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Décisions

Cass. 2e civ., 2 juillet 2020, n° 18-25.681

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Aix-en-Provence, du 30 nov. 2017

30 novembre 2017

 

1.Selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 30 novembre 2017 et 11 octobre 2018), Mme C... et la société Base Sud ont formé successivement le même jour deux déclarations d'appel, enregistrées chronologiquement sous les numéros de répertoire général 16/13719 et 16/13722 à l'encontre du jugement d'un tribunal de commerce les ayant condamnées à payer une certaine somme à la société Rom à titre de dommages-intérêts.

 

2. Les deux instances ayant été jointes, les appelantes ont déposé leurs premières conclusions d'appel le 3 octobre 2016 dans l'instance 16/13719 mais pas dans l'instance 16/13722.

 

3. La société Rom, qui n'a pas constitué avocat dans l'instance 16/13719, a constitué avocat dans l'instance 16/13722 et y a déposé ses conclusions d'intimée le 16 décembre 2018.

 

4. Les appelantes ont saisi le conseiller de la mise en état d'un incident tendant à voir déclarer irrecevables ces conclusions au motif qu'ayant été déposées, en dépit d'une référence erronée, dans l'instance 16/13719, elles étaient tardives.

 

5. Après avoir rendu sur déféré un premier arrêt déclarant irrecevables les conclusions de la société Rom, la cour d'appel a statué au fond.

 

Examen des moyens

 

Sur le premier moyen du pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 30 novembre 2017

 

Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

 

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

 

Enoncé du moyen

 

7. La société Rom fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses conclusions déposées et signifiées le 6 décembre 2016, de juger irrecevables les pièces communiquées par elle le 6 décembre 2016 sous le n° RG 16/17322 et de la condamner à payer à Mme C... et à la société Base Sud une certaine somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que la jonction d'instances, qui n'a pas pour effet de créer une procédure unique, ne peut avoir pour effet d'étendre la constitution d'avocat effectuée par l'intimée dans l'une des instances jointes à l'autre instance concernée par la jonction ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 367 et 368 du code de procédure civile. »

 

Réponse de la Cour

 

8. Dans ses conclusions d'appel, la société Rom ne s'est pas opposée à ce que ses conclusions d'intimée, quoique déposées dans le dossier 16/13722, soient déclarées recevables dans le dossier 16/13719 dans lequel elle n'était pas constituée.

 

9. La société Rom n'est pas recevable à présenter un moyen contraire à ses propres écritures.

 

10. Le moyen est dès lors irrecevable.

 

Mais sur le second moyen du pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 11 octobre 2018

 

Enoncé du moyen

 

11. La société Rom fait grief à l'arrêt de réformer le jugement du 11 juillet 2016, de rejeter l'ensemble de ses demandes et de la condamner à payer à Mme C... et à la société Base Sud une certaine somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, alors :

 

«1°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office, sans provoquer les explications des parties, que l'irrecevabilité des conclusions et pièces de la société Rom, intimée, privait de tout fondement juridique la condamnation prononcée en sa faveur en première instance, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, en violation de l'article 16 du code de procédure civile ;

 

2°/ qu'en appel, si l'intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond, et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés ; qu'en jugeant que l'irrecevabilité des conclusions et pièces de l'intimée privait de tout fondement juridique la condamnation prononcée en sa faveur en première instance, quand elle devait examiner, au vu des moyens d'appel, la pertinence des motifs par lesquels les premiers juges s'étaient déterminés, la cour d'appel a violé l'article 472 du code de procédure civile. »

 

Réponse de la Cour

 

Vu les articles 16 et 472 du code de procédure civile :

 

12. Selon le premier de ces textes, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il résulte du second qu'en appel, si l'intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond du litige et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés.

 

13. Pour réformer le jugement entrepris, rejeter l'ensemble des demandes de la société Rom et la condamner à payer à Mme C... et à la société Base Sud une certaine somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt retient que l'irrecevabilité des conclusions et des pièces de l'intimée prive de tout fondement juridique la condamnation de Mme C... et de la société Base Sud.

 

14. En statuant ainsi, sans examiner la pertinence des motifs du premier juge et en relevant d'office, sans inviter les parties à présenter leurs observations, le moyen tiré de ce que l'irrecevabilité des conclusions et pièces de la société Rom, intimée, privait de tout fondement juridique la condamnation prononcée en sa faveur en première instance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

 

PAR CES MOTIFS, la Cour :

 

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt du 30 novembre 2017 ;

 

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

 

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

 

Condamne Mme C... et la société Base Sud aux dépens ;

 

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme C... et la société Base Sud et les condamne à payer à la société Rom la somme globale de 3 000 euros ;

 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du deux juillet deux mille vingt, et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.