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Décisions

Cass. com., 31 mars 2009, n° 08-14.180

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

Mme Laporte

Avocat général :

M. Raysséguier

Avocats :

SCP Baraduc et Duhamel, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Aix-en-Provence, du 8 févr. 2008

8 février 2008

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 février 2008 n° 06/15800), que la société Jesta Fontainebleau (la société Jesta), adjudicataire d'un ensemble immobilier saisi au préjudice de la société Noga hôtels Cannes (la société Noga) qui y exploitait un hôtel, l'a assignée en paiement d'acomptes sur des réservations effectuées postérieurement à l'adjudication ;

Attendu que la société Noga fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à la reconnaissance de sa qualité de propriétaire du fonds de commerce et d'avoir en conséquence accueilli la demande de la société Jesta, alors, selon le moyen :

1°/ que le fonds de commerce est une universalité qui, de par sa nature mobilière, ne peut faire l'objet d'une saisie immobilière ; qu'en affirmant que l'exploitant d'un fonds de commerce en avait perdu la propriété, après avoir seulement constaté que, par l'effet de l'adjudication du bail à construction et de l'immeuble dans lequel ledit fonds était exploité, l'adjudicataire était devenu propriétaire des droits réels immobiliers détenus par le propriétaire du fonds, la cour d'appel a violé les articles 544 et 545 du code civil, L. 141-5 du code de commerce ainsi que 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

2°/ que l'immobilisation par destination du mobilier affecté à l'exploitation d'un fonds de commerce ne s'étend pas au fonds lui-même, lequel a la nature d'un meuble incorporel ; qu'en déniant à l'exploitant d'un fonds de commerce la qualité de propriétaire de ce fonds en raison de l'adjudication de l'immeuble dans lequel il était exploité, au prétexte que le mobilier affecté à son exploitation était réputé compris de plein droit dans la saisie de l'immeuble, la cour d'appel a violé les articles 524 du code civil, L. 141-5 du code de commerce ainsi que 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

3°/ qu'en outre, la volonté du propriétaire d'affecter les meubles au service de l'immeuble doit être prouvée ; qu'en affirmant que les meubles affectés à l'exploitation commerciale des locaux à usage d'hôtel constituaient des immeubles par destination, quand, en matière de bail à construction, le bailleur devient propriétaire par accession des seuls immeubles, de sorte que aucune intention du preneur d'affecter au service de l'immeuble les biens meubles composant son fonds de commerce ne pouvait être présumée, la cour d'appel a violé l'article 524 du code civil ;

4°/ qu' en toute hypothèse, les créances et les disponibilités, même nées de/ou relatives à l'exploitation du fonds, sont exclues des éléments corporels et incorporels le constituant ; qu'en énonçant que les sommes remises à l'exploitant du fonds de commerce au titre de la réservation de chambres l'avaient été pour le compte de l'adjudicataire de l'immeuble dès lors qu'elles avaient trait à la réservation de chambres dont la prestation avait été supportée par le second, quand le transport du fonds entre les mains du propriétaire de l'immeuble n'emportait pas cession des liquidités appartenant à l'exploitant, la cour d'appel a violé l'article L. 141-5 du code de commerce ;

5°/ qu'enfin, la force de chose jugée attachée à une décision judiciaire dès son prononcé ne peut avoir pour effet de priver une partie d'un droit tant que cette décision ne lui a pas été notifiée ; qu'en retenant que l'adjudicataire avait droit à la jouissance du fonds dès le 9 février 2006, date du jugement d'adjudication de l'immeuble, quand ledit jugement avait été signifié le 23 octobre 2006 au débiteur saisi, la cour d'appel a violé les articles 502 et 503 du code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir constaté que par le seul effet de l'adjudication, la société Jesta était devenue propriétaire de l'ensemble immobilier édifié en exécution du bail à construire, précédemment détenu par la société Noga, et relevé que les meubles affectés à l'exploitation commerciale de l'hôtel et placés dans cet immeuble par cette dernière lorsqu'elle en était propriétaire pour le service du fonds de commerce, l'arrêt retient exactement qu'ils constituaient des immeubles par destination en application de l'article 524 du code civil dont les conditions se trouvaient ainsi réunies et que la société Noga qui n'était pas locataire mais propriétaire de l'immeuble où était implanté le fonds de commerce, était dépourvue de titre lui permettant de poursuivre son exploitation et de justifier de son maintien dans les locaux acquis par la société Jesta qui n'était pas tenue de lui consentir un bail commercial ;

Et attendu, en second lieu, que l'arrêt ne retient pas que la société Jesta avait droit à la jouissance du fonds de commerce dès la date de l'adjudication ni que le fonds de commerce lui a été cédé, mais qu'elle est entrée en jouissance de l'immeuble et pouvait donc l'exploiter à cette date en sorte que les sommes perçues depuis lors au titre des réservations hôtelières par la société Noga qui occupait encore les locaux, lui étaient dues ; qu'ainsi la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa cinquième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.