Cass. 2e civ., 19 février 2015, n° 13-27.691
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Flise
Rapporteur :
Mme Lemoine
Avocat général :
M. Mucchielli
Avocats :
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 7 octobre 2013), que sur des poursuites de saisie immobilière diligentées contre M. X..., tiers détenteur, par la Société financière Antilles Guyane (la SOFIAG), celle-ci lui a délivré un commandement valant saisie avant de délivrer un commandement de payer au débiteur principal ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, dire qu'en application de l'article R. 321-5 du code des procédures civiles d'exécution, en sa qualité de tiers saisi débiteur du droit de suite, il n'était pas fondé à soulever les moyens de nullité tirés de l'absence de TEG du prêt et de la prescription de la créance, dire que la créance de la société SOFIAG s'élevait à la somme de 67 643, 66 euros sans préjudice des intérêts postérieurs jusqu'à la distribution du prix de vente à intervenir et au plus tard à la date prévue par l'article R. 334-3 du code des procédures civiles d'exécution, confirmer le jugement pour le surplus et dire qu'il sera procédé au retour du dossier au greffe du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Pointe-a-Pitre en vue de la vente forcée des biens, alors selon le moyen :
1°/ que le commandement de payer valant saisie immobilière lui a été délivré par la SOFIAG le 4 novembre 2010, comme l'indiquaient tant lui-même que la SOFIAG et comme l'a par ailleurs également relevé le premier juge et la cour d'appel ; que la signification de ce commandement était en outre produite aux débats par les parties, et portait la date du 4 novembre 2010 ; qu'en énonçant en conséquence, pour rejeter le moyen de nullité pris de l'absence de délivrance préalable au commandement valant saisie d'un commandement de payer au débiteur, que le commandement de payer valant saisie lui avait été délivré le 15 juin 2011, la cour d'appel a dénaturé ce document et violé en conséquence l'article 1134 du code civil ;
2°/ que la délivrance du commandement de payer au débiteur doit précéder la signification du commandement valant saisie au tiers détenteur, à peine de nullité de ce dernier ; que la nullité est encourue sans qu'il soit nécessaire de démontrer l'existence d'un grief causé par cette omission ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément constaté que la SOFIAG avait délivré le commandement de saisie à M. X..., tiers détenteur, le 4 novembre 2010, et le commandement de payer à la société La Gourmanderie, débiteur, le 24 février 2011, soit quatre mois plus tard et deux mois après la publication du commandement valant saisie ; qu'en refusant néanmoins de prononcer la nullité du commandement valant saisie immobilière diligenté contre l'exposant, aux motifs qu'il n'était exigé par aucun texte que le commandement délivré au débiteur soit antérieur au commandement valant saisie signifiée au tiers détenteur, et que M. X... ne démontrait en tout état de cause pas avoir subi un grief, la cour d'appel a violé les articles R. 321-4 du code des procédures civiles d'exécution et l'article 17 du décret du 27 juillet 2006 applicable au présent litige ;
3°/ que le créancier qui exerce l'action hypothécaire ne saurait avoir plus de droits contre le tiers détenteur que contre le débiteur principal ; qu'il en résulte que le tiers détenteur est recevable à opposer au créancier poursuivant les exceptions qui auraient appartenu au débiteur s'il était resté propriétaire de l'immeuble ; qu'il peut notamment à ce titre invoquer la prescription de la créance garantie ; qu'en jugeant que M. X... n'était pas fondé, en sa qualité de tiers détenteur, à soulever le moyen de nullité de la procédure de saisie immobilière tiré de la prescription de la créance de la banque poursuivante, la cour d'appel a violé les articles 2461 et suivants du code civil, ensemble les articles R. 321-4 et R. 322-15 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu qu'abstraction faite de l'erreur purement matérielle affectant la date de délivrance du commandement de payer valant saisie immobilière, qui n'a pas eu d'incidence sur la solution du litige, la cour d'appel a exactement retenu qu'aucun texte n'imposait, pour sa validité, que le commandement délivré au tiers détenteur soit postérieur à celui adressé au débiteur principal ;
Et attendu qu'en application de l'article 2463 du code civil, le tiers détenteur qui ne remplit pas les formalités pour purger sa propriété est tenu, ou de payer, ou de délaisser l'immeuble ; qu'ayant relevé que M. X... était recherché en sa qualité de tiers détenteur du bien immobilier, débiteur du droit de suite, la cour d'appel a retenu à bon droit qu'il n'était pas fondé à se prévaloir de la prescription de la créance principale à l'appui de sa demande de mainlevée du commandement de payer valant saisie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que la créance de la société SOFIAG s'élevait à la somme de 67 643, 66 euros sans préjudice des intérêts postérieurs jusqu'à la distribution du prix de vente à intervenir et au plus tard à la date prévue par l'article R. 334-3 du code des procédures civiles d'exécution, alors, selon le moyen :
1°/ que seul le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière ; que le jugement d'orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais et intérêts ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le contrat de prêt fondant les poursuites diligentées par la SOFIAG à l'encontre de l'exposant, tel que modifié par l'avenant du 2 juin 1986, prévoyait l'application « d'intérêts au taux de 10, 65 % l'an de 1986 à 1988, de 10, 70 % de 198 9 à 1992 et de 10, 80 % de 1993 à 2000 pour la partie dite « PCM » soit aux conditions du marché et 8, 50 % pour la partie dite « (PSI) » ; que la cour d'appel a par ailleurs relevé que le décompte de sa créance produit par la SOFIAG faisait application d'un taux unique de 10, 65 %, ce dont l'exposant déduisait que la SOFIAG ne démontrait pas être titulaire d'une créance conforme à son titre exécutoire ; qu'en affirmant néanmoins que le décompte de la SOFIAG était « conforme aux stipulations contractuelles », la cour d'appel a refusé de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L. 311-2 et R. 322-18 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en l'état de la contestation de M. X... sur ce point, la cour d'appel, en se bornant à affirmer que le décompte était « conforme aux stipulations contractuelles », sans s'expliquer sur la différence qu'elle relevait elle-même entre les taux d'intérêts stipulés au contrat et celui appliqué par la banque aux termes de son décompte de créance, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que, sous couvert de griefs non fondés de violation de la loi et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du fond, lesquels ne sont pas tenus de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, de la valeur et de la portée des éléments de preuve en débat ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.