVABILITE EN FAISANT DISPARAITRE SON BATEAU DE SON PORT D'ATTACHE, TANDIS QUE LE COMPORTEMENT VISE PAR LA POURSUITE DISCIPLINAIRE COMPORTAIT EGALEMENT LE REFUS D'ETABLIR DES DECLARATIONS DE REVENUS ET DE PAYER LES IMPOTS, REFUS QUI N'ETAIT PAS VISE PAR L'ACTION PUBLIQUE ;
QU'ELLE A PU EN DEDUIRE QU'A DEFAUT D'IDENTITE TOTALE ENTRE LES DEUX ACTIONS, IL N'Y AVAIT LIEU DE SURSEOIR A STATUER SUR L'ACTION DISCIPLINAIRE ;
QU'APRES AVOIR RELEVE QUE LE DROIT, POUR LE JUGE D'APPEL, D'EVOQUER ET DE STATUER AU FOND ETAIT RECONNU, TANT AUX JURIDICTIONS CIVILES QU'AUX JURIDICTIONS PENALES, ET QUE LA PROCEDURE ETAIT EN ETAT DE RECEVOIR UNE SOLUTION DEFINITIVE, LA COUR D'APPEL A PU DECIDER QU'IL Y AVAIT LIEU D'EVOQUER ET DE STATUER AU FOND ;
QU'ELLE A AINSI LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ET QUE LE MOYEN N'EST FONDE EN AUCUNE DE SES BRANCHES ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 12 AVRIL 1983 PAR LA COUR D'APPEL DE NIMES.