Cass. 3e civ., 27 mai 1997, n° 95-16.578
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beauvois
Rapporteur :
M. Pronier
Avocat général :
M. Weber
Avocat :
Me Guinard
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 3 mai 1995), que, par un jugement d'adjudication du 6 juillet 1993, les époux Y... ont acquis un immeuble saisi au préjudice des époux A...; qu'avant l'entrée dans les lieux des acquéreurs, les époux A..., s'estimant propriétaires d'un meuble-bar, l'ont emporté après l'avoir descellé; que, par une précédente décision, les époux A... ont été condamnés à restituer le meuble-bar; qu'en avril 1990, MM. B..., A..., C... Z... et la société Forban ont vendu un fonds de commerce de brasserie-snack-bar à la société X... comprenant le matériel dont le meuble-bar; qu'ayant été contrainte de restituer le meuble-bar, la société X... a assigné ses vendeurs en paiement d'une certaine somme au titre de l'indemnisation du préjudice résultant de l'enlèvement du mobilier; que M. B... a reconventionnellement demandé la condamnation de la société X... à lui payer le solde restant dû sur le prix de vente du fonds de commerce ;
Attendu que la société X... fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en dommages-intérêts, alors, selon le moyen, "que l'acquéreur évincé partiellement qui n'a pas contractuellement renoncé à la garantie d'éviction a droit à des dommages-intérêts dus par le vendeur garant de son éviction partielle en cas de préjudice causé par le trouble du fait du tiers; que, dans ses écritures, la société X... avait régulièrement souligné que la prise du meuble bar par le tiers revendiquant lui avait causé un préjudice commercial et financier caractérisé notamment par les travaux de remise en état du fonds de commerce et de réparation des dégâts causés par l'enlèvement du meuble encastré; qu'en se fondant, dès lors, sur un motif inopérant lié à la connaissance par l'acquéreur du risque de revendication du meuble-bar, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1626, 1629 et 1630 du Code civil" ;
Mais attendu qu'ayant retenu que la mention manuscrite portée par M. X..., ès qualités, au pied de l'acte authentique de vente, selon laquelle il reconnaissait que M. Y... revendiquait la propriété du comptoir et l'arrière-bar, prouvait sa connaissance du risque, mais ne comportait pas de renonciation, même implicite, à la garantie du vendeur, la cour d'appel, qui en a exactement déduit que cette connaissance lui permettait seulement de requérir la restitution du prix sans pouvoir prétendre à dommages-intérêts, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour fixer à 105 000 francs le solde restant dû sur le prix de vente, l'arrêt retient que les sommes réclamées ne sont pas discutées ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions, la société X... se reconnaissait débiteur de la somme de 80 000 francs et soutenait que la sommation interpellative délivrée le 21 juillet 1992 par M. B... qui invoquait la déchéance du terme devait être privée d'effet comme ayant été délivrée de mauvaise foi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé à 105 000 francs le solde du prix de vente du fonds de commerce et ordonné la compensation de cette somme avec celle de 20 000 francs à laquelle a été fixée la créance de la société X... contre M. B..., l'arrêt rendu le 3 mai 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.