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Décisions

CA Paris, 25e ch. B, 21 juin 2002, n° 2000/16319

PARIS

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jacomet

Conseillers :

Mme Collot, Mme Delmas-Goyon

Avoués :

SCP Annie Baskal, Me Huyghe

Avocats :

Me Nosten, Me Kutirovezzo

TGI Meaux, 1re ch., du 13 juill. 2000, n…

13 juillet 2000

Le litige a pour objet le partage des bénéfices d’une société créée de fait qui, selon X, aurait existé entre lui et Y en 1995/1996 aux fins de développer auprès de sociétés projetant un plan social l‘aide à la création d’entreprise apportée aux salariés licenciés, ainsi que la rupture abusive, par Y, de l’association qui aurait été ainsi créée.

Vu le jugement rendu le 13 juillet 2000 par le tribunal de grande instance de Meaux, lequel, après avoir constaté que la preuve de l’existence d’une société crée de fait entre X et Y n'était pas rapportée, a débouté X de sa demande en paiement de la somme de 135.700 francs ;

Vu les conclusions signifies le 22 février 2002 par X, appelant, aux termes desquelles il demande à la cour, infirmant le jugement déféré, de :

• dire qu’il a existé entre lui et Y une société de fait,

• constater que les bénéfices générés par cette société se sont élevés à la somme de 41.374,66 € que Y, seul, a perçus,

• condamner, en conséquence, Y à lui payer la somme de 20.687,33 €, avec intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 1996, ainsi que 7.700 € à titre de dommages et intérêts pour dissolution abusive de la société de fait créée entre eux, conformément aux dispositions des articles 1872-2 alinéa 1 et 1873 du code civil, et 1.600 € au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Vu les conclusions signifiées le 21 mars 2002 par Y, intimé, par lesquelles il sollicite la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de X à lui payer la somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et celle de 2.000 € au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

SUR QUOI, LACOUR,

Considérant que X réitère les arguments qu’il a développés devant le tribunal et fait ainsi essentiellement valoir que les démarches conjointes auprès des clients au nom du cabinet DM Consultants, le dépôt en commun de la marque “OUTVENTURE”, la conclusion du contrat avec la société Unisys, l’association de leurs deux noms sur la plaquette publicitaire du cabinet DM Consultants, démontrent l’existence d'une affectio societatis dès 1995, lorsque les parties ont commencé à élaborer leur projet commun ; qu’il a engagé des frais et contribué aux charges, étant observé qu'en l’absence de pertes, il n’y a pas lieu de caractériser la vocation des associés à participer aux pertes ;

Mais considérant que c’est par d’exacts motifs, que la cour adopte, que le premier juge a retenu l’absence d’élément probant relatif à l'intention des parties de s’associer et à leur vocation à participer aux résultats, aucune société créée de fait ne pouvant ainsi être identifiée dans leur collaboration hésitante, éphémère et partielle ;

Considérant qu’il suffit de rappeler que dans sa lettre du 25 janvier 1997 à Y, alors que le contentieux était né entre les parties, X constate que l’absence d’accord explicite concernant les modalités de notre collaboration ne pouvait que conduire à un malentendu sur l'accord implicite que nous présupposions chacun” ; que cette constatation, émanant de l’appelant lui-même, confirme l’ambigüité dans laquelle la collaboration entre les deux hommes s’est instaurée et leur absence de volonté concordante sur un objectif commun et des modalités communes dès le début de leurs relations ;

Qu’au surplus, si une association effective a bien été envisagée entre eux sous forme de constitution d’une S.A.R.L., ce projet ne s’est pas réalisé, et X a alors crée sa propre enseigne commerciale, en mars 1996, à une époque avec les démarches entreprises auprès de la societé Unisys ne s’étaient pas encore concrétisées, confirmant ainsi son statut d’indépendant; qu’il résulte d’ailleurs de la correspondance échangée qu’en réalité, X ne croyait pas au concept développé par Y et qu’il n’apparait pas avoir insisté pour qu’une association effective au sein d'une S.A.R.L. se concrétise; 

Considérant que, dans ce contexte, la participation de X à l’élaboration et à l’exécution du contrat conclu avec Unisys, les démarches commerciales en commun, la présentation, par Y, de X comme son associé, selon une attestation du responsable des relations sociales de la société Unisys, la présence du nom des deux parties sur le document de présentation du cabinet DM Consultants destiné à Unisys, qui ont permis de donner à ce cabinet une apparence plus structurée, l’enregistrement de la marque “OUTVENTURE” au nom des deux parties, les quelques dépenses effectuées par X, dont les pièces versées aux débats montrent, au demeurant, qu'elles lui ont été en grande partie remboursées par Y, sont insuffisants à caractériser une volonté non équivoque d'association, nécessaire à la création d’une société de fait;

Qu'il n’est nullement démontré, en effet, une volonté de Y de faire participer X, en qualité d’associé, au développement du cabinet DM Consultants qu’il avait créé en juin 1994, pour en assumer, ensemble, les risques, les bénéfices et les pertes, dans un objectif économique commun et sur un concept commun ;

Que la collaboration qui s’est instaurée entre les parties est celle de deux consultants professionnels qui exerçaient àtitre indépendant des activités analogues ou complémentaires et ont mis temporairement en commun leur force de travail, comme il est d'usage dans ce type d’activité, ainsi que le confirment les attestations de A consultant qui a également participé à l’élaboration et à l'exécution de la mission Unisys, de B et de C ; qu’elle n'a pas débouché sur la véritable association qui a été envisagée pendant un temps, mais ne s’est jamais concrétisée et n'a reçu aucun commencement d’exécution;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la demande complémentaire de X tendant au paiement de dommages et intérêts pour dissolution abusive, et de mauvaise foi, de la société créée de fait ne peut qu’être rejetée ;

Considérant, par ailleurs, que Y n’est pas d’avantage fondé en sa demande de dommages et intérêts en raison du préjudice moral que lui aurait causé l’attitude de X qui, en demandant aux partenaires commerciaux de DM Consultants de lui apporter leur témoignage sur sa présence lors de réunions de travail, jetterait le trouble sur l’intégrité de ce cabinet, alors qu’il n’est pas démontré qu’une quelconque suspicion à l'égard de Y ou de DM Consultants soit le résultat de ces démarches ;

Considérant, en conséquence, qu’il y a lieu de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions;

Considérant qu’il est équitable de condamner X à verser à Y une indemnité de 2.000 € pour les frais exposés, par lui en cause d'appel, en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Considérant enfin que X sera condamné aux entiers dépens de l’appel ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Et, y ajoutant,

Condamne X à payer à Y une Indemnité de 2.000 € en application de l’article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Rejette toute demandes autre, plus ample ou contraire des parties ;

Condamne X aux entiers dépens de l’appel, et admet Maître Huyghe, avoué, au bénéfice de l’article 699 du nouveau code de procédure civile.