Cass. 3e civ., 15 octobre 2015, n° 14-21.423
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvin
Avocats :
SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Yves et Blaise Capron
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 17 mars 2014), que, par acte du 11 avril 2005, la Banque populaire Centre Atlantique (la BPCA) a prêté à la société civile immobilière Macha (la SCI), dont la gérante est Mme X..., la somme de 50 000 euros, avec affectation hypothécaire de l'immeuble détenu par la SCI situé à Le Bugue, au profit de la banque ; que, par acte du 4 septembre 2007, la BPCA a prêté à la SCI la somme de 100 000 euros, à titre de prêt relais d'une durée de deux ans remboursable in fine, ayant pour objet « l'apport en compte courant de l'EURL Harmonie déco et reconstitution d'une réserve personnelle dans l'attente de la vente d'une maison sise à Le Bugue », avec affectation hypothécaire de cet immeuble au profit de la banque ; que Mme X... s'est portée caution solidaire de ce prêt à hauteur de 130 000 euros ; que, par jugement du 24 avril 2009, la société Harmonie déco, dont la gérante est Mme X..., a été placée en liquidation judiciaire ; que, par lettre du 22 décembre 2009, la BPCA a prononcé la déchéance du terme du prêt du 11 avril 2005 et a mis en demeure la SCI et Mme X... de régler la somme de 143 767, 86 euros ; que, le 26 mai 2010, la BPCA a fait délivrer à la SCI un commandement de payer valant saisie du bien immobilier situé à Le Bugue et, le 4 septembre 2010, elle a saisi le juge de l'exécution afin de faire valider cette saisie ; que celui-ci a sursis à statuer sur cette demande jusqu'à la décision définitive dans l'instance, la SCI ayant, par acte du 9 février 2011, assigné la BPCA en nullité de l'acte de prêt du 4 septembre 2007, mainlevée de l'inscription d'hypothèque, nullité de l'engagement de caution personnelle de Mme X... et paiement d'une certaine somme à titre de dommages-intérêts ;
Sur la recevabilité du pourvoi contestée par le Fonds commun de titrisation Hugo créances 3 :
Attendu que le Fonds commun de titrisation Hugo créances 3 soutient que par acte du 18 décembre 2013, la Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique, venue aux droits de la Banque populaire Centre Atlantique par une décision d'assemblée générale du 8 novembre 2011, a cédé ses créances au Fonds commun de titrisation « Hugo créances 3 », qu'il a fait signifier cette cession de créances à la SCI et à Mme X... le 16 juin 2014, en même temps que l'arrêt attaqué ; que le pourvoi formé par la SCI et Mme X... le 22 juillet 2014, n'étant dirigé que contre la Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique et aucun autre pourvoi n'ayant été formé dans le délai de l'article 612 du code de procédure civile, le pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre le Fonds commun de titrisation « Hugo créances 3 » est irrecevable ;
Attendu que la SCI et Mme X... ayant dirigé leur pourvoi formé le 22 juillet 2014 contre la Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique sur la signification de l'arrêt faite par celle-ci moins de deux mois avant que leur mémoire ampliatif déposé dans le délai de l'article 978 du code de procédure civile visant le fonds de titrisation qui a seul qualité pour agir en défense à la suite de la cession de créance intervenue à son profit, le pourvoi est recevable ;
Sur le second moyen, ci après annexé :
Attendu qu'ayant retenu, par une interprétation souveraine des conclusions de la SCI, rendue nécessaire par leur ambiguïté, que la demande en dommages-intérêts était une conséquence de celles tendant à obtenir la nullité des actes de prêt et de cautionnement, la cour d'appel en a exactement déduit, par une décision motivée, que les contestations relatives à la déchéance du terme s'avéraient sans incidence sur l'ensemble de ces demandes ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 1849, alinéa 1er, du code civil ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de la SCI, l'arrêt retient que cette société et Mme X... ne peuvent valablement invoquer le dépassement de ses pouvoirs par la gérante lors de la souscription du prêt souscrit le 4 septembre 2007, ayant pour objet un apport en compte courant à une autre société, alors qu'en application du texte susvisé, les clauses statutaires limitant les pouvoirs du gérant ne sont pas opposables à la Banque populaire Centre Atlantique, que, par ailleurs, l'acte notarié de prêt mentionne que Mme X..., agissant en qualité de gérante statutaire, a déclaré « avoir tous pouvoirs à l'effet des présentes », que celle ci ne peut dans ces conditions, se prévaloir de ses propres manquements, que la SCI Macha et Mme X... qui connaissaient parfaitement l'objet du prêt consenti par la banque, tel qu'énoncé à l'acte, visant à financer un apport en compte courant de la société Harmonie déco, dont Mme X... était également gérante, et qui se sont abstenues de produire les pièces justificatives mentionnées à la clause particulière, s'avèrent mal fondées à invoquer la fraude de la banque, laquelle n'est pas caractérisée en l'espèce ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le prêt du 4 septembre 2007 était conforme à l'objet social, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers.