Cass. com., 20 septembre 2017, n° 16-12.939
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Yves et Blaise Capron
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 17 décembre 2015), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 4 novembre 2014, pourvoi n° 13-23.130), que par un acte du 3 décembre 2009, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel du Languedoc (la caisse) a consenti à la société Uniconfort (la société) une avance de trésorerie, garantie par le cautionnement de M. X..., donné par un acte séparé non daté, "édité" le 23 novembre 2009 ; que la société ayant été mise en liquidation judiciaire, la caisse a assigné en paiement la caution, qui lui a opposé la nullité de son engagement ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la caisse la somme de 483 148,78 euros, outre intérêts, et de rejeter l'ensemble de ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ que toute modification de la formule de cautionnement imposée par la loi entraîne la nullité du cautionnement dès lors qu'elle rend sa compréhension plus difficile pour la caution ; qu'en ayant jugé du contraire quant à la mention manuscrite relative à la solidarité, la cour d'appel a violé les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation ;
2°/ que la durée de l'engagement de la caution est un élément essentiel de telle sorte que la caution doit pouvoir déterminer avec précision la durée de son engagement pour que les dispositions de l'article L. 341-2 du code de la consommation soient respectées ; qu'en décidant que "l'absence de datation de l'acte de caution alors même qu'il a été souscrit en garantie du contrat de "plafond de trésorerie" édité le 23 novembre 2009 et accepté le 3 décembre 2009 par la société Uniconfort, n'affecte pas sa validité et ne lui confère pas un caractère indéterminé, puisque sa durée a été expressément limitée à 48 mois", la cour d'appel a violé l'article L. 341-2 du code de la consommation ;
3°/ que constitue un soutien abusif le fait pour le créancier de demander des garanties disproportionnées eu égard au montant de la dette du débiteur ; qu'en décidant que les garanties réclamées par le Crédit agricole n'étaient pas disproportionnées alors qu'elle a constaté que la dette de la société Uniconfort était de 500 000 euros remboursable sur 24 mois, que le Crédit agricole a réclamé non seulement le cautionnement de M. X... à hauteur de 600 000 euros sur 48 mois, mais aussi le nantissement du fonds de commerce de la société Uniconfort, la cour d'appel, qui n'a pas indiqué en quoi de telles garanties étaient proportionnées compte tenu des relations des parties, des usages ou encore des normes professionnelles, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, qu'après avoir énoncé que le non-respect des dispositions relatives aux mentions manuscrites exigées par les articles L. 341-2 et L. 341-3 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016, est sanctionné par la nullité de l'acte de cautionnement, à moins qu'il ne s'agisse d'imperfections qui n'affectent ni le sens ni la portée des mentions légales, l'arrêt retient que M. X... a reproduit intégralement la mention manuscrite exigée par l'article L. 341-2, en évoquant, en sus, le caractère solidaire de l'engagement de caution et en déduit exactement que l'ajout du terme "solidaire" dans la mention manuscrite prescrite par l'article L. 341-2 du code de la consommation ne modifie pas le sens et la portée de l'engagement de la caution ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que l'acte de cautionnement avait été souscrit en garantie du contrat de "plafond de trésorerie" "édité" le 23 novembre 2009 et accepté le 3 décembre 2009, donc conclu par la société à cette dernière date, et dès lors que l'article L. 341-2 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016, n'impose pas la mention manuscrite de la date de la souscription du cautionnement mais seulement de sa durée, la cour d'appel, qui a fait ressortir, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que le cautionnement avait été souscrit à la date du crédit garanti puis relevé que la durée du cautionnement de M. X... avait été fixée à 48 mois, a légalement justifié sa décision ;
Et attendu, enfin, que, lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis qu'en cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou de disproportion des garanties prises, et si les concours consentis sont en eux-mêmes fautifs ; qu'ayant exactement relevé que l'application des dispositions de l'article L. 650-1 du code de commerce oblige celui qui s'en prévaut à prouver, en sus de la fraude, de l'immixtion ou de la disproportion des garanties, que les concours octroyés par le créancier professionnel étaient fautifs, la cour d'appel, qui a retenu que M. X... invoquait la disproportion des garanties sans apporter la preuve d'un concours fautif, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.